Jean-Marie Le Clézio - Étoile errante

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Pendant l'été 1943, dans un petit village de l'arrière-pays niçois transformé en ghetto par les occupants italiens, Esther découvre ce que peut signifier être juif en temps de guerre : adolescente jusqu'alors sereine, elle va connaître la peur, l'humiliation, la fuite à travers les montagnes, la mort de son père.
Comme dans 
, avec lequel il forme un diptyque, on retrouve dans 
le récit d'un voyage vers la conscience de soi. Tant que le mal existera, tant que des enfants continueront d'être captifs de la guerre, tant que l'idée de la nécessité de la violence ne sera pas rejetée, Esther et Nejma resteront des étoiles errantes.

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La mer est violente, ourlée d’écume. Elle change sans arrêt de couleur. Quand les nuages s’étirent à nouveau dans le ciel, elle devient grise, sombre, violette, un porphyre en fusion.

J’ai froid, maintenant. Je me rencogne dans l’abri de rocher. Les autres, que font-ils ? Est-ce qu’ils attendent encore ? Si nous cessons d’y croire, peut-être que le bateau fera demi-tour, qu’il ne luttera plus contre le vent, et qu’il retournera vers l’Italie. Mon cœur bat vite et fort, ma gorge est sèche, parce que je sais que c’est en cet instant que nous jouons notre vie, que le Sette Fratelli n’est pas n’importe quel bateau. C’est lui qui porte notre destinée.

Le Berger est venu me voir dans ma cachette. C’est déjà le soir. Par un trou dans les nuages, le soleil darde une lueur violente, pourpre, on dirait mêlée de cendres. Le Berger vient jusqu’à moi, il s’assoit sur le tronc de l’arbre, il me parle. Je n’écoute pas ce qu’il dit au début, je suis trop fatiguée pour bavarder. Mes yeux brûlent, l’eau coule de mes yeux et de mon nez. Le Berger croit que je pleure de découragement, il s’assoit à côté de moi, il met son bras autour de mes épaules. C’est la première fois qu’il fait cela, je sens la chaleur de son corps, je vois la lumière qui fait briller drôlement les poils de sa barbe. Je pense à Tristan, à l’odeur de son corps après l’eau de la rivière. C’est un souvenir très ancien, d’une autre vie. C’est léger comme le frisson qui court sur ma peau. Le Berger parle, il raconte sa vie, son père et sa mère emmenés à Drancy par les Allemands, jamais revenus. Il dit son nom, il parle de ce qu’il fera, à Jérusalem, des études qu’il voudrait faire, peut-être en Amérique, pour devenir médecin. Il me prend par la main et nous marchons ensemble jusqu’au port, jusqu’à la cabane de pierres où les gens attendent. Quand je m’assois à nouveau auprès de maman, il fait presque nuit.

Peu à peu, la tempête est revenue. Les nuages ont caché les étoiles. Il fait froid, la pluie tombe par paquets. Nous sommes enveloppées dans la couverture de l’oncle Simon Ruben, le dos appuyé contre le mur en ruine. Les pins géants ont recommencé à grincer. Je sens le vide en moi, je tombe. Comment le bateau pourrait-il nous retrouver, maintenant qu’il n’y a plus de vigie ?

C’est le Berger qui me réveille. Il est penché sur moi, il touche mon épaule, il dit quelque chose, et je dois avoir l’air tellement endormie qu’il me force à me lever. Maman aussi est debout. Le Berger me montre au loin une forme qui avance sur la mer, devant l’embouchure du port d’Alon, à peine visible dans la lumière grise de l’aube. C’est le Sette Fratelli.

Personne ne crie, personne ne dit rien. Les uns après les autres, hommes, femmes, enfants, se sont mis debout sur la plage, encore enveloppés dans leurs couvertures et dans leurs manteaux, et regardent la mer. Le bateau entre lentement dans la baie, ses voiles claquant dans le vent. Il vire, roule dans les vagues qui le frappent par le travers.

À ce moment, il y a une déchirure dans le ciel. Entre les nuages, le ciel brille, et la lumière de l’aube éclaire d’un coup la baie d’Alon, les rochers blancs, illumine le feuillage des grands pins. Il y a des étincelles sur la mer. Les voiles du navire paraissent immenses, blanches, presque irréelles.

