Tatiana Rosnay - Moka

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Churchill m'avait donné une idée. J'ai pris mon vieux Discman, retrouvé le CD de Supertramp. À l'hôpital, j'ai demandé aux infirmières si je pouvais faire écouter de la musique à mon fils. Je le pouvais, m'a-t-on dit. Avec précaution, j'ai installé des écouteurs sur ses oreilles, réglé le volume sonore. Fool's Overture, sa préférée. C'était étrange, son goût pour Supertramp. Ça nous avait toujours amusés, Andrew et moi. On ne pensait pas qu'un adolescent de son âge y succombe à ce point. Tous ses copains écoutaient du R'n'B.

History recalls how great the fall can be

When everybody's sleeping, the boats put out to sea

Borne on the wings of time

It seemed the answers were so easy to find…

Le visage de Malcolm restait immobile, comme du marbre. Je me disais que ce n'était pas grave, qu'il devait forcément entendre quelque chose, dans les limbes noires de ce coma qui s'éternisait, ce no man's land opaque, insaisissable, inaccessible, auquel je me heurtais jour après jour. Drôles de paroles. Je ne les avais jamais vraiment écoutées. Par déformation professionnelle, parce que je ne pouvais pas faire autrement, je me suis mise à les traduire.

L'histoire retiendra comme la chute peut être immense

Pendant que tout le monde dort, les bateaux prennent la mer

Portés par les ailes du temps

Les réponses semblaient si faciles à trouver…

J'ai remis la chanson plusieurs fois. Toujours le petit visage pointu, sans mouvement, sans réaction. Mais à quoi m'attendais-je donc ? Qu'il sourie, qu'il batte la mesure avec ses doigts, qu'il me dise « Merci, maman » ? J'ai laissé le casque sur ses oreilles, et je me suis tournée vers ma traduction, ordinateur portable posé sur les genoux. Successions de mots sur l'écran, des mots que je ne lisais pas. Laurent. Le flic.

Toujours pas de nouvelles de lui. Où en était-il avec les Secrey ? Pourquoi n'avait-il pas téléphoné ? Pourquoi ce silence ? Pourquoi était-ce si long, si compliqué ? Pourquoi tout cela prenait-il tant de temps ? Que faisait le commissariat d'Orange ? J'aurais déjà pu faire un aller-retour à Orange, j'aurais pu frapper à la porte des Secrey de bon matin, les tirer de leur sommeil, leur dire ce qui les attendait. Oui, j'aurais pu le faire, le tout en quelques heures. Que foutaient ces flics ? Que foutaient-ils, bon sang ? Je m'entendais parler comme mon père. J'utilisais les mêmes mots que lui.

Sur la table de nuit de Malcolm, son portefeuille Quiksilver. Il l'avait dans sa poche, le jour de l'accident. À la rentrée scolaire, j'y avais glissé une de mes cartes de visite, avec ces mots dessus : Personne à prévenir en cas d'accident. Et j'avais mis entre parenthèses : Maman. Quand on écrit des mots pareils, on ne pense jamais à l'accident. On écrit à toute vitesse, mal à l'aise. Surtout ne pas penser à un éventuel accident. Surtout pas. Mais c'était grâce à cette petite carte crème, que j'avais toujours trouvée d'une grande élégance, que j'avais choisie avec tant de soin, que la police avait pu me joindre si vite, ce jour-là.

La chanson passait en boucle. Je l'entendais à peine, atténuée, à partir des oreillettes de Malcolm. Mais je la connaissais par cœur. Big Ben qui sonne, solennel. Une rumeur de foule qui enfle. La voix de Churchill, vibrante d'autorité. « We shall go on to the end. We shall fight on the seas and the océans. » Nous tiendrons jusqu'au bout. Nous nous battrons sur les mers et sur les océans. « We shall defend our island, whatever the cost maybe. We shall never surrender. » Nous défendrons notre île, à n'importe quel prix. Nous ne nous rendrons jamais.

J'ai regardé Malcolm.

J'ai hurlé. Il avait les yeux grands ouverts, écarquillés. Bleus, si bleus. J'avais oublié à quel point ses yeux étaient bleus.

