Jean-Marie Le Clézio - La quarantaine

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«Que reste-t-il des émotions, des rêves, des désirs quand on disparaît? L’homme d’Aden, l’empoisonneur de Harrar sont-ils les mêmes que l’adolescent furieux qui poussa une nuit la porte du café de la rue Madame, son regard sombre passant sur un enfant de neuf ans qui était mon grand-père? Je marche dans toutes ces rues, j’entends le bruit de mes talons qui résonne dans la nuit, rue Victor-Cousin, rue Serpente, place Maubert, dans les rues de la Contrescarpe. Celui que je cherche n’a plus de nom. Il est moins qu’une ombre, moins qu’une trace, moins qu’un fantôme. Il est en moi, comme une vibration, comme un désir, un élan de l’imagination, un rebond du cœur, pour mieux m’envoler. D’ailleurs je prends demain l’avion pour l’autre bout du monde. L’autre extrémité du temps.»

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Les tourterelles se sont levées en criant, comme elles devaient le faire quand ils débouchaient des broussailles, les jambes griffées d’épines. Mais je n’ai pas osé m’aventurer plus loin. Il y avait quelque chose de sombre, de fermé, quelque chose qui s’enveloppait dans mes jambes et m’empêchait d’avancer, un secret, un interdit que je ne pourrai jamais comprendre. Comme un yangue, comme un sortilège.

Dans la Bluebird, Lili attendait sans s’impatienter. Elle avait occupé le temps à peindre ses ongles en rouge carmin. Elle n’a posé aucune question. Quelle importance cela pouvait-il avoir, Médine, Anna? Pour elle ce ne sont que des noms, des lieux comme il y en a d’autres, un peu oubliés, perdus au fin fond des champs. Lili n’a rien que le temps présent, et c’est pourquoi tout est à elle. Elle ne peut rien avoir perdu. Elle n’a pas besoin de noms pour vivre, elle ajuste besoin d’un toit, d’un repas et d’un peu d’argent pour acheter son rouge à ongles et ses T-shirts. La radio diffuse un séga de Ti-frère, Anita, resté dormi, Anita. Est-ce qu’on dansait sur cette musique sur la plage noire de Tamarin, quand la coupe était finie? Lili me surveille du coin de l’œil. Elle trouve qu’on s’attarde trop dans cet endroit sinistre. Elle m’a dit: «Now, go back! Please!» En cahotant et en grinçant, la vieille Bluebird est retournée jusqu’à la grand-route. J’avais prévu de revenir par la côte, par le Morne et Souillac — pour rendre visite à la maison du poète Robert-Edward Hart de Keating —, mais il est déjà tard, et la pluie ne semble pas vouloir s’arrêter.

En repassant par Port-Louis, j’ai fait un détour par la Flore mauricienne pour acheter quelques napolitains pour la tante Anna, en souvenir de sa jeunesse. Lili a choisi un gros chou, qu’elle mange debout, comme une petite fille gourmande, en se léchant les doigts. Il faisait nuit quand nous sommes arrivés à la pointe d’Esny.

Anna avait vingt-trois ans quand le Patriarche est mort. Il a eu une agonie épouvantable, qui a duré des semaines, des mois. Son corps pourrissait sur place. Il était seul dans la maison d’Anna, brouillé avec son fils, détesté de toute sa famille, abandonné de tous, dans la seule compagnie d’un vieux Noir, un ancien esclave nommé Topsie, et de la nénène de sa petite fille, la vieille Yaya. Personne ne venait le voir. Ses compagnons de la Synarchie l’avaient délaissé l’un après l’autre, rebutés par sa méchanceté et son orgueil.

Chaque fois que Jacques venait le voir, au début, Alexandre le mettait à la porte, le traitait de charlatan, de pique-assiette. La seule qu’il avait tolérée, c’était Suzanne, sans doute parce qu’elle avait vécu à Paris et qu’elle n’avait aucun lien avec sa famille. Et puis elle était jolie. Un jour, il avait dit d’elle: «Elle a le profil idéal de la Parisienne, le nez retroussé, la bouche petite, le cou très long.» C’est Jacques qui racontait cela à mon père, quand il parlait de l’homme qui l’avait ruiné. J’avais neuf ou dix ans, je me souviens très bien de sa voix, de son accent chantant quand il parlait, après le dîner. J’essayais alors d’imaginer ce monstre, enfermé dans sa maison comme dans un château maudit, et parlant du profil de ma grand-mère Suzanne.

