Jean-Marie Le Clézio - Tempête. Deux novellas

Здесь есть возможность читать онлайн «Jean-Marie Le Clézio - Tempête. Deux novellas» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию без сокращений). В некоторых случаях можно слушать аудио, скачать через торрент в формате fb2 и присутствует краткое содержание. Город: Paris, Год выпуска: 2014, ISBN: 2014, Издательство: Éditions Gallimard, Жанр: Современная проза, на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале библиотеки ЛибКат.

Tempête. Deux novellas: краткое содержание, описание и аннотация

Предлагаем к чтению аннотацию, описание, краткое содержание или предисловие (зависит от того, что написал сам автор книги «Tempête. Deux novellas»). Если вы не нашли необходимую информацию о книге — напишите в комментариях, мы постараемся отыскать её.

En anglais, on appelle « novella » une longue nouvelle qui unit les lieux, l'action et le ton. Le modèle parfait serait Joseph Conrad. De ces deux novellas, l'une se déroule sur l'île d'Udo, dans la mer du Japon, que les Coréens nomment la mer de l'Est, la seconde à Paris, et dans quelques autres endroits. Elles sont contemporaines.
J. M. G. Le Clézio

Tempête. Deux novellas — читать онлайн бесплатно полную книгу (весь текст) целиком

Ниже представлен текст книги, разбитый по страницам. Система сохранения места последней прочитанной страницы, позволяет с удобством читать онлайн бесплатно книгу «Tempête. Deux novellas», без необходимости каждый раз заново искать на чём Вы остановились. Поставьте закладку, и сможете в любой момент перейти на страницу, на которой закончили чтение.

Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Nous restons à pêcher et bavarder jusqu’à ce que la nuit tombe. La plupart du temps nous oublions de pêcher. Quand le vent souffle, et que la mer est mauvaise, ça ne sert à rien de lancer la ligne. Les poissons restent au fond de l’eau dans leurs grottes. Monsieur Kyo reste assis dans les rochers, sans bouger, il regarde la mer. Il a une expression vraiment triste quand il regarde la mer. C’est comme si la couleur de la mer entrait dans ses yeux.

« À quoi vous pensez ? » je lui demande. Est-ce qu’une gamine de treize ans peut s’intéresser à ce que pense un vieux ? Il n’est même pas étonné. « Je pense à ma vie, dit-il. — Vous avez fait beaucoup de choses dans votre vie ? » Il ne répond pas tout de suite. J’ai un peu l’habitude des vieux, je fais toujours parler les femmes de la mer. Je suis sûre que beaucoup de gens trouveraient ça bizarre, que je leur parle. Mais je sais que lorsqu’on devient vieux, on aime bien que les jeunes vous posent des questions. Je crois que j’aimerai bien ça quand je serai vieille. « J’ai étudié pour être architecte, et puis je suis devenu journaliste. J’ai débuté pendant mon service militaire, j’envoyais des articles sur ce qui se passait au front. J’aime bien écrire, mais je n’arrive pas à écrire un livre. Je suis venu ici pour avoir le temps d’écrire un livre. » Il parle avec un accent, il cherche ses mots. J’aime bien sa façon de parler anglais, il a un accent très british, j’écoute et je répète les mots quand je suis seule. Il me semble que c’est une langue différente de celle que ma mère m’a apprise. Monsieur Kyo dit que j’ai un bon accent, c’est peut-être parce que mon père est américain, mais évidemment, ça je ne le lui ai pas dit, ça ne regarde personne. J’aime bien parler une autre langue, pour que les gosses de l’école ne me comprennent pas. C’est ça que je demande à Monsieur Kyo : « S’il vous plaît, apprenez-moi d’autres mots dans votre langue. » Je crois que ça aussi ça lui plaît. Ça l’a fait rire, je suis sûre qu’il se sent flatté. Les adultes aiment bien enseigner quelque chose. Ça compense le fait qu’il ne soit pas très bon à la pêche. Il me donne des mots nouveaux : « Angle, thread, hooks, snapper, starfish . » Il me dit des mots que je ne comprends pas, des mots de marin : « Starboard, stern, seabass, bow, aft bow, mooring . » Ce ne sont pas les mots que je veux retenir, c’est la façon de les dire. De les chanter. Je lui fais répéter les mots, je regarde sa bouche pour comprendre la musique. Ce que j’aime bien, c’est que, contrairement à la plupart des gens, Monsieur Kyo ne me pose jamais de questions personnelles. Il ne m’a jamais demandé : « Quel âge avez-vous ? » Ou : « En quelle classe êtes-vous ? » Peut-être qu’il croit que je suis grande, pas une adulte mais presque, et c’est pour ça qu’il accepte de me parler. Souvent je dis que j’ai seize ans ou même dix-huit ans. C’est vrai que je suis grande de taille, je dépasse la plupart des femmes ici, et j’ai déjà les seins qui poussent, et je suis réglée depuis un bon moment. Depuis le début de l’année, j’ai commencé. Ça m’est arrivé la première fois au collège, en pleine classe, j’avais tellement honte que je n’osais plus me lever de ma chaise. Une autre fois, j’avais tellement mouillé mon lit que j’ai cru que j’avais pissé en dormant, mais c’était du sang. J’ai dû me lever la nuit et laver mon drap dehors, à l’eau froide, parce que maman m’a toujours dit que pour laver le sang il fallait de l’eau froide.

