Daniel Pennac - Chagrin d'école

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Chagrin d'école: краткое содержание, описание и аннотация

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Chagrin d’école
Comme un roman

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La pensée magique… Un jour, je demande à mes premières de faire le portrait du professeur qui donne les sujets du bac. C’est un devoir écrit : Faites le portrait du professeur qui donne les sujets du baccalauréat de français. Ils n’étaient plus des enfants, ils avaient le temps de réfléchir, une semaine pour me rendre leur copie ; ils pouvaient se dire qu’un seul professeur ne suffisait pas à préparer tous les sujets de français, de toutes les sections, pour toutes les académies, que la chose se faisait probablement en groupe, qu’on se répartissait la tâche, qu’une commission décidait du contenu des sujets en fonction des différents programmes, ce genre de supputations… Rien du tout : ils me tracèrent tous, sans exception, le portrait d’un vieux sage, barbu, solitaire et omniscient, qui, du haut de l’olympe du savoir, lâchait sur la France des sujets de bac comme autant d’énigmes divines. J’avais imaginé ce sujet pour me représenter l’image qu’ils se faisaient de l’Instance, et par là éclairer la nature de leur inhibition. Objectif atteint. Nous nous sommes aussitôt procuré les annales du bac, nous y avons recensé tous les sujets de dissertation des dernières années, les avons disséqués, avons étudié leur composition, avons découvert qu’on n’y proposait pas plus de quatre ou cinq thèmes de réflexion, eux-mêmes présentés en deux ou trois types de formulation seulement. (Guère plus complexe, en somme, que des variantes autour de la recette du canard à l’orange : pas de canard, prenez une poule, pas d’orange, prenez des navets. Si ni poule ni canard, prenez un bœuf et des carottes. La sauce restait la même : Vous étaierez vos raisonnements de citations tirées de votre culture personnelle.) Forts qu’ils étaient de cette analyse structurelle, ils eurent mission, pour le devoir suivant, de composer eux-mêmes un sujet de dissertation.

— Ce sera noté, monsieur ?

(Combien de fois aurai-je entendu cette question !)

— Mais oui. Tout travail mérite salaire.

Formidable ! Un simple sujet noté comme une dissertation entière, l’aubaine ! On se frottait les mains. On prévoyait un week-end allégé. Mais que je ne m’inquiète pas, on ne ferait pas ce travail par-dessus la jambe, on me promettait d’y réfléchir sérieusement, un sujet en bonne et due forme, thème, structure et tout et tout, juré craché, m’sieur ! (Tout compte fait, prendre la place de Dieu le Père les tentait assez.)

Ils ne s’en tirèrent pas si mal. Ils avaient rédigé leurs sujets de dissertation en fonction de ce qu’ils savaient de leur programme et des quelques idées qui traînaient dans l’air du temps. J’aurais pu les faire embaucher par le Ministère. L’un d’eux, ou plutôt l’une d’elles, c’était une fille, fit observer que la formulation de ces sujets officiels n’était elle-même pas exempte de pensée magique :

— « Vous étaierez vos raisonnements de citations tirées de votre culture personnelle. » Quelles citations, le jour du bac, monsieur ? D’où les sortirait le candidat ? De sa tête ? Tout le monde n’apprend pas de textes comme nous ! Et quelle culture personnelle ? Ils veulent qu’on leur parle de nos chanteurs préférés ? De nos bandes dessinées ? Un peu magique, cette formule, non ? — Pas magique, idéale.

La semaine suivante, il ne leur resta qu’à traiter le sujet qu’ils s’étaient posé à eux-mêmes. Je ne prétends pas qu’ils frôlèrent l’excellence, mais le cœur y fut ; je récoltai des dissertations qui devaient beaucoup moins à la pensée magique, et eux des notes qui devaient beaucoup plus à la compréhension des impératifs du baccalauréat.

18

— Ce sera noté, m’sieur ?

Il y avait la question des notes, bien sûr.

Question capitale, la notation, si on veut s’attaquer à la pensée magique et, ce faisant, lutter contre l’absurde.

