Frédéric Dard - Renifle, c’est de la vraie

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Renifle, c’est de la vraie: краткое содержание, описание и аннотация

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Bonne nouvelle : la chasse aux perdreaux vient d'ouvrir !
Oui, mais sale nouvelle pour les perdreaux !
Les flics se ramassent à la pelle dans les rues de Paname !
Il faut absolument qu'on fasse quelque chose, non ?
Alors on fait.
Béru, par exemple, se déguise en gardien de la paix. Comme il prend du service dans le quartier des putes, c'est pas triste, malgré l'hécatombe !
Franchement, si t'es contre la chicorne, la baise et la franche rigolade, vaut mieux que tu relises l'annuaire des Chemins de fer.

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— Faites pas chier le marin, je ne sais rien ! bougonne-t-il.

La grosse piqueuse-repasseuse rebranche son fer et murmure :

— Je le sais, moi, ce qu’il ne veut pas vous dire.

— Tu vas boucler ta chierie de gueule, morue ! tonne le délicat personnage que je soupçonne de misogynie larvée.

Là, elle rebiffe :

— J’ai pas envie qu’on te bute, Claudius !

— Où tu as vu ça, figure de fesses ? C’est lui qui le dit, pour faire pression ! Je ne sais rien, j’ai rien vu, je…

— La fille d’à côté est morte ! objecte-t-elle.

— C’est de ma faute si elle a pris une dose de cheval ?

Je les laisse se chamailler, sachant bien que leurs ergotages et autres criailleries me sont propices. Ils s’usent gentiment et je n’aurai plus ensuite qu’à cueillir les marrons du feu. Je tiens le couteau par le manche puisque la fille déclare « savoir ce qu’il s’obstine à me celer ». Alors je les laisse vitupérer sur le thème :

A. — Dis tout, je ne veux pas que tu meures.

B. — Ta gueule, connasse, je ne crains rien.

Comme ça finit par tourniquer en rond, je me lève et vais retirer la prise du fer à repasser.

— Suivez-moi un instant, petite fille.

— Je te l’interdis ! crie Claudius.

Alors moi, toujours qu’on me pompe l’air, à la longue, hmmm ? Bon !

Je saisis Koenigstein par les bretelles (il porte des bretelles, des rouges à fleurettes vertes, c’est son seul luxe). Le soulève du divan.

— T’as jamais bouffé un fer à repasser brûlant ? je lui demande. T’as jamais ramassé tes dents éparpillées dans une pièce pour en faire un collier d’ambre ? Tu sais que tu me plumes, avorton ! Moi, quand je supporte plus, je casse : les meubles, les frimes de rat, tout ce qui me tombe sous la main !

Je lui fais décrire une rotation complète autour de moi, avec l’aisance d’un lanceur de marteau soviétique, puis je le lâche et il va disloquer la table à repasser de Nicaise et déguste le fer à vapeur dans les gesticules.

Du temps qu’il hurle, j’emporte la Nicaise chez feue Violette impériale. Le cadavre la fait fondre en larmes de suif, la grosse.

— Maintenant, vous me parlez, môme, puisque ce sous-crevard s’obstine à la fermer ! Votre instinct de femme vous avertit qu’il est temps de cesser les cachotteries ! Votre petite voisine a payé de ne m’avoir pas dit la vérité. Maintenant il est trop tard pour elle !

La boulotte pleure à gorge déployée. Je lui caresse les doudounes, manière de la réconforter. La belle surprise, mec : c’est pas gélatineux comme j’imaginais, mais bien dru, ardent.

Viens dans la pièce à côté, pas regarder ce triste spectacle, gamine.

Elle me suit. Moi, j’ sais pas si ça provient de la fatigue accumoncelée, mais voilà que je trique comme le bâton de Guignol. Ces deux nichemars aussi, me portent à la godanche. C’est tellement capricieux, les choses de la chair, t’auras remarqué. Et je démarre si aisément, pour ce qui est du périscope géant. Une dame qui descend de voiture, une marchande de chaussures en action, une pensée inavouable, et voilà Mister Popaul qui dresse son chapiteau !

Je fourvoie ma dextre dans son décolleté. Y a super-ramage dans la volière ! Ça facilite l’élocution.

Va pas croire que je sois nécrophile le moindre ! Ça me botte pas de tringler une greluse à quatre mètres d’un cadavre. Mais faut laisser priorité à la vie, mon père me l’a toujours dit. La nique prime tout ! Quand un membre se met à parader, tu le suis sans barguigner. Le défilé des majorettes ! Musique en fête ! Queue en tête !

Miss Nicaise, je sais pas si ça lui fait plaisir mes attouchages. C’est une passive. Une exécutante docile. Elle ne se permet pas de participer. On l’a dressée au plaisir de l’homme. Le sien, c’est Santa Barbara , et pointe à la ligne. Alors, sentant ma mâture contre son fessier, elle passe la main dans son dos pour me faire pouët-pouët, ce qui est vachement gentil compte tenu de son émotion, je trouve. Ça dénote une bonne nature, non ?

