— Vous savez ce qui se passera, lorsque l’homme aura livré sa semence ?
— Dites-le ! Vous brûlez de me le révéler !
— C’est vous qui prendrez sa place !
— Belle princesse, vous me faites grand honneur, mais n’oubliez pas que j’ai déjà donné.
— Notre technicien vous fera renouer avec la vigueur. Au reste, vous ne devez pas être très regardant sur ce chapitre, si j’en crois vos récentes prestations.
Pendant qu’on devisait chemin faisant, la seconde nana, mieux conditionnée, est parvenue à s’enquiller le minaret du julot. Oh ! pas totalement, elle n’en est qu’au tiers ; mais sa farouche volonté, son application, la vaseline dont le mâle est enduit sont autant d’éléments qui font bien augurer de la finalité de la chose.
Fectivement, la Miss Jaunisse dévale le thermomètre à moustache de l’Hindou. Elle grimace un peu, s’évertue avec la lenteur de la tortue si bien décrite par Jeannot, pèse des meules, pas-de-visse du fouinozoff et finit par aboutir.
Les donzelles saluent l’exploit par un concert de cris de liesse. Dopée, la vaillante entreprend d’exploiter sa victoire. Une gigue lente commence.
Les Chinoises, une chose que tu ne peux pas leur enlever (après leur culotte), c’est leur grâce. Cette danse du scalp sur chauve à col roulé, tu sais que c’est vachètement superbe ? Elle joue des bras, faisant la danseuse thaïlandaise, sauf qu’elle n’a pas des pelles à feu de vingt centimètres comme les gerces de Bangkok ; ses gratte-miches sont de dimensions courantes. Un mouvement ondulatoire du ventre, du cou, des épaules crée la magie.
L’Hindou, ça lui trépane les glandes, ce manège. Lui, le Kama-sutra , il l’a lu à l’école primaire, mais ce qu’on lui manigance là le hisse vers des sommets insoupçonnés. Il commence à rauquer du gosier : sa glotte qui lui tyrole les sens, à Brâkmondhar. C’est trop intense. Il va pas pouvoir tenir tout le rallye comme ça. Sûr qu’il déjantera au prochain virage ! Elle l’essore trop dans l’impétueux, Cunégonde, sans se soucier de la surchauffe. Sa tête de nœud est mise à prix, au brahmane brameur. Il crispe les mâchoires, ferme les yeux, fouisse des narines, mais quand faut y aller, faut y aller, Bébé ! Le voilà qui floconne à s’en fissurer le sacrum. Il débourre du fusil lance-harpon. Juste un glapissement pareil à un cri de malheur : suraigu !
Elle désuife de partout, la cavalière. Dans cette posture, ça débâcle nécessairement ! L’amazone pique des deux afin de lui enlever le copeau brillamment. Ses potesses lui lancent des encouragements.
À cet instant, il y a brouhaha en coulisse. La porte s’ouvre après qu’on y eût brièvement toqué. Un malabar malais s’inscrit dans l’encadrement. Baraqué champion : haut de deux mètres zéro cinq, une moustache noire d’encre pareille à une chaglatte d’épicière turque, coiffé d’un turban. Il déclare quelque chose à la matrone. Celle-ci répond brièvement. Le gars se retire, mais il va reviendre bientôt puisqu’il laisse la porte ouverte.
C’est le moment où la chevaucheuse d’élite saute à bas de sa monture et s’enfuit vers des bidets de grand pardon en trottinant menu, cuisses serrées : soldats, droit au cul, mais épargnez la moquette ! L’Hindou demeure inerte, avec ses aiguilles disséminées dans la viande. Son mât de misaine se fait soudain roseau penchant.
Et bon, je reviens à la porte qu’on ouvre grand. Ils sont quatre : le garde moustachu plus deux autres garçonnets de son calibre qui maîtrisent un énorme Chinois qui n’est autre que Bérurier. Te dire l’effarement du valeureux commissaire ! Béru ! Mais qu’est-il venu foutre ici ? Et comment diantre a-t-il retrouvé ma trace, et si rapidos ?
