Agnès Martin-Lugand - Entre mes mains le bonheur se faufile

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Entre mes mains le bonheur se faufile: краткое содержание, описание и аннотация

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Depuis l’enfance, Iris a une passion pour la couture. Dessiner des modèles, leur donner vie par la magie du fil et de l’aiguille, voilà ce qui la rend heureuse. Mais ses parents n’ont toujours vu dans ses ambitions qu’un caprice : les chiffons, ce n’est pas « convenable ». Et Iris, la mort dans l’âme, s’est résignée.
Aujourd’hui, la jeune femme étouffe dans son carcan de province, son mari la délaisse, sa vie semble s’être arrêtée. Mais une révélation va pousser Iris à reprendre en main son destin. Dans le tourbillon de Paris, elle va courir le risque de s’ouvrir au monde et faire la rencontre de Marthe, égérie et mentor, troublante et autoritaire…
Portrait d’une femme en quête de son identité, ce roman nous entraîne dans une aventure diabolique dont, comme son héroïne, le lecteur a du mal à se libérer.

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Quelques instants plus tard, Marthe vint me chercher, elle souhaitait me présenter au successeur de son mari. Elle m’entraîna à l’autre bout de la pièce.

— Gabriel ! appela-t-elle.

Je m’attendais à rencontrer un vieux monsieur de la finance. Et c’est un homme d’une petite quarantaine d’années qui se dirigea vers nous. Loin d’être gringalet, la démarche assurée mais nonchalante, costume et cravate sombres, chemise avec col italien et boutons de manchette, des traits de canaille, rasé de près. En un mot, le genre de type sur lequel on se retourne dans la rue.

— Oui, Marthe, lui répondit-il sans me quitter des yeux.

— Je voulais enfin te présenter Iris. Iris, voici Gabriel.

— Enchantée, lui dis-je en lui tendant la main.

Il la tint quelques secondes dans la sienne. Lorsqu’il la lâcha, je me surpris à penser que j’aurais voulu qu’il la garde plus longtemps encore.

— La protégée de Marthe, me répondit-il d’une voix cassée. C’est un vrai plaisir de te rencontrer. Je commençais à penser que Marthe fantasmait ton existence, mais tu es bien réelle.

Il inclina légèrement la tête et ses yeux me parcoururent des pieds à la tête.

— J’espère avoir souvent l’occasion de te voir, reprit-il.

— Ne viens pas dissiper Iris pendant qu’elle travaille, intervint Marthe.

— Loin de moi cette idée, je pourrais juste venir la regarder… coudre.

Il me décocha un sourire ravageur qui me fit rougir jusqu’à la racine des cheveux.

— Depuis quand t’intéresses-tu à la mode ? lui demanda sèchement Marthe.

— Depuis une minute et quarante-cinq secondes.

En souriant, je baissai la tête. J’aurais voulu trouver un mot d’esprit, quelque chose à dire, n’importe quoi en fait, mais j’étais confuse et embrouillée par la simple présence de cet homme.

— Iris ? m’appela-t-il.

Je levai timidement les yeux vers lui.

— Je peux t’offrir une coupe de champagne ?

— Euh…

— Non ! décréta Marthe.

Elle me prit à nouveau par le coude, et m’entraîna dans son sillage. Je ne pus m’empêcher de me retourner, Gabriel ne me lâchait pas des yeux. Lorsque nos regards se croisèrent, il me fit un clin d’œil, et je rougis, encore. Je sentis la poigne de Marthe se raffermir sur mon coude, ce qui me ramena brusquement les pieds sur terre.

— Iris, si tu avais besoin d’une preuve de ton sex appeal, tu l’as. Cependant, méfie-toi de Gabriel.

— Mais… Marthe… je…

— Je l’aime comme mon fils, mais c’est un séducteur sans respect pour les femmes et tu es mariée. Je te dis cela pour ton bien.

Cette femme lisait en moi comme dans un livre ouvert.

— Ne vous inquiétez pas, lui répondis-je.

Jusqu’à la fin de la soirée, Marthe ne me quitta plus d’une semelle. Je souriais aux personnes qu’elle me présentait, je l’écoutais leur parler.

