D'après M'sieur Félisque qui m'a éducationné su' l'sujet, Napo s' s'rait embourbé une trentaine d'greluses n'au cours d'sa vie, c' qu' je consomme par trimesse. Tu vas m'dire qu'y faut choisir : baiser ou faire la guerre, car tu n' peuves pas charger un nennemi au sabre et sabrer un' pécore en mêm' temps. J'ai toujours mieux aimé planter ma bite qu'un' baïonnette. Moive, les infusions d' sang, j'déteste pas, n'à condition qu' ça s' fasse d'homme à homme et à poings nus. Défoncer la gueule d'un pourri n'manque pas d' charme quand c'est l' vilain qui t' cherche des rognes.
Pour t'en reviendre à la zifolette farceuse d'Poléon, ell' le faiblissait n'au lieu d'lu donner du tonus. Dès qu'un' frangine lu vidait les aumônières, y s'croiliait son débiteur pour l'avoir bitée. La vraie pomme à l'huile ! N'habituellement, les Corsicos transforment les gerces en gagneuses. Dans son cas, c'est lui qui f'sait le pigeon ! Un' pipe : un' rente ! Un' feuille d'rose : un tit' d' noblesse ! Et tout à lav'ment !
La bonne affure pou' les gonzesses.
Quand est-ce y leur déballait ses roustons tannés par la pratique du bourrin, il éperduait de r'connaissance. Dans l' fond, c'tait modeste de la part d'un gazier qu'a fait tant tell'ment de veuves qu' la pauv' France s'en est pas encore r'mise complèt'ment !
Mais j' dégraisse, Berthe. J' m'écartèle d'mon propos. En tant qu'son descendant, faut qu' je fasse taire ces critiques. J'lu doive l'respecte, biscotte la famille c'est sacré.
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J'veuille pas insister su' les pouffes qu'il a grimpées, not' Illuste. Pour beaucoup ça t'été du rapidos : un coup dans les baguettes et Malboro s'en va t'en guerre ! C't' marotte d'désambuler su' les routes d'Europe avec des milliers d' zigus qu'auraient tant préféré rester chez eux à moud' le blé, presser l'raisin, et empaffer leur rombiasse ! C' qu'a d'malheureux, vois-tu, Berthy, c'est qu' les guerreriers font plus causer d'eux qu' les pacifiqueurs et qu'on écrit des bouquins su' les tyrans, mais pas à propos du mec ayant inventé le vasquecin cont' la rougeole ou la pommade pou' la chaude-lance.
C' qu' j'en r'viens, c't'aux frangines.
A dix-huit ans, y s'laisse déberlinguer par un' prostipute qui y estirpe l'escarguinche d'sa coquille et lu fait mousser l'blanc d'œuf. Fier service ! On n'direra jamais c'qu'un jeune homme doive aux putes. Joli d' s'astiquer l'panais, mais l'moment arrive, inéluctab', qu'tu doives t'faire prend' en main par un' gosseline d'espérience, sinon c't'un pédoque qui t' déboutonne la soutane dans un cinoche et t'oriente su' la terre jaune. Moive, j'ai z'eu des potes qu'ont chopé du rond au départ et n' s'en sont jamais r'mis. Un' fois craqué la rondelle, tu d'viens un inepte d'la chose ; or un chibraque dans le pétrousquin, c'est pas c'qui fait progresser la race humaine, quand bien même ça guérit les émeraudes.
N'aftère sa radasse, mon parent s' la met en veilleuse quéques années avant d'monter à la tringlette pou' d'bon. C't'ainsi qu'y s'embourbe une mijaurée de seize piges : Emilie Laurenti. Et pis v'là qu'au début d'1795 y rencontre un' aut' berlinguée du même âge, Désirée Clary, brune bien roulaga. Y s'l'emplâtre recta (p't'être rectum) !
Un' jouvenceuse d'plus. C't'à ça qu'on voye sa timidité ! Probab' qu'les éplucheuses d'braguettes y font peur. Y veuille bien s' risquer à palucher des chattounes verginales, mais pas encore des babasses écarquillées, comme s'y craindrait d'y paumer sa baratte à moules.
N'au départ, c'tait son frangin Joseph qui guignait la craquette à Désirée ; mais av'c Poléon : pas d'ça, Louisette ! Y fait valoir sa suprême assise et conseille au frelot d'marida Julie, l'aînée. Ce glandu accepte. Pour lui, des rillettes ou du caviar, c'est du pareil au kif.
Mais là y a un os dans la noce, dirait l'Antonio : les vieux d'la Désirée n'veuillent pas d'deux Bonaparte dans la famille. Y pouvaient avoir l'aigle, y s'contentent du pigeon !