C’est si beau qu’on en a la chair de poule. Maman s’est mise à genoux dans le sable de la grève, et d’autres femmes font comme elle, puis des hommes. Moi aussi je suis à genoux dans le sable mouillé, et nous regardons le navire qui s’immobilise au centre de la baie. Nous ne faisons rien d’autre que regarder. Nous ne pouvons plus parler, plus penser, plus rien. Sur la plage, toutes les femmes sont à genoux. Elles prient, ou elles pleurent, j’entends leurs voix monotones dans les rafales de vent. Derrière elles, les vieux Juifs sont restés debout, vêtus de leurs lourds manteaux noirs, certains appuyés sur leurs parapluies comme sur des bâtons. Ils regardent la mer, leurs lèvres bougent aussi, comme s’ils priaient. Pour la première fois de ma vie, je suis en train de prier, moi aussi. C’est en moi, je le sens, au fond de moi, malgré moi. C’est dans mes yeux, c’est dans mon cœur, comme si j’étais en dehors de moi et que je voyais au-delà de l’horizon, au-delà de la mer. Et tout ce que je vois maintenant signifie quelque chose, m’emporte, me lance dans le vent, au-dessus de la mer. Jamais je n’avais senti cela : tout ce que j’ai vécu, toutes ces fatigues, la marche dans les montagnes, puis les années horribles dans la rue des Gravilliers, les années où je n’osais même pas sortir dans la cour pour voir la couleur du ciel, les années suffocantes et laides, et longues comme une maladie, tout est en train de s’effacer ici, dans la lueur qui éclaire la baie d’Alon, avec le Sette Fratelli qui tourne lentement autour de son ancre et ses grandes voiles blanches détendues qui claquent dans la bourrasque.

Tous, nous sommes immobiles, à genoux, ou debout sur la plage, encore enveloppés dans nos couvertures, engourdis de froid et de sommeil. Nous n’avons plus de passé. Nous sommes neufs, comme si nous venions de naître, comme si nous avions dormi mille ans, ici, sur cette plage. Je dis cela, je l’ai pensé, alors, en un éclair, si fort que mon cœur bat à se rompre. Maman pleure en silence, de fatigue, peut-être, ou de contentement, je sens contre moi son corps qui se plie en avant, comme si elle avait reçu des coups. Peut-être qu’elle pleure à cause de mon père qui n’est pas arrivé sur le chemin, là où on l’attendait. Elle n’a pas pleuré alors, même quand elle a compris qu’il ne viendrait plus. Et maintenant il y a ce vide, ce vide en forme de navire, immobile au milieu de la baie, et c’est plus qu’elle ne peut en supporter.

Est-ce que c’est un bateau réel, monté par des hommes ? Nous le regardons avec autant de peur que de désir, craignant qu’à chaque instant il ne relève ses amarres et s’enfuie dans le vent sur la mer, au loin, en nous abandonnant sur cette plage déserte.

Alors les enfants ont commencé à courir sur le sable de la grève, ils ont oublié leur fatigue, la faim et le froid. Ils courent jusqu’à la pointe rocheuse, en agitant les bras, ils crient : « Hé ! Ohé !.. » Leurs voix aiguës m’arrachent à mon rêve.

C’est bien le Sette Fratelli, le bateau qu’on attendait, qui va nous conduire de l’autre côté de la mer, jusqu’à Jérusalem. Je me souviens maintenant pourquoi j’avais aimé le nom du bateau, la première fois que Simon Ruben l’avait prononcé, les « sept frères ». Un jour, avec mon père, on avait parlé des enfants de Jacob, ceux qui se sont répandus dans le monde. Je ne me souvenais pas de tous leurs noms, mais il y en avait deux dont j’aimais les noms, parce qu’ils étaient pleins de mystère. L’un, c’était Benjamin, le loup dévorant. L’autre, c’était Zabulon, le marin. Je pensais qu’il avait disparu un jour sur son navire, dans une tempête, et que la mer l’avait emporté dans un autre monde. Il y avait aussi Nephtali, la biche, la seule fille, et j’imaginais que ma mère devait lui ressembler, à cause de ses yeux si noirs et si doux (et moi aussi, avec mes yeux allongés, et mon regard toujours aux aguets). Alors c’était peut-être Zabulon qui revenait aujourd’hui sur son navire, pour nous ramener jusqu’aux rives de nos ancêtres, après avoir erré tant et tant de siècles sur la mer. Le Berger est près de moi, il m’a pris la main un instant, sans rien me dire. Ses yeux sont brillants, sa gorge doit être tellement serrée par l’émotion qu’il ne peut pas parler. Mais moi, tout d’un coup, je me libère, et sans plus attendre, je me mets à courir sur la plage avec les enfants, et à crier, et à agiter mes bras. Le vent froid fait couler mes larmes, bouscule mes cheveux. Je sais bien que maman n’aimera pas cela, mais tant pis ! Je dois courir, je ne peux plus rester en place. Il faut que je crie, moi aussi. Alors je crie n’importe quoi, j’agite mes bras, et je crie vers le navire : « Ohé ! Zabulon ! » Les enfants ont compris, eux aussi ils crient avec moi : « Zabulon ! Zabulon ! Ohé, Zabulon !.. » avec des voix stridentes qui ressemblent à des cris d’oiseaux en colère.

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