Mathias Enard - Boussole

Здесь есть возможность читать онлайн «Mathias Enard - Boussole» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию без сокращений). В некоторых случаях можно слушать аудио, скачать через торрент в формате fb2 и присутствует краткое содержание. Город: Paris, Год выпуска: 2015, ISBN: 2015, Издательство: Actes Sud, Жанр: Современная проза, на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале библиотеки ЛибКат.

Boussole: краткое содержание, описание и аннотация

Предлагаем к чтению аннотацию, описание, краткое содержание или предисловие (зависит от того, что написал сам автор книги «Boussole»). Если вы не нашли необходимую информацию о книге — напишите в комментариях, мы постараемся отыскать её.

Le point de vue des éditeurs
La nuit descend sur Vienne et sur l’appartement où Franz Ritter, musicologue épris d’Orient, cherche en vain le sommeil, dérivant entre songes et souvenirs, mélancolie et fièvre, revisitant sa vie, ses emballements, ses rencontres et ses nombreux séjours loin de l’Autriche — Istanbul, Alep, Damas, Palmyre, Téhéran… —, mais aussi questionnant son amour impossible avec l’idéale et insaisissable Sarah, spécialiste de l’attraction fatale de ce Grand Est sur les aventuriers, les savants, les artistes, les voyageurs occidentaux.
Ainsi se déploie un monde d’explorateurs des arts et de leur histoire, orientalistes modernes animés d’un désir pur de mélanges et de découvertes que l’actualité contemporaine vient gifler. Et le tragique écho de ce fiévreux élan brisé résonne dans l’âme blessée des personnages comme il traverse le livre.
Roman nocturne, enveloppant et musical, tout en érudition généreuse et humour doux-amer,
est un voyage et une déclaration d’admiration, une quête de l’autre en soi et une main tendue — comme un pont jeté entre l’Occident et l’Orient, entre hier et demain, bâti sur l’inventaire amoureux de siècles de fascination, d’influences et de traces sensibles et tenaces, pour tenter d’apaiser les feux du présent.
Mathias Enard est notamment l’auteur de
(2008), de
(2010) et de
(2012), tous parus chez Actes Sud.
est son sixième roman.

Boussole — читать онлайн бесплатно полную книгу (весь текст) целиком

Ниже представлен текст книги, разбитый по страницам. Система сохранения места последней прочитанной страницы, позволяет с удобством читать онлайн бесплатно книгу «Boussole», без необходимости каждый раз заново искать на чём Вы остановились. Поставьте закладку, и сможете в любой момент перейти на страницу, на которой закончили чтение.

Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Azra était inquiète, elle ne tenait pas en place. Elle avait peur pour Lyautey. Elle l’avait perdu de vue au cours d’une manifestation trois jours plus tôt. Elle n’avait plus de nouvelles. Elle l’avait appelé mille fois, était passée chez lui, était allée à l’université de Téhéran malgré l’interdiction de ses parents pour le trouver. Sans succès. Elle était terriblement anxieuse et la seule personne qu’elle connaissait de ses « amis français », c’était moi.”

L’évocation d’Azra et de la Révolution donnait à Morgan un air un peu alarmant. Sa passion était devenue froide ; son visage restait impassible, immergé dans le souvenir ; il regardait son verre en parlant, il le serrait à deux mains, calice profane de la mémoire. Sarah montrait des signes de gêne, d’ennui peut-être, voire des deux. Elle croisait et décroisait les jambes, tapotait le bras de son fauteuil en osier, jouait machinalement avec une sucrerie avant de finir par la reposer, sans l’ingérer, dans sa sous-tasse de verre.

“C’était la première fois que nous parlions de Lyautey. D’habitude Azra évitait le sujet par pudeur ; moi par jalousie. Il faut que je le reconnaisse : je n’avais aucune envie de m’intéresser au sort de ce fou. Il m’avait volé l’objet de ma passion. Il pouvait bien se trouver au diable, ça m’était absolument égal. Azra était chez moi, cela suffisait à mon bonheur. Je comptais bien en profiter le plus longtemps possible. Je lui ai donc dit qu’il était fort probable que Lyautey appelle ou qu’il passe chez moi sans prévenir, comme à son habitude, ce qui était bien évidemment un mensonge.

