Daniel Pennac - Chagrin d'école

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Chagrin d'école: краткое содержание, описание и аннотация

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Chagrin d’école
Comme un roman

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Un dernier mot pour te rassurer pleinement : va à la poste, ouvre la porte de ta mairie, prends le métro, entre dans un musée ou dans un bureau de la Sécurité sociale, et tu verras, tu verras, ce seront la mère, le père, le frère ou la sœur aînés de ces jeunes gens au langage déplorable qui t’accueilleront, assis derrière le guichet. Ou fais comme moi, tombe malade, réveille-toi à l’hôpital, et tu reconnaîtras l’accent du jeune infirmier qui poussera ton chariot vers le bloc opératoire :

— Pas d’panique, mon frère, ils vont t’refaire à neuf !

6

Le comble étant que, dans les classes de banlieue où les professeurs m’invitent, une des toutes premières questions que me posent les élèves regarde la crudité de mon langage. Pourquoi tant de gros mots dans mes romans ? (Eh oui, mon ami, tes adolescents si terrifiants manifestent la même préoccupation que toi : pourquoi tant de violence langagière ?) Certes, ils me posent cette question pour complaire à leur professeur, un peu, pour chercher à m’embarrasser moi-même, parfois, mais aussi parce que le mot, à leurs yeux, ne devient vraiment gros que lorsqu’il est écrit. On s’en « branle » à l’oral, on s’en « bat les couilles » à longueur de récré, on « nique ta mère » à tire-larigot, mais trouver le mot « couille » ou les verbes « branler » et « niquer » noir sur blanc, dans un livre, quand leur place ordinaire est sur les murs des toilettes, alors ça… !

C’est d’ailleurs à ce stade de nos échanges que, le plus souvent, s’engage une conversation sur la langue française entre ces élèves et moi : à partir de l’argot de mes romans, à partir de l’argot comme langage de substitution, de dissimulation, et en tout cas de connivence, à propos de son emploi, dans la violence bien sûr, mais dans la tendresse aussi (plus encore que les autres, les mots d’argot sont sensibles au ton, ils n’ont pas leur pareil pour passer de l’insulte à la caresse), à propos de ses origines très anciennes dans une France qui travaille depuis des siècles à son unité linguistique, à propos de sa diversité : argot de bandits, argot de quartiers, de métiers, de milieux, de communautés, à propos de son assimilation progressive par la langue dominante et du rôle que, de Villon à nos jours, la littérature joue dans cette lente digestion (d’où la présence de gros mots dans mes propres romans)… Et, de fil en aiguille, nous voilà parlant de l’histoire des mots :

— Car les mots ont une histoire, ils ne tombent pas de notre bouche comme un œuf du jour ! Les mots évoluent, leurs existences sont aussi imprévisibles que les nôtres. Certains finissent par dire le contraire de ce qu’ils disaient à leur début : l’adjectif « énervé », par exemple, pouvait désigner une petite grenouille dont on avait ôté les nerfs, une pauvre petite bête d’expérience réduite à l’état de flaque, mais certainement pas Mouloud, ici présent, que son voisin est en train d’« énerver », et qui devient franchement « vénère » ! Les mots dérivent même jusqu’à l’argot. Prenez la pauvre « vache », si paisible dans ses prairies, et qui, au fil du temps, a désigné tant de gens qu’on n’aimait pas : la prostituée au XVII e, le policier à la fin du XIX e, ou tous les méchants d’aujourd’hui qui nous font des « vacheries » ! La vache si modeste, qui a engendré, va savoir pourquoi, un « vachement » on ne peut plus superlatif.

Ce fut au cours d’une de ces conversations qu’un professeur demanda à ses élèves :

— Quelqu’un peut-il me donner un exemple de mot « normal » devenu un mot de votre argot à vous ?

— Allez-y ! Un mot que vous prononcez cent fois par jour quand vous vous moquez de quelqu’un.

— « Bouffon », m’dame ? C’est un bouffon ?

