Jean-Marie Le Clézio - Printemps et autres saisons

Здесь есть возможность читать онлайн «Jean-Marie Le Clézio - Printemps et autres saisons» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию без сокращений). В некоторых случаях можно слушать аудио, скачать через торрент в формате fb2 и присутствует краткое содержание. Город: Paris, Год выпуска: 1991, ISBN: 1991, Издательство: Éditions Gallimard, Жанр: Современная проза, на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале библиотеки ЛибКат.

Printemps et autres saisons: краткое содержание, описание и аннотация

Предлагаем к чтению аннотацию, описание, краткое содержание или предисловие (зависит от того, что написал сам автор книги «Printemps et autres saisons»). Если вы не нашли необходимую информацию о книге — напишите в комментариях, мы постараемся отыскать её.

Cinq saisons, cinq nouvelles, cinq femmes ; Libbie-Saba, Zobéïde, la bohémienne aux roses, Gaby et Zinna. Une par nouvelle. Une par saison. Cinq femmes vues ou entrevues, rêvées, pour tenter de dire la fragilité, l'étrangeté et la recherche de l'amour, la recherche de soi-même, l'errance et l'appartenance, la mémoire ou l'oubli, le temps qui ne passe pas et les lieux anciens qui s'enfuient.

Printemps et autres saisons — читать онлайн бесплатно полную книгу (весь текст) целиком

Ниже представлен текст книги, разбитый по страницам. Система сохранения места последней прочитанной страницы, позволяет с удобством читать онлайн бесплатно книгу «Printemps et autres saisons», без необходимости каждый раз заново искать на чём Вы остановились. Поставьте закладку, и сможете в любой момент перейти на страницу, на которой закончили чтение.

Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

L’air léger. La liberté, courir les rues. Sur le Bébé Peugeot, le plus loin possible, pour sentir le vent, rouler sur le trottoir entre les autos arrêtées, le long de la mer, aller vers le soleil. Tout est possible. C’est ce que je voulais, je crois, faire tout ce qui est possible. En même temps, j’avais peur, j’étais au bord du vide, comme dans un rêve. Il y a l’étendue d’ombre, on peut tomber. On peut se perdre.

Le vent, le soleil, la mer. Je sens la vie, dans mon ventre, dans ma poitrine, dans mes mains. C’est comme un fourmillement. Il y a quelque chose qui a changé, je ne suis plus la même, jusqu’à la pointe de mes cheveux. C’est dangereux, c’est effrayant de le dire. Il ne faut jamais se regarder dans les miroirs, ni même dans les vitres des magasins, ni sur les carrosseries des voitures. Bébé Peugeot a un rétroviseur sur la poignée gauche. Lucien l’a installé, il était très fier. À force de le retourner, j’ai fini par le casser, et il pend lamentablement sous le guidon. Je ne veux pas voir mon reflet, ni le regard des autres. Je ne veux voir que le ciel, même gris.

Les journées sont longues, longues. Le matin, je m’en vais en même temps que ma mère, avec mon sac, comme si j’allais au lycée. Le soir, je reviens quelquefois avant elle. Je ne monte pas tout de suite. Je reste assise sur le seuil, pour le cas où Gianni serait en haut.

Les heures sont longues comme des mois, comme des années. Quand je reviens, le soir, je suis ivre de tout ce que j’ai vu, du vent, de la lumière du soleil, du regard des gens. Je ne mange pas. Le soleil mange mon visage. J’ai mis des lunettes noires, des lunettes à monture plastique imitation écaille que j’ai achetées au bazar « Tout à cinq francs ». J’ai toujours le vieux manteau marron avec des manches trop longues. C’est lui que j’avais quand je suis arrivée, par le bateau. Quand Amie me l’a donné, il était immense comme un peignoir, elle avait roulé les manches. Elle disait : « Tu as l’air d’un clown ! » Moi je l’aimais, je ne voulais plus le quitter. Je dormais avec, sur le pont du Commandant Quéré, je m’étais enveloppée dedans comme dans une couverture.

