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Karine Giébel: Terminus Elicius

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Karine Giébel Terminus Elicius
  • Название:
    Terminus Elicius
  • Автор:
  • Издательство:
    Éditions Pocket
  • Жанр:
  • Год:
    2011
  • Город:
    Paris
  • Язык:
    Французский
  • ISBN:
    978-2266223720
  • Рейтинг книги:
    3 / 5
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Terminus Elicius: краткое содержание, описание и аннотация

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Toujours le même trajet. Istres-Marseille. Marseille-Istres. Sa mère, son travail. La vie de Jeanne est en transit. Elle la contemple en passager. Une lettre suffira à faire dérailler ce train-train morose : « Vous êtes si belle, Jeanne. » Glissée entre deux banquettes, elle l’attendait. Une déclaration. D’amour. De guerre. Car l’homme de ses rêves est un monstre, un tueur sans pitié. Elle sera sa confidente, son épaule. Il sera son âme sœur, son dilemme. Le terminus de ses cauchemars… Cet ouvrage a reçu le Prix SNCF Marseillais du Polar

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— Putain, c’est pas vrai ! lâcha Esposito.

— On est dans la merde, confirma Lepage.

Ils regardaient sans trop y croire le cadavre de Grangier, le directeur de l’ESCOM en personne, retrouvé mort dans les sous-sols de sa chère école.

À genoux contre un mur, les mains liées dans le dos. La gorge tranchée. Le médecin légiste livra ses premières conclusions.

— Il a été tué il y a moins de deux heures, annonça-t-il.

— Putain, on est dans la merde ! répéta Lepage. C’était pas Zamikellian… Ce fou s’est bien foutu de nous !

Esposito restait pétrifié face au corps sans vie. Tout s’écroulait, il ne comprenait plus. Et, soudain, son cerveau se remit à fonctionner.

— Merde ! s’écria-t-il.

Il regarda sa montre : 17 heures.

— Qu’est-ce qu’il se passe ? demanda Lepage avec inquiétude.

— Jeanne !

Chapitre vingt et un

Jeanne monta dans le train, la main crispée sur son sac. Elle s’assit à sa place, même si n’importe quelle autre place pouvait convenir, désormais. Même si cette place lui rappelait trop de choses. Trop de lettres, trop d’amour.

Il n’y avait pas grand monde dans le wagon, ce soir. Quelques habitués, quelques inconnus. Le train quitta Saint-Charles et Jeanne posa son sac à ses pieds. Elle n’avait pas apporté de roman, elle allait s’ennuyer. Elle pensait à Elicius, elle pensait au capitaine Esposito. Deux êtres que tout séparait ; tout, sauf elle. J’ai été tellement nulle, avant-hier. Tellement nulle ! J’aurais dû lui dire que je le trouvais beau, que j’avais envie de vivre quelque chose avec lui… Si t’étais pas si conne, ma pauvre Jeanne ! Tu t’es comportée comme une gamine de quinze ans ! Morte de peur, Jeanne !

Les murs, les tags, la chaleur lourde avant l’orage. La lumière grise qui filtrait au travers des nuages déjà épais. Un train d’enfer. Elicius, encore. Oublie-le, Jeanne ! Il est en prison, là où est sa place !

Le train prenait de la vitesse. Jeanne, mélancolique, sombrait doucement. Son visage se reflétait dans la vitre sale. Qui es-tu, Jeanne ? De quoi es-tu capable ? Fuir, trahir, mentir. Voilà tout ce dont je suis capable. Jugement brutal et sans appel… Les mots d’Elicius vinrent à son secours. Si beaux, si touchants. Ces mots qu’elle ne lirait plus…

Instinctivement, elle glissa sa main à droite du siège pour éprouver le vide. Mais ses doigts effleurèrent quelque chose de familier. Non ! C’est pas possible ! Paniquée, elle enleva tout de suite sa main. Comme si elle venait de se brûler. Non ! C’est pas possible ! Elle tremblait, maintenant. Mais il fallait qu’elle en ait le cœur net. Alors, elle prit l’enveloppe. Toujours la même. La même écriture sur le même papier. D’un geste mal contrôlé, elle déplia l’unique feuille. Seulement quelques lignes. Quelques mots qui allaient forcément changer le cours de sa vie.

« Vendredi, le 12 juin,

Jeanne,

Il y a des choses irréversibles. Des blessures inguérissables. Vous étiez ma seule source de vie et d’espoir. La seule personne qui comptait. Mais je devais savoir si je pouvais avoir confiance en vous. Savoir si vous m’aimiez autant que je vous aime. Il fallait que je sache, Jeanne. Et maintenant, je sais. Je sais à quel point votre trahison m’a fait mal. À quel point elle a brisé mes derniers espoirs.

