Très vite, le plus vite possible, précipitamment.
Voilà pour une fois une expression dont l’origine est facile à expliquer et qui ne devrait laisser aucun doute. Pour dire également « très vite », on dit aussi « à toute vitesse » (attestée en 1888) qui est simplement une autre forme de « à toute la vitesse qu’il est possible d’atteindre ». Mais la vitesse, c’est aussi un cran de ces dispositifs mécaniques qui, dans une voiture, permettent progressivement d’arriver à la vitesse maximale que peut atteindre le véhicule.
Au milieu du siècle dernier, les voitures, après avoir été généralement équipées de boîtes à trois vitesses, ont commencé à recevoir des boîtes à quatre rapports, symboles de la vitesse très élevée (pour l’époque) à laquelle elles pouvaient rouler. « En quatrième vitesse » était alors une image indiquant bien quelque chose de très rapide, également parfois confondu avec de la précipitation (« vers la tombe », pour certains, d’où l’expression « à tombeau ouvert » *, toutefois plus ancienne, puisque employée même pour ceux qui utilisaient un cheval pour se déplacer). Et bien que le nombre de rapports des voitures soit maintenant plus généralement de cinq, voire six, l’expression n’est pas en perte de vitesse.
Aux premiers ronflements de Nefus, je fonce sur l’enveloppe en kraft, je regrimpe l’escalier en quatrième vitesse, je me rue dans ma chambre.
Derri Berkani —
La kahéna de la courtille — L’Harmattan — 2002
499. Une volée (de bois vert)
1. Une sévère réprimande ou correction.
2. Des critiques violentes.
Si « volée » désigne d’abord, au XII esiècle et assez logiquement, le fait de s’élever en l’air, c’est un siècle plus tard que le mot prend aussi le sens de « mouvement rapide et violen » par allusion à la rapidité de l’envol des oiseaux effarouchés.
Il faudra toutefois attendre le XVII epour que, toujours avec la signification de « mouvement vif », mais répété cette fois, apparaisse la locution « une volée de coups » qui, raccourcie, est simplement devenue « une volée », les coups étant implicites. À la fin du XVIII esiècle, on y ajoute parfois « de bois vert », toujours au sens propre, la volée de coups pouvant être assénée avec un bâton de bois vert, histoire de faire bien mal, car ce bois est souple et non cassant comme le serait du bois sec. Enfin, au XIX esiècle, une forte réprimande ou des critiques violentes pouvant aussi faire moralement très mal, l’expression a pris le sens figuré qu’on lui connaît aujourd’hui.
Pourtant, la présence du président dans le Centre a déjà valu au candidat une volée de bois vert de la part de son adversaire, François Bonneau.
Le Figaro — Article du 10 février 2010
Choisir, sélectionner avec soin.
Qu’il s’agisse de candidats à l’embauche, de fruits fraîchement cueillis ou de chevaux de course, notre société applique toujours une sélection impitoyable, pourchassant inexorablement la moindre inacceptable imperfection. Tout est trié sur le volet. Certains croient à tort que l’expression vient de ces « volets » sur lesquels les marchands auraient trié leurs produits. Mais ces planches s’appelaient en réalité des contrevents et non des volets . Ces derniers ne sont apparus qu’au XVII esiècle et étaient à l’origine placés à l’intérieur des logements.
Au Moyen Âge, un volet était un tissu si fin et léger qu’il pouvait « voleter » au vent. Il était utilisé, entre autres, pour fabriquer des tamis servant à trier les graines, tamis qui, par extension, ont eux-mêmes été appelés volets . Le mot a perduré et, au XV esiècle, le volet désignait l’assiette en bois dans laquelle les femmes triaient les pois et les fèves. Un peu plus tard, Rabelais a d’ailleurs écrit : « Élus choisis et triés comme beaux pois sur le volet ». Depuis, les beaux pois ont été mangés et le volet est resté, sans que l’on comprenne maintenant ce qu’il vient faire dans le tri, si on ne connaît pas le fin mot de l’histoire.
Les joueurs de l’équipe de France ne s’entraîneront pas aujourd’hui. La séance ouverte à un public trié sur le volet et à la presse s’est transformée en un nouveau psychodrame pitoyable.
Le Progrès — Article du 20 juin 2010
Bologne, Jean-Claude, Au septième ciel , Larousse, 2005.
Bologne, Jean-Claude, Qu’importe le flacon …, Larousse, 2005.
Cellard, Jacques — Rey, Alain, Dictionnaire du français non conventionnel , Hachette, 1991.
Colin, J.P. — Mével, J.P. — Leclère, C., Dictionnaire de l’argot français et de ses origines , Larousse, 2005.
Collectif, Dictionnaire de Trévoux , 1771.
Collectif, Dictionnaire historique de la langue française , Le Robert, 1999.
Collectif, Dictionnaire Le Grand Robert (sur cédérom), Le Robert, 2005.
Collectif, Trésor de la langue française informatisé, http ://atilf.atilf.fr.
Delvau, Alfred, Dictionnaire de la langue verte , Marpon & Flammarion, 1883.
De Rudder, Orlando, In vino veritas , Larousse, 2005.
Duneton, Claude, La puce à l’oreille , Balland, 2002.
Esnault, Gaston, Dictionnaire historique des argots français , Larousse, 1965.
Furetière, Antoine, Dictionnaire universel , 1690.
Germa, Pierre, Minute papillon ! , Hermé, 1987.
Giraud, Pierre, Les locutions françaises , P.U.F., 1962.
Guillemard, Colette, L’affaire est dans le sac , Bartillat, 2003.
Guillemard, Colette, La fin des haricots , Bartillat, 2002.
Henry, Gilles, Petit dictionnaire des expressions nées de l’histoire , Tallandier, 1993.
Klein, Bernard, La cuisse de Jupiter , Librio, 2009.
Klein, Bernard, Les expressions qui ont fait l’histoire , Librio, 2009.
Larchey, Lorédan, Dictionnaire historique d’argot , Dentu, 1881.
Littré, Émile, Dictionnaire de la langue française , Gallimard/ Hachette, 1972.
Loubens, Didier, Les proverbes et locutions de la langue française , Delagrave, 1888.
Louis, Patrice, Du bruit dans Landerneau , Arléa, 1995.
Nisard, Charles, Curiosités de l’étymologie française , Hachette, 1863.
Oudin, Antoine, Curiosités françaises , 1661.
Quitard, Pierre-Marie, Dictionnaire étymologique, historique, et anecdotique des proverbes , Bertrand, 1842.
Rat, Maurice, Dictionnaire des expressions et locutions traditionnelles , Larousse, 2000.
Rey, Alain et Chantreau, Sophie, Dictionnaire des expressions et locutions , Le Robert, 2001.
Rozan, Charles, Petites ignorances de la conversation , Lacroix-Comon, 1857.
Scheler, Auguste, Dictionnaire d’étymologie française , Firmin Didot, 1862.
Treps, Marie, Allons-y, Alonzo ! , Le Seuil, 1994.
Weill, Sylvie et Rameau, Louise, Trésor des expressions françaises , Belin, 2003.
Oui, cette expression est présente dans cet ouvrage !
Et de abluere nous vient le verbe « abluer » qui existe toujours en français au sens de « laver », même s’il est tombé en désuétude. Mais l’histoire ne dit pas si c’est parce que le prêtre se lave les mains un moment avant de boire le vin dans le calice qu’est né le fameux proverbe « qui ablue boira ».
Читать дальше