Karine Giébel - De force

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De force: краткое содержание, описание и аннотация

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Le temps de l'impunité est révolu. Le temps des souffrances est venu. Elle ne m'aimait pas.
Pourtant, je suis la aujourd'hui.
Debout face au cercueil premier prix sur lequel j'ai pose une couronne de fleurs commandée sur internet.
Car moi, j'ai voulu l'aimer.
De toutes mes forces. De force.
Lorsque j'arrive devant la porte de mon ancienne chambre, ma main hésite a tourner la poignée. Je respire longuement avant d'entrer.
En allumant la lumière, je reste bouche bée.
Pièce vide, tout a disparu.
Il ne reste qu'un tabouret au centre de la pièce.
Sur le tabouret, une enveloppe.
Sur l'enveloppe, mon prénom écrit en lettres capitales.
Deux feuilles, écrites il y a trois mois.
Son testament, ses dernières volontés.
Je voulais savoir.
Maintenant, je sais.
Et ma douleur n'a plus aucune limite.
La haine.
Voila l'héritage qu'elle me laisse.

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Il pose le pied sur la première marche, se retourne subitement.

— Avance.

— Comment vous avez fait pour…

— Pour te retrouver ? Allons, Reynier, réfléchis un instant ! Qui est au courant que tu es ici ?

Armand baisse les yeux, en proie à un terrible doute.

— Alors, qui ? répète le colosse. Luc, Maud et…

— Charlotte, murmure le chirurgien.

— Ta femme, en effet ! Ou bien… ta gouvernante ! À moins que ce ne soit ta propre fille…

Reynier relève les yeux vers le tueur.

— Tu voudrais bien savoir qui t’a trahi, hein ? Mais tu le sauras, ne t’en fais pas. Avance, maintenant.

Le professeur se remet en marche, serrant la rampe dans sa main. Il s’arrête au début du couloir, attendant les instructions.

— On commence par la Chinoise, indique Abramov.

Reynier pousse la porte de la chambre de la gouvernante et demeure à nouveau stupéfait. Amanda et sa fille sont par terre, à côté du lit, poignets et chevilles solidement attachés. Toutes deux sont bâillonnées par un morceau de scotch et dans l’incapacité de bouger ne serait-ce que le petit doigt.

Le tueur est monté à l’étage cette nuit, a réussi à surprendre les deux femmes dans leur sommeil, à les ligoter.

Et Reynier n’a rien entendu.

— Joli spectacle, non ? s’amuse Abramov.

Maud jette des œillades paniquées à son père, qui sent son cœur se fendre comme un fruit mûr.

— Je parie que tu te demandes comment j’ai fait ! Tu sais, avant d’être un père désespéré, j’étais un soldat. Membre d’un commando d’élite… Les Forces spéciales, tu connais ?

Abramov colle l’arme dans le dos de Reynier, qui se raidit instantanément.

— Pénétrer en toute discrétion au domicile de la cible, murmure-t-il. Avancer sans faire le moindre bruit, même en pleine nuit… J’ai fait ça pendant des années. Pour moi, c’est la routine ! Je me suis d’abord occupé de la Chinoise et ensuite, je suis allé réveiller ta charmante fille.

— Que voulez-vous que je fasse ? coupe brutalement Reynier.

— À ton avis ? Elles ne peuvent pas marcher et je tiens à ce qu’elles assistent au spectacle. Alors, tu vas les porter jusqu’en bas.

Armand caresse les cheveux de Maud, qui se met aussitôt à pleurer sa terreur.

— Magne-toi ! ordonne Abramov.

Le professeur passe un bras sous les genoux de Maud, un autre derrière son dos, et la soulève du sol. Elle doit peser environ soixante-cinq kilos et Reynier a toutes les peines du monde à arriver en haut de l’escalier.

Encore une dizaine de marches à descendre, sans faire le moindre faux pas.

— Allez, avance ! lui enjoint son bourreau.

Armand commence sa périlleuse descente, le souffle court, les muscles tétanisés. Il est en train de porter sa propre fille vers l’autel du sacrifice. En train de la conduire à l’abattoir. Il a l’impression que son cœur n’y résistera pas.

Lorsqu’il pose le pied dans la cuisine, il n’arrive plus à respirer.

— Fous-la ici, indique Abramov.

Reynier dépose Maud par terre, contre le buffet. Juste en face du message. Elle tente de lui dire quelque chose, mais les mots restent étouffés par le bâillon.

— Allez, à la suivante ! ordonne le colosse avec un sourire abject.