Tout en me « pitrognant » Totor elle dit :

— On a entendu du bruit, cette nuit. Ça cognait dans l’escalier. Claudius est allé regarder. Y avait deux types qui coltinaient une malle. Ils sortaient d’ici. Claudius a refermé la porte et s’est recouché. Mais voilà que dix minutes plus tard, le boucan a recommencé. Il est retourné voir. Cette fois, ils étaient trois pour porter une autre malle qui paraissait encore plus lourde. Je l’ai rejoint. Le troisième type, c’était le copain de Violette.

« Vous déménagez, monsieur Cunar ? » je lui ai demandé. Il m’a dit : « C’est des livres, y a rien de plus lourd. Je profite de la camionnette d’un copain. » Claudius s’est proposé pour les aider mais ils ont dit que non merci, que ça allait bien comme ça. Le chiant c’était l’exiguïté de l’escalier.

Quand elle a terminé de révéler, mon braque est tellement inexistant qu’il pourrait servir de marque-page à un bouxif de la Pléiade. Y a de quoi fuliginer, faut dire, ces deux malles constituaient les cercueils de Béru et Pinuche !

Devant l’inefficacité de sa courtoise manœuvre, Nicaise me lâche la rampe. C’est pas sa nuit, au point de vue découillage du mâle.

— Ils étaient comment, ces types ? reviens-je à nos moutons-je.

— Genre arabe.

Elle ajoute :

— Vous croyez qu’on est en danger ?

— J’en ai peur.

— Je ne veux pas qu’ils butent Claudius !

C’est beau une femelle ! C’est farouche. Ça ne pense qu’à son julot. L’abnégation complète ! Et comme le julot aussi ne pense qu’à lui, tout est harmonieux.

Je la prends par ses potelures :

— Nicaise, mon chou, tu dois m’en dire davantage ! Il le faut !

— Mais vous dire quoi ?

— T’as pas eu la curiosité de regarder par la fenêtre ce qu’ils faisaient de ces deux malles, les potes de ton voisin ?

Pourquoi je pense qu’elle a agi de la sorte, cette connasse réveillée en sursaut ? On trimbale des malles en pleine noye dans son escalier étroit… Son mec se lève, elle le rejoint. Faut croire que ça a produit un certain boucan puisqu’il les a tirés des toiles. Il est clair qu’elle sera allée couler un œil par la croisée.

Elle répond qu’en effet. Ouf !

— Et t’as vu quoi, ma frivole ?

— Une camionnette.

— Tu veux bien me la décrire ?

— Elle était jaune.

Tout de suite, je pense à un véhicule Hertz. J’essaie de me mettre à la place d’Hervé Cunar. Il a de la viande froide à trimbaler. Pas de véhicule à dispose. Force lui est d’en louer un. Alors il va à une agence de location spécialisée…

— Bon, je te remercie, môme, tu peux retourner sucer ta terreur aux biscotos de crevette.

Elle hésite. Peut-être que je lui plais, va-t’en savoir ?

— Autre chose à me dire, ma poule ?

Sa bouche écrase la mienne et une menteuse frétillante comme une truite tirée de l’onde vient faire le bilan de ma denture. Oui : je lui plais !

Seulement, à l’instant où Mister Poluche se remet à rouler des mécaniques, une pensée surprenante m’empare.

— Excuse-moi, môme : faut que j’usine. Mais on se reverra bientôt, parole !

Cette fois, elle se taille. Mister Moi-même se met alors à fouinasser une fois de plus dans le logis. La fièvre me gagne si fort que j’en tremble comme à un premier rendez-vous d’amour. Je commence par me mettre à genoux pour examiner le sol de très près. Aucune trace de sang ! On a neutralisé mes deux féaux sans problème.

Je renifle avec préciosité l’air confiné de l’apparte. Des relents ténus. Un truc qui ressemble à des vapeurs ammoniaquées, ou de térébenthine… Mon agitation croît et se multiplie. Ça confine à des transes, sais-tu ? Des filaments de brume s’effilochent. La tête me fait mal, derrière surtout. Comme un médium, je repars en maraude d’une pièce l’autre. Je fouille les meubles, explore leur dessus, leur dessous, leurs tiroirs quand ils en possèdent. Non, non : il a disparu. S’il servait à ce que je crois, il devait y avoir une antenne à l’extérieur. J’ouvre la fenêtre, grimpe sur une chaise, me débuste dans le vide au risque de valdinguer. La joie m’inonde. IL Y A UNE ANTENNE orientable. Dans sa hâte, il n’a pas songé à la démonter. Mais putain, j’ai donc un génie de divination ? J’ai LE DON ou quoi ? Si j’essayais de tordre les cuillers à café rien qu’en les regardant dans les yeux, j’y parviendrais, tu paries, aiguisé du sixième sens comme je me sens ?

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