Karine Giébel - Purgatoire des innocents

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Purgatoire des innocents: краткое содержание, описание и аннотация

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Je m'appelle Raphaël, j'ai passé quatorze ans de ma vie derrière les barreaux. Avec mon frère, William, nous venons de dérober trente millions d'euros de bijoux. Ç'aurait dû être le coup du siècle, ce fut un bain de sang. Deux morts, un blessé grave. Le blessé, c'est mon frère. Alors, je dois trouver une planque où il pourra reprendre des forces.
Je m'appelle Sandra. Je suis morte, il y a longtemps, dans une chambre sordide. Ou plutôt, quelque chose est né ce jour-là… Je croyais avoir trouvé le refuge idéal. Je viens de mettre les pieds en enfer. Quelque chose qui marche et qui parle à ma place. Et son sourire est le plus abominable qui soit… « Fascinant. »
Sud-Ouest

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— C’est vrai, admet Raphaël avec un sourire. Tu marques un point !

Il réalise qu’il est en train de se ramollir, que cette fille le trouble. Que ce n’est pas bon pour la suite. Qu’il ne doit pas se laisser entraîner sur ce terrain miné.

Plus la viande est tendre, plus elle est facile à manger.

Alors il affûte ses griffes, sort ses crocs. Enfile son armure de mauvais garçon.

— T’inquiète, doc , je ne raconterai pas à ton mari que tu m’as proposé tes services… Je crois que je n’aurai pas le temps de lui faire la moindre confidence de toute façon ! Et puis, il vaut mieux qu’il meure l’esprit en paix, non ?

La bouche de Sandra s’ouvre légèrement, mais aucun son n’en sort. Raphaël sourit toujours, si content de son effet qu’il ne voit pas arriver la gifle.

Pendant quelques secondes il reste bouche bée à son tour.

— Tu devrais apprendre à cogner plus fort, dit-il en réajustant son sourire.

Il lui rend sa gifle, puissance dix. Elle s’écroule dans un cri qui réveille William.

— Comme ça, tu vois ? ricane Raphaël. Là, au moins, c’est efficace.

Elle recule jusque dans la salle à manger, pressant une main sur sa joue douloureuse, qui ne tardera pas à enfler et à virer au bleu.

— Va me refaire du café. Je dois être en forme pour m’occuper de ton mec.

*

2 h 45

Le bruit d’un véhicule qui approche de la maison leur fait relever la tête.

Leurs yeux se croisent. Ceux de Sandra sont indéchiffrables. Peur mêlée d’espoir, peut-être.

Ceux de Raphaël ne reflètent rien d’autre que la détermination.

Il empoigne son colt, récupère un chargeur plein dans la poche de son jean et l’insère dans le pistolet. Il arme le canon en fixant Sandra. Le bruit métallique la fait sursauter.

— Bouge pas, murmure-t-il. Reste assise là, comme ça. Tu es parfaite.

— Je t’en prie…

— Boucle-la. Si tu pousses le moindre cri pour l’alerter, je vous descends tous les deux. C’est clair ?

— Ne le tue pas !

Elle se précipite soudain vers la porte. Raphaël la saisit au vol, plaque une main sur sa bouche avant qu’elle ait le temps de hurler.

Elle se débat, manque de lui échapper. Il lui assène un coup de crosse en pleine tête.

Méthode expéditive, pas le temps de faire dans la dentelle.

Elle s’effondre, groggy.

— Will, occupe-toi d’elle. Fais en sorte qu’elle se taise.

Tandis que le jeune homme s’extirpe du canapé avec difficulté, Raphaël jette un œil par la fenêtre. Il ne voit pas la voiture, elle s’est arrêtée après la ferme, sans doute devant la remise.

William récupère Sandra qui gémit de douleur et saigne abondamment. Arcade sourcilière explosée. Il la tient dans ses bras puissants, pose une main sur sa bouche.

— Reste tranquille…

À côté de lui, son fidèle Beretta. Chargé à bloc par Raphaël. Deux flingues valent mieux qu’un.

La pièce est seulement éclairée par une petite applique murale.

Pénombre propice, piège parfait.

Sandra est revenue à elle et recommence instantanément à s’agiter ; William est obligé de resserrer son étreinte. Un bras autour de son cou, il l’étouffe lentement.

Elle tente de le faire lâcher, même de le mordre.

— Reste tranquille ! menace-t-il encore dans son oreille. Sinon je t’étrangle !

Il fait pression sur sa gorge, elle est obligée de capituler pour avoir un filet d’air.

