Jean-Marie Le Clézio - Ritournelle de la faim

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Ritournelle de la faim: краткое содержание, описание и аннотация

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« Ma mère, quand elle m’a raconté la première du
, a dit son émotion, les cris, les bravos et les sifflets, le tumulte. Dans la même salle, quelque part, se trouvait un jeune homme qu’elle n’a jamais rencontré, Claude Lévi-Strauss. Comme lui, longtemps après, ma mère m’a confié que cette musique avait changé sa vie.
Maintenant, je comprends pourquoi. Je sais ce que signifiait pour sa génération cette phrase répétée, serinée, imposée par le rythme et le crescendo. Le
n’est pas une pièce musicale comme les autres. Il est une prophétie. Il raconte l’histoire d’une colère, d’une faim. Quand il s’achève dans la violence, le silence qui s’ensuit est terrible pour les survivants étourdis.
J’ai écrit cette histoire en mémoire d’une jeune fille qui fut malgré elle une héroïne à vingt ans. »

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C’était un peu avant l’été. Éthel s’en souviendra, il faisait une langueur anormale, la ville semblait endormie. Alexandre, remis à peu près de son accident, avait repris ses sorties. Chapeauté, impeccable dans son costume gris trois pièces du temps de sa splendeur, sa barbe taillée aux ciseaux et ses cheveux noirs bien peignés, il allait aux affaires.

« Mais qu’est-ce qu’il espère ? Trouver un nouveau filon ? », avait commenté Éthel. « Ne parle pas de cette façon, avait répondu Justine. Ton père est très affecté d’avoir à tout vendre. » Éthel n’avait pas accepté la résignation de Justine. « Il s’agit bien d’être affecté ! Qu’est-ce qu’il va faire ? Avec qui ? Et nous, qu’est-ce qu’on va devenir ? Où est-ce qu’on va aller ? De quoi va-t-on vivre ? » C’était malgré elle. Les questions remontaient dans sa gorge, elle les sentait se bousculer, là, au fond de sa poitrine, comme si elles pressaient sur son diaphragme. L’indolence de Paris avant juillet lui pesait, lui donnait la nausée. Ce soleil pâle comme un cachet d’aspirine, ce fleuve sale. Le ciel qui serrait les tempes comme un couvercle. Elle avait écrit dans son carnet ce vers grimaçant : « Jeter ce cachet dans la Seine, pour guérir Paris de sa migraine. »

Xénia, où était-elle ? Depuis des mois, elle n’avait plus donné de nouvelles. Le mariage avec Daniel n’avait pas eu lieu. Elle en était sûre. La famille du futur hésitait. Leur fils était un prix précieux qu’il fallait mériter. Et lui en avait-il envie ? Est-ce qu’il savait à quel point Xénia était unique, magnifique, et que jamais il ne mériterait ne fût-ce que d’attacher ses chaussures, ne fût-ce que d’attacher son regard gris-bleu.

La tête lui tournait. Elle a pris Justine par la main. « Allons ! Il faut y aller ! On ne peut pas rester les bras ballants ! Il faut se battre ! »

Elle se sentait le brave petit soldat qui monte au combat, sans expérience, avec toute l’ardeur et la confiance de la jeunesse. Justine rechignait. Elle a fini par céder, elle a mis son chapeau à voilette (celui qu’elle portait pour l’enterrement de Monsieur Soliman) et elle a donné le bras à sa fille, mais c’était Éthel qui l’entraînait. Elles sont entrées dans le cabinet de Me Bondy. En revoyant le décor où elle avait perdu son héritage, Éthel a ressenti une rage froide. Le notaire n’était-il pas responsable, après tout, autant qu’Alexandre ?

« Madame, mademoiselle ? » Il était pareil à lui-même, l’air ennuyé, son teint de papier mâché. Comment Alexandre pouvait-il avoir confiance dans un tel homme ? Éthel n’a pas laissé à sa mère le temps de dire un mot. « Vous connaissez notre situation, n’est-ce pas ? Vous savez que mon père a tout perdu. Il reste l’appartement dans lequel nous vivons, le bout de terrain, et l’atelier que nous louons à Mlle Decoux. Qu’est-ce que vous proposez ? »

Bondy faisait semblant de consulter des dossiers. Il lissait sa moustache teinte en roux, où se mêlaient les poils gris sortant de ses narines. « Vous dites que votre papa a tout perdu. Ce n’est pas ce qu’il m’a dit, à moi. Il est — nous sommes — en train de négocier avec un acquéreur important, et je puis vous garantir…

— Non, non, ce n’est pas ce que je vous demande. » Éthel avait le cœur qui battait trop vite, mais elle s’efforçait de parler calmement. « Ce n’est pas de promesses qu’il a besoin. Il lui faut la certitude qu’une fois tout réglé, tout payé, il pourra continuer à habiter l’appartement de la rue du Cotentin. »

Me Bondy était pris de court. Il n’avait probablement jamais eu dans sa carrière affaire avec une jeune fille âgée de dix-neuf ans qui venait lui réclamer des comptes. Sans doute se sentait-il protégé par la loi, il n’avait commis aucune malversation. L’acte qui faisait d’Alexandre le détenteur des droits sur l’héritage de Monsieur Soliman, tout était légal. Mais la réalité était là : il la lisait clairement sur le visage effondré de Justine, dans le regard dur et brillant d’Éthel. La ruine, l’angoisse du futur, la maladie d’Alexandre, l’incapacité où étaient ces deux femmes de s’en sortir. Il a refermé les dossiers. Peut-être qu’il était attendri, ou qu’il ressentait de la honte.