Elle est restée une grande partie de la journée. Elle a rassuré ses parents par téléphone, leur disant qu’elle se trouvait en sécurité chez une amie. Nous regardions la télévision en écoutant la BBC en même temps. Nous entendions les cris, les sirènes dans la rue. Parfois il nous semblait percevoir des coups de feu. On voyait la fumée s’élever au-dessus de la ville. Assis tous les deux sur le sofa. Je me rappelle jusqu’aux couleurs de ce canapé. Ce moment me poursuit depuis des années. La violence de ce moment. La douceur de ce moment, le parfum d’Azra sur mes mains.”

Sarah en laissa tomber sa tasse ; l’objet rebondit, roula jusque dans l’herbe sans se briser. Elle se leva de sa chaise pour la ramasser. Morgan détailla longuement ses jambes, puis ses hanches, sans chercher à se dissimuler. Sarah ne se rasseyait pas ; elle restait debout dans le jardin à regarder l’étrange façade biscornue de la villa. Morgan chassa de nouveau les mésanges d’un revers de la main et se resservit, sans glace cette fois-ci. Il marmonna quelque chose en persan, des vers d’un poème sans doute, il me sembla percevoir une rime. Sarah s’était mise à arpenter la petite propriété ; elle observait chaque rosier, chaque grenadier, chaque cerisier du Japon. J’imaginais ses pensées, sa gêne, sa douleur même d’entendre la confession de son maître. Morgan ne parlait pour personne. La vodka faisait son effet, j’imaginai que d’ici peu il se mettrait à pleurer des larmes d’ivrogne, s’apitoyant définitivement sur son sort. Je n’étais pas sûr d’avoir envie de l’écouter jusqu’au bout, mais avant que Sarah ne revienne et ne me donne l’occasion de me lever à mon tour, Morgan reprit son histoire, d’une voix toujours plus profonde et essoufflée :

“Avouez que la tentation était trop forte. Être là à ses côtés, proche à la toucher… Je me souviens de sa surprise glacée lorsque je lui dévoilai ma passion. Par malchance elle était — comment dire — indisposée. Comme dans Vis et Ramin , le roman d’amour. Le souvenir de l’antique romance m’a réveillé. J’ai pris peur. J’ai fini par la raccompagner à la fin de l’après-midi. Il a fallu contourner le centre-ville ravagé, occupé par l’armée. Azra marchait en regardant par terre. Puis je suis rentré seul. Je n’oublierai jamais cette soirée. Je me sentais à la fois heureux et triste.

Lyautey a fini par réapparaître dans un hôpital militaire du nord de la ville. Il avait pris un mauvais coup sur le crâne, les autorités ont prévenu l’ambassade qui a appelé l’institut. J’ai immédiatement sauté dans une voiture pour me rendre à son chevet. Devant sa porte se trouvait un officier de l’armée ou de la police au poitrail couvert de médailles qui s’excusa, avec toute la politesse iranienne, de cette erreur. Mais vous savez, disait-il en souriant ironiquement, il n’est pas facile de distinguer un Iranien d’un Français au milieu d’une manifestation violente. Surtout un Français qui crie des slogans en persan. Lyautey était couvert de bandages. Il paraissait épuisé. Il commença par me dire que le shah n’en avait plus pour longtemps, j’ai acquiescé. Je lui ai ensuite expliqué qu’Azra le cherchait, qu’elle était morte d’inquiétude ; il m’a demandé de l’appeler pour la rassurer — je lui ai proposé de lui remettre une lettre en mains propres le soir même s’il le voulait. Il m’a chaudement remercié de cette attention. Il a rédigé un bref billet sous mes yeux en persan. Il devait rester encore trois jours en observation. Je suis allé ensuite à l’ambassade ; j’ai passé la fin de la journée à convaincre nos chers diplomates que, pour son bien, il fallait renvoyer Lyautey en France. Qu’il était fou. Qu’il se faisait appeler Farid Lahouti, qu’il usurpait une identité iranienne, qu’il militait, qu’il était dangereux pour lui-même. Puis je suis passé chez Azra pour lui remettre le mot de Fred. Elle ne m’a pas fait entrer, ne m’a pas octroyé un regard, elle est restée derrière la porte entrebâillée qu’elle a claquée sitôt le papier entre ses mains. Quatre jours plus tard, à sa sortie de la clinique, officiellement rapatrié pour raisons de santé, Fred Lyautey était dans l’avion pour Paris. En réalité, expulsé par les Iraniens sur intervention de l’ambassade, il avait interdiction de revenir en Iran.