Raphaël s’est placé à gauche de la porte, aussi immobile qu’une statue en bronze. Mais le mari n’arrive toujours pas.

— Qu’est-ce qu’il fout ce putain de flic ? grogne-t-il à voix basse. Il s’est endormi dans sa tire ou quoi ?

Il leur faut attendre de longues minutes pour entendre enfin des pas approcher de la maison.

La poignée s’abaisse, la porte s’ouvre.

Patrick n’a pas le temps de refermer qu’il sent quelque chose de froid pressé sur sa nuque.

— Bouge pas.

Il se tétanise, la main sur la poignée.

— Qui êtes-vous ?

— Ta gueule. Lève les mains, doucement…

Raphaël le pousse, lui faisant violemment embrasser le mur. Puis il commence à le fouiller. L’autre ne fait pas un mouvement, sage comme une image.

— Où est ton flingue ?

— Mon flingue ?

— Ouais, ton flingue ! Il est où ?

— Je ne suis pas armé.

Raphaël l’oblige à pivoter, plante le canon du colt dans sa gorge.

— Je vais pas le demander cinquante fois : où est ton calibre ?

— Je n’ai pas d’arme, je vous assure.

L’homme aperçoit enfin Sandra prisonnière des bras d’un autre homme. Il ne dit rien, même pas le sempiternel : « Qu’est-ce que vous avez fait à ma femme, bande de salauds ? »

Pourtant, elle est salement amochée.

William retire sa main. Maintenant, Sandra peut hurler autant qu’elle veut. Mais elle se tait, dévisageant son mari d’un drôle d’air.

Un air coupable.

Il a toujours le canon du colt fiché dans la gorge, Raphaël augmente la pression.

— Je t’ai posé une question.

Il ouvre la bouche, mais c’est Sandra qui parle à sa place.

— Je leur ai dit… Ils savent que tu es gendarme.

— Eh ouais ! enchaîne Raphaël. On sait que t’es un putain de flic. Et un flic, ça a toujours un flingue.

— Je ne l’ai pas sur moi.

— Il est où ?

— Je… Je l’ai…

Raphaël retire l’arme afin qu’il puisse parler.

— Je l’ai laissé au bureau, explique-t-il enfin.

— Quel grade ?

— Hein ?

— T’es quoi ? Officier ou sous-fifre ?

Patrick hésite une seconde avant de répondre :

— Colonel.

— À genoux, mains sur la tête, ordonne Raphaël.

Patrick obtempère sans la moindre rébellion.

— Je vois que tu es plus obéissant que ta femme ! raille le malfaiteur. C’est bien.

— Qui êtes-vous ?

— Tu me reconnais pas ? Tu devrais réviser tes leçons, tu sais… Faire tes devoirs à la maison !

— Qui êtes-vous ? répète inlassablement Patrick.

— Ton pire cauchemar, mon colonel … !

CHAPITRE 21

Il sait enfin.

Qui sont ces hommes enfouraillés qui l’attendaient chez lui.

Sandra a résumé la situation en quelques mots, quelques secondes. Avec un impressionnant sens de la synthèse.

Son mari reste étonnamment calme. Un peu comme s’il prenait le thé en bonne compagnie.

Toujours à genoux, il s’est cependant permis de baisser les bras.

Raphaël le toise avec curiosité. Il ne s’attendait pas à ça .

Pas très grand, plutôt chétif, les épaules un peu rentrées. Bien plus âgé que Sandra. Vingt ans de plus à vue de nez. Lunettes rondes et dorées, cheveux poivre et sel.

Il ressemble plus à un bibliothécaire à la retraite qu’à un super flic aux trousses d’un serial killer.

Raphaël se demande pourquoi Sandra s’est maquée avec ce type. La recherche du père, sans doute…

Mais il a appris pas mal de choses au cours de sa chaotique existence. Notamment qu’il faut parfois se méfier de ceux qui ne payent pas de mine. Comme ce petit homme qui l’a tailladé en taule et a bien failli l’envoyer au cimetière avant l’heure.

Malgré tout, il préfère avoir en face de lui un modèle réduit visiblement sur le déclin qu’un jeune loup baraqué.

Mais ce qui l’étonne peut-être le plus, c’est que le nouveau venu n’a pas eu un mot pour sa dulcinée. Pas un « Ils t’ont fait du mal, ma chérie ? » ou un « Vous avez frappé ma femme, espèces de salauds ! »

Il l’a juste dévisagée froidement, tandis qu’elle lui présentait en accéléré leurs hôtes encombrants.

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