Tatiana Rosnay - Moka

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C'est un labeur de l'ombre, comme d'être nègre, ou écrivain public. On considère toujours un traducteur avec une certaine condescendance. Comme quelqu'un qui aurait raté une carrière d'écrivain, de journaliste. Je m'étais longtemps insurgée contre cette injustice. À présent, c'était derrière moi. Je faisais ce métier depuis dix ans. Pour rien au monde je n'en changerais. Mais pourquoi n'écris-tu pas des romans ? me demandait-on. Des livres, des essais, pourquoi te cantonner aux créations des autres, comme si tu te cachais derrière leur texte ? Mon père disait : « Justine élève ses enfants, et elle fait un « peu de traduction » pour joindre les deux bouts. » Un peu de traduction. Son mépris me rendait folle. « Mais ce n'est pas un vrai travail, insistait-il. C'est du bricolage. Tu ne vas pas dans un bureau, comme ton frère, par exemple, ou ton mari. Tu fais ça comme ça, ce n'est pas un vrai boulot. » J'essayais de lui expliquer, le plus patiemment possible, ce qui n'était jamais facile avec mon père, que pour aimer traduire, il fallait d'abord aimer lire. Ce qu'il faisait rarement. Ensuite, il fallait aimer deux langues, passionnément, être capable de jauger leurs différences, leurs similitudes, leurs surprises, leurs pièges.

J'avais toujours eu un attrait pour la langue anglaise, qui pourtant n'était pas ma langue maternelle. Une langue qui me séduisait par ses contrastes. Depuis que j'avais été capable de lire Daphné du Maurier dans le texte. J'étais tombée par hasard sur une ancienne traduction de Rebecca en poche, bâclée, lamentable. Du haut de mes treize ans, j'avais frémi d'indignation. Des passages entiers avaient été malhabilement tronqués. Même la première phrase, mythique, « Last night I dreamt I went to Manderley again », avait été massacrée pour donner : « Je rêvai la nuit passée d'être retournée à Manderley. » C'était la pire des trahisons. Cela m'a mise hors de moi. Le passé simple, quelle hérésie ! J'ai traduit l'ouverture, consciencieusement, la rage au ventre. Voilà. J'avais rendu justice à Daphné. Et j'avais découvert un plaisir inédit. Débusquer le mot juste tout en fuyant le mot à mot. Ne pas coller au texte d'origine, ce qui irrémédiablement le rendait lourd, surfait, mais le faire renaître à sa façon. Respecter la fluidité. Aimer jouer avec le secret des mots. Décrypter les arcanes de la langue anglaise, cette langue qui me fascinait par sa sécheresse apparente, par ses richesses cachées. Lui rendre la pareille en français. Et vice versa. Aller et venir entre les deux langues.

Avec les années, et à force de vivre avec un Anglais, je me sentais de plus en plus proche de ce drôle de peuple. Je les trouvais plus fins, plus espiègles que les Français. J'aimais leur humour, leur détachement. Les Monty Python et Peter Sellers me faisaient davantage rire que Louis de Funès ou Bourvil. J'aimais leur grain de folie. Leur réserve, aussi. Et pourtant, j'avais trouvé ma belle-sœur Isabella réfrigérante, au début. Un parapluie dans le cul, comme disait prosaïquement Emma. Puis il avait suffi d'une soirée dans un pub, en bas de chez elle, à Islington, et de quelques confidences au-dessus d'une pinte de Lager et de chips au goût bacon, pour que je voie apparaître derrière ce grand front austère et ces yeux pâles et gris une fille facétieuse à l'humour aussi pointu qu'original.

Mon portable a vibré dans ma poche. C'était M. Vandenbossche, le conducteur de bus. Il avait eu mon message hier, mais n'avait pu me rappeler que ce matin. Il avait une voix très jeune.

— Vous savez, madame, la personne qui a fait ça à votre fils, il faut qu'elle paie. Il faut qu'on l'arrête. Moi, j'ai tout vu, madame. C'est honteux, de prendre la fuite quand on a fait ça à un gamin. Honteux. (Sa voix grondait d'indignation.) Moi, je vois beaucoup de choses depuis que je suis chauffeur de bus. Des choses pas drôles, vous savez. Mais ce qu'on a fait à votre gamin, c'est impardonnable.

