Karine Giébel - De force

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De force: краткое содержание, описание и аннотация

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Le temps de l'impunité est révolu. Le temps des souffrances est venu. Elle ne m'aimait pas.
Pourtant, je suis la aujourd'hui.
Debout face au cercueil premier prix sur lequel j'ai pose une couronne de fleurs commandée sur internet.
Car moi, j'ai voulu l'aimer.
De toutes mes forces. De force.
Lorsque j'arrive devant la porte de mon ancienne chambre, ma main hésite a tourner la poignée. Je respire longuement avant d'entrer.
En allumant la lumière, je reste bouche bée.
Pièce vide, tout a disparu.
Il ne reste qu'un tabouret au centre de la pièce.
Sur le tabouret, une enveloppe.
Sur l'enveloppe, mon prénom écrit en lettres capitales.
Deux feuilles, écrites il y a trois mois.
Son testament, ses dernières volontés.
Je voulais savoir.
Maintenant, je sais.
Et ma douleur n'a plus aucune limite.
La haine.
Voila l'héritage qu'elle me laisse.

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— Une quoi ? l’interrompt Maud.

— Une parade, c’est une séance d’identification, explique Lacroix. Nous allons vous placer dans une pièce et vous allez observer plusieurs hommes parmi lesquels il y aura ce fameux individu. Vous pourrez nous dire si vous reconnaissez le type qui vous a attaquée. Et monsieur Garnier, en votre qualité de témoin de l’agression, vous ferez la même chose. D’accord ?

Luc hoche la tête.

— Allons-y, dit le lieutenant.

Ils traversent un couloir et Lacroix invite Maud à pénétrer dans un petit bureau. Une vitre fumée le sépare d’une autre pièce, plus grande, dans laquelle cinq hommes sont alignés de face et tiennent dans les mains un petit carton marqué d’un numéro.

Dès qu’elle les aperçoit, Maud a un mouvement de recul.

— N’ayez crainte, dit Lacroix à voix basse. Ils ne peuvent pas vous voir.

La jeune femme s’approche du miroir sans tain et met moins d’une minute à répondre.

— Non, dit-elle. Il n’est pas là.

— Prenez votre temps, prie le lieutenant. Et si vous le souhaitez, je peux leur demander de se mettre de profil.

Maud les observe à nouveau et arrive à la même conclusion.

— Non, je ne reconnais personne, désolée.

Elle rejoint son père dans le couloir, tandis que Luc pénètre à son tour dans la pièce. Il observe longuement les hommes alignés face à lui puis se tourne vers Lacroix.

— Ce n’est pas l’un d’entre eux, dit-il.

— Vous êtes sûr de vous ? Parce qu’il faisait sombre, ce soir-là…

Évidemment, Lacroix ignore que Luc a revu l’agresseur en plein jour.

— Aucun doute, lieutenant.

— Bon, tant pis, soupire Lacroix.

Ils quittent la pièce et le flic leur serre la main.

— Merci d’être venus. Et navré pour le dérangement.

— C’est pas grave, répond Maud.

— J’espère que la prochaine fois, vous arrêterez le bon ! balance Reynier.

— On y travaille, professeur, assure Lacroix. On y travaille…

* * *

La nuit est tombée, la chaleur persiste. Mais le ciel est menaçant, ce soir. L’orage gronde déjà sur les Alpes toutes proches.

Luc termine sa ronde dans le jardin et lorsqu’il revient à son studio, il trouve Maud assise sur la terrasse.

— Bonsoir, dit-il en s’installant près d’elle.

— Ça ne te dérange pas que je sois venue ? espère-t-elle.

— Pas du tout.

Il allume une cigarette, lui en propose une.

— Ton père est venu te parler après le déjeuner ? demande Luc.

— Oui… À toi aussi ?

Luc hoche la tête.

— Je lui ai dit qu’on était juste amis.

— Ce qui est le cas, assène-t-il un peu brutalement.

Maud sent son cœur s’arrêter pendant une longue seconde.

— Je crois qu’on avait déjà parlé de ça, non ? poursuit Luc. On s’était mis d’accord…

— Je sais, mais… Tu m’en veux ?

Elle sait à merveille jouer les petites filles coupables, adorables. À qui on pardonnerait tout.

— Non, je ne t’en veux pas. Mais je te l’ai dit : pour le moment, ça ne nous mènera à rien de bien. Alors je ne veux plus de ça entre nous.

Elle ne comprend pas vraiment son raisonnement, mais suppose qu’il ne veut pas tromper sa copine.

Un vrai gentleman, en somme.