En plein suif, l'futur Empereur regagne Pantruche.
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Cézigus a pigé qu'pour arrivever à quèqu'chose, faut se frotter aux grands d'c'monde. Y s'fait inviter chez Barabbas qu'on appelle « Le Roi d'la République », près d'qui s'pressent les plus chouettes greluses. Le Barabbas à moinve qu'ça soye Barras, j' m'y perds, s'enquille un' mousmé d' first quality nommée Thérèse Tallien. C' t'un' découilleuse d'classe, entourée d'mômes surchoix, parmi lesquelles Maâme Récamier et un' pouliche aux lotos salingues nommée Joséphine de Beauharnais.
Tu m'as compris tu m'as, hein, Berthy ?
Joséphine ! Un' sacrée pétroleuse.
Dans l' salon d'la Tallien, mon onc' fait des ravages. Il a la gale, il est craspect, mal fagoté, n'au point qu'la Thérèse lu obtentionne du tissu pou' s'reloquer, mais il jacte comm' un merle blanc et les pépées s'entichent d' sa Pomme. Bientôt, y va dégainer dans l'alcôve à Joséphine et lu ramoner la case-trésor.
Salope comme l'est la brunette, il tombe dingue d'elle en plein, lu écrit des babilles qui f'raient chialer un concierge d'usine. Tiens, Félisque m'en a cité des passages capab' d'éclater les burnes d'un sapajou.
J't' cite :
« Ton portrait et l'enivrante soirée d'hier n'ont point laissé de repos à mes sens, douce et incomparable Joséphine. »
Et pis encore :
« En attendant (d't' r'voir) mi dolce amore, un million de baisers ; mais ne m'en donne pas, car ils brûlent mon sang ! »
D'quoive s'poignarder l'oigne av'c un plantoir d'jardin, non ?
Comment ? Ah ! tu trouves ça bien tourné, toi, Berthe ? Y a pas à dire, j'comprendrerai jamais rien aux péteuses !
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Poléon veut la marida, mais elle chipote, l'trouvant trop pauvret, la conne !
A la longue, pourtant, elle dit « banco ». Ils font un contrat d'mariage en bon uniforme. Su' c'documentaire, la morue s'rajeunit d' trois piges tandis qu'lui s'vieillit d'dix-huit mois. Môm'ries ! Il tire sa souris deux noyes d'enfilées et part conquir l'Italie. N'au passage, j' t'signalise que la Joséphine a la clape daubée et les ratiches kif les touches noires d'un piano ; elle fouette du tout-à-l'égout et ses beaux harnais (fallait pas qu' j' la rate, cell'-là) puent la brune en pleine cultur' physique ; mais ça y stimule l'popaul. Un guerrerier, ça aime la v'naison.
Davantage qu'elle pue, davantage qu'il gode ! Note qu'j' partag'rais ses goûts : moive, un' crougnasse trop lavée, c'est comm' un' huître amerloque qu' ces cons, là-bas, rincent dix fois à l'eau claire avant d'la gober !
J'espère qu'au moins ell' s'astiquait les recoins pour s'laisser grimper. N'à c't'époque, les blablutions s'opéraient à sec ; faut dire qu'Jacob Delafon encombrait pas les appartes comm' d'nos jours où qu'on peut accumonceler des réserves d'patates dans les baignoires.
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N'à peine il a décarré qu' la mère Bonaparte se fait r'luire la chagatte à tout berzingue, allant jusqu'à s'embourber les têtes d'camp d'son mec : Murat et Junot qu'il a envoiliés à Paname pou' la chercher ! Tu parles d'une incendiée d'la craquette. Question d'faire décharger la populace, son fion c't'était le port du Have ! Sans compter qu'elle s'tait entichechée d'un bioutifoule yeut'nant nommé Hippolyte, comm' l'garçon à mon n'veu Patrice !
Et pendant qu'on lu décoiffe l'frifri à coups d'guiseau, l'grand conquéreur lu écrit : « Prends des ailes, viens, viens ! Un baiser au cœur et puis un peu plus bas, bien plus bas ! » C'qui indiqu'rait qu'y lui interprétait des tyroliennes d'broussailles et lu écrémait l'brigounet à la menteuse !
Ou j' m'goure ?
* * *
Leur vie couplière à Poléon et Joséphine cahin-cahate, va son ch'min, av'c des z'hauts et des bas : y s'aiment, y s'aiment plus ! Y s'font des scènes, puis liment pendant trente-six plombes. Des comédies d'louftingues !
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