Daniel Pennac - Chagrin d'école

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Chagrin d'école: краткое содержание, описание и аннотация

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Chagrin d’école
Comme un roman

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Supposons que je me trompe dans mes calculs, qu’il faille multiplier par deux ou par trois mes 0,4 %, le chiffre demeure dérisoire et la peur entretenue contre cette jeunesse parfaitement honteuse pour les adultes que nous sommes.

Adolescent issu d’une cité ou d’une quelconque barre des quartiers périphériques, Black, Beur ou Gaulois relégué, grand amateur de marques et de téléphones portables, électron libre mais qui se déplace en groupe, encapuchonné jusqu’au menton, taggueur de murs et de RER, amateur d’une musique hachée aux paroles vengeresses, parlant fort et réputé taper dru, présumé casseur, dealer, incendiaire ou graine d’extrémiste religieux, Maximilien est la figure contemporaine des faubourgs d’antan ; et comme naguère le bourgeois aimait à s’encanailler rue de Lappe ou dans les guinguettes du bord de Marne hantées par les apaches, le bouffon d’aujourd’hui aime à côtoyer Maximilien, mais en image seulement, image qu’il cuisine à toutes les sauces du cinéma, de la littérature, de la publicité et de l’information. Maximilien est à la fois l’image de ce qui fait peur, et celle de ce qui fait vendre, le héros des films les plus violents et le vecteur des marques les plus portées. Si, physiquement (l’urbanisme, le coût de l’immobilier et la police y veillent), Maximilien est confiné aux marges des grandes villes, son image, elle, est diffusée jusqu’au cœur le plus cossu de la cité, et c’est avec horreur que le bouffon voit ses propres enfants s’habiller comme Maximilien, adopter le sabir de Maximilien, et même, comble de l’épouvante, accorder sa voix aux sons émis par la voix de Maximilien ! De là à hurler à la mort de la langue française et à la fin prochaine de la civilisation, il n’y a qu’un pas, vite franchi, avec une peur d’autant plus délicieuse qu’au fond de soi c’est Maximilien que l’on sait sacrifié.

4

À y regarder de près, Maximilien est l’envers de la médaille du jeunisme. Notre époque s’est fait un devoir de jeunesse : il faut être jeune, penser jeune, consommer jeune, vieillir jeune, la mode est jeune, le foot est jeune, les radios sont jeunes, les magazines sont jeunes, la pub est jeune, la télé est pleine de jeunes, internet est jeune, les people sont jeunes, les derniers baby boomers vivants ont su rester jeunes, nos hommes politiques eux-mêmes ont fini par rajeunir. Vive la jeunesse ! Gloire à la jeunesse ! Il faut être jeune !

À condition de n’être pas Maximilien.

5

— Les profs, ils nous prennent la tête, m’sieur !

— Tu te trompes. Ta tête est déjà prise. Les professeurs essayent de te la rendre.

Cette conversation, je l’ai eue dans un lycée technique de la région lyonnaise. Pour atteindre l’établissement il m’avait fallu traverser un no man’s land d’entrepôts en tous genres où je n’avais rencontré âme qui vive. Dix minutes de marche à pied entre de hauts murs aveugles, des silos de béton à toit de fibrociment, c’était la jolie promenade du matin que la vie offrait aux élèves logés dans les barres alentour.

De quoi avons-nous parlé, ce jour-là ? De la lecture bien sûr, de l’écriture aussi, de la façon dont les histoires viennent à l’esprit des romanciers, de ce que le mot « style » veut dire quand on n’en fait pas un synonyme de « comme », de la notion de personnage et de la notion de personne, de bovarysme par conséquent, du danger d’y céder trop longtemps une fois le roman refermé (ou le film vu), du réel et de l’imaginaire, de l’un qu’on fait passer pour l’autre dans les émissions de téléréalité, toutes choses qui passionnent les élèves de tout bord dès qu’ils les envisagent avec sérieux… Et, plus généralement, nous avons parlé de leur rapport à la culture. Il va sans dire qu’ils voyaient un écrivain pour la première fois, qu’aucun d’entre eux n’avait jamais assisté à une pièce de théâtre, et que très peu étaient allés jusqu’à Lyon. Comme je leur en demandais la raison, la réponse ne se fit pas attendre :

— Eh ! On va pas aller là-bas se faire traiter de caillera par tous ces bouffons !