« Et vous, Monsieur ? » Je lui dis : « Monsieur. » Comme on dit dans l’armée : « yessir », ou « no sir ». Comme si j’avais le droit à mon tour de poser des questions. Mais j’oubliais qu’il n’avait rien demandé. « Vous êtes marié ? Vous avez des enfants ? » Il a secoué la tête : « Non, non, pas marié, pas d’enfants. — C’est triste, qui est-ce qui va s’occuper de vous quand vous serez très vieux ? » Il a haussé les épaules, il est évident qu’il s’en fout.

Après cela, nous n’avons plus rien dit, ni lui ni moi, pendant un moment. J’ai pensé que les questions personnelles l’ennuyaient. Monsieur Kyo a un visage qui se ferme facilement. Ce n’est pas le genre de personne que vous rencontrez tous les jours, qui est prêt à faire marcher sa langue pour un oui ou pour un non. C’est quelqu’un d’assez mystérieux. Il a une ombre sur son visage. Quand je lui parle, tout d’un coup une sorte de nuage passe devant ses yeux, sur son front.

Avec Monsieur Kyo, nous avons inventé un drôle de jeu. Je ne sais plus si c’est lui ou moi qui ai commencé. C’est le jeu que nous jouons quand il y a cette ombre sur son visage. Au début, nous touchions des choses sur la plage, des morceaux de rien du tout, des bouts de bois, des feuilles d’algues. Puis nous avons décidé de faire cela à tour de rôle, en prétextant que nous déplacions des pions, ou des dominos. Ce sont juste des petits riens qu’on trouve dans le sable, ou dans les creux de rochers, des brindilles, des plumes d’oiseau, des coquilles vides. Nous les posons devant nous, dans le sable nettoyé et bien plat. « À vous », dit Monsieur Kyo. Je mets un bout de ficelle. « À moi », dit Monsieur Kyo. Il place un brin d’algue séché, torsadé. « À vous. » Un morceau de verre dépoli. « À moi. » Il met un caillou plat. « À vous. » Je mets un autre caillou, plus petit, mais veiné de rouge. Il est perplexe, il cherche autour de lui, visiblement il n’y a rien de mieux. « C’est vous qui gagnez », dit Monsieur Kyo. Ça peut sembler idiot, mais quand nous jouons, ça veut vraiment dire quelque chose. Ce caillou veiné de rouge est vraiment gagnant. Surtout, quand nous jouons à ce jeu, Monsieur Kyo oublie ce qui le préoccupe. La tache sombre s’efface de ses yeux, ils redeviennent clairs et rieurs. Ils reflètent l’éclat du soleil dans la mer.

C’est notre jeu. Je l’ai appelé « À vous, à moi » tout simplement. Quand nous nous mettons à jouer, nous ne pensons plus à rien d’autre. Le temps n’existe plus. Nous pourrions ne jamais nous arrêter. Moi, ça me fait rire, mais Monsieur Kyo reste sérieux. Même lorsqu’il pousse quelque chose de bizarre, ou de comique, il garde un visage sérieux. Mais ses yeux disent le contraire. J’aime la couleur de ses yeux quand nous jouons.

