Jean-Claude Mourlevat - Le chagrin du roi mort

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Alors j’ai pensé à toi, Lia, et à cette phrase que tu m’as apprise. « Si tu salues quelqu’un de nous de cette façon, rien ne t’arrivera… » Voilà ce que tu m’avais assuré. Alors j’ai prononcé la phrase : « Otcheti ots.,. » parce que je m’adressais à plusieurs personnes, pas « otcheti tyin » non, ça c’est pour une seule personne, tu vois j’ai bien retenu, je suis bon élève… « otcheti ots »… la paix soit avec vous, et j’ai fait le geste qui allait avec, comme tu me l’avais montré, la main droite devant soi, pas trop, juste comme ça, puis sur la poitrine en l’effleurant à peine.

Et sais-tu ce qui est arrivé à cet instant ? Sais-tu ce qu’ils ont fait en m’entendant dire la phrase ? Ils ont éclaté de rire ! Ce fantôme ébouriffé, sale, maigre, et qui leur disait « otcheti ots » avec son accent de fetsat était incroyablement comique à leurs yeux. Alors j’ai ri aussi. Que faire d’autre ? Mais ça m’a fait si mal à l’épaule que je suis tombé à genoux en la tenant. Un homme s’est approché. Je me suis rappelé comment on disait « j’ai mal » et je l’ai dit :

Matyé…

Il s’est retourné et a crié quelque chose à un enfant. L’enfant est parti en courant et il est revenu très vite avec un gros bonhomme placide qui m’a palpé l’épaule avec ses mains énormes et chaudes. Je me souviens qu’il chantonnait en sourdine en le faisant, comme si c’était une routine pour lui. Son haleine empestait l’alcool. J’ai pensé que c’était un rebouteux. En effet, c’en était un. Mais un rebouteux expéditif. Il m’a fait coucher sur le dos. Lui aussi s’est couché, en angle droit par rapport à moi. Il a mis un de ses pieds sous mon aisselle et l’autre contre mon cou. Il a pris mon bras par le poignet et a tiré très fort dessus en lui imprimant une torsion. J’ai entendu un craquement sinistre. Mon épaule était à sa place. Et moi j’étais évanoui.

Ils ne m’ont pas traité en fetsat. Ils m’ont pris pour ce que j’étais : un garçon de dix-huit ans, jeté malgré lui dans cette guerre, presque mort et qui avait besoin d’aide. Ils m’ont recueilli, soigné. Ils m’ont fait manger, boire, ils m’ont tenu au chaud. Chaque fois que j’y repense, ma gorge se serre. Jamais je ne l’oublierai.

J’évitais de parler sinon pour dire les mots que je connaissais de leur langue, de la tienne : skaya… l’eau, firtzet … le feu, itiyé… ça va. J’ai repris sur le carnet de Lenart la liste que j’avais écrite sur le nôtre et j’y ai ajouté tout ce que j’arrivais à attraper : nyin… la ville, choudya… l’épaule, et un verbe que j’avais oublié de te demander : ziliadin… rire. C’est joli ziliadin… à l’intérieur il y a ton nom lia…

Il y avait foule sous les murs de la capitale libérée. Tout un peuple qui affluait de la province pour venir en reprendre possession ou rendre visite à leurs parents assiégés depuis si longtemps. Des hommes, des femmes, des grands-pères et des grands-mères, des enfants, des nourrissons, tous emmitouflés dans leurs vêtements d’hiver, des milliers de visages cuivrés, de joues et de mains rougies par le froid, et la musique de leur langue, la tienne, qui m’était à la fois mal connue et presque familière. Je ne sais pas d’où provenait notre subsistance : des pommes de terre, du poisson séché, de la viande de mouton, du pain noir. C’était étonnant, j’avais quitté un monde en descendant sous la terre de quelques mètres, et j’en trouvais un autre en remontant. Plus un seul soldat de l’armée de Guerolf, plus une seule tente militaire, plus un uniforme, plus rien. Comme si rien de tout ça n’avait jamais existé ici. Malgré le manque de tout, les gens chantaient et dansaient le soir autour des feux. Moi je les regardais, couché sous une couverture, près des flammes, et je me demandais si c’était un rêve.