Discrètement, je cherchai Gabriel du regard. Ce furent des éclats de rire féminins qui me guidèrent jusqu’à lui. Il était entouré de plusieurs femmes. On aurait dit des mouches autour d’un pot de miel. J’étais même prête à parier que deux d’entre elles étaient mère et fille. Elles riaient toutes bêtement à ses blagues. Il avait un mot pour chacune, il leur parlait à l’oreille, elles rosissaient de plaisir et battaient des cils. Les mains de Gabriel étaient baladeuses, mais d’après ce que je voyais, il ne franchissait jamais la limite, se contentant d’émoustiller son auditoire. Marthe avait raison : un homme à femmes. Elle n’aurait pas été là, je me serais fait avoir par son charme. Alors que j’étais mariée, que j’aimais mon mari… C’est à ce stade de ma réflexion que je croisai son regard. Sans me quitter des yeux, il susurrait des mots doux à l’oreille d’une de ses groupies.

— Il est tard, me dit Marthe.

À regret et avec l’impression d’être prise en faute, je brisai la connexion visuelle avec ce Don Juan. Marthe m’observait.

— Il y a des taxis en bas de l’immeuble, prends-en un et rentre chez toi. Reviens ici lundi soir.

— Merci, Marthe, pour la soirée… pour tout.

Sans lâcher mon coude, elle s’approcha de moi et frôla ma joue de ses lèvres.

— Tu as été parfaite, me dit-elle à l’oreille de sa voix ensorcelante.

Puis elle me regarda droit dans les yeux. Je baissai la tête. Sa main quitta ma peau, et elle retourna à ses invités.

J’allai directement dans le vestibule pour récupérer mon manteau. Le préposé au vestiaire s’apprêtait à m’aider à l’enfiler.

— Laissez, je m’en occupe.

Je me retournai. Gabriel était appuyé au chambranle de la porte, les bras croisés. Il s’empara de ma veste avec autorité tandis que je le regardais faire, pétrifiée.

— Tu pars déjà ? On n’a pas fait connaissance.

— Une prochaine fois… peut-être.

Il me fit un grand sourire et me présenta ma veste. Je n’eus d’autre choix que de me laisser faire. Il prit tout son temps pour la remonter jusqu’à mes épaules.

— Laisse-moi t’inviter à dîner, me dit-il à l’oreille. Juste toi et moi, sans ces vieux croûtons, et surtout sans Marthe.

Je me retournai vers lui, il ne bougea pas d’un pouce, si bien que nos corps se frôlaient. Il affichait un vrai sourire de play-boy.

— C’est très gentil, mais je dois refuser.

Il inclina la tête, et fronça les sourcils sans cesser de sourire.

— Je suis mariée.

Pourquoi avais-je la désagréable impression de servir ça comme une excuse minable ?

— Qui irait lui dire qu’on dîne ensemble ? Certainement pas moi. Un petit mensonge de temps en temps, c’est excitant.

Je lui souris et le regardai à travers mes cils.

— C’est non, désolée. Bonne fin de soirée.

Je tournai les talons pour camoufler mes bouffées de chaleur de plus en plus envahissantes, et donc visibles. Il passa devant moi et m’ouvrit la porte.

— Bonne nuit, Iris.

Le lendemain matin, je montai dans le train la tête encore dans les nuages et impatiente de raconter à Pierre que mes créations avaient remporté un vrai succès. Il m’attendait sur le quai de la gare. Après un baiser rapide, il m’entraîna vers la voiture.

— Je te dépose et je repars tout de suite, me dit-il une fois en route.

— Tu travailles aujourd’hui ?

— Je pensais te l’avoir dit pour l’astreinte. J’essaierai de ne pas rentrer tard ce soir.

Je me murai dans le silence pour ne pas lui balancer ma déception à la figure. En moins de dix minutes, nous fûmes devant la maison. Je décidai de ne pas mettre d’huile sur le feu.

— Je nous prépare un petit dîner sympa pour ce soir, lui proposai-je le sourire aux lèvres.

— Ne te casse pas la tête, je prendrai à emporter. De toute façon, je suis crevé, je ne ferai pas long feu.

Je détachai ma ceinture, m’approchai de lui, lui caressai la joue et l’embrassai.

— Je voudrais me faire pardonner de ne pas avoir été là hier soir.

— Y a rien à pardonner, ne t’en fais pas. Regarde, je bosse aujourd’hui. Je dois y aller.

À regret, je me détachai de lui et sortis de la voiture. Je lui jetai un dernier coup d’œil, attrapai mon sac à l’arrière et entrai dans la maison.

Vingt heures. Coiffée, maquillée, habillée avec l’envie de plaire à mon mari. J’allumai quelques bougies et lançai la musique. J’entendis la voiture de Pierre arriver. Je m’assis dans le canapé et pris un magazine. Il entra et se rendit directement dans la cuisine.

— Je suis passé chez le chinois, ça te va ?

— Bien sûr, lui répondis-je. Ç’a été ta journée ?

— Je vais me doucher.

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