J’avais donc Azra pour moi. Mais il fallait la convaincre de me pardonner mes élans, que je regrettais amèrement. Elle était très affectée par le départ de Lyautey, qui lui écrivait de Paris pour lui dire qu’il était victime d’un complot monarchiste et reviendrait « en même temps que la liberté en Iran ». Dans ces missives, il m’appelait « son seul ami français, le seul Français en qui il avait confiance à Téhéran ». À cause des grèves qui paralysaient la poste, il m’écrivait à moi par la valise diplomatique en me chargeant de transmettre. Une ou deux lettres par jour, que je recevais par paquets de huit ou dix chaque semaine. Je ne pouvais m’empêcher de les lire, ces lettres, et elles me rendaient fou de jalousie. De longs poèmes érotiques en persan, d’une beauté inouïe. Des chants d’amour désespérés, des odes sombres illuminées par le soleil d’hiver de l’amour que je devais apporter jusqu’à la boîte de l’intéressée. Porter moi-même ces lettres à Azra me déchirait chaque fois le cœur de rage impuissante. C’était une vraie torture — la vengeance inconsciente de Lyautey. Je ne faisais le facteur que dans l’espoir de croiser Azra au bas de son immeuble. Parfois la douleur était si forte que je brûlais quelques-unes de ces enveloppes après les avoir ouvertes — quand les poèmes étaient trop beaux, trop érotiques, trop susceptibles de renforcer l’amour d’Azra pour Lahouti, quand ils me faisaient trop souffrir, je les détruisais.

Au mois de décembre, la Révolution prit encore de l’ampleur. Le shah était reclus dans le palais de Niavaran, on avait l’impression qu’il n’en sortirait plus que les pieds devant. Le gouvernement militaire était bien évidemment incapable de réformer le pays et les administrations étaient toujours paralysées par les grèves. Malgré le couvre-feu et l’interdiction des manifestations, l’opposition continuait à s’organiser ; le rôle du clergé, en Iran comme en exil, devenait de plus en plus prépondérant. Le calendrier religieux n’aidait pas : décembre correspondait au mois de muharram . La célébration du martyre de l’imam Hossein promettait de donner lieu à des manifestations massives. Une fois de plus, c’est le shah lui-même qui précipita sa chute ; face à la pression des clercs, il autorisa les marches religieuses pacifiques du 10 muharram, Ashura . Des millions de personnes défilèrent dans tout le pays. Téhéran était prise par la foule. Étrangement, il n’y eut pas d’incident notoire. On sentait que l’opposition avait atteint une telle masse, une telle puissance que la violence était dorénavant inutile. L’avenue Reza-Shah était un grand fleuve humain qui se jetait dans la place Shahyad devenu un lac frémissant que surplombait, comme un rocher, le monument à la royauté dont on sentait qu’il changeait de sens, qu’il devenait un monument à la Révolution, à la liberté et à la puissance du peuple. Je pense que tous les étrangers présents à Téhéran ces jours-là se rappellent l’impression de force extraordinaire qui émanait de cette foule. Au nom de l’imam Hossein abandonné par les siens, au nom de la justice face à la tyrannie, l’Iran était debout. Nous avons tous su ce jour-là que le régime allait tomber. Nous avons tous cru ce jour-là que l’ère de la démocratie commençait.

Читать дальше
Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Похожие книги на «Boussole»

Представляем Вашему вниманию похожие книги на «Boussole» списком для выбора. Мы отобрали схожую по названию и смыслу литературу в надежде предоставить читателям больше вариантов отыскать новые, интересные, ещё непрочитанные произведения.


Отзывы о книге «Boussole»

Обсуждение, отзывы о книге «Boussole» и просто собственные мнения читателей. Оставьте ваши комментарии, напишите, что Вы думаете о произведении, его смысле или главных героях. Укажите что конкретно понравилось, а что нет, и почему Вы так считаете.

x