Jean-Marie Le Clézio - Ritournelle de la faim

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Ritournelle de la faim: краткое содержание, описание и аннотация

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« Ma mère, quand elle m’a raconté la première du
, a dit son émotion, les cris, les bravos et les sifflets, le tumulte. Dans la même salle, quelque part, se trouvait un jeune homme qu’elle n’a jamais rencontré, Claude Lévi-Strauss. Comme lui, longtemps après, ma mère m’a confié que cette musique avait changé sa vie.
Maintenant, je comprends pourquoi. Je sais ce que signifiait pour sa génération cette phrase répétée, serinée, imposée par le rythme et le crescendo. Le
n’est pas une pièce musicale comme les autres. Il est une prophétie. Il raconte l’histoire d’une colère, d’une faim. Quand il s’achève dans la violence, le silence qui s’ensuit est terrible pour les survivants étourdis.
J’ai écrit cette histoire en mémoire d’une jeune fille qui fut malgré elle une héroïne à vingt ans. »

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Ou bien elle n’aurait rien dit du tout. Xénia était d’un égoïsme féroce, ce qui lui était étranger n’existait pas, tout simplement.

Est-ce que le monde était vraiment malade ? Ce frisson, cette nausée, cela venait de très loin, de très longtemps. Maintenant dans l’été des dunes, au Pouldu, en attendant l’heure du rendez-vous avec son amoureux, Éthel pouvait compter toutes les racines, radicelles, veinules, tous les capillaires de ce mal, comme un tissu qui avait recouvert toute sa vie. Cela n’avait rien d’imaginaire. C’étaient toutes les petites trahisons, le silence quotidien qui s’était installé dans les cœurs, le vide. Les mots parfois trop forts, la violence des sentiments, quand la voix de Justine montait dans la nuit, se brisait dans un sanglot qui ressemblait à un grelot, et la voix d’Alexandre qui lui répondait, un borborygme grave qui enflait, qui grondait. Puis le bruit de la porte qui claquait, le bruit des chaussures qui s’éloignaient dans le couloir, encore une porte qui claquait, le bruit des pas dans la rue, qui disparaissaient dans la nuit. Éthel qui attendait, qui espérait le retour, qui s’endormait avant d’avoir perçu les pas discrets dans le couloir, la respiration alourdie par le sommeil, par la fumée des cigarettes.

Toutes les conversations du salon, insignifiantes, rodo-montantes, toutes ces voix, le chantonnement des Mauriciennes, une odeur de sucre vanillé, de cannelle, sur les restes du cari safrané et des chatinis acidulés. Le vide, arrogant, injuste, cette façon que les gens de sa famille avaient de nier le réel, de lancer les noms d’une parentèle à jamais disparue, qui probablement n’avait jamais vraiment existé. Ces noms farfelus, inventés, pailletés, de la petite noblesse de Maurice, auxquels elle était plus ou moins rattachée par l’histoire de la famille Brun (au moins, celle-là n’avait pas cru bon y rattacher une particule). Des noms d’opérette, des noms de juments et d’étalons croisés dans les haras.

Les Archambault, Besnières, de Gersilly, de Grammont, de Grandpré, d’Espars, les Robin de Thouars, les de Surville, de Stère, de Saint-Dalfour, de Saint-Nolff, les Pichon de Vanves, les Cléry du Jars, Pontalenvert, les Seltz de Sterling, Craon de la Mothe, d’Edwards de Jon-ville, Créach du Rezé, de Soulte, de Sinch, d’Armor.

Déjà, l’an passé, en septembre, le 23 et le 24, les nouvelles de l’exode de la frontière nord, tous ces gens lancés sur les routes, avec leurs voitures à cheval et leurs charrettes à bras. La tempête qui avait soufflé sur eux, qui avait couché les arbres sur les routes. Le froid de l’hiver précoce, la chute des finances, les banques qui demandaient le remboursement immédiat des dettes, puis mettaient la clef sous la porte, et leurs patrons couraient s’abriter en Suisse, en Angleterre, en Argentine.

La voix qui crachotait dans le poste de TSF, la voix rauque, puissante, qui enflait, qui montait. Ses phrases lancées dans l’espace, et la rumeur environnante qui reprenait en chœur, un crissement de mer sur les galets de la plage, un fracas sur les dents des brisants. Les clameurs d’une foule, là-bas, quelque part, à Munich, à Vienne, à Berlin. Ou bien dans l’amphithéâtre du Vél’ d’Hiv, les fidèles de La Rocque, de Maurras, de Daudet, ceux qui acclamaient la Ligue, qui conspuaient les communistes. Et les voix des femmes, des folles, dans le salon de la rue du Cotentin, qui s’enthousiasmaient : « Quelle force, quel génie, quel pouvoir, mes chéries, quelle volonté émouvante, même si on ne comprend pas il nous électrise, c’est lui qui nous sauvera de nos vieux démons, qui nous protégera de Lénine, cet Asiate aux yeux fourbes, c’est lui qui vaincra Staline, qui nous préservera des barbares. »

