Frédéric Dard - Tarte aux poils sur commande

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Tarte aux poils sur commande: краткое содержание, описание и аннотация

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Pour bien se préparer à la consommation de la tarte aux poils, il est conseillé de manger beaucoup de cœurs d'artichauts non ébarbés. Ensuite, il est bon d'embrasser le sculpteur César, Alain Bombard ou François Nourissier à pleine joue et de façon répétitive, avant de prodiguer ces baisers fougueux à un manteau d'astrakan (dans la région des boutonnières de préférence).
L'entraînement doit être intensif. Songez qu'Arthur Rubinstein s'est fait chier des années avec « La Lettre à Elise » avant d'interpréter ces noctumes de Chopin qui ont assuré sa gloire.
Lorsque vous aurez la certitude de bien maîtriser le sujet, vous pourrez vous risquer alors à pratiquer sur une dame la figure dite de « l'enveloppe cachetée ». Pour le reste, faites confiance à votre instinct et allez de l'avant !
Cela dit, il n'y a pas que des séances de tartes aux poils dans ce saisissant ouvrage.
Vous trouverez en outre : une balle fondue, huit caïmans (mais peut-être sont-ce des alligators ?), une mine désaffectée, un nègre blanc, une balle de golf particulière et plus d'une tonne de cadavres.
Quand vous aurez achevé votre lecture, faites-moi signe : on ira bouffer ensemble.
De la tarte aux poils, de préférence.

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— Maintenant, je repasse à Miguel : vous avez du nouveau à son sujet ?

— Pratiquement pas. J’ai pris contact avec un copain à moi qui travaille au F.B.I. en lui fournissant les tuyaux que m’apportait ta carte postale. Il a refilé le bébé à un de ses correspondants du Mississippi, lequel lui a appris que de La Roca a effectivement séjourné chez un mec habitant Gulfport, un certain Irving Clay, à la réputation plus que douteuse, ayant trempé dans une tripotée d’affaires louches dont il a toujours su se sortir. Le correspondant de mon pote ricain n’a rien appris de particulier sur le comportement du Gitano à Gulfport. Il pense que ce dernier devait servir de garde du corps à Clay. Et puis Irving Clay est décédé, de sa bonne mort soit dit en passant : le crabe. Depuis lors Miguel de La Roca a disparu et personne, pas même les services d’Immigration, n’a jamais plus entendu parler de lui.

— C’est tout ?

— Hélas.

— Votre sentiment, commissaire ?

— Je n’ai pas de sentiment, Sauveur. Ton pote, après la mort de son « bienfaiteur », a dû se reconvertir dans une bande d’arnaqueurs de là-bas, je suppose.

— Et y a pas mèche de le retrouver ?

— Tu sais, les flics yankees ont d’autres chats à fouetter. Si ton aminche tombe à la suite d’une mauvaise affaire, il refera surface et il se peut que mon ami du F.B.I. me prévienne ; comme il se peut également que lui-même n’en soit pas informé !

— Donc, c’est râpé ?

— Je ne peux guère te laisser d’espoir.

Un temps. Je regarde par la fenêtre, tout au bout du jardin, il y a l’apprentis. Merde, j’ai oublié Maria qui doit m’attendre, le jupon rabattu sur la tête, le postère à dispose. Peut-être profite-t-elle de sa position pour prier ?

— Il vous arrive de prendre des vacances, commissaire ?

— Cette connerie, naturellement ! Pourquoi ?

— Parce qu’il m’est venu une idée que vous allez juger folle, probablement.

— Balance, je verrai.

— Supposons que vous preniez une quinzaine ; après tout on est en juillet, non ?

— Et alors ?

Il tousse.

— J’ai affuré pas mal de fraîche, pour tout vous dire, en me réveillant, ce matin, j’ai pensé : « Et si on allait voir là-bas avec le commissaire » ?

— Qui, on ?

— Ben, Maryse et moi ; avec vous. Je douille le voyage, les frais de séjour, tout. Ma gosse, ça lui change les idées, à moi aussi d’ailleurs. On vous regarde enquêter, au besoin on vous aide, commissaire. Voyez-vous, le Miguel j’ai une dette de reconnaissance envers lui, comme on dit. Quand on a braqué le fourgon qui transportait des fonds et qu’un des chiens de garde nous a balancé la purée, il lui a sauté sur le paltock et j’ai seulement écopé d’une bastos dans la cuisse ; s’il n’avait pas eu ce geste, le Gitano, je morflais un trou grand comme le cratère du Vésuve dans la poitrine.

Maintenant il parle, parle, pour noyer l’énormité de sa propose, Sauveur. Il sait qu’elle est saugrenue, insensée, pratiquement inacceptable pour un officier de police. Si les poulets de haut niveau se font sponsoriser par des malfrats repentis pour retrouver leurs copains disparus, où ça va, ça ?

Et malgré tout, mon côté farfadingue l’emporte.

— On déboulerait à Gulfport, les trois. On se rencarderait à propos du Gitano. Peut-être parviendrions-nous à retrouver sa piste ; un mec de votre calibre, j’ai confiance !