Je lui ai dit que je souhaitais le rencontrer. C'était urgent, important. Il ne m'a pas demandé pourquoi. Il m'a donné rendez-vous dans un café près de la gare Montparnasse, à la fin de son service, vers dix-neuf heures. J'ai demandé comment je pouvais le reconnaître. Il a ri : « Un grand Belge blond avec un costard RATP. »

J'ai passé la journée à ronger mon frein. Je n'ai parlé du rendez-vous à personne. J'étais incapable de travailler. Je n'ai pas touché à la chemise rouge, posée sur mon bureau. Je suis restée assise devant mon ordinateur, à regarder l'écran d'attente s'installer. Puis je bougeais la souris pour le faire disparaître.

Le temps s'écoulait, lentement. Je pensais à mon fils. À cette nouvelle vie que je ne reconnaissais plus. À tout ce qui avait changé, si brutalement. À Andrew qui s'enfonçait jour après jour dans le silence. On se parlait peu. Il rentrait fatigué, las. Le visage fermé, sa petite bouche serrée. Il faisait illusion devant la petite. Puis il se renfermait dans sa coquille. On n'avait pas fait l'amour depuis l'accident. C'était comme si un mur s'était dressé entre lui et moi. Pourtant, j'avais soif de sa tendresse, de ses caresses. La nuit, quand il dormait, je me blottissais contre lui. Sa chaleur, sa force.

Mais il ne se réveillait jamais.

M. Vandenbossche devait avoir une petite trentaine. Il avait un léger accent belge, un teint de brique. Il était très remonté : « Je suis certain d'avoir vu des cheveux blonds, bouclés, assez longs, derrière le volant. Et un homme à la place du passager avant. Mais ils sont passés si vite. Je suis sorti comme un fou pour m'occuper du petit. J'ai planté là tous les gens dans mon bus ! »

La police prenait son temps ? Mais c'était scandaleux. Honteux. Je lui ai dit que j'avais décidé de retrouver le chauffard. Toute seule. Je rien avais pas parlé, ni à mon mari, ni à mes parents. Seulement à ma sœur. Elle était comme moi, folle à l'idée que cette personne n'avait pas encore été arrêtée. C'était pour cela que j'étais venue le voir ce soir. Pour recueillir le maximum d'informations. Pour faire mon petit bonhomme de chemin. La police allait peut-être « s'y mettre », mais elle prenait trop de temps à mon goût. Je ne pouvais plus attendre. Je rien pouvais plus.

Le jeune conducteur a hoché la tête. Il m'a dit qu'il me comprenait. Qu'il ferait la même chose à ma place. Quand il s'agissait d'enfant, de son enfant, on n'était plus le même. Sa femme avait eu une petite fille, cet hiver. Il en était si fier. Sa fille, c'était le centre de sa vie. Toute sa vie. Il m'a dit : « La personne qui a renversé votre fils et qui a pris la fuite, c'est la pire des lâches. Attrapez-la, madame. Faites tout ce que vous pourrez pour l'attraper. Vous l'aurez. Je le vois dans vos yeux. »

Une femme. Je n'arrêtais pas d'y penser. Une femme ? Était-ce possible ? Je n'en avais pas parlé à Andrew. Je ne lui avais rien dit de ma rencontre avec le conducteur de bus, avec Laurent. Je gardais tout pour moi. J'en parlais seulement à Emma. Elle m'encourageait. Me poussait. Me disait qu'il fallait que je continue. Qu'il fallait que j'avance. Sur mon ordinateur, j'avais noté tout ce que je savais concernant la plaque. 86 ou 56, ensuite LYR puis 54, 64 ou 84. J'avais été sur Internet trouver des vieux modèles de Mercedes. Celle qui avait renversé Malcolm devait être un modèle 500 SE. Elle devait dater de la fin des années 80. Elle était marron. Chez Mercedes, on appelait ce coloris précis « moka ».

Coma en verlan. Moka. Coma. 54 : Meurthe-et-Moselle. 64 : Pyrénées-Atlantiques. 84 : Vaucluse.

Que faisait cette personne à Paris ce mercredi-là ? Vivait-elle ici, dans la capitale, avec une plaque d'un autre département ? Où allait-elle ce jour-là ? Pourquoi roulait-elle si vite ? Ces questions revenaient, inlassablement. Je voyais la voiture. Son parcours. Sa vitesse. Le feu grillé. Le choc. Malcolm étendu sur le macadam. La fuite. Je ne pouvais plus passer devant l'endroit de l'accident. Je faisais tous les détours possibles pour l'éviter. J'aurais voulu que cet endroit n'existe plus, qu'il soit rayé de la carte. À jamais.

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