Pourtant ce baiser, il l’a accepté. Il aurait pu la repousser, ne l’a pas fait. Alors, Maud se dit qu’elle a eu tort. Qu’elle ne doit rien précipiter. Plutôt œuvrer pour qu’il se détache de Marianne tout en se rapprochant d’elle.

Prendre la place de cette femme fantôme, voilà sa mission.

Dissimuler ses sentiments, montrer ses qualités. Et se faire désirer.

Lorsqu’elle le quitte, ce soir-là, elle est presque sereine.

Malgré cet amour fou qui la consume de l’intérieur. Malgré la douleur qui palpite dans sa poitrine.

Ce soir, elle est sûre qu’avec le temps, Luc sera à elle.

On passera notre vie ensemble.

Papa finira bien par l’accepter.

Et cette salope de Charlotte en crèvera de jalousie.

28

L’homme est devant la télé. Un reportage sur la Légion étrangère retient toute son attention. Vautré sur son vieux canapé en velours brun, déchiré à plusieurs endroits, il a les yeux rivés sur l’écran plat petit format et la main dans un sachet de chips goût poulet rôti. Ce sera son seul repas du soir.

Soudain, son portable sonne et l’homme baisse le son de la télé avant de décrocher.

— Oui ?

— C’est moi, dit la voix. Je vous appelle pour voir si tout est prêt.

— Affirmatif. Vous avez l’argent ? Parce qu’il a fallu que j’engage des frais et…

— Je viens de faire le virement.

— Parfait ! se réjouit l’homme.

Il croque dans une chips.

— Je vous dérange pendant votre repas, peut-être ? dit la voix.

— Pas grave.

— Vous avez trouvé l’arme facilement ?

— Aucun problème. Les armes, ça se trouve, si on cherche bien… En plus, j’ai eu un prix d’ami.

— Tout cela est parfait, conclut la voix. Je vous rappellerai bientôt pour les prochaines instructions.

— J’ai hâte ! dit l’homme.

Il raccroche et remonte le son de la télé.

Sur la table basse, à côté d’un paquet de cigarettes, brille la robe en métal argenté du Beretta Cougar Inox.

Une belle arme.

Calibre 9 mm. Quinze coups dans le chargeur.

De quoi décimer une famille entière.

29

Ce matin, Luc n’est pas allé courir.

Il n’a même pas mis le nez dehors et tourne en rond dans son petit studio.

Un animal fourbu dans une cage. Voilà à quoi il ressemble.

Il pleut depuis l’aurore. Averses sporadiques et violentes. Mais ce n’est pas l’orage qui a empêché Luc de s’adonner à son plaisir quotidien. De prendre sa dose d’endorphine, comme d’autres prennent leur dose de cannabis.

Cette nuit, il s’est noyé dans d’abominables cauchemars. Lorsqu’il s’est réveillé, son oreiller était trempé.

Saturé de larmes.

Aujourd’hui, il va très mal. Et ne parviendra pas à donner le change, il le sait. Alors, il n’espère qu’une chose : que Maud ne voudra pas sortir. Qu’elle le laissera en paix.

Que Reynier ne viendra pas lui infliger l’une de ses pitoyables leçons de morale ou l’accabler de ses tourments de père incestueux.

Que Charlotte évitera de lui faire son numéro de charme.

Il veut être seul. Souffrir en paix.

Il n’a plus de comprimés. Ses précieux calmants. Sa came personnelle et légale.

Il était certain qu’il lui en restait une boîte mais impossible de mettre la main dessus. Il a vidé tous les tiroirs, les placards. A mis son appartement sens dessus dessous. En vain. Pourtant, il n’a pas pu se laisser démunir de la sorte. Alors, où est passée cette maudite boîte ? L’a-t-il oubliée chez lui, à Nice ?

Il se pose sur le sofa et observe, impuissant, le tremblement pathétique de ses mains, le mouvement répétitif et involontaire de ses jambes.

Il n’a rien pu avaler. Incapable de desserrer les dents.

Les images ne le quittent pas. Ce qu’il a vu pendant la nuit défile devant ses yeux meurtris. L’angoisse est à son paroxysme.

Personne ne doit le voir comme ça. Tel qu’il est vraiment.

Un petit garçon mort de peur.

Alors, il envoie un texto sur le portable de Reynier et sur celui de Maud. Quelques mots qu’il a du mal à taper tellement ses doigts paniquent.

Suis obligé de m’absenter aujourd’hui. Urgence personnelle. Je reviens dès que je peux, sans doute en fin de journée. Maud, ne sors pas sans moi. Luc.

Puis il récupère une ordonnance dans le tiroir de sa table de chevet, enfile son blouson de cuir et se dirige vers le garage, en priant pour ne croiser personne.

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