Jean-Claude Mourlevat - Terrienne

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Terrienne: краткое содержание, описание и аннотация

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Nous nous sommes revus tous les trois la semaine suivante. Jens nous a invitées dans un restaurant, rue Saint-Jean, un des meilleurs de la ville, à ce qu’on dit. Pour moi, c’était un peu confiture aux cochons. Je dois être trop jeune, la nourriture raffinée m’est indifférente, je me régale cent fois mieux d’une pizza trois fromages avec mes amies. Mais bon, Jens avait demandé à Gabrielle d’inviter la personne de son choix, et elle m’avait choisie.

Le repas a plutôt bien commencé. Jens s’est peut-être un peu trop mis en avant, dans le genre « je suis très à l’aise dans ces endroits-là, je sais goûter les vins, je sais plaisanter avec les serveurs », mais ça restait supportable. Il s’est montré assez chaleureux à mon égard, et curieux de ce que je faisais. Je lui ai dit que je vendais des chaises et ça l’a fait rire. Je ne sais pas pourquoi les gens rient quand je leur dis que je vends des chaises. Et puis il est arrivé ceci, juste avant le dessert. Gabrielle s’est levée pour aller aux toilettes. Elle a traversé la salle et Jens l’a suivie des yeux jusqu’à ce qu’elle disparaisse ; puis, au moment où il aurait dû revenir à nous deux, il ne l’a pas fait. C’était pourtant la chose la plus naturelle du monde : se tourner vers moi, relancer la conversation et nous épargner ainsi la gêne d’un tête-à-tête silencieux. Il ne l’a pas fait. Il m’a ignorée pendant tout le temps de l’absence de Gabrielle. Il s’est comporté exactement comme une personne qui se retrouve seule dans une pièce et qui n’a plus à faire bonne figure.

Ça n’a l’air de rien, dit comme ça, mais c’était très impressionnant. Il était ailleurs, rentré en lui-même, inaccessible, comme plongé dans une réflexion intense. Ses yeux étaient plissés. Sa bouche serrée. Il semblait avoir suspendu sa respiration. Et il ne lâchait pas du regard l’endroit où Gabrielle avait disparu, à l’angle de la salle. Je me suis sentie très mal. J’étais tétanisée, incapable de lui parler. Je me souviens d’avoir pensé : « Ce type est malade. Ou fou. »

Dès que Gabrielle est réapparue, il a retrouvé son comportement d’avant, sociable et attentionné. Le repas s’est poursuivi sans autre incident, mais je n’ai pas pu me défaire de cette vision : Jens absent, transfiguré, qui regarde l’endroit où Gabrielle a disparu et où elle va réapparaître. Deux mots me sont venus : « chasseur » et « proie ».

J’ai essayé de me raisonner : si ma sœur, qui n’était ni idiote ni futile, avait choisi cet homme, ce n’était pas pour rien. Il était peut-être fatigué ce soir-là et il avait eu cet étrange moment d’absence. Je me trompais sans doute, c’était un type bien.

Mais j’étais déjà convaincue du contraire. J’avais la certitude d’être entrée par accident à l’intérieur de sa tête, dans un recoin de son cerveau inconnu de Gabrielle elle-même. Comme si j’avais accédé à sa maison, poussé la porte d’une pièce interdite, dans sa chambre peut-être, regardé dans un tiroir ouvert, vu dedans quelque chose que je n’aurais pas dû voir et quitté les lieux sans que personne n’ait rien su de ma visite.

J’ai revu Jens deux ou trois fois, chez nos parents à Saint-Just-sur-Loire, et chez Gabrielle, rue Guy-Colombet à Saint-Étienne. Je l’ai observé avec attention, à l’affût d’un signe de plus de sa bizarrerie. Il n’a rien laissé paraître d’anormal. Et puis, j‘ai fait ce cauchemar où il lui faisait du mal.