Je ne voulais pas aller dans la cabine avec Amie et le Colonel. Le bateau roulait lentement dans la nuit, sur la mer invisible. C’était un été, il faisait doux, le vent était tiède. J’ouvrais les yeux, je voyais le ciel étoilé que cachaient de temps à autre les volutes de fumée. J’étais sur le dernier pont, à côté des grandes cheminées.

Je n’ai pas oublié cette nuit-là. Elle semblait immense et sans fin, elle aussi, comme lorsque j’étais allée aux noces de Jamila. Mais c’était une autre nuit, un autre monde. Je m’en allais. Je ne savais pas où j’allais. Peut-être que je croyais que je partais en vacances. C’était comme pour les vacances, il y avait beaucoup de monde sur le bateau, les gens allaient et venaient d’un pont à l’autre, les enfants couraient, les bébés pleurnichaient. La plupart des gens n’avaient pas de couchette, ils dormaient à même le pont, enveloppés dans des couvertures. D’autres avaient trouvé des transats, ils avaient mis autour d’eux tous leurs effets, les valises, les cartons. La vibration des machines changeait avec les oscillations du bateau. Du côté des chaloupes, il y avait des jeunes gens, j’entendais par instants leurs rires, un air de guitare. Je crois que j’ai compris que je m’en allais pour toujours.

Ma mère est rentrée plus tôt, elle m’a attendue sur le seuil de la maison. Quand je suis arrivée, elle n’a rien dit, mais elle avait sa tête des mauvais jours. Elle avait les lèvres serrées. Quand on est entrées chez elle, elle a dit : « Où étais-tu ? » Elle avait une drôle de voix sourde. J’ai cru qu’elle allait me frapper. Je me suis mise devant la porte, j’étais prête à m’en aller. Je n’ai pas voulu inventer quelque chose. Je lui ai dit : « Je ne suis pas allée au lycée. » Ça fait bien des semaines que je ne vais plus au lycée. J’écris moi-même les mots d’absence. De toute façon, elle ne sait pas écrire. J’ai regardé dans un dictionnaire quelle maladie je pourrais avoir. Des rhumatismes. J’ai trouvé ça, des rhumatismes articulaires. Avec ça, je peux m’absenter quand je veux. Je suis allée quand même aux cours de Miss Butterworth, parce qu’elle est drôle, avec ses taches de rousseur. Et j’aime bien l’anglais, c’est la langue du Colonel. J’aime bien écouter Radio Tanger, The Voice of America, ou aller voir les films américains. Les autres cours, la chimie, les maths, le français, l’histoire-géo surtout, je ne pouvais plus les supporter. J’écris les mots sur un beau papier gris que j’ai acheté aux Galeries Lafayette. Je ne voulais pas qu’on sache que ma mère ne sait pas écrire. J’ai acheté de belles enveloppes doublées de papier satin. J’écris le mieux que je peux. J’invente un style :

« Cher Professeur,

« Ma fille me rendra folle.

« Ces crises continuelles me font souffrir peut-être plus qu’elle, les médecins en perdent leur latin.

« Mais si elle n’y est pas par le corps, sachez que ma fille est sans cesse présente par l’esprit. Elle relit les livres, elle raconte le cours comme si elle y était. Elle est impatiente d’être de nouveau sur pied. Ne lui en veuillez pas ! »

J’invente les prénoms : Saba, Henriette, Lucienne. J’invente les adresses, le numéro de téléphone. J’invente ma mère. Elle ne s’appelle plus Mariem, elle s’appelle Jamila. Elle s’appelle Elsa, ou Sarah, elle s’appelle Hélène. Elle travaille dans un grand bureau tout en verre, comme les banques, ou bien dans un immeuble de ciment gris avec une moquette d’un bleu profond. Il y a du marbre, des glaces, des plantes vertes qui montent jusqu’au plafond.

