Jean-Marie Le Clézio - La quarantaine

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«Que reste-t-il des émotions, des rêves, des désirs quand on disparaît? L’homme d’Aden, l’empoisonneur de Harrar sont-ils les mêmes que l’adolescent furieux qui poussa une nuit la porte du café de la rue Madame, son regard sombre passant sur un enfant de neuf ans qui était mon grand-père? Je marche dans toutes ces rues, j’entends le bruit de mes talons qui résonne dans la nuit, rue Victor-Cousin, rue Serpente, place Maubert, dans les rues de la Contrescarpe. Celui que je cherche n’a plus de nom. Il est moins qu’une ombre, moins qu’une trace, moins qu’un fantôme. Il est en moi, comme une vibration, comme un désir, un élan de l’imagination, un rebond du cœur, pour mieux m’envoler. D’ailleurs je prends demain l’avion pour l’autre bout du monde. L’autre extrémité du temps.»

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Avec Sita, elle peut tout oublier. Elles parlent pendant des heures, de tout et de rien, comme si elles avaient grandi ensemble, qu’elles étaient les deux parties d’une même personne.

Il y a des moments de long silence. Elles sont couchées toutes les deux dans l’herbe, cachées par les buissons, et elles regardent le ciel d’un bleu violent où glissent les nuages en duvet. Tout l’hiver, elles sont ensemble dehors. Elles marchent le long des chemins, au milieu des cannes plus hautes qu’elles. Quand commence la coupe, elles vont se réfugier près des ruines du four à chaux, au bord de la mer. Elles marchent en se tenant la main, Sita lui montre comment on danse avec les gestes des bras, en bougeant les yeux, en frappant la terre avec ses pieds nus. Elle lui apprend des chansons indiennes anciennes, dont elle-même ne comprend pas le sens. Sita dessine ses grands yeux d’un mince fil noir, elle montre à Anna comment on fait de la couleur avec de la poudre de santal mêlée à la boue. Un jour, elle a même dessiné sur le front de son amie la goutte magique que la déesse Yamuna avait posée sur le front de son frère Yama, pour lui dire son amour éternel. Sita a des yeux immenses, ses iris sont mêlés d’or et de nuages, Anna dit qu’on peut y voyager.

À la saison des pluies, en janvier, cette année-là, elles continuent à se voir. C’est pourtant l’année de tous les drames. Le Patriarche a noué les fils du complot pour expulser tous les locataires d’Anna, y compris son propre fils. Il a vendu les deux maisons, les champs de cannes, le moulin. Pour parer aux intempéries, Sita vient chaque après-midi au rendez-vous, munie d’un grand parapluie noir que sa tante lui a rapporté de Pondichéry. Ensemble elles marchent serrées sous le parapluie, pieds nus dans les flaques. Elles s’abritent sous le multipliant, ou plus loin, sous les veloutiers du rivage.

Quand le déménagement a eu lieu, Anna se résout à ne voir Sita qu’une ou deux fois par semaine. Parfois elle prend le char à bancs qui descend jusqu’à Médine, ou bien c’est Sita qui vient à Floréal. C’est compliqué, mais c’est excitant aussi. Dans les rues de la ville, elles se promènent, elles vont manger des gâteaux-piment chez le Chinois de Quatre-Bornes. Elles ont tant de choses à se raconter!

Un jour, Sita arrive tout essoufflée. Elle apporte une grande nouvelle: son père est mort, et sa mère a décidé de s’installer à Quatre-Bornes. Maintenant, elles vont pouvoir recommencer à se voir chaque jour, après l’école. Elles ont décidé d’un endroit, à mi-chemin, du côté de Phœnix, près de la voie ferrée. Chacune marchera une demi-heure. Il y a un gros arbre brisé par la tempête, couché sur le talus, qui servira très bien de banc. Et s’il pleut, on ira s’abriter dans le jardin du couvent de Bonne-Terre.

L’hiver est revenu. Sita maintenant est une grande jeune fille. Avec sa taille fine, ses longs bras cerclés de cuivre, sa poitrine et ses cheveux épais coiffés en chignon, elle semble une princesse d’Inde, et tous les hommes se retournent sur elle. Anna a grandi elle aussi, mais elle est toujours aussi maigre, ingrate. Elle a coupé court ses beaux cheveux noirs, elle a un visage aigu, intelligent. Pour cacher ses seins, elle se serre dans des bandes de lin sous sa robe grise. Elle n’aime pas la façon dont les garçons regardent Sita. Ensemble elles s’en moquent, elles rient et partent en courant sur la route, jusqu’au grand arbre tombé.