Ai-je parlé de la couleur des yeux de Monsieur Kyo ? Ils sont verts. Mais d’un vert changeant, vert de feuille de salade, ou bien vert d’eau. Quelquefois de la couleur du creux de la vague qui déferle, quand les bulles d’air et l’eau de pluie s’en mêlent. Dans son visage sombre, ses yeux font deux taches de lumière. Si je regarde trop ses yeux, je sens une sorte de vertige. Alors je cesse de le regarder, je me penche sur le sable pour chercher quelque chose qui continue le jeu. Mon cœur bat plus vite, j’ai l’impression que si je continue à regarder ses iris, je vais tomber. Ou bien m’évanouir. Mais bien sûr je ne pourrais pas lui en parler. D’ailleurs il ne fixe jamais les gens très longtemps, en fait je devrais parler de moi, car je ne l’ai jamais vu quand il est avec d’autres personnes. Et puis, quand il s’en va, j’ai remarqué qu’il met des lunettes de soleil, même lorsque la nuit est en train de tomber.

Nous nous voyons tous les jours ou presque. Monsieur Kyo a pris une place importante dans ma vie. Je l’ai écrit dans mon journal, puisque je ne peux en parler à personne d’autre. Quand je sors de l’école, et aussi le dimanche après l’église, je cours à travers les champs de patates jusqu’au rivage. De loin, je reconnais sa silhouette, son complet-veston qui flotte dans le vent. Les premiers temps, il portait même une cravate pour aller à la pêche. Mais elle le fouettait dans les bourrasques, et il a fini par l’ôter. Mais j’aime bien qu’il soit élégant, contrairement aux touristes qui se croient obligés de circuler en bermudas à fleurs ou en anoraks jaunes. Quand il pleut, il apporte un parapluie, non pas un de ces ridicules petits parapluies pliants, mais un parapluie noir comme les hommes d’affaires en Angleterre. Le vent a fini par le retourner, et il a décidé de s’en passer. L’eau ruisselle sur sa casquette et mouille son veston. Les jours où il fait vraiment mauvais, il s’abrite sous sa tente. Il l’a plantée dans la dune, un peu à l’écart des plages. C’est une tente en nylon vert, attachée par des piquets de métal. C’est l’hôtelier qui la lui loue. Alors nous allons nous abriter de la pluie sous sa tente. Il y a une sorte d’auvent, nous sommes assis dans la tente mais les jambes de Monsieur Kyo dépassent au-dehors. J’adore ça ! J’ai l’impression que nous sommes très loin, dans un pays inconnu, en Amérique, ou en Russie. Un pays dont nous ne reviendrons jamais. Je regarde les vagues qui courent sur la mer laiteuse. La brume s’épaissit à l’horizon. Il me semble que nous sommes sur un bateau, en partance vers l’autre bout du monde.

Читать дальше
Тёмная тема
Сбросить

Интервал:

Закладка:

Сделать

Похожие книги на «Tempête. Deux novellas»

Представляем Вашему вниманию похожие книги на «Tempête. Deux novellas» списком для выбора. Мы отобрали схожую по названию и смыслу литературу в надежде предоставить читателям больше вариантов отыскать новые, интересные, ещё непрочитанные произведения.


Jean-Marie Le Clézio - Poisson d'or
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Ourania
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Le chercheur d'or
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Étoile errante
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Désert
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Printemps et autres saisons
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - La ronde et autres faits divers
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Diego et Frida
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - The African
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Le procès-verbal
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - Fièvre
Jean-Marie Le Clézio
Jean-Marie Le Clézio - La quarantaine
Jean-Marie Le Clézio
Отзывы о книге «Tempête. Deux novellas»

Обсуждение, отзывы о книге «Tempête. Deux novellas» и просто собственные мнения читателей. Оставьте ваши комментарии, напишите, что Вы думаете о произведении, его смысле или главных героях. Укажите что конкретно понравилось, а что нет, и почему Вы так считаете.

x