Chiang Li réclame des explications aux gardiens. Je ne pige pas la réponse car on n’étudie pas le cantonais non plus que le mandarin, le sanscrit ou le malais à l’école communale de Saint-Chef, et c’est très évidemment l’un de ces quatre patois qui est présentement utilisé.
À la fin, elle me demande :
— Vous connaissez cet homme ?
— Pas le moins du monde ! menté-je.
Œuf corse, elle ne me croit pas, mais se réserve de pousser ultérieurement l’entretien, car l’un des trois mercenaires vient lui chuchoter quelque chose dans l’esgourde.
Elle demande :
— Qu’avez-vous fait du cadavre de mon garde du corps ?
— Je l’ai laissé à l’hôtel.
— C’est faux : il n’y est plus !
— Alors c’est que son âme est montée au paradis avec son enveloppe charnelle, plaisanté-je cyniquement.
Je viens de piger pourquoi le Gravos est là. Chiang Li a dépêché des messagers au Dragon Palace pour y récupérer la carcasse de son zébu. Ils ne l’ont pas trouvée dans ma piaule parce que, suivant mes directives, Béru et Pinuche avaient déjà « fait le ménage ». Leur venue n’est pas passée inaperçue de mon tandem d’or et le Mastar les a suivis. Seulement, ce sont des gonziers un peu marles et ils ont vite retapissé Bébé-lune. Du coup, le guetteur est devenu proie.
Je suis satisfait car j’aime bien comprendre.
Le Mammouth a dû regimber et se faire bastonner dûrement car il est couvert de ce qu’il appelle des « esquimoses ». Les deux lampions dans les teintes violaces, du raisin qui dégouline de son pif sur ses fringues, une manche arrachée, à demi essorillée (Van Gogh qui aurait fait philippine), une bosse en cours de gonflage sur le front ; drôlement touché, le pauvre Gros.
Il a dû entendre que je niais le connaître car il ne m’adresse pas le moindre signe d’intelligence (d’ailleurs, le pourrait-il ?). Il visionne les lieux, aperçoit l’Hindou avec sa bitoune en dodelinance et défoutraison, et grommelle :
— C’est l’orgie romaine, on dirait ! La grande partouze av’c toute la troupe au final !
La dame bordelière lance un ordre à nouveau. C’est décidément elle, la grande prêtresse des réjouisseries. Le petit acupuncteur vient récupérer ses aiguilles et les remet dans sa boîte de laque noire après les avoir stérilisées en les essuyant sur sa manche. Ensuite, deux valets délient le récent découillé, non pas de son serment, mais de ses sangles.
La taulière se rend alors dans un angle de la pièce et soulève une trappe astucieusement camouflée : elle est recouverte d’un tapis à ses dimensions, que l’on a encollé dessus.
— Venez voir ce qui vous attend ! me dit Chiang Li.
Je me redresse, embarde un brin, biscotte mes fumerons sont encore branlants, et la suis jusqu’à la trappe.
La grognasse à gueule de lampion s’agenouille et bricole je ne sais quoi à l’intérieur du trou. Aussitôt un bruit de moteur se fait entendre.
— Penchez-vous ! m’enjoint Chiang Li.
À un mètre au-dessous de moi, j’aperçois des pales groupées sur un large essieu, et aussi des rouages, le tout fonctionnant dans un bac de métal en forme d’entonnoir.
La bordelière adresse un signe. Quelqu’un branche une musique indonésienne à base de cloches et autres instruments à percussion d’une énorme résonance. Le vacarme devient insoutenable car ils ont monté le niveau au max.
Nouvelles directives : les valets s’emparent de l’Hindou, lui lient pieds et jambes pour en faire un sauciflard humain et appliquent sur son museau un large bâillon adhésif.
J’ai déjà pigé. Mes poils se hérissent comme ceux de ta brosse à dents.
Effectivement, ils tiennent le malheureux à la verticale et l’enquillent par la trappe. Malgré la musique cacophonique et tympanicide, on perçoit les hurlements fous du supplicié. Ses pattounes sont happées, broyées. Les aides-bourreaux continuent de le maintenir malgré ses contorsions désespérées. Le corps du pauvre gars continue de s’enfoncer progressivement. Instant démentiel !
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