Karine Giébel - Chiens de sang

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Chiens de sang: краткое содержание, описание и аннотация

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Courir, toujours plus vite. Plus loin. Fuir la mort qui plane au-dessus d’eux ; oiseau de proie aux ailes gigantesques dont l’ombre les dévore déjà. Diane a choisi la fuite. D’instinct. Elle sait qu’ils sont derrière. Juste derrière. Avance minime, infime. Comme son espérance de vie, désormais. Pourtant, elle marche. Pourtant, elle veut vivre. Rémy avance. Avec le poids de la peur qui comprime son coeur. Le poids de la fatigue, comme un boulet enchaîné à ses jambes. Il devrait être ailleurs, en ce moment même. En compagnie de sa femme et de sa fille. Mais non, il est là, errant dans ces bois inhospitaliers, avec ces inconnus qui fuient comme lui. Il est devenu une proie. Rien qu’une proie. Il n’existe plus. Déjà mort. Alors, pourquoi a-t-il aussi peur ? Le monde est ainsi fait, qui ne changera jamais.
Les chasseurs d’un côté, les proies de l’autre.
Karine Giébel
Chiens de sang
Biographie d'auteur

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S'affichant avec des putes de luxe, dans des hôtels de luxe.

Qui ne chasse pas, mais massacre plutôt le gibier à la kalachnikov.

Un boucher, rien d'autre.

Un boucher qui saigne, pourtant. Car d'après ce que le Lord a compris, Balakirev a perdu un fils dans un attentat perpétré par les résistants tchétchènes. C'est la raison pour laquelle il a voulu un mets spécial. Certes, il aurait participé quelle que soit la nationalité des proies, mais là, ce sera encore plus savoureux…

Balakirev a payé le prix fort et surtout, il était recommandé par quelqu'un à qui l'on ne peut rien refuser. Alors, le Lord n'a pu l'exclure de son club très privé.

Anatoli a choisi Hamzat, le jeune Caucasien.

Ça tombe bien ; c'est lui qui a testé la clôture électrique en premier.

C'est lui qui sera servi en hors-d'œuvre.

Balakirev s'en pourlèche déjà les babines…

*

Diane vient de déboucher sur un nouveau sentier.

Calme absolu. Personne à l'horizon.

Elle soupire, puis sourit. Elle a même envie de rire !

Elle vient de reconnaître cet endroit où elle est passée ce matin. Cette croisée des chemins si caractéristique ! Elle sait donc désormais comment rejoindre sa voiture.

Sauvée.

À condition d'éviter toute mauvaise rencontre. Où sont-ils ?

Où sont ces salauds, capables de se mettre à quatre pour massacrer un homme ?

Capables de s'acharner sur lui jusqu'à le tuer. Capables, encore, de faire disparaître le corps pour effacer leur crime. Avec un effrayant sang-froid. Capables de tout.

La peur fait flageoler ses jambes, tape dans sa tête comme un gourdin.

Pourtant, il faut bien avancer.

Elle se fera aussi discrète que possible. Comme elle aimerait être un de ces cervidés ! Agiles, rapides, invisibles. Puissants. Ou un de ces vautours, pour pouvoir emprunter la voie des airs… Mais elle n'est qu'humaine.

Elle s'engage dans la descente, d'un pas soutenu. A cette vitesse, il lui faudra à peine une demi-heure pour rejoindre sa voiture qu'elle n'a jamais autant rêvé de revoir !

Une demi-heure, pas plus.

Trente minutes d'angoisse, de terreur.

*

10 h 30

Ils restent figés un instant.

L'équipage mortel vient de déboucher de la forêt sur leur droite.

A trois cents mètres, tout au plus.

Trois cents mètres qui les séparent de la mort.

Cette fois, c'est fini. Terminus, tout le monde descend.

Après quelques secondes d'immobilisme, ils veulent se remettre à courir.

Mais Hamzat ne peut pas. Ne peut plus. Ou ne veut plus.

Sarhaan et Eyaz ne le lâchent pas. Rémy s'y met aussi. Ils sont trois à le traîner de force tandis que les cavaliers se sont arrêtés pour jouir de la perspective. Que les chiens se sont mis à hurler au bout de leurs interminables longes tenues par les larbins du Lord.

Après vingt mètres de torture, Hamzat s'effondre.

— Partez ! s'écrie-t-il.

Les autres le relèvent encore, refusant d'abdiquer.

— Vous, partir ! répète le jeune Tchétchène. Vous… sauver !

Les cavaliers ne bougent toujours pas. Pourquoi ?

— Partir ! implore le blessé.

Sarhaan et Rémy se regardent, effarés. Rester et mourir ; ou courir et mourir plus tard. Abandonner leurs amis à leur funeste sort. Car Eyaz ne laissera pas son frangin. Ils partiront ensemble.

