Jean-Marie Le Clézio - Étoile errante

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Pendant l'été 1943, dans un petit village de l'arrière-pays niçois transformé en ghetto par les occupants italiens, Esther découvre ce que peut signifier être juif en temps de guerre : adolescente jusqu'alors sereine, elle va connaître la peur, l'humiliation, la fuite à travers les montagnes, la mort de son père.
Comme dans 
, avec lequel il forme un diptyque, on retrouve dans 
le récit d'un voyage vers la conscience de soi. Tant que le mal existera, tant que des enfants continueront d'être captifs de la guerre, tant que l'idée de la nécessité de la violence ne sera pas rejetée, Esther et Nejma resteront des étoiles errantes.

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Peu à peu, même les enfants avaient cessé de courir et de crier et de se battre aux abords du camp. Maintenant, ils restaient autour des huttes, assis à l’ombre dans la poussière, faméliques et semblables à des chiens, se déplaçant avec le mouvement du soleil. Sauf quand approchait l’heure de la distribution de nourriture, quand le soleil était au zénith.

Je les voyais alors, et c’était un miroir de ma propre faiblesse, de ma propre déchéance. Les traits de l’enfance, chez beaucoup d’entre eux, surtout parmi les pauvres, les orphelins de père et de mère, ou ceux qui avaient fui les villages de la côte sous les bombes, sans argent, sans provisions, semblaient déjà flétris par une vieillesse incompréhensible. Petites filles maigres aux épaules voûtées, leur corps flottant dans des robes trop grandes pour elles, petits garçons à demi nus, aux jambes arquées, aux genoux trop gros, la peau d’un gris sombre, couleur de cendre, le cuir chevelu mangé par la teigne, les yeux envahis de moucherons. C’étaient les visages surtout que je regardais, que je fixais parce que je ne voulais pas les voir : l’expression que je ne pouvais pas comprendre, leur regard vide, lointain, étranger, où brillait la lumière de la fièvre. Quand je marchais dans les rues de Nour Chams, sans but, au hasard, longeant les rangs de maisons, les murs de carton goudronné, de vieilles planches, c’étaient ces visages d’enfants que j’apercevais partout, ces regards vides et lointains qui me hantaient. Et comme dans un miroir je voyais mon propre visage, non celui d’une jeune fille de seize ans, beauté voilée que les yeux impatients des jeunes gens interrogent, mais visage d’une vieille femme ridée, flétrie, noircie par le malheur, desséchée par l’approche de la mort.

Partout où j’allais dans le camp, c’était ce visage que je voyais, mon visage, et mes mains amaigries où saillaient les veines, et la silhouette de mon corps fragile et fuyant comme une ombre. Les autres détournaient les yeux, ou bien, au contraire, me fixaient sans ciller, dans l’ombre de leur tarh, comme du fond d’une grotte, sans rien dire, mais avec une sorte de folie muette.

Maintenant, même aux puits, les femmes avaient cessé de parler. Elles ne se plaignaient plus, elles ne prononçaient plus les noms des villes et des gens disparus. Avec la sécheresse de l’été, l’eau avait encore baissé au fond des puits, et le seau basculé au bout de la corde raclait un fond boueux, presque noir.

L’eau était devenue si rare qu’on ne pouvait plus se laver, ni laver les habits. Les vêtements des enfants étaient souillés d’excréments, de nourriture, de terre, et les robes des femmes étaient devenues rigides de crasse, pareilles à de l’écorce.

Les vieilles femmes, le visage noir, les cheveux emmêlés, sentaient une odeur de charogne qui me soulevait le cœur. Nous partagions à ce moment-là notre maison avec une vieille paysanne du littoral (de Zarqa). L’odeur de la vieille femme m’était devenue si insupportable que j’avais pris l’habitude de dormir dehors, dans la poussière, enroulée dans une vieille toile.