Mon hurlement a fait venir une infirmière. J'ai failli lâcher mon ordinateur qui glissait de mes genoux. Mon cœur battait à tout rompre. Mes mains tremblaient, mes jambes aussi. Ses yeux, si bleus, si grands, vides de toute expression. J'ai crié : Malcolm, c'est maman, tu m'entends, tu peux m'entendre, mon bébé ? Je n'osais pas le toucher. Il me faisait peur avec son visage blanc, ce regard exorbité.

L'infirmière m'a calmée. Elle m'a dit que c'était normal, que cela arrivait. Cela ne voulait pas dire que Malcolm était sorti de son coma. Mais il avait réagi à quelque chose. Churchill, j'ai dit à voix basse, il a réagi à Churchill. L'infirmière souriait, gênée. Elle ne savait pas quoi dire. Elle était toute jeune, elle devait avoir vingt ans. Je lui ai montré les oreillettes, le CD de Supertramp. Je lui ai expliqué le moment préféré de Malcolm sur la chanson, quand Churchill dit qu'il ne se rendra jamais. Elle hochait la tête, gentille. Elle devait avoir pitié de moi, de mon visage fatigué, de mes mains tremblantes. Elle n'avait sans doute jamais entendu parler de Supertramp, et elle ignorait probablement qui était Churchill et pourquoi il ne voulait pas se rendre.

Malcolm a fermé les yeux, doucement. J'étais à la fois apaisée et triste. J'aurais voulu voir ses iris bleus, encore et encore. Mais ce regard fixe, terrible, m'était insoutenable. Je me suis assise près de lui, j'ai pris sa petite main molle, et une fois de plus, j'ai sangloté en silence.

Tout me touchait. Tout me faisait pleurer. Comme si l'accident de mon fils avait ravivé une sensibilité déjà à fleur de peau. Une SDF qui raccommodait ses fripes sur le trottoir, fil et aiguille dans ses grosses mains pataudes, violacées, et je sentais mon cœur se serrer. Le jeune homme qui jouait du violon au changement entre les lignes 10 et 13 à Duroc me donnait envie de m'arrêter, de lui parler, de lui dire que sa musique était belle. Il posait son étui précautionneusement sur une feuille de papier calque, pour ne pas l'abîmer. Je ne sais pas pourquoi, mais la vue du papier calque et du CD qui ornait l'étui, où l'on voyait une photocopie trop pâle du jeune homme et de son violon, avec 15 euros écrit d'une main appliquée, faisait poindre des larmes.

Sans parler de ce que je voyais, quotidiennement, à l'hôpital. La chambre de Malcolm donnait sur les urgences. J'avais appris à détourner le visage quand une ambulance ou le camion rouge des pompiers arrivait. Je ne regardais plus la souffrance, la détresse des autres, car elles devenaient miennes. Elles m'envahissaient. Elles me possédaient. La salle d'attente, j'avais aussi compris qu'il me fallait passer droit devant, les yeux baissés, car je ne me sentais plus capable de voir de face ces parents brisés, recroquevillés sur les chaises en métal, sous les plantes vertes

Moka en plastique, la blancheur de leur visage, l'horreur de leur perte.

L'hôpital, ses couloirs, ses escaliers, sa machine à café étaient devenus aussi familiers que mon appartement. Mais je ne les supportais plus. L'odeur, l'ambiance, les drames quotidiens, je ne les supportais plus. J'aurais voulu y arracher Malcolm, l'emmener loin, sur une plage, face à la mer. Le vent dans ses cheveux, le soleil sur son visage blanc. Il y avait des infirmières qui m'étaient indifférentes. Et d'autres, une ou deux, que je n'oublierai jamais. Il m'est arrivé de pleurer sur leur épaule. Il m'est arrivé de rire avec elles, et puis de me sentir coupable, et de m'en vouloir.

Une, en particulier, Éliane. Jeune, une trentaine d'années. J'aimais la regarder faire la toilette de Malcolm. Elle le manipulait avec une affection facile. Elle lui parlait. Elle lui disait : « Alors comme ça on est moitié angliche, mon grand bonhomme ? » Et elle me regardait, très sérieusement, un sourcil relevé, l'œil pétillant, tout en savonnant le long dos laiteux de mon fils.

— Mais quelle idée d'avoir épousé un Anglais, tout de même !

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