La famille qui m’avait recueilli se composait d’une trentaine de personnes. Il y avait l’ancêtre, une vieille femme sans âge, paralytique, dont ils prenaient soin et appelaient Talynia. Les autres étaient ses descendants, mais je n’ai jamais réussi à établir tous les liens familiaux.

Quand je me suis senti mieux, quand mon épaule a cessé de me faire souffrir, j’ai dessiné ton visage sur le carnet. Je m’y suis repris à vingt fois et je suis arrivé à quelque chose qui te ressemble. Sauf tes yeux. Ils sont impossibles à reproduire. J’ai montré mon dessin à tout le monde autour de moi en te nommant : Lia. Ils secouaient la tête. Non, ils ne connaissaient pas cette fille. Ils disaient juste halyit… jolie. Ça me faisait plaisir, mais ça ne m’aidait pas beaucoup.

Alors, je les ai embrassés tous, les trente, les uns après les autres et je suis entré dans la ville.

Où es-tu, Lia ? Je t’ai cherchée partout dans cette ville immense. J’ai montré mon dessin dix mille fois en disant ton nom. Ils m’ont dit cinq mille fois halyit mais ils ne te connaissaient pas.

J’ai survécu parce que je suis bon menuisier. La ville n’était plus que décombres et partout on reconstruisait des abris provisoires avec des pierres tirées des éboulis et des planches de récupération. Même avec un bras et demi, j’ai pu me rendre utile. Je connais des façons d’ajuster, de caler, d’assembler. En le faisant je pensais à mon père qui me les a apprises et je le remerciais.

Je m’embauchais comme ça, sans rien demander. Je m’approchais du chantier et je me mettais au travail sans dire un mot. J’y gagnais un bol de soupe, une chaussette, une pièce. On m’a chassé trois fois seulement parce que j’étais un fetsat. Je trouve que c’est peu si on considère ce que les miens ont fait supporter à ces gens, les années de calvaire. Je restais quelques jours, le temps que la construction soit achevée et je changeais de quartier.

Le printemps est passé, bien court. J’aurais aimé te retrouver au printemps. Me promener avec toi au soleil. Voir ton visage dans sa lumière, et un peu plus de ta peau. Ton cou, tes bras, tes jambes. Je ne t’ai vue dehors que couverte de quatre couches d’habits ou bien au contraire : toute nue dans l’étable de Rodione. J’aurais aimé connaître la demi-mesure.

Au bout de six mois, j’ai compris que tu n’étais pas dans cette ville. Elle est immense et peuplée, mais je t’y aurais retrouvée. En six mois, je t’y aurais retrouvée. Alors je suis parti.

Je me suis dit : « D’accord… jusqu’à l’hiver, Lia… je te cherche jusqu’à l’hiver prochain, dix semaines en tout, pas une de plus et je rentre à Petite Terre… »

J’ai acheté au prix de la viande un vieux cheval malade qu’on allait abattre pour le manger. Je l’ai soigné sans trop y croire et j’ai eu la chance avec moi : il a survécu. Il était moche, avec sa longue tête maigre et ses côtes saillantes, son poil gris et rêche. Je me suis dit qu’on était comme des rescapés, tous les deux, des survivants. Qu’on allait bien ensemble. Je l’ai appelé du premier nom qui m’est venu : Veinard.

J’ai acheté aussi un petit traîneau, à peine plus grand qu’une luge, et j’ai quitté la ville.

J’ai retrouvé le village de Rodione, notre village. J’y ai mis du temps, j’ai erré dans la plaine, je me suis égaré, mais je l’ai retrouvé. Rappelle-toi, on le comparait à un village fantôme, mais ce n’était rien en comparaison de maintenant. Sans Rodione et sans toi, il avait l’air figé pour des siècles dans le silence et le froid. Rien ne bougeait. J’ai dormi dans notre étable. La porte était restée ouverte et toutes nos affaires étaient là en désordre, comme si tu n’y étais même pas revenue. Il ne manquait que notre carnet. Dormir sur notre matelas de feuilles sans toi était d’une tristesse épouvantable. Veinard ne donnait pas la même chaleur que Faxi, loin de là. Et il n’y avait pas les rêves et les délires de Rodione qui nous faisaient tellement rire. Derrière la cloison c’était un silence de mort, et dans mon lit, sans toi, la froideur de la solitude.

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