— Oui, « bouffon », par exemple.

« Bouffon », je l’ai entendu pour la première fois au début des années quatre-vingt-dix, celui-là, en entrant dans ma classe, un matin où deux petits coqs, dressés sur leurs ergots, s’apprêtaient à se taper dessus.

— Il m’a traité de bouffon, m’sieur !

Le mot, remonté du XIII esiècle italien, où il désignait les amuseurs de cour, explosa devant moi ce matin-là comme synonyme de « pauvre mec ». Quinze nouvelles années ayant passé, l’injure désigne aujourd’hui pour les élèves de cette classe, comme pour ceux de L’esquive et plus généralement pour les jeunes gens de leur milieu et de leur génération, tous ceux qui ne partagent pas leurs codes, autrement dit ceux que la jeunesse de ma vieille maman, qui pourtant en était, appelait déjà les bourgeois (« Il a vraiment l’esprit trop bourgeois »…).

« Bourgeois »… Voilà un mot qui en a vu de toutes les couleurs ! Du dédain de l’aristocrate à la colère de l’ouvrier en passant par la fureur de la jeunesse romantique, l’anathème des surréalistes, la condamnation universelle des marxistes-léninistes et le mépris des artistes en tout genre, l’histoire l’aura à ce point lardé de connotations péjoratives que pas un enfant de la bourgeoisie ne se qualifie ouvertement de bourgeois sans un sentiment confus de honte ontologique.

Peur du pauvre chez le bourgeois, mépris du bourgeois chez le pauvre… Hier, le blouson noir de mon adolescence faisait déjà peur au bourgeois, puis vint le loubard de ma jeunesse pour inquiéter les bourges ; aujourd’hui ce sont les jeunes des cités qui effrayent le bouffon. Pourtant, pas plus que le bourgeois d’hier n’avait l’occasion de rencontrer le blouson noir sur son chemin, le bouffon d’aujourd’hui ne risque de croiser sur le sien un de ces adolescents voués à de lointaines cages d’escaliers.

À combien de gosses des cités notre meneur de jeu effrayé par les adolescents de L’esquive a-t-il eu affaire, personnellement ? Peut-il seulement les compter sur les doigts d’une main ? Aucune importance, il lui suffit de les entendre parler dans un film, d’écouter trente secondes de leur musique à la radio, de voir brûler des voitures lors d’une flambée sociale en banlieue, pour qu’il soit saisi d’une terreur générique, et les désigne comme l’armée des cancres qui aura raison de notre civilisation.

V

MAXIMILIEN

ou

le coupable idéal

Les profs, ils nous prennent la tête, m’sieur !

1

Belleville, soir d’hiver, nuit tombée, rue Julien-Lacroix, je rentre chez moi, pipe au bec, sac à provisions, rêvasserie, quand un type adossé à un mur m’arrête en laissant tomber son bras comme une barrière de parking. Petit coup au cœur.

— Passe-moi du feu !

Comme ça, sans plus d’égard pour la quarantaine d’années qui nous sépare. C’est un grand gaillard de dix-huit ou vingt ans, noir, costaud, qui joue les faux calmes, sûr de ses muscles et de son bon désir : il exige du feu, on lui en donne, un point c’est tout.

Je pose mon sac à provisions, sors mon briquet, tends la flamme vers sa cigarette. Il baisse la tête, creuse les joues en aspirant, et me regarde pour la première fois par-dessus le bout rougeoyant. Ici, changement d’attitude. Ses yeux s’écarquillent, il laisse retomber son bras, ôte la cigarette de sa bouche, et balbutie :

— Oh ! Pardon, m’sieur… Une hésitation.

— Vous n’êtes pas… ? Vous écrivez des… Vous êtes écrivain, non ?

Je pourrais me dire avec un friselis de plaisir : Allons bon, un lecteur, mais un vieil instinct me souffle autre chose : Tiens, un élève, son prof de français doit le faire plancher sur un Malaussène ; dans une seconde il va me demander de lui donner un coup de main.

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