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Hugues Pagan: Tarif de groupe

Здесь есть возможность читать онлайн «Hugues Pagan: Tarif de groupe» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию). В некоторых случаях присутствует краткое содержание. Город: Paris, год выпуска: 2001, ISBN: 978-2-7436-0796-8, издательство: Éditions Payot & Rivages, категория: Полицейский детектив / Триллер / на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале. Библиотека «Либ Кат» — LibCat.ru создана для любителей полистать хорошую книжку и предлагает широкий выбор жанров:

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Hugues Pagan Tarif de groupe

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Tarif de groupe, huitième roman de Pagan, déballe le linge sale de l'usine — la police en jargon interne. Le spectacle d'une poubelle de fast-food serait sans doute plus ragoûtant. Ce flic qui a le blues ne fait pas dans le sous-entendu. Son ex-inspecteur Chess les connaît à fond, ces types qui pratiquent les méthodes du grand banditisme, sous le masque de la vérité et de la justice. Des flics qui se goinfrent : 50 briques sur un plan de came. Le plus sinistre ripou de l'histoire a commandité le meurtre d'une prostituée. Pourquoi ? Pour rien. Parce qu'elle n'a jamais accepté de baiser avec lui. On l'a découverte morte et torturée de la pire façon. Affaire classée. Chess remue la