Frédéric Dard - La crève

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La crève: краткое содержание, описание и аннотация

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1944 — La libération. Le drame d'une famille qui a mal choisi son camp et dont le châtiment sera impitoyable. Huis clos d'une nuit où défilent dans la tête et le cœur de chacun, les rivalités, les rancœurs, les regrets et les souvenirs heureux.
Écrit en 1945, paru à Lyon en 1946,
fut tirée à 500 exemplaires, jamais réimprimé depuis. Pourtant il s'agit d'un grand livre où l'auteur, malgré sa jeunesse, donne la pleine mesure de son talent d'écrivain et révèle déjà sa nature d'humaniste.

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— Du marc, répète-t-il avec un peu d’extase.

La mère intervient :

— Tout de même, lance-t-elle, sur un ton de reproche, n’oubliez pas que vous êtes chez Eugène.

— Eugène, ironise Petit Louis, à l’heure actuelle il doit avoir assez de plomb dans le ventre pour être sûr de couler à pic « s’ils » le foutent à la rivière. C’est un bagarreur. Il m’a dit : « Moi, je n’aime pas jouer à cache-cache, je vais finir mes cartouches aux côtés des frizous. Bonne chance à vous tous. » Alors tu parles… son marc…

Le souvenir d’Eugène se place en évidence au milieu de la pièce. Tout le monde en prend un peu.

Le père dit :

— Il a eu tort, il faut savoir s’arrêter.

— Oh, fait Petit Louis, il avait la gueule à finir comme ça.

Hélène essaie de se rappeler Eugène. C’était un garçon parmi tant d’autres, elle regrette de ne pas lui avoir accordé une plus grande attention. Maintenant que l’histoire de cet homme est complète par le fait de sa mort, Hélène s’y intéresse.

— Il avait de la famille ? questionne-t-elle.

— Oui, sa vieille je crois, à la campagne.

Hélène baisse la tête avec accablement.

— Des gens, sa mère… À quoi tout cela a-t-il servi ?

Eugène est allé se faire crever la paillasse. Et tout ce qui se justifiait par son existence s’est anéanti avec lui. Il ne demeure plus de lui que de minuscules souvenirs qui tombent les uns après les autres et font de grands ronds fugaces dans la mémoire.

— C’est la destinée, assure la mère.

Chacun se sent soulagé par ce lieu commun. Petit Louis tend le litre au père.

— Bois ! ordonne-t-il, à notre santé, il y a que ça qui compte.

— Oui, balbutie le vieux en entonnant la bouteille, y a que ça…

Le père s’essuie les lèvres.

— Ouf ! soupire-t-il. Lorsque je bois du marc, il me semble que je bois la France.

Petit Louis a un sourire vénéneux.

— La France…

— Je la connais… affirme le père.

— Comme si tu l’avais faite, ronchonne Petit Louis.

— Mais j’en ai fait un peu ! s’écrie le vieux. On fait un enfant avec du sang, on fait un pays avec des routes. Et vois-tu il y a des kilomètres de routes dans mes mains.

Il va se planter devant l’étroite fenêtre. L’incendie pantèle et s’affaisse dans ses cendres. Derrière lui, le jour se lève, élégant ; un jour plus collectif que les autres.

Un étrange malheur sèche la gorge du père : voici l’heure de partir au travail et il demeure là. La nuit, il pouvait l’offrir en holocauste aux dieux cruels de l’actualité, mais ce jour facile appartient à une accoutumance qui habite en lui et le domine, il ne peut en disposer.

Hier encore, il a retrouvé ses camarades devant l’entrée du tunnel et tous, entassés dans d’étroits wagonnets, sont partis à l’attaque de la montagne.

Le vacarme des foreuses s’est déclenché, accompagné par le bruit des pioches, par le cahotement grinçant des chariots, par les cris du contremaître.

Le tunnel transpire une eau trouble et glacée : le sang des pierres. Cette hémorragie ruisselle sous les pieds, diluant la terre grasse. C’est bon de sentir que le sol vous retient.

Albert Lhargne aime le travail. Une frénésie prodigieuse le transporte lorsque sa force communique à l’inertie des choses, l’intelligence des hommes.

Chaque jour, ils avancent plus avant dans la montagne, rongeurs scientifiques et persévérants, conscients de dompter cette orgueilleuse excroissance de globe.

Les ampoules d’une électricité hâtive dispensent une lumière maigre, dans laquelle les hommes s’affairent, chargés de reflets incertains.

Le dehors… Qu’est le dehors pour ces ouvriers ? Un passé tourmenté et un avenir perfide auquel il convient de songer le moins possible. Ils appartiennent à la route qui, venue des gloires extérieures, s’enfonce comme une veine dans le roc.

