Jean-Claude Mourlevat - Terrienne

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Terrienne: краткое содержание, описание и аннотация

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Que faire, maintenant ? Où aller ? Que dire ? À qui ? Ce que nous venons de vivre, Gabrielle et moi, ne peut être raconté à personne. Je ne veux pas que nous soyons prises pour des folles. Folles à lier. Toutes les deux. J’ai déjà ma stratégie.

Une voiture arrive. C’est une petite Renault grise. Elle vient de Montbrison et roule vers Saint-Étienne. Je tends le pouce. Elle s’arrête. Le gars a l’air très jeune, moins de vingt ans. Il a la tête rasée et porte un survêtement noir avec une capuche.

– Où vous allez ?

– On va à Saint-Étienne.

– C’est bon. Montez.

Je m’assieds devant. Bran et Gabrielle derrière. L’odeur de vieux cuir et de tabac manque de me faire tourner de l’œil. Le gars ne jette même pas un regard sur les tuniques sales qui nous servent de vêtements. Le dialogue est irréel.

– Vous étiez en boîte ?

De quoi parle-t-il ? Ah, oui, je comprends : on est dimanche matin. Je n’ai pas tenu le compte des jours, là-bas, mais ça doit être à peu près ça. Il y a une semaine que je suis partie. Ça me semble un siècle.

– Non. On sort… d’une fête.

Il rit.

– Ah, je vois. C’était bien ?

– C’était spécial. Et toi, où tu vas ?

– Je vais aider un copain qui déménage, à Saint-Étienne. Il va juste en face, de l’autre côté de sa cour, à vingt mètres. Pas besoin de camion. Mais faudra quand même descendre les meubles par l’escalier. Quatre étages ! Et en remonter deux ! Mais on est toute une bande. Ça va aller.

Il ouvre une boîte métallique qui contient trois cigarettes mal roulées.

– Ça vous dérange si je fume ?

– Non.

Il ouvre en grand sa vitre et continue :

– Normalement, il a dû préparer les cartons et démonter les meubles, le copain, mais je le connais, il est encore à roupiller à cette heure. On va le sortir du lit ! Je le sais parce que je l’ai déjà déménagé deux fois et que les deux fois…

Je l’écoute pérorer et j’éprouve un vertige. Peut-être la fumée de sa cigarette, ou la fatigue… Ou plutôt le mystère du passage. Ce qu’il me dit sonne incroyablement familier à mon oreille, et pourtant ça me semble provenir d’un monde distant de quatre millions d’années-lumière. Je me retourne. Derrière il y a ma sœur Gabrielle, hébétée, presque transparente de pâleur, qui regarde défiler le paysage, se demandant sans doute quel nouveau rêve elle est en train de rêver. Je prends enfin vraiment conscience qu’elle est revenue, que je l’ai ramenée, qu’elle est là. On devrait sonner les cloches, tirer des feux d’artifice, danser, hurler, pleurer de joie. Au lieu de ça, on traverse la campagne endormie du petit jour. Le soleil hésite à se lever derrière la rangée de peupliers, à l’est. Nous roulons sur la D8 en respectant sagement la limitation de vitesse et un type que je ne connais pas me raconte des histoires de déménagement.

Bran me sourit et pose la main sur mon épaule, mais il a le même air égaré que Gabrielle. Je pense à ce qu’il est en train de vivre : il laisse derrière lui le monde qui était le sien, et il entre dans le mien. Et ce gars qui parle de déménagement ! À quel point Bran fait-il cela pour moi ? Et à quel point pour lui-même, lui qui est plus terrien qu’un Terrien ? Je ne le sais pas encore. Je le saurai bientôt sans doute.

Dans la traversée de Sury, je trouve ce que je cherche.

– Arrête-toi ! S’il te plaît, arrête-toi !

Le garçon, étonné, se gare sur le bas-côté, près de la station-service.

– Qu’est-ce qui t’arrive ?

– Rien. Je veux juste téléphoner.

– J’ai un portable, si tu veux…

– Non, je préfère appeler d’une cabine.

Je descends et j’ouvre la portière de Gabrielle.

– Gabrielle, viens.

Elle est dans une phase où elle souffre moins. Elle me suit docilement jusqu’à la cabine en se serrant dans ses propres bras, comme pour garder précieusement en elle ce répit, cette absence passagère de douleur, l’empêcher de s’enfuir. Il n’y a pas un chat aux alentours. C’est bien.