Quelle que soit la matière qu’il enseigne, un professeur découvre très vite qu’à chaque question posée, l’élève interrogé dispose de trois réponses possibles : la juste, la fausse et l’absurde. J’ai moi-même passablement abusé de l’absurde pendant ma scolarité « La fraction, faut la réduire au dénominateur commun ! » ou, plus tard : « Sinus a sur sinus b, je simplifie par sinus, reste a sur b ! » Un des malentendus de ma scolarité tient sans doute à ce que mes professeurs notaient comme étant fausses mes réponses absurdes. Je pouvais répondre absolument n’importe quoi, une seule chose m’était garantie : j’obtiendrais une note ! Zéro, généralement. J’avais compris cela très tôt. Et que c’était la meilleure façon d’avoir la paix, ce zéro. Au moins provisoirement.

Or, la condition sine qua non pour libérer le cancre de la pensée magique, c’est le refus catégorique de noter sa réponse si elle est absurde.

Pendant nos premières séances de correction grammaticale, ceux de mes « aménagés » qui se prétendaient abonnés au zéro n’étaient pas avares en réponses absurdes.

En quatrième, par exemple, l’ami Sami.

— Sami, quel est le premier verbe conjugué de la phrase ?

— Vraiment, m’sieur, c’est vraiment.

— Qu’est-ce qui te fait dire que vraiment est un verbe ?

— Ça se termine par ent !

— Et à l’infinitif, ça donne quoi ?

— … ?

— Allez, vas-y ! Qu’est-ce que ça donne ? Un verbe du premier groupe ? Le verbe vraimer ? Je vraime, tu vraimes, il vraime ?

La réponse absurde se distingue de la fausse en ce qu’elle ne procède d’aucune tentative de raisonnement. Souvent automatique, elle se limite à un acte réflexe. L’élève ne fait pas une erreur, il répond n’importe quoi à partir d’un indice quelconque (ici, la terminaison ent). Ce n’est pas à la question posée qu’il répond, mais au fait qu’on la lui pose. On attend de lui une réponse ? Il la donne. Juste, fausse, absurde, peu importe. D’ailleurs, au tout début de sa vie scolaire il pensait que la règle du jeu consistait à répondre pour répondre, il jaillissait de sa chaise doigt tendu, tout vibrant d’impatience : « Moi, moi, maîtresse, je sais ! je sais ! » (j’existe ! j’existe !), et répondait n’importe quoi. Mais, très vite, nous nous adaptons. Nous savons que le professeur attend de nous une réponse juste. Il se trouve que nous n’en avons pas en magasin. Pas même de fausse. Aucune idée de ce qu’il nous faut répondre. Tout juste si nous avons compris la question qu’il nous pose. Puis-je avouer cela à mon prof ? Ai-je le choix du silence ? Non. Autant répondre n’importe quoi. Avec ingénuité, si possible. Je suis tombé à côté, monsieur ? Croyez que je le regrette. J’ai tenté le coup, c’est raté, voilà tout, mettez-moi zéro et restons bons amis. La réponse absurde constitue l’aveu diplomatique d’une ignorance qui, malgré tout, cherche à maintenir un lien. Bien sûr, elle peut aussi exprimer un acte de rébellion caractérisé : il me casse les pieds, ce prof, à me pousser dans mes retranchements. Est-ce que je lui en pose, des questions, moi ?

Dans tous les cas de figure, noter cette réponse — en corrigeant une interrogation écrite par exemple —, c’est accepter de noter n’importe quoi, et par conséquent commettre soi-même un acte pédagogiquement absurde. Ici, élève et professeur manifestent plus ou moins consciemment le même désir : l’élimination symbolique de l’autre. En répondant n’importe quoi à la question que me pose mon professeur, je cesse de le considérer comme professeur, il devient un adulte que je courtise ou que j’élimine par l’absurde. En acceptant de tenir pour fausses les réponses absurdes de mon élève, je cesse de le considérer comme un élève, il devient un sujet hors sujet que je relègue aux limbes du zéro perpétuel. Mais ce faisant, je m’annule moi-même comme professeur ; ma fonction pédagogique cesse auprès de cette fille ou de ce garçon qui, à mes yeux, refusent de jouer leur rôle d’élève. Quand j’aurai à remplir leur carnet scolaire, je pourrai toujours arguer de leur manque de bases. Un élève qui prend l’adverbe « vraiment » pour un verbe du premier groupe ne manque-t-il pas singulièrement de bases ? Certainement. Mais un professeur qui fait semblant de tenir pour fausse une réponse si manifestement absurde ne ferait-il pas mieux de s’adonner lui aussi à un jeu de hasard ? Du moins n’aurait-il que son argent à y perdre, il n’y jouerait pas la scolarité de ses élèves.

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