Daniel Pennac - Chagrin d'école
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- Название:Chagrin d'école
- Автор:
- Издательство:Éditions Gallimard
- Жанр:
- Год:2007
- Город:Paris
- ISBN:978-2070396849
- Рейтинг книги:5 / 5. Голосов: 1
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Comme un roman
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— Vous ne vous rendez pas compte, monsieur, j’ai douze ans et demi, et je n’ai rien fait.
Rentré chez moi je ressasse la phrase. Qu’est-ce que cette gamine a bien pu vouloir dire ? « Rien fait… » Rien fait de mal en tout cas, innocente Nathalie.
Il me faudra attendre le lendemain soir, renseignements pris, pour apprendre que le père de Nathalie vient de se faire licencier après dix ans de bons et loyaux services en qualité de cadre dans une boîte de je ne sais plus quoi. C’est un des tout premiers cadres licenciés. Nous sommes au milieu des années quatre-vingt ; jusqu’à présent le chômage était de culture ouvrière, si l’on peut dire. Et cet homme, jeune, qui n’a jamais douté de son rôle dans la société, cadre modèle et père attentif (je l’ai vu plusieurs fois l’année précédente, soucieux de sa fille si timide, si peu confiante en elle-même), s’est effondré. Il a dressé un bilan définitif. À la table familiale, il ne cesse de répéter : « J’ai trente-cinq ans et je n’ai rien fait. »
8
Le père de Nathalie inaugurait une époque où l’avenir lui-même serait réputé sans avenir ; une décennie pendant laquelle les élèves allaient se l’entendre répéter tous les jours et sur tous les tons : fini les vaches grasses, mes enfants ! Et fini les amours faciles ! Chômage et sida pour tout le monde, voilà ce qui vous attend. Oui, c’est ce que nous leur avons seriné, parents ou professeurs, pendant les années qui ont suivi, pour les « motiver » davantage. Un discours comme un ciel bouché. Voilà ce qui faisait pleurer la petite Nathalie ; elle éprouvait du chagrin par anticipation, elle pleurait son futur comme un jeune mort. Et elle se sentait bien coupable de le tuer un peu plus tous les jours, avec ses difficultés en grammaire. Il est vrai que, par ailleurs, son professeur avait cru bon lui affirmer qu’elle avait « de l’eau de vaisselle dans le crâne ». De l’eau de vaisselle, Nathalie ? Laisse-moi écouter… J’avais secoué sa petite tête avec une mine de toubib attentif… Non, non, pas de flotte là-dedans, ni de vaisselle… Timide sourire, quand même. Attends un peu… Et j’avais tapoté son crâne, index replié, comme on frappe à une porte… Non, je t’assure, c’est un beau cerveau que j’entends là, Nathalie, exceptionnel même, un très joli son, exactement le son que font les têtes pleines d’idées ! Petit rire, enfin.
Quelle tristesse nous leur avons mise à l’âme pendant toutes ces années ! Et comme je préfère le rire de Marcel Aymé, le bon rire vachard de Marcel, quand il vante la sagesse du fils qui a flairé le chômage avant tout le monde :
— Toi, Émile, tu as été rudement plus malin que ton frère. Il faut dire que tu es l’aîné et que tu as plus de connaissance de la vie. En tout cas je n’ai pas d’inquiétude pour toi, tu as su résister à la tentation, et comme tu n’en as jamais foutu un clou te voilà préparé à l’existence qui t’attend. Ce qui est le plus dur pour le chômeur, vois-tu, c’est de ne pas avoir été habitué dès l’enfance à cette vie-là. C’est plus fort que soi, on a dans les mains une démangeaison de travailler. Avec toi, je suis tranquille, tu as un de ces poils dans la main qui ne demande qu’à friser.
— Quand même, protesta Émile, je sais lire presque couramment.
— Et c’est encore une preuve que tu es malin. Sans rien te casser ni prendre de mauvaises habitudes de travail, te voilà capable de suivre le tour de France dans ton journal, et tous les comptes rendus des grandes épreuves sportives qu’on écrit pour la distraction du chômeur. Ah ! Tu seras un homme heureux…
9
Plus de vingt ans ont passé. Aujourd’hui, le chômage est en effet de toutes les cultures, l’avenir professionnel ne sourit plus à grand monde sous nos latitudes, l’amour ne brille guère et Nathalie doit être une jeune femme de trente-sept ans (et demi). Et mère, va savoir. D’une fille de douze ans, peut-être. Nathalie est-elle chômeuse ou satisfaite de son rôle social ? Perdue de solitude ou heureuse en amour ? Femme équilibrée, maîtresse ès concessions et oppositions ? Se répand-elle en désarroi à la table familiale ou songe-t-elle bravement au moral de sa fille quand la petite franchit la porte de sa classe ?