Reynier reprend son souffle et son cerveau s’enraye à nouveau. Il ne sait plus s’il doit s’asseoir et attendre la mort. Se jeter sur Abramov au risque de recevoir une balle.

Il a seulement envie de se blottir contre Maud. De la serrer contre lui.

Et envie de hurler.

— Qu’est-ce que t’attends ? s’impatiente le tueur.

Armand tente de reprendre pied. La seule chose qui importe, c’est que Maud soit encore en vie quand ce malade quittera la maison. Le reste ne doit pas venir le déconcentrer.

Il repart vers l’étage, le géant sur ses talons.

— Tu crois qu’elle pèse combien, la domestique ? envoie Abramov. Tu vas y arriver ?

Reynier ne répond pas et pénètre dans la chambre. Il s’abaisse vers Amanda, la fixe droit dans les yeux. Elle semble terrorisée.

Joue-t-elle la comédie ? Est-elle complice de cet assassin ?

Il se souvient de son insistance à les accompagner. Des réticences de Luc.

Il réitère les mêmes gestes qu’avec sa fille, constate qu’Amanda est un peu plus légère. Heureusement, car ses forces fondent comme neige au soleil.

— Tu as bien fait de commencer par ta fille, s’amuse son ennemi. Parce que je sens que tu vas te casser la gueule dans l’escalier… Mais peut-être que je te sous-estime ?!

Reynier pose le pied sur la première marche, à l’aveugle, et entame sa descente aux enfers. Une sorte de rage s’empare soudain de lui, qui décuple son énergie. Il dépose Amanda près de Maud, prend appui sur le buffet.

— Bravo, professeur ! Tu m’épates. Pas évident à ton âge…

Reynier tente de recouvrer une respiration normale. Il faut qu’il se tienne prêt. Si une occasion se présente, il doit pouvoir agir.

— Bien, maintenant que tout le monde est réuni, on va pouvoir commencer. Tu peux leur enlever leur bâillon… De toute façon, personne ne les entendra crier, ici ! Tu as choisi un endroit parfait… je ne pouvais pas rêver mieux !

Reynier ferme les yeux une demi-seconde puis s’accroupit devant les deux jeunes femmes. Avec précaution, il retire le scotch qui entrave les lèvres de Maud et elle pousse un cri avant de prendre une profonde inspiration.

— Papa ! gémit-elle.

— Ça va aller, ma chérie, murmure Armand. Ça va aller. Reste calme.

Il s’occupe ensuite d’Amanda, qui respire à son tour librement mais garde le silence.

— Où est Luc ? demande Maud.

— Dans la pièce d’à côté, répond Abramov. Mais il ne peut se joindre à nous. Il est un peu trop mort pour ça !

D’abord, c’est la stupeur sur le visage de Maud. L’incompréhension totale. Le déni.

Puis une vague de détresse la secoue de la tête aux pieds.

— Non ! s’écrie-t-elle. Non !

— Désolé, chérie, continue le tueur. Moi aussi, je l’aimais bien, ce petit gars…

Puis il s’adresse au professeur.

— À genoux, mains sur la tête.

Dès que Reynier ne représente plus le moindre danger, Abramov recule jusqu’au salon et ouvre la porte. Toujours à reculons, de façon à garder le chirurgien dans sa ligne de mire, il pénètre dans la petite pièce et récupère un sac à dos avec lequel il revient dans la grande cuisine.

Amanda et Maud, dans un réflexe similaire, ont suivi chacun de ses mouvements. Et les deux femmes aperçoivent alors, dans une semi-obscurité, le corps sans vie de Luc.

— Mon Dieu ! murmure Amanda.

Abramov extirpe de son sac un caméscope numérique et un trépied. Du coin de l’œil, dans son inconfortable position, Reynier l’observe. L’homme installe le caméscope et le met en marche.

— Viens t’asseoir, professeur, ordonne-t-il. Et mets tes mains en évidence sur la table.

Reynier se relève péniblement et se pose sur une chaise.

— Aujourd’hui, c’est un grand jour, annonce Abramov. Aujourd’hui, tu vas passer aux aveux, professeur…

Armand avale bruyamment sa salive, une corde lovée autour du cou.

— Tu vas tout nous raconter en détail, continue le tueur. Toutes les saloperies que tu as faites dans ta vie. Le chemin qui t’a conduit ici. Et je crois que ta confession va être longue et douloureuse…

— Je peux vous donner beaucoup d’argent ! tente le chirurgien.

Abramov s’approche de sa cible, pose le canon du pistolet sur sa tempe. Reynier ferme les yeux, s’accroche à la table.

— Tu ne jures que par le fric, hein ? Tu crois que tu peux tout acheter !

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