Les chevaux s'avancent lentement, ne se pressant même pas.

Hamzat supplie encore son frère. Mais celui-ci tient bon. Il le hisse de force sur son dos, essaie de progresser dans le bourbier malgré le fardeau sur ses épaules. Il chute, Sarhaan fait demi-tour pour venir lui filer un coup de main. Bien plus costaud que le Tchétchène, le voilà charriant Hamzat sur son échine.

Le Lord attrape sa carabine. Premières détonations.

Ils ne s'en sortiront pas s'ils n'accélèrent pas.

Hamzat l'a bien compris. Il renonce, définitivement, se laisse glisser sur le sol spongieux, se rendant intransportable.

Il confie quelques mots à son frère, sans doute une supplique. Puis, d'un simple regard, il enjoint à Sarhaan et Rémy d'agir avant qu'il ne soit trop tard.

Il y a des moments où la barrière de la langue n'existe plus…

Le Black et le Français hésitent un instant ; une troisième détonation les décide. Ils empoignent Eyaz. essaient de l'obliger à les suivre. Mais il se défend, se débat, refuse.

Les secondes passent, la mort approche.

Alors, Sarhaan et Rémy prennent la fuite ; aussi vite que possible, ils longent l'étang. Avec le bruit des sabots martelant le sol.

Avec la culpabilité qui les étouffe, les ralentit.

Avec quelques balles qui sifflent près de leurs oreilles mais ne les atteindront pas.

Normal, le seul but de ces tirs était de les obliger à renoncer à Hamzat.

Hamzat qui, toujours à terre, les suit à travers ses larmes. Il ne pleure pas parce qu'il est condamné ; mais parce que son frère est toujours là, près de lui. Rempart inutile contre une mort annoncée.

Arrivés de l'autre côté de la mare, les deux miraculés se retournent. Les cavaliers ne les poursuivent pas. Ils encerclent les jeunes Tchétchènes. Hamzat s'est relevé dans un ultime effort de dignité.

Mourir debout.

Deux types s'emparent d'Eyaz et le tiennent éloigné de son frère.

C'est alors que le Lord fait taire les chiens et s'adresse aux rescapés, d'une voix qui ferait vaciller les Enfers.

— On s'occupera de vous plus tard ! Ce serait trop facile de vous tuer maintenant ! Trop rapide ! Profitez donc du spectacle !

Eyaz essaie de se jeter à la rescousse de son frère, mais les deux larbins l'en empêchent. Dans sa langue maternelle, il vocifère des insultes, des menaces. Bien dérisoires.

Le châtelain lui sourit. Son fameux et abominable sourire.

— Puisque tu as voulu rester toi aussi, tu vas être aux premières loges…

Sarhaan et Rémy ne songent même plus à s'éloigner, ayant compris qu'ils auront le temps de fuir après.

Ayant compris que ce sera l'un après l'autre et pas tous en même temps.

Les fameuses règles du jeu…

Ils assistent alors à une scène qui leur glace le sang. Les chiens se remettent à gueuler en un lugubre concerto.

Hamzat recule, doucement. Balakirev, arme au poing, s'avance vers lui.

— On va voir si tu sais nager ! ricane-t-il dans sa langue maternelle.

Les yeux exorbités, Hamzat continue de boiter à reculons. Il s'écroule à nouveau.

— Allez, debout ! ordonne le Lord. Je croyais pourtant que les gens de ta race étaient de vaillants guerriers !

Le chasseur s'approche de sa proie terrorisée qui se remet tant bien que mal sur ses deux jambes. Un pas après l'autre, Hamzat s'enfonce dans l'eau limoneuse.

Le bruit de la détonation déchire le ciel, les tympans. Un des étalons se cabre, envoyant son cavalier au tapis.

Hamzat pousse un hurlement. Touché à l'autre jambe, il s'affaisse. Il essaie de ne pas sombrer, peu à peu aspiré par le néant. Par la vase. Il boit la tasse à plusieurs reprises, appelle au secours.

Eyaz tente à nouveau de s'élancer en direction de l'étang, mais les hommes de main du Lord le retiennent énergiquement. Il devient si violent qu'ils sont forcés de le plaquer au sol.

À deux cents mètres de là, Rémy se met à trembler. De la tête aux pieds.

Sarhaan se bouche les oreilles.

Obligés d'endurer…

Les cris de leur ami qui se noie, encore.

Les cris de son propre frère.

Sa lente agonie.

Ça n'en finira donc jamais…

Des secondes interminables, des minutes peut-être.

Enfin, Balakirev s'approche. Avec le pied, il appuie sur la tête du jeune homme.

Le maintient sous l'eau jusqu'à ce qu'il ne bouge plus.

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