10
Nos « mauvais élèves » (élèves réputés sans devenir) ne viennent jamais seuls à l’école. C’est un oignon qui entre dans la classe : quelques couches de chagrin, de peur, d’inquiétude, de rancœur, de colère, d’envies inassouvies, de renoncement furieux, accumulées sur fond de passé honteux, de présent menaçant, de futur condamné. Regardez, les voilà qui arrivent, leur corps en devenir et leur famille dans leur sac à dos. Le cours ne peut vraiment commencer qu’une fois le fardeau posé à terre et l’oignon épluché. Difficile d’expliquer cela, mais un seul regard suffit souvent, une parole bienveillante, un mot d’adulte confiant, clair et stable, pour dissoudre ces chagrins, alléger ces esprits, les installer dans un présent rigoureusement indicatif.
Naturellement le bienfait sera provisoire, l’oignon se recomposera à la sortie et sans doute faudra-t-il recommencer demain. Mais c’est cela, enseigner : c’est recommencer jusqu’à notre nécessaire disparition de professeur. Si nous échouons à installer nos élèves dans l’indicatif présent de notre cours, si notre savoir et le goût de son usage ne prennent pas sur ces garçons et sur ces filles, au sens botanique du verbe, leur existence tanguera sur les fondrières d’un manque indéfini. Bien sûr nous n’aurons pas été les seuls à creuser ces galeries ou à ne pas avoir su les combler, mais ces femmes et ces hommes auront tout de même passé une ou plusieurs années de leur jeunesse, là, assis en face de nous. Et ce n’est pas rien, une année de scolarité fichue : c’est l’éternité dans un bocal.
11
Il faudrait inventer un temps particulier pour l’apprentissage. Le présent d’incarnation, par exemple. Je suis ici, dans cette classe, et je comprends, enfin ! Ça y est ! Mon cerveau diffuse dans mon corps : ça s’incarne.
Quand ce n’est pas le cas, quand je n’y comprends rien, je me délite sur place, je me désintègre dans ce temps qui ne passe pas, je tombe en poussière et le moindre souffle m’éparpille.
Seulement, pour que la connaissance ait une chance de s’incarner dans le présent d’un cours, il faut cesser d’y brandir le passé comme une honte et l’avenir comme un châtiment.
12
À propos, que deviennent-ils, ceux qui sont devenus ?
F. est mort quelques mois après sa mise à la retraite. J. s’est jeté par la fenêtre la veille de la sienne. G. fait une dépression nerveuse. Tel autre en sort à peine. Les médecins de J. F. datent le début de son Alzheimer de la première année de sa retraite anticipée. Ceux de P. B. aussi. La pauvre L. pleure toutes les larmes de son corps pour avoir été licenciée du groupe de presse où elle croyait faire l’actualité ad vitam aeternam. Et je pense encore au cordonnier de P., mort de n’avoir pas trouvé repreneur à sa cordonnerie. « Alors ma vie ne vaut rien ? » C’est ce qu’il ne cessait de répéter. Personne ne voulait racheter sa raison d’être. « Tout ça pour rien ? » Il en est mort de chagrin.
Celui-ci est diplomate ; retraité dans six mois, il redoute plus que tout le face-à-face avec lui-même. Il cherche à faire autre chose : conseiller international d’un groupe industriel ? Consultant en ceci ou en cela ? Quant à celui-là, il fut Premier ministre. Il en a rêvé trente ans durant, dès ses premiers succès électoraux. Sa femme l’y a toujours encouragé. C’est un routier de la politique, il savait que ce rôle-titre, le gouvernement Untel, était, par nature, temporaire. Et dangereux. Il savait qu’à la première occasion il serait la risée de la presse, une cible de choix, y compris pour son propre camp, bouc émissaire en chef. Sans doute connaissait-il la blague de Clemenceau sur son chef de cabinet, en 1917, « Quand je pète, c’est lui qui pue ». (Oui, le monde politique a de ces élégances. On y est d’autant plus cru entre « amis » qu’on se doit de peser les déclarations publiques au milligramme.) Donc, il devient Premier ministre. Il accepte ce contrat périlleux à durée limitée. Sa femme et lui se sont blindés en conséquence. Premier ministre pendant quelques années, bien. Les quelques années passent. Comme prévu, il saute. Il perd son ministère. Ses proches affirment qu’il accuse gravement le coup : « Il craint pour son avenir. » Tant et si bien qu’une dépression nerveuse l’entraîne jusqu’au bord du suicide.
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