« Mademoiselle Brun, je vais voir ce que je peux faire. J’espère qu’il n’est pas trop tard pour négocier avec la banque. Mais n’attendez pas trop de moi, je puis donner des conseils à votre papa, mais je ne peux pas défaire ce qu’il a fait.

— Même si son état de santé ne lui a pas permis de prendre la bonne décision ? »

Me Bondy avait compris avant Justine.

« Oui, oui, on pourrait toujours demander la mise sous curatelle de votre papa, compte tenu de ce qui lui est arrivé. Il faudrait un certificat du médecin qui…

— Jamais ! » Justine a contenu son cri. « Il n’est pas question de, jamais je n’accepterai pour lui une telle indignité. »

Elles sont reparties. Cette fois, Éthel ne donnait plus le bras à sa mère. Elle marchait vite en faisant cogner ses talons sur le trottoir. Le boulevard du Montparnasse était encombré, bruyant. Les terrasses des cafés étaient déjà envahies, des hommes, des femmes qui buvaient des bocks, les voitures et les camionnettes s’embouteillant au carrefour de l’avenue du Maine. Éthel continuait à marcher sans ralentir, elle entendait derrière elle le petit bruit un peu pitoyable de sa mère qui trottinait, son souffle court, la voilette devait se coller à son nez à chaque inspiration. Tous ces gens, pensait-elle. Tous ces gens indifférents, chacun dans sa bulle, dans sa coquille. Ces gens qui flânaient, d’autres qui faisaient semblant d’être occupés. Les gens graves, les grisettes, les artistes. La comédie du boulevard. Personne qui se souciât véritablement de personne. Une ville où on pouvait se perdre, où, si l’on perdait de vue quelqu’une, si on la semait à la course comme à la gymnastique du lycée, il y avait toutes les chances pour qu’on ne la retrouvât jamais !

Elle a pensé soudain à Xénia. Son image est revenue d’un seul coup, comme si de l’avoir écartée depuis des mois l’avait rendue encore plus nécessaire. Xénia, quelque part dans Paris, vivant sa vie, de son côté. La famille Chavirov avait déménagé, sans laisser d’adresse. Éthel avait bien pensé à l’atelier de la rue Geoffroy-Marie, mais elle n’avait pas eu le courage d’y retourner. Elle aurait pu ruser, s’embusquer dans un café, guetter le passage de Xénia ou de sa sœur Marina, mais la seule idée du regard goguenard d’un cafetier ou des œillades des messieurs qui cherchaient les filles dans ce mauvais quartier lui avait fait horreur. Xénia était son amie. Sa seule amie. Celle qui était le plus proche, qui l’avait influencée dans sa vie. Et, en marchant sur ce trottoir encombré, en cognant fort des talons sur le ciment, en allant de l’avant, c’était Xénia qu’elle avait imitée. Xénia qui décidait. Qui se battait pour vivre. Xénia qui pouvait rire de tout, se moquer de tous, Xénia venue de loin, qui avait décidé de réussir sa vie.

C’était un flot de bonheur, une ivresse. Éthel a ralenti le pas, elle s’est même arrêtée un instant au bord du trottoir, comme si elle cherchait sa route. Justine est arrivée, un peu essoufflée, elle s’est accrochée à son bras. « Tu marches trop vite pour moi. » Elle était légère, pas plus lourde qu’un petit oiseau.

Éthel a compris. Elle a regardé sa mère. Elle s’adressait à Xénia, de l’autre côté de la ville. On ne choisit pas son histoire. Elle t’est donnée sans que tu la cherches, et tu ne dois pas, tu ne peux pas la refuser.

Bien entendu tout cela avait été inutile. Comme si la destinée avait été nouée, le fil invisible qui attachait Justine et Alexandre les tirait vers le malheur, vers le fond. Me Bondy avait téléphoné, le lendemain. Il avait réussi à suspendre la vente aux enchères, un acheteur proposait de reprendre la dette, sur la seule garantie du terrain et de l’immeuble inachevé. Alexandre gardait la jouissance de l’appartement de la rue du Cotentin, de l’atelier d’artiste, c’était comme si on avait effacé un mauvais rêve. Justine attendait le retour de son mari, elle avait mis une jolie robe, elle s’était coiffée, poudrée, parfumée. Elle avait préparé du thé, des gâteaux de maïs, Éthel l’avait aidée à mettre la table. Ça faisait un peu exagéré, avait pensé Éthel, le retour d’Ulysse à Ithaque. Un peu mascarade malgré tout. Vers le soir, Alexandre est revenu fourbu. La chaleur, dehors, l’avait exténué, il s’est laissé tomber dans le fauteuil. Il n’a même pas regardé la théière. « C’est fait, a-t-il dit. Tout est dit. Il n’y a plus de dettes. Nous allons commencer une nouvelle vie. » Éthel regardait sa mère. Justine n’avait pas encore compris. Elle posait des questions, sa voix montait crescendo. Cela faisait comédie, à présent. Un opéra, une opérette plutôt. Éthel imaginait la musique, quelque chose de léger, un peu cassé, une ritournelle. « Pourquoi ? Pourquoi ? » Et la voix grave d’Alexandre, son accent mauricien traînard, les « qu’est-ce qu’on pouvait faire ? ». Comme il disait au cours des conversations de salon : « Kipé fer ? » Avec la chaleur, son visage tournait au bistre. Depuis l’accident, il ne teignait plus sa barbe, les filets blancs apparaissaient de chaque côté, au bas des joues.

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