Il soupire :

— Ma gosse est vachement accro en ce qui vous concerne. Cette équipée, ce serait une remise sur rail. Elle s’est tellement consacrée à ma pauvre femme ! Vous savez, plus les parents vous mobilisent, plus ils vous manquent quand ils disparaissent.

Et puis là, il la ferme, comprenant qu’il a tout dit et que ce qu’il pourrait ajouter de plus pour me convaincre serait de trop.

Je prends le temps de déguster mon divin porto, histoire de mettre Kajapoul sur le gril. Dans le fond, son idée tombe à pic. J’allais prendre des vacances incessamment. Je devais rejoindre Jérémie Blanc au Sénégal, dans son village perdu. Les tam-tams, les vilains insectes, les bouffes au piment, ça sera pour une autre année. Je lui télégraphierai que j’ai un empêchement.

— D’accord, Sauveur. A une condition.

Il s’éclaire, que dis-je : s’illumine.

— Oh ! commissaire ! Là, vous vous me faites plaisir. J’accepte votre condition, toutes vos conditions.

— Je carmerai mon voyage, Air France me fait des prix poulets.

Il va pour protester, se ravise :

— Vous ne voulez pas vous laisser rincer avec du pognon douteux ?

— Exact. Je peux pas me permettre d’introduire le doigt dans ce genre d’engrenage.

Il renfrogne un peu, l’air de dire : « Tu veux pas y mettre le doigt, mais ta bite, tu l’as déjà fourrée dans l’engrenage de la truanderie puisque tu sautes ma gosse, grand dégueulasse ! »

Oui, ça exactement, il pense, Sauveur. Je le lis en caractères géants dans ses yeux. Seulement il a le tact de ne pas proférer des mots qui carboniseraient notre projet.

Il me tend la main, je la presse.

Il appartient à la génération des bandits d’honneur, le vieux voyou. Il aurait pu devenir P.-D.G. ou armateur si la vie ne s’était pas goupillée mochement pour lui, dans sa jeunesse. L’adolescence, c’est toujours le mauvais cap à franchir ; il est rare que les adultes se mettent à brigander. Ils glissent escrocs, parfois, traficoteurs because l’appât du gain, la soif du grisbi ou les ratages professionnels. Mais truands, c’est comme la danse : faut démarrer de bonne heure.

Je le raccompagne jusqu’au portail en cours de repeintage. Il grimpe dans sa Mercedes d’homme arrivé. A cet instant, Toinet sort de l’appentis, l’air tout chose. Je tressaille en repensant à la môme Maria qui y expose ses trésors andalous.

— D’où viens-tu ? l’apostrophé-je.

Au lieu de répondre à ma question (qui d’ailleurs, devant l’évidence, est sans objet), il demande :

— Dis voir, grand, treize ans, c’est jeune ou pas pour tirer son premier coup ?

LAVAGE AUTOMATIQUE

Franck Studder prit son tour derrière les voitures attendant à la station de lavage automatique. Il n’y avait que deux bagnoles devant lui, ce qui représentait une attente de six à dix minutes. Il avait une carte d’abonnement et venait faire nettoyer sa Chevrolet chaque mercredi soir après la fermeture de son officine. Le jeudi, il se rendait à la réunion hebdomadaire des « chefs d’agence » et il tenait à s’y présenter dans les conditions les plus favorables à son standing. Une voiture bien briquée ajoutait à sa classe.

Il se mit à lire Playboy en attendant son tour. Le poster central représentait une superbe rousse à poils fauves dont l’œil coquin aurait fait frémir le kangourou d’un nonagénaire. Elle regardait le lecteur, la tête inclinée, un sourire salace au coin des lèvres, et l’on distinguait un bout de langue rose comme un clito derrière ses dents éclatantes.

La voiture qui précédait Studder avança et il prit sa place. Il lut les blagues du mensuel. La plupart étaient vieilles comme l’amour, mais il en dénichait toujours une ou deux dans le lot, qui le faisaient marrer.

Le caisson de la laverie se divisait en deux parties : le lavage et le séchage. Ils étaient séparés par de larges volets de plexiglas qui coulissaient le moment venu. Franck admirait la virtuosité précise de l’appareil, la manière impressionnante dont les nombreux jets se mettaient en action pour projeter l’eau savonneuse sur le véhicule. Ils fouettaient la carrosserie avec impétuosité et celle-ci ne tardait pas à être recouverte d’une mousse blanchâtre. Lorsqu’ils cessaient de fonctionner, les énormes rouleaux blanc et rouge se mettaient de la partie. Ils démarraient par l’avant et paraissaient happer l’auto. Le plus gros, le rouleau transversal, épousait les volumes de celle-ci. S’élevant avec la courbe du capot, noyant le pare-brise et l’engloutissant dans ses longs poils. Studder ressentait toujours, à cet instant, une vague appréhension, comme si le monstre mécanique allait le broyer. Il avait l’impression d’être avalé par un animal préhistorique, l’eau savonneuse constituant une espèce de bile destinée à faciliter la digestion.

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