Un dimanche après-midi, Sita n’est pas venue. Il pleuvait à verse. Anna a attendu longtemps près de l’arbre, sous la pluie froide. Le ciel était sombre, et quand elle s’est aperçue que la nuit tombait, elle a couru jusqu’à Floréal, sans reprendre haleine.

C’était la première fois. Son père a fait une scène terrible. Pendant plusieurs jours, Anna est restée consignée dans sa chambre, à regarder la pluie sur les plantes du jardin. Puis elle est tombée malade, à cause du froid qu’elle avait pris, le jour où elle avait tant attendu.

Quand elle est allée mieux, elle a senti un très grand vide. Maintenant les journées semblaient longues, sans Sita. Après la classe de religion, il n’y avait plus rien à faire. De plus, tout allait mal à la maison, son père était malade, ruiné. Le Patriarche s’était installé à Anna, à leur place. Il interdisait les visites. La vieille Yaya racontait qu’il avait tombé tous les palmistes, et qu’il avait fait clouer les volets du bas, de crainte des voleurs. Après avoir rompu avec son fils, il avait chassé tous ses alliés, il avait dissous le parti de l’Ordre moral, et annoncé la fin du rêve de la Synarchie. Maintenant il était évident qu’on ne retournerait jamais à Anna.

Un jour, pourtant, à l’heure où son père sommeillait, Anna a revu Sita. Elle se tenait debout dans la rue, devant la maison, à l’abri de son grand parapluie noir. Le cœur débordant, Anna s’est précipitée au-dehors, les deux amies se sont longuement embrassées. Mais Anna s’est aperçue que quelque chose avait changé. Sita avait toujours son regard brillant, mais ses traits étaient durcis, son teint avait pâli. Elle avait le cou plus épais, et au milieu du front, la raie qui divisait sa chevelure était peinte en rouge sombre.

Après l’avoir embrassée, Sita a fait un pas en arrière. Elle a fixé un moment Anna sans rien dire, comme si elle cherchait ses mots. Puis elle a dit seulement: «Nous ne pourrons plus nous voir. Je me suis mariée. Je suis venue te dire adieu.» La pluie fine accrochait des gouttes sur le parapluie noir, et les gouttes roulaient, s’unissaient, tombaient lourdement au bout des baleines. Anna regardait les gouttes, elle non plus ne trouvait rien à dire. Dans la rue, les gens se hâtaient, les femmes qui revenaient des champs, enveloppées dans leurs gonis, leur houe en équilibre sur la tête. Le ciel bas pesait sur les cimes des arbres.

Anna sentait le frisson de la fièvre dans son dos, dans ses épaules. Elle avait la nausée dans sa gorge. À un moment, son père est apparu à l’entrée du jardin. Alors Sita a baissé son parapluie, elle a mis un pan de son châle rouge sur sa bouche, peut-être pour se protéger du froid, et elle a marché vite vers le bout de la rue, jusqu’à la voie ferrée, dans la direction de Vacoas.

Quand Anna est rentrée dans la maison, son père avait préparé une serviette. Il lui a demandé: «Qui est-ce?» Anna a répondu: «Rien… Personne.»

Elle n’a jamais revu Sita. Sur la route, près de la voie ferrée, l’arbre est resté longtemps couché. Puis un jour les cantonniers l’ont scié et ont emporté les morceaux.

J’ai quitté Maurice sans savoir si j’y retournerai jamais. Je n’emporte rien de ce que je suis venu chercher. Malgré le temps passé — bientôt cent ans — rien de ce que le Patriarche a défait n’est réparable. C’est lui qui triomphe, de son mausolée de marbre noir dans le cimetière du Jardin botanique.

Il ne reste rien du passé, et c’est sans doute mieux ainsi. Comment vivre avec la mémoire du sang versé, de l’exil, des hommes sacrifiés au Moloch de la canne à sucre? Ce qu’Alexandre Archambau a effacé dans son orgueil était de peu d’importance. Les maisons coloniales, la vanité des péristyles, la Comète au pinacle, les varangues languissantes où traînait la fièvre, les bassins envahis par les jacinthes d’eau où chaque nuit les crapauds entonnent leurs chants alternés, et tous ces noms, ces titres, ces mot-tos, ces souvenirs inventés, toute cette poudre d’or, cette poudre aux yeux. Tous ces masques.

Au contraire, ceux qu’il ne faut jamais oublier, ce sont les premiers immigrants venus de Bretagne, fuyant la famine et l’injustice, en quête d’un nouvel Éden, les Malouins, les Vannetais, les gens de Lorient et de Paimpont, de Pontivy, de Mûr-de-Bretagne, tous ceux que la Compagnie la plus cruelle du monde bafouait et abandonnait sur les îles lointaines, et sur lesquels elle prélevait chaque année sa livre de chair.

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