J’invente sa vie, ses voyages, ses amants. Mon père est séparé d’elle, il vit à l’autre bout du monde, il est marin, pas comme Gianni, un capitaine de la marine marchande, sur un grand porte-conteneurs qui va jusqu’à Yokohama, jusqu’à Hawaii.

J’invente d’autres maladies. Une affection rare du fond de l’œil, due à un trop fort rayonnement d’ultraviolets.

« Ma fille Sarah, Saba, risque de perdre la vue, imaginez mon désarroi ! Dès demain je l’emmène consulter le Professeur Leroy à Lyon, il est peut-être le seul qui puisse la sauver. Je ne peux croire qu’elle ait à renoncer à tout jamais aux études. A-t-on le droit de lui cacher la vérité ? Si je lui révélais la gravité de son état, elle perdrait confiance en moi, en vous… À bientôt j’espère, à la grâce de Dieu. »

C’est à ce moment-là que j’ai acheté mes lunettes noires, au bazar.

Ma mère ne m’a rien demandé. Peut-être qu’elle ne savait rien de tout ça. Le lendemain, elle n’est pas allée à la fabrique Atlas. Lucien attendait près de la boulangerie, à côté du Bébé Peugeot. Il faisait beau, il y avait les cris stridents des martinets.

« Habille-toi. » J’ai voulu mettre le vieux manteau marron, mais ma mère s’est mise en colère. « Pas cette saleté. » Elle a jeté le manteau par terre. J’ai mis une veste propre. J’ai marché dans la rue, un peu derrière elle. Je ne savais pas où elle m’emmenait.

On a marché jusqu’à cette grande avenue, dans le centre de la ville, où habite le docteur Haven. C’est une femme de cinquante ans, un peu grosse, avec des cheveux décolorés en jaune. Elle est gynécologue. Je ne savais pas bien ce que ça voulait dire. Je ne comprenais pas pourquoi ma mère m’avait emmenée là. Ma mère est restée dans le bureau, et la grosse femme m’a fait allonger sur une civière recouverte d’un papier. Elle m’a fait écarter les jambes, et elle a regardé dans mon sexe, elle avait des gants de caoutchouc, et un instrument froid. Mon cœur cognait, j’avais peur, j’avais honte. Ensuite, elle a enlevé ses gants, et j’ai attendu sans bouger sur la civière. Elle a dit : « C’est fini, tu peux te rhabiller. » Elle m’a posé des questions, d’une drôle de voix un peu embarrassée. Elle m’a demandé si j’avais eu des relations avec des hommes. Je n’avais plus peur, j’étais en colère. J’ai dit oui, avec plusieurs. Elle m’a regardée, elle a simplement dit : « Eh bien, ça ne se voit pas. » Alors j’ai compris pourquoi ma mère m’avait emmenée là, chez cette femme. J’ai senti plus fort la colère, la rage. Mon cœur battait très vite, le sang brûlait mon visage. Je voulais repartir, j’ai ouvert la porte et j’ai descendu l’escalier de l’immeuble très vite, j’ai couru dans la rue, sans attendre ma mère.

Читать дальше
Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Похожие книги на «Printemps et autres saisons»

Представляем Вашему вниманию похожие книги на «Printemps et autres saisons» списком для выбора. Мы отобрали схожую по названию и смыслу литературу в надежде предоставить читателям больше вариантов отыскать новые, интересные, ещё непрочитанные произведения.


libcat.ru: книга без обложки
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Poisson d'or
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Ourania
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Le chercheur d'or
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Étoile errante
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Désert
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Tempête. Deux novellas
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - La ronde et autres faits divers
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Coeur brûle et autres romances
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Fièvre
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - La quarantaine
Jean-Marie Le Clézio
Отзывы о книге «Printemps et autres saisons»

Обсуждение, отзывы о книге «Printemps et autres saisons» и просто собственные мнения читателей. Оставьте ваши комментарии, напишите, что Вы думаете о произведении, его смысле или главных героях. Укажите что конкретно понравилось, а что нет, и почему Вы так считаете.

x