Hélène questionne :

— Pourquoi bouges-tu les mains de cette façon, papa ?

Le père regarde ses mains. Péniblement il les lève, elles sont lourdes d’inutilité. Ce sont de grosses mains solides, en bois calleux.

— Je ne sais pas.

Mais si, il sait ! Parbleu, elles ont des mouvements de travail. Elles piaffent comme des chevaux à l’heure de la besogne.

Hélène admire les mains de son père qui se balancent lourdement de chaque côté de ses jambes.

Et elle comprend.

— Tu as des mains nobles, murmure-t-elle.

Le vieux sourit, d’un air gêné.

— Il a de grosses « pognes », rectifie la mère ; c’est Petit Louis qui en a de belles.

Petit Louis, en effet, possède des mains précieuses, menues et cultivées. Des mains d’assassin ou de pianiste.

— La noblesse des mains, dit gravement Hélène, se mesure à l’usage qu’on en fait.

— Connasse ! grince Petit Louis.

Il met les mains dans ses poches.

Le père soupire. Il y a des moments où il ne reconnaît plus bien ses enfants. Ceux-ci lui échappent. Ah ! c’est pénible de gérer d’autres âmes lorsqu’on n’a pas d’intelligence.

Et puis, ça a été une coalition : la médiocrité, la guerre. Petit Louis est devenu une crapule avant de devenir un homme.

Le père s’en est aperçu. Il se demandait ce qu’il convenait de faire pour réagir. Sévir ? Mais ces garçons-là ont un peu de poil sous le nez et se cabrent à la moindre piqûre d’amour-propre. Discuter ? Le père ne sait pas. Les mots, pour lui, sont comme des petites tablettes huilées difficiles à saisir, impossibles à classer. Alors il a fermé les yeux obstinément et, lorsque le remords le tenaille, il l’assomme contre la montagne qu’il est en train de percer.

Ses compagnons le comprennent, car tous ont également quelque chose à oublier. Quelque chose qu’ils aimeraient défoncer à coup de pic. Ils connaissent leurs travers, mais se supportent gaillardement. L’amitié n’est-elle pas faite, avant tout, d’indulgence ?

« — Ton gamin, disaient certains, a tort de frayer avec cette milice, ça n’est pas très propre. Et puis peut-être qu’un jour… »

Alors le père buvait. Et lorsqu’il était ivre, le monde tournait dans le bon sens.

N’empêche que le jour de gloire est arrivé, tout de même. Il est là, étalé dans la rue, pas très propre, pas très beau, couleur de sang. Et Petit Louis, blême, le regarde horrifié.

Un trait de jour sertit les volumes extérieurs. Petit Louis s’accoude à la fenêtre.

La mère lui conseille :

— Attention à ne pas te montrer.

Vivement il se retire et se laisse tomber sur une chaise. Ses lèvres sont toutes blanches, ses joues deviennent exsangues.

— Les idiots ! gronde-t-il, ils sont tous à leurs fenêtres, moches comme des fesses. Leur joie est hideuse. Regardez leurs gueules ! Je me demande comment j’ai pu vivre au milieu d’eux si longtemps. Maintenant leur bidoche m’étouffe, il me semble que je suis prisonnier dans le frigo d’un abattoir. Avant, ils se piétinaient sur les places : Vive Pétain ! Aujourd’hui ils attendent…

— Ils crieront tout de même vive quelque chose, assure Hélène. C’est dans leur nature.

— Et dire qu’autrefois, je croyais faire partie de la foule, rêve Petit Louis. J’aimais courir les fêtes foraines, les cafés bondés, les spectacles. J’aimais me montrer. Il me semblait que tout ce qui existait, existait pour moi. Les femmes me souriaient, les hommes aussi parfois. Je ne pensais pas à les aimer ou à les haïr. Eux, c’était moi. Je me retrouvais à chaque pas dans les regards et dans les gestes d’autrui. Tiens, Hélène, je me souviens d’une fête foraine et d’un tir à la carabine. À chaque coup je foutais dans le 100, la bonne femme du tir applaudissait. Elle disait : « Ça c’est tapé ! » J’aurais pu lui dire n’importe quoi, elle aurait compris. Maintenant lorsque je m’adresse aux gens, j’ai l’impression de parler une autre langue qu’eux. Ils me regardent et baissent les yeux, leurs voix sont molles comme des voix de sourds, on dirait que je leur fais peur. Pourtant on ne voit pas ce que j’ai fait, dis, Hélène ? Les saletés n’éclaboussent pas ; le sang se lave, dis, Hélène ?

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