On l’a enterré à Curepipe, au cimetière du Jardin botanique, où il avait acheté une concession à la mort de sa femme. J’y suis allé un matin pluvieux, par curiosité plutôt que par piété. Je n’ai jamais aimé les cimetières, hormis ceux des musulmans, où il n’y a rien d’autre qu’un petit tas de terre et une pierre blanche. Le tombeau d’Alexandre et de Julie Archambau m’a paru sinistre, avec sa grande chambre de marbre noir importé d’Inde, et ces noms gravés en lettres majuscules dont la dorure se vert-de-grise. J’ai lu les noms marqués sur les tombes alentour, des noms que je ne connais pas. Jusque dans la mort, le Patriarche est resté seul, sans parents, sans amis.

Celui que je cherche, je ne le trouverai pas ici. Denis, le mari de Marie-Noëlle, un pêcheur de Ville-Noire, m’a emmené dans sa pirogue jusqu’au vieux cimetière, en amont de la rivière La Chaux. À l’endroit où la rivière fait un coude, un sentier boueux gravit la colline. Denis est resté à côté de la pirogue, pour surveiller, dit-il, mais je pense qu’il n’a pas très envie de rendre visite aux grands mounes qui ont été enterrés ici. Les tombes sont plus modestes, en pierre de lave rongée par les intempéries. Aucun nom n’est lisible, sauf peut-être le nom de Pitot, et un prénom, Pierre. Ce que je voudrais voir, ce sont les anciens bûchers, à Curepipe, à Port-Louis, dans la vallée des Prêtres, au Morne, à Grand Baie. Mais c’est l’île tout entière qui est le champ crématoire des coolies, toute cette terre rouge sur laquelle poussent les cannes, ces routes où marchent les tourterelles, les plages, les collines, les jardins et même les rues des villes nouvelles. Partout ici, l’on marche sur les cendres des travailleurs indiens.

C’est pour cela qu’Anna est restée. Elle n’a jamais voulu partir, quitter les morts. Elle est restée là où elle est née, elle ne s’est pas mariée, elle n’a pas voulu vivre comme les autres. Elle n’a rien accepté, surtout pas l’oubli. Tous les autres sont partis. Ils sont allés chercher fortune ailleurs, au Cap, à Durban, en Australie, aux États-Unis. À la mort de Canute, à la chute de la maison Archambau, ils n’ont pas résisté. Ils ont eu peur de la pauvreté, de devoir renoncer aux privilèges, à la gloire. Même Jacques est parti. Qui aurait eu besoin d’un Archambau comme médecin? Il n’avait pas sa place dans un monde où tout se délitait. Le rêve de ma grand-mère Suzanne, ouvrir un dispensaire à Médine, œuvrer pour l’amélioration des conditions de vie des travailleurs immigrés, rien de tout cela ne pouvait résister aux cabales, aux médisances, à la mauvaise volonté. Mon père avait quatorze ans quand a eu lieu la reddition de comptes, et que mon grand-père a décidé de quitter définitivement Maurice. Avec le pécule du règlement de la propriété d’Anna, Jacques s’est installé médecin dans la banlieue de Paris, à Garches. Il consultait gratuitement, réalisant en petit le souhait de ma grand-mère. Suzanne, elle, donnait des leçons de français dans une école de jeunes filles. Jacques a élevé Noël dans la haine de tout ce qui se rapportait à la canne à sucre. «Plutôt être damné que de faire de mon fils un sucrier.» Jacques disait «sucrier» comme il aurait dit «négrier». Et moi, Léon Archambau, le dernier de mon espèce (selon l’orgueilleux motto que Jacques avait inventé quand il était adolescent), je suis devenu médecin aussi, un médecin sans clientèle, sans travail, errant avant de partir pour le bout du monde.

Chaque après-midi, vers une heure, je suis dans le jardin du couvent, assis à l’ombre d’un grand magnolia, en attendant qu’Anna me rejoigne. Quand elle apparaît, un peu chancelante, à la porte de son pavillon (elle m’interdit absolument de prononcer le mot «bungalow», qui est anglais), je suis surpris à chaque fois par sa fragilité, sa maigreur. Elle me fait entrer dans sa chambre noyée par la pénombre. Malgré la chaleur étouffante, elle porte une robe grise strictement boutonnée jusqu’au cou. Elle ressemble à une bonne sœur, avec ses chaussures de cuir, sa robe, ses cheveux courts.

Sur la table de sa cuisine, les fourmis ont envahi une assiette remplie des restes de son déjeuner. Avec de la viande hachée et du riz, elle a confectionné de petites boulettes régulières. Quand j’arrive, elle se hâte de les recouvrir avec une serviette blanche qu’elle noue aux quatre coins. Je ne lui ai rien demandé. Mais ça n’est un mystère pour personne, ici, à Mahébourg. C’est le Chinois Chong Lee, de la grand-rue, qui lui procure la poudre blanche, la strychnine qu’elle mélange à la viande. Tout son argent de poche passe à acheter le poison, l’argent que lui envoient ses cousins, et celui que je lui envoie fidèlement de France, comme mon père le faisait avant moi.

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