J’ai tué sept bourreaux.

Sept sur huit, Jeanne.

Notre rencontre aurait dû être la plus belle. Pour vous, elle sera la dernière.

Elicius. »

Jeanne retenait ses cris, sa peur. Ce n’était pas lui qui était tombé dans le piège : c’était elle. L’amour devenu haine, le temps était venu de payer le prix de la trahison.

Sept sur huit, Jeanne…

Elle ferma les yeux et se vit morte. Il viendrait cette nuit, chez elle. A moins qu’il ne l’attende sur le quai, à l’arrivée. Peu importe où et quand. Sept sur huit… Mais après tout, elle méritait ce châtiment. Et soudain, elle sentit que quelqu’un prenait place à ses côtés. Lui, déjà. Son cœur se crispa une dernière fois et, curieusement, la peur s’en alla doucement. La mort, ce n’est pas si grave. Pas si terrible, quand c’est la sienne. De toute façon, elle n’était bonne à rien. Morte depuis longtemps, déjà.

Alors, elle rouvrit les yeux.

Il était là, assis à côté d’elle.

C’était lui, elle le savait. Ce visage, elle le connaissait. Effacé depuis longtemps. Enseveli sous une tonne de mauvais souvenirs.

— Bonsoir, Jeanne…

— Bonsoir…

— Vous savez qui je suis, n’est-ce pas ?

— Oui, je le sais.

— Et la raison de ma présence ?

— Je… Je regrette de vous avoir trahi… Mais je n’avais pas le choix. Je ne pouvais pas laisser mourir cet homme…

— Rien à foutre de lui ! Un pauvre type sans importance. Je n’ai jamais eu l’intention de le tuer…

— C’était juste pour moi ? Pour me tester ?

— J’avais besoin de savoir.

— Vous ne m’avez pas laissé le choix… Vous ne m’avez laissé aucune chance…

— Si, Jeanne. Vous pouviez me suivre. Vous pouviez, me croire…

Le TER s’arrêta en gare de l’Estaque. Jeanne tourna la tête vers le quai. Appeler au secours ? Personne n’entend jamais les appels au secours. Pendant des années, elle avait appelé, en vain. Personne jamais ne répond. Alors, à quoi bon essayer encore ? La mort sera peut-être douce.

— Vous savez, je me suis occupé du septième cet après-midi… Le pire de tous, sans doute…

Elle oublia de respirer.

— Qui ?

— Grangier, le directeur de l’ESCOM…

— Expliquez-moi, s’il vous plaît… J’aimerais comprendre…

Elle l’observa tandis que le train repartait. Tant de douleur dans ces yeux. Sur ce visage. Il avait dû être beau, mais il était défiguré par la souffrance. Ses mains étaient pleines de cicatrices, de traces de brûlures.

Elle le connaissait, elle en était certaine. Mais pourquoi n’arrivait-elle pas à rassembler ses souvenirs ?

— Vous ne me reconnaissez pas, n’est-ce pas Jeanne ?

— Non, je ne vous reconnais pas… Pourtant, je suis certaine de vous avoir déjà vu… Souvent, même. Expliquez-moi…

— Vous expliquer ? Vous n’avez donc pas compris ?

— Non.

— Tous ces gens, tous ceux qui sont morts vous ont pourtant fait tant de mal, Jeanne !

— Michel ?

— Oui, Michel.

Elle ferma les yeux. Sous le choc.

— Michel était mon ami, reprit Elicius. Le meilleur et le seul véritable ami. Comme un frère…

— Vous êtes… Vous êtes…

Si longtemps qu’elle ne l’avait pas vu… Même son regard avait changé. Elle ne se souvenait plus de son prénom ; juste qu’il avait été l’ami fidèle. Un jeune homme idéaliste et plein de vie. Elle en avait été amoureuse, gamine.

Et elle le reconnaissait à peine aujourd’hui.

— J’ai changé, n’est-ce pas ?

— Tellement…

À partir de cet instant, ils plongèrent dans un affreux silence.

Tant d’images revenaient, si vite, si violentes. Des questions aussi. Mais Jeanne n’osait pas les poser.

— Nous descendrons à la prochaine station, dit soudain Elicius. Ma voiture est garée là-bas.

— Où allons-nous ?

Il ne répondit pas. Alors, elle prit son sac et le serra contre elle. Il était fermé. Elle entendait son portable qui sonnait. Esposito qui la cherchait, sans doute. Qui voulait la prévenir du danger. Trop tard. Impossible de reculer, de fuir. Elle avait trahi Elicius, elle avait trahi Michel.

La gare de Niolon se présenta, il se leva.

— Venez, ordonna-t-il en prenant sa main.

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