Quelle sorte de mal, je ne sais pas. Cela n’apparaissait pas dans le rêve, c’était caché. Je la voyais seulement pleurer et je le voyais, lui, le visage tordu par la haine. Il la tirait par le bras, violemment, pour l’emmener de force quelque part, ou au contraire pour l’éloigner d’un endroit où elle n’aurait pas dû se trouver. Et la chose la plus étrange était celle-ci : il avait l’air dégoûté par elle, voilà, dégoûté. Je l’ai fait plusieurs fois, ce cauchemar, et je me réveillais dans un état de terreur épouvantable. Pour m’en extraire, pour remonter de ces ténèbres, je devais allumer toutes les lumières de ma chambre et écouter trois fois de suite She has no time de Keane.

Alors, j’ai appelé Gabrielle et je lui ai dit que je devais lui parler d’urgence. C’est le mot que j’ai employé : d’urgence. Ils n’avaient pas perdu de temps, le mariage était programmé pour l’automne. Mes parents ne le voyaient pas d’un mauvais œil. Jens serait le gendre parfait, solide, attentif et, ce qui ne gâtait rien, bien assis dans la vie avec son confortable salaire d’ingénieur chimiste.

Nous nous sommes retrouvées dès le lendemain, Gabrielle et moi, au café du cinéma Méliès. J’ai commandé un Perrier et elle un espresso , je crois. On se faisait face. J’ai trouvé Gabrielle plus jolie que jamais, avec son abondante chevelure rousse, ses yeux verts et sa peau claire. Elle tient de maman. Moi, je tiens du côté sombre de mon père et de mes grands-parents, du côté de l’Italie. Il y avait beaucoup de monde, un peu trop à mon goût. Les gens étaient venus pour le dernier film des frères Coen, je m’en souviens. J’ai attendu que les consommations arrivent et je me suis jetée à l’eau :

– Gabrielle, pardonne-moi, je vais te choquer, mais je pense que tu ne devrais pas te marier avec Jens.

Elle n’a pas été choquée mais stupéfaite. J’étais sa cadette de sept ans et si l’une devait donner des conseils à l’autre ce n’était pas moi. Elle n’avait pas soupçonné une seconde mes réserves à propos de Jens. Elle était certaine que je l’appréciais, que je l’admirais. Elle pensait peut-être même que j’étais amoureuse de lui.

– Tu peux préciser ta pensée ? a-t-elle dit froidement, et rien d’elle ne bougeait à part ses lèvres.

– J’ai rêvé qu’il te faisait du mal. Plusieurs fois.

Elle a laissé passer quelques secondes, le temps d’encaisser.

– Quelle sorte de mal ?

– Je ne sais pas. Ce n’est pas visible. Il est fou de rage, il te tire par le bras et toi tu pleures.

– Il me frappe ?

– Non. Il t’entraîne. Il te menace. Je ne le vois pas te frapper.

Je baissais la tête. Je n’osais plus la regarder après ce que je venais de dire. Elle s’est tue à nouveau, comme si elle réfléchissait à la meilleure réponse possible.

– Anne, tu as fait un cauchemar. Tout le monde en fait. Tu as vu Jens me faire du mal, mais c’était en rêve. Ça ne veut pas dire qu’il va me faire du mal en vrai . Ce serait trop simple. Je ne suis pas psychiatre, mais je crois que c’est beaucoup plus compliqué que ça, le rapport entre les rêves et la réalité.

J’étais au bord des larmes. Des gens se sont retournés sur nous. Alors Gabrielle a rapproché sa chaise et s’est penchée vers moi par-dessus la table.

– Anne, enfin… qu’est-ce qui t’arrive ?

Elle a pris mes mains dans les siennes.

– Écoute-moi. Jens est le type le plus doux et le plus patient que j’aie jamais rencontré. Tu me connais, tu sais à quel point je peux être pénible et agaçante parfois, eh bien, il supporte tout. Je ne l’ai jamais entendu élever la voix. Alors me battre… Et puis autre chose que tu dois savoir : j’aime cet homme. Je n’en ai jamais aimé un autre comme ça. Voilà, c’est dit.

J’ai su que c’était perdu d’avance, que j’avais fait une erreur en lui parlant. J’ai abandonné l’idée de lui rapporter le comportement de Jens au restaurant. Je me rappelle seulement la fin de notre conversation.

– Ça va mieux, je t’ai un peu rassurée ?

– Oui, un peu.

– Je peux me marier, alors ? J’ai ton accord ?

Je me suis forcée à sourire et j’ai ajouté :

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