Éthel enfonçait son corps dans le sable chaud, elle regardait le bois de pins avancer sous les nuages. Un après-midi, au crépuscule, comme les chauves-souris commençaient leur ronde au ras des dunes à la chasse aux moucherons, dans l’air calme, avec la marée étale qui clapotait à l’estran, Éthel et Laurent se sont baignés longuement, sans nager, juste à se laisser porter par la vague molle. Il y avait un silence intense sur la plage, personne à des kilomètres. Sur le tapis âcre des aiguilles, ils ont fait l’amour sans ôter leurs maillots trempés, un simulacre plutôt, le sexe de Laurent tendu sous l’étoffe noire appuyé sur le sexe d’Éthel creusé dans son maillot blanc, c’était une danse longue et lente d’abord, puis plus rapide, leurs peaux frissonnant dans la fraîcheur de l’air, où perlaient de petites gouttes de sueur salée comme l’eau de la mer, Éthel le visage renversé en arrière, les yeux fermés sur le ciel, Laurent arc-bouté, les yeux grands ouverts, le visage un peu grimaçant, les muscles de son dos et de ses bras tendus. Ils écoutaient le bruit saccadé de leurs cœurs, le halètement de leurs poumons. Éthel a joui en premier, puis Laurent, qui s’est aussitôt déporté sur le côté, la main appuyée sur son maillot où s’agrandissait une étoile chaude.

Laurent restait silencieux à reprendre son souffle, il allait s’excuser, toujours aussi gauche, presque honteux, mais Éthel ne lui en laissait pas le temps. Elle roulait sur lui et l’écrasait de tout son poids, le sable crissait entre ses dents, les mèches de ses cheveux cachaient entièrement son visage comme des algues noires. Elle l’embrassait pour le faire taire. Il ne fallait rien dire, surtout ne prononcer aucune parole, pas un mot, surtout ne pas dire : je t’aime, ou quoi que ce soit de ce genre.

Le soir ils revenaient à la pension Liou, à grands coups de pédale sur le sentier sableux, rouges, décoiffés, giflés par le vent. Ils dînaient tôt, sans écouter le brouhaha des tablées, sans entendre la voix d’Alexandre en train de pérorer devant son habituel public. Seule Justine les regardait du coin de l’œil, d’un regard long, un peu triste, qui voulait dire qu’elle savait. Ils allaient se coucher, chacun dans son lit étroit, dans les draps frais, avec du sable brûlant incrusté dans le dos et les plis de l’aine, une petite motte de sable durci dans le trou de leur nombril.

Laurent était parti pour l’Angleterre. Sur le quai, à la gare du Nord, il était debout, sa petite valise à la main, le col de sa vareuse entrouvert à cause de la chaleur, le calot roulé dans l’épaulette, encore tout doré par le soleil et la mer. Éthel avait appuyé sa joue sur la poitrine du jeune homme, mais le vacarme des quais l’empêchait d’entendre les battements de son cœur.

Tout de suite, il avait fallu plonger dans la réalité. C’était comme si tout s’accélérait, un film dont on aurait tourné la manivelle avec furie, des scènes qui sautaient, des saccades comiques, des gens qui couraient, des yeux qui roulaient, des grimaces. La vente à l’encan avait débuté au retour de Bretagne. Dans le salon, comme après un deuil. Les meubles rassemblés, les bâches, le piano Érard le couvercle relevé pour que les marchands puissent essayer chaque touche, comme s’ils y connaissaient quelque chose. À un moment, enragée, Éthel s’est assise sur le tabouret, le dos bien droit, elle a pris son souffle. Elle s’est mise à jouer, un peu raidie d’abord, puis elle a senti la chaleur qui entrait en elle, doucement, elle jouait un Nocturne de Chopin, le glissement des notes sortait par les portes-fenêtres ouvertes et emplissait le jardin déjà jauni par l’automne, elle croyait qu’elle n’avait jamais joué aussi bien, jamais ressenti une telle puissance. Dans le vent les feuilles des marronniers tourbillonnaient, chaque passage du Nocturne se mêlait à la chute des feuilles, chaque note, chaque feuille… C’était son adieu à la musique, à la jeunesse, à l’amour, son adieu à Laurent, à Xénia, à Monsieur Soliman, à la Maison mauve, à tout ce qu’elle avait connu. Bientôt il ne resterait plus rien. Quand elle a fini de jouer, Éthel a claqué le couvercle comme on fermerait une boîte à trésors, et le vieux piano a rendu un drôle de son grave et mêlé, toutes ses cordes vibrant en même temps. Une plainte, ou plutôt un ricanement douloureux, a pensé Éthel. Justine était debout près d’elle, les yeux rougis de larmes. Bien le moment de pleurer, a murmuré Éthel. Mais les mots ne sont pas vraiment sortis de sa gorge. Bien le moment de pleurer, oui, mais c’est hier que vous auriez dû verser vos larmes, quand vous pouviez encore faire quelque chose.

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