Je ne me sentais bien que lorsque je pouvais m’éloigner du camp. Je grimpais, tôt le matin, jusqu’en haut de la colline de pierres, jusqu’à la tombe du vieux Nas. Un jour, sur le chemin, j’ai vu pour la première fois une bête mourir de soif. C’était la chienne blanche de Saïd, le fils cadet de Nas, que je connaissais bien parce que le vieil homme s’était pris d’affection pour elle, vers la fin de sa vie, et qu’elle restait souvent près de lui, couchée, les pattes de devant bien allongées sur le sol, et la tête redressée. Elle n’avait pas de nom, il me semble, mais elle suivait le vieil homme partout où il allait. Quand il est mort, la chienne l’a suivi jusqu’à sa tombe, en haut de la colline, et elle n’est redescendue que le lendemain. Et depuis, chaque matin, elle montait en haut de la colline, et redescendait à la nuit tombante. Mais l’eau était devenue précieuse, et quand je l’ai rencontrée, un matin, elle était en train de mourir. Elle haletait si fort que je l’ai entendue depuis le bas du chemin. Entre les buissons d’épines, dans la lumière du soleil levant, elle était maigre, flasque, elle ressemblait à une tache. Je me suis approchée d’elle, jusqu’à la toucher, mais elle ne m’a pas reconnue. Elle était déjà du côté de la mort, les yeux vitreux, le corps secoué de frissons, sa langue noire et enflée sortie de sa bouche. Je suis restée à côté d’elle jusqu’à la fin, assise par terre, pendant que la lumière du soleil devenait éblouissante. Je pensais à ce que disait le vieux Nas, à cette interrogation qu’il répétait sans cesse, comme un refrain : « Le soleil ne brille-t-il pas pour tous ? » Alors le soleil était haut dans le ciel, il brûlait la terre sans espoir, il brûlait le visage des enfants, il brillait avec force sur le pelage de la chienne en train de mourir. Jamais je n’avais senti cela auparavant, cette sorte de malédiction, cette force impitoyable de la lumière sur une terre où la vie se brise et s’échappe, où chaque journée qui commence enlève quelque chose à la journée qui l’a précédée, où la souffrance est immobile, aveugle, impossible à comprendre comme les marmonnements de la vieille Leyla dans sa grotte.

Pour cela Saadi Abou Talib, le Baddawi, celui qui fut plus tard mon mari, et qui ne savait ni lire ni écrire, ayant appris que j’avais été à l’école à al-Jazzar, m’avait demandé d’écrire tout ce que nous endurons ici, au camp de Nour Chams, afin que cela se sache, et que nul n’ose l’oublier. Et moi, je l’ai écouté, et pour cela j’ai écrit la vie, jour après jour, sur les cahiers d’école que j’avais apportés avec moi. C’est Ahmad, mon père, avant de partir pour le nord d’où il n’est jamais revenu, qui a eu la volonté de me faire apprendre à lire et à écrire comme si j’étais un garçon, pour que je puisse apprendre les sourates du Livre, et calculer et résoudre les problèmes de géométrie comme n’importe quel garçon sait le faire. Avait-il pensé qu’un jour je me servirais de l’écriture pour remplir ces cahiers de ma mémoire ? Il me semble qu’il l’aurait approuvé, et c’est pourquoi j’ai écouté ce que me disait Saadi, le Baddawi.

Et pour elle aussi j’ai écrit, pour celle qui a marqué son nom en haut du cahier, sur la route de la source de Latrun, Esther Grève, dans l’espoir qu’elle lira un jour cela, et qu’elle viendra jusqu’à moi. Elle est venue, ce jour-là, et j’ai lu ma destinée sur son visage. Un bref instant, nous étions réunies, comme si nous devions nous rencontrer depuis toujours. Quand j’aurai fini d’écrire ces cahiers, je les donnerai à un soldat des Nations unies, pour qu’il les lui remette, là où elle se trouvera. Pour cela, j’ai la force d’écrire, malgré la solitude et la folie qui m’entourent.

J’ai parlé de la mort de la chienne blanche, de sa souffrance interrompue, tandis que le soleil montait impitoyablement dans le ciel au-dessus de la colline de pierres, parce que c’était la première fois que je voyais la mort. J’avais déjà vu des hommes et des femmes morts, couchés sur leurs nattes, dans les chambres très propres, très blanches, autrefois à Akka, les morts qui semblaient dormir dans le drap très blanc et très propre qu’on allait coudre sur eux, avec leurs yeux fermés, marqués d’une tache sombre, leurs lèvres serrées, maintenues par un léger fil qui entourait les mâchoires et se perdait dans les cheveux. Ainsi, ma tante Raïssa, et mon grand-père Mohamad, froids, immobiles, un peu gauches dans la mort comme s’ils n’étaient pas encore habitués. Puis les cercueils qu’on mettait dans les tombeaux, la tête tournée vers le sud, et le travail des fossoyeurs, les cris stridents des pleureuses professionnelles. Le vieux Nas lui-même était parti sans mystère, en premier, comme on souffle une lampe, et je n’avais vu de lui que cette forme enveloppée dans le vieux drap trop court, et ses deux pieds nus qui s’inclinaient vers le fond de la terre.

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