– Écoute-moi, Gabrielle. Tu me fais confiance, hein ? Je t’ai ramenée de là-bas, alors tu dois m’obéir, d’accord ?

– D’accord.

Elle me fait de la peine avec sa petite voix d’enfant. Est-ce qu’un jour elle redeviendra forte ? Est-ce qu’elle redeviendra ma grande sœur ?

– Je vais faire le numéro du portable de papa et tu lui parleras.

– D’accord.

– Tu te souviens de son numéro ?

– Non.

– Ça ne fait rien. C’est moi qui vais le faire. Mais si on te demande, tu diras que tu t’en souvenais. D’accord ?

– D’accord.

– Ne lui dis pas que je suis avec toi. Surtout pas. Dis-lui que tu es seule et qu’il doit venir te chercher.

– Et il viendra me chercher ?

Ma gorge se serre. J’ai l’impression de parler à une fillette de six ans.

– Oui, il viendra te chercher.

Je lui explique où elle est, ce qu’elle doit dire et surtout ce qu’elle ne doit pas dire. Je le lui fais répéter. Répéter encore. Ça dure plusieurs minutes. Je lui fais promettre de bien le dire comme ça et pas autrement. Puis j’introduis ma carte de téléphone. Je compose le numéro de mon père et je passe l’écouteur à Gabrielle. Pendant que ça sonne, je sors de la cabine et je m’éloigne de quelques mètres pour ne pas trahir ma présence. Dans la Twingo, Bran nous regarde depuis l’arrière, le front contre la vitre. Devant, le gars a mis du rap à la radio, il tapote son volant et se demande ce que nous fabriquons.

Enfin, je vois les lèvres de Gabrielle qui s’activent. Elle parle à notre père. Je sais déjà que cette image restera gravée pour toujours dans ma mémoire : Gabrielle revenue qui parle à notre père dans cette cabine téléphonique et moi qui la regarde. Il lui pose sans doute des questions. J’espère qu’elle répond bien, qu’elle ne se trompe pas. Enfin, elle hoche la tête, à plusieurs reprises. Il doit lui dire : « Je viens, j’arrive, ne bouge surtout pas… » Et elle lui répond : « Oui d’accord, d’accord, oui, d’accord… » Elle raccroche. Je fonce vers elle.

– Alors ?

– Il vient me chercher.

– Tu es contente ?

Elle hoche encore la tête et dit :

– J’ai froid.

– Reste dans la cabine. Il sera là dans moins d’un quart d’heure.

Nous ne sommes plus que trois dans la voiture. C’est impoli, mais je suis passée derrière, avec Bran, et j’ai pris ses mains dans les miennes. Ça ne dissuade pas notre garçon au crâne rasé qui poursuit son monologue sans se soucier qu’on l’écoute ou non. Il y a des gens comme ça. Il est question de bières, d’aquariums, de flics.

À Saint-Étienne, il nous laisse place Fourneyron et nous marchons en direction du studio. Les rues sont désertes et ça nous arrange bien. Une boulangerie vient d’ouvrir. Je devrais être plus prudente, aller d’abord me changer, mais c’est plus fort que moi. Il me reste une quinzaine d’euros dans mon porte-monnaie. J’entre avec Bran. L’odeur de pain chaud me bouleverse. Je prends une baguette, deux croissants. Et deux pains au chocolat dont je sens la tiédeur à travers le papier.

Je tourne la petite clef plate dans la serrure du studio et la porte s’ouvre. Je suis émerveillée de voir comme tout cela fonctionne : la boulangerie, la clé, la cafetière électrique… Ma colocataire est absente. Ça aussi, ça m’arrange bien. Nous nous asseyons dans la minuscule cuisine. J’ai posé mon portable devant moi, sur la table, et j’attends l’appel de mon père. Je sais qu’il ne me préviendra qu’une fois Gabrielle récupérée et en sécurité à la maison.

Nous mangeons en silence, comme un vieux couple. Mais ce n’est pas la lassitude qui nous fait taire, c’est une sorte de sidération, et la sensation d’être des miraculés. Il y a trois jours, nous agonisions dans l’enfer d’Estrellas et, ce matin, nous glissons des tartines dans le grille-pain en reniflant l’odeur du café. Je m’aperçois que j’avais très faim. Mes papilles jubilent à chaque bouchée. Mémé Chiara me le disait parfois avant de perdre la tête : « Mangia, figlia mia, è il Bambin Gesù in bocca ! »

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