Le monde était en ordre, en somme : la ville avait peur d’eux et ils craignaient le jugement de la ville… Comme beaucoup de jeunes gens de cette génération, garçons et filles, ils étaient pour la plupart si grands qu’on les aurait crus poussés entre les murs des entrepôts à la recherche du soleil. Certains étaient à la mode — à leur mode croyaient-ils, mais uniformément planétaire — et tous forçaient cet accent répandu par le rap qu’affectent même les jeunes bouffons les mieux branchés des centres-villes où ils n’osaient se rendre.

Nous en vînmes à parler de leurs études.

C’est à ce stade de la conversation qu’intervint le Maximilien de service. (Oui, j’ai décidé de donner à tous les cancres de ce livre, cancres de banlieue ou cancres de quartiers chics, ce beau prénom superlatif.)

— Les profs, ils nous prennent la tête !

C’était visiblement le cancre de la classe. (Il y aurait long à dire sur cet adverbe « visiblement », mais le fait est que les cancres se remarquent très vite dans une classe. Dans toutes celles où l’on m’invite, établissements de luxe, lycées techniques ou collèges de quelconques cités, les Maximilien sont reconnaissables à l’attention crispée ou au regard exagérément bienveillant que leur professeur porte sur eux quand ils prennent la parole, au sourire anticipé de leurs camarades, et à un je-ne-sais-quoi de décalé dans leur voix, un ton d’excuse ou une véhémence un peu vacillante. Et quand ils se taisent — souvent, Maximilien se tait —, je les reconnais à leur silence inquiet ou hostile, si différent du silence attentif de l’élève qui engrange. Le cancre oscille perpétuellement entre l’excuse d’être et le désir d’exister malgré tout, de trouver sa place, voire de l’imposer, fût-ce par la violence, qui est son antidépresseur.)

— Comment ça, les profs vous prennent la tête ?

— Ils prennent la tête, c’est tout ! Avec leurs trucs qui servent à rien !

— Par exemple, quel truc qui ne sert à rien ?

— Tout, quoi ! Les… matières ! C’est pas la vie !

— Comment t’appelles-tu ?

— Maximilien.

— Eh bien tu te trompes, Maximilien, les profs ne te prennent pas la tête, ils essayent de te la rendre. Parce que ta tête, elle est déjà prise.

— Elle est prise, ma tête ?

— Qu’est-ce que tu portes à tes pieds ?

— À mes pieds ? J’ai mes N, m’sieur ! (Ici le nom de la marque.)

— Tes quoi ?

— Mes N, j’ai mes N !

— Et qu’est-ce que c’est, tes N ?

— Comment ça, qu’est-ce que c’est ? C’est mes N !

— Comme objet, je veux dire, qu’est-ce que c’est comme objet ?

— C’est mes N !

Et, comme il ne s’agissait pas d’humilier Maximilien, c’est aux autres que j’ai, une nouvelle fois, posé la question :

— Qu’est-ce que Maximilien porte à ses pieds ?

Il y eut des échanges de regards, un silence embarrassé ; nous venions de passer une bonne heure ensemble, nous avions discuté, réfléchi, plaisanté, beaucoup ri, ils auraient bien voulu m’aider, mais il fallut en convenir, Maximilien avait raison :

— C’est ses N, m’sieur.

— D’accord, j’ai bien vu, oui, ce sont des N, mais comme objet, qu’est-ce que c’est comme objet ?

Silence.

Puis, une fille, soudain :

— Ah ! Oui, comme objet ! Ben, c’est des baskets !

— C’est ça. Et un nom plus général que « baskets » pour désigner ce genre d’objets, tu aurais ?

— Des… chaussures ?

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