San-Antonio
Grimpe-la en danseuse
ROMAN D’UNE HAUTE TENUE MORALE ET LITTÉRAIRE DANS LEQUEL L’AUTEUR ASSURE LA CONCORDANCE DES TEMPS ET MET UN PRÉSERVATIF POUR BAISER.
À mon cher HIPPOLYTE,
qui a la charge retoutable de
perpétrer une lignée d’exception.
SAN-ANTONIO
EXCELLENTE PREMIÈRE PARTIE
Pendant que je la grimpais en danseuse, Salami faisait semblant de dormir dans le dressing-room.
Il avait suivi passionnément notre première étreinte, marquant son intérêt par de légers gémissements. Ceux-ci ayant troublé ma concentration, j’avais prié mon cador de s’évacuer à côté, avant de faire rebelote à la dame. Déçu et vexé, il s’était résigné de mauvaise grâce, allant jusqu’à nous gratifier d’un vent maléfique avant de nous laisser.
Cet animal, doué d’une intelligence supérieure, appréciait fort les ébats humains ; au point d’avoir voulu, la semaine passée, participer à une séance de baise à laquelle je me livrais avec une donzelle dévoreuse de membres.
Cette personne me taillait le calumet de l’happé lorsque le polisson quadrupède se permit de lui passer une langue dans l’ornière à délices.
Affolée par cette intervention inattendue, ma partenaire avait poussé un cri dont les occupants de la chambre voisine doivent se souvenir car il était de force 4 sur l’échelle de Richter.
Je me montre d’une grande bonté envers les animaux, mais sans tomber dans la zoophilie pour autant. La confusion des genres, why not ? Des espèces, que non point ! Je suis un homme rapide du braque, mais qui croit en Dieu. Ce sont là deux forces complémentaires grâce auxquelles j’aurai traversé l’existence avec un minimum d’encombres. Mon mérite aura été de mêler adroitement matérialisme et spiritualisme, alors que mes semblables s’estiment obligés de neutraliser l’un au profit de l’autre. Sépare-t-on deux béquilles ?
Ces considérations, qui ne sont pas sans queue ni tête, conviens-en, auraient pu me distraire de ma partie de baisanche si je les avais conduites plus loin, aussi les abandonnai-je promptement pour accorder à ma partenaire ce qu’elle espérait de moi.
Nous nous jetâmes donc dans la frénésie sexuelle que nous espérions l’un de l’autre, la conduisîmes à son apothéose, et nous nous retrouvâmes ensuite pareils à deux naufragés rejetés sur la plage par une tempête somme toute bienveillante.
À présent, ami lecteur, comme l’écrirait un auteur du XIX e siècle, voire du dix-huitième arrondissement, quelques explications s’imposent.
Tu te poses deux questions essentielles auxquelles je me dois de répondre. Où se trouve San-Antonio ? Qui baise-t-il ?
Réponses. Je suis à Ostende, ville belge sur la mer du Nord, connue pour sa plage et son ostréiculture (ce qui équivaut à dire qu’on y déguste en abondance des huîtres et des moules frisées). J’enfile le parfait amour en compagnie d’une personne prénommée Astrid, en souvenir probablement de l’infortunée reine que son époux (qui ne fut ni un grand roi, ni un bon conducteur) fracassa contre un sapin helvète peu avant la dernière guerre.
Cette inchanceuse altesse était scandinavement belle, aussi son tragique trépas porta-t-il un rude coup à la monarchie d’outre-Quiévrain. Heureusement pour notre vaillante alliée, le fils de cette reine de légende (Boudin I er), dégota à son tour une épouse édifiante nommée Babiola, avec laquelle il eut beaucoup de messes et de chapelets, mais pas d’enfants.
Me montrant intarissable sur les familles royales, il me plaît de préciser que la souveraine eut un frère qui, bambocheur notoire, défraya les chroniques mondaines. Le champagne et les serpentins qui plurent sur sa vie n’empêchèrent pas la municipalité de Marbella (Andalousie) de lui ériger une statue à un carrefour de la ville. Las ! le sculpteur qui la réalisa, oublieux des règles de la perspective, l’édifia grandeur nature, si bien que le personnage ressemble à quelque Charlie Chaplin modèle réduit.
Cette silhouette informelle n’ajoute pas grand-chose au prestige de la noble et ardente Espagne, et ne retire rien à sa gloire. Étant nulle, elle est donc non avenue.
Et voilà, j’en ai terminé avec cette question royaleuse.
Mais parlons cul, façon de ne pas se cantonner dans l’historique.
Mon Astrid à moi, je l’ai rencontrée sur le vol Nice-Paris, que je faillis d’ailleurs rater. Un hasard plein de mansuétude m’avait placé à son côté. Je fus d’emblée sous le charme de ses grands yeux bleus et la fascination de sa bouche vorace, dont illico j’imaginai le somptueux va-et-vient le long de ma tige maîtresse.
Nous nous sourîmes spontanément, avec cette merveilleuse connivence des couples qui jouissent d’une sécrétion spontanée, si j’ose dire.
En guise d’entrée en matière, je lui fis intelligemment remarquer combien le temps était beau. Elle m’avoua s’en être aperçue. Là-dessus, l’avion décolla sans problème.
Lorsque nous atteignîmes l’altitude de huit mille mètres, je m’enhardis à déposer ma dextre sur son genou. Elle ne me rebuffa point. J’y vis un tacite consentement. Sa jupe étant de l’espèce portefeuille, ce fut pour ma main un jeu d’enfant de repter jusqu’à son slip. Je l’obtins en direct car, compte tenu de la météo, elle ne portait pas de collant, cette honte de la civilisation.
La peau de ses cuisses me sembla plus douce que des pétales de lis.
Mon sens tactile la parcourut avec opiniâtreté. Je n’y découvris aucun bouton mal venu, nul grain de beauté intempestif, pas le moindre poil avant-coureur. C’est donc d’un médius altier que j’établis une tête de pont à l’orée de sa chatte.
Guère plus tard, je feignis une légère quinte de toux et portai ma main à ma bouche de manière à ce que mon doigt-estafette se trouvât sous mes narines vigilantes. Un délice ! Rarement odeur de chattoune ne me parut plus suave. J’en fus transporté.
Au moment où nous nous posâmes à Paris, Astrid (elle m’avait annoncé son merveilleux prénom dans un râle) avait prit son foot à deux reprises ; une première fois à l’aplomb de Valence (Drôme), une seconde en survolant les vignobles bourguignons, à gauche de la Romanée Conti.
Quand nous atterrîmes, je coltinais dans mon bénoche une hallebarde de garde pontifical. Cette érection me quitta rapidement lorsque je vis ma compagne de voyage à la verticale.
Cette chérie mesurait plus d’un mètre quatre-vingt-quinze ! Ce qui, sur l’instant, m’impressionna, car les femmes plus longues que moi me font peur. Je me suis rarement risqué à baiser des filles dont la taille dépassait largement la mienne. Les dinosaures femelles m’ont toujours effrayé.
Elle ne s’aperçut pas de ma médusance et s’engagea dans la travée, son « biouty quèse » au bout du bras. Elle réussit à me palper les bourses de sa dextre valide avant de s’engager dans l’escadrin. Je n’en conçus nul émoi, donc aucune reconnaissance. Elle m’avait prévenu qu’elle serait attendue à l’arrivée. Cette annonce, contrariante sur le moment, devenait source de soulagement.
N’ayant qu’un bagage à main, je me fondis dans la foule sans même apercevoir le glandu qui l’attendait et devait ressembler, selon toute logique, au géant Atlas.
Je l’oubliai sans plus tarder.
Rentrai chez moi avec l’impression d’avoir une figue de Barbarie inépluchée à la place du cœur. Je venais de conduire Félicie sur la Côte d’Azur pour qu’elle se remette d’une méchante congestion pulmonaire qui m’avait beaucoup inquiété. Je déteste que ma Féloche ne soit pas à la maison. Il est rare qu’elle la déserte, et quand cela se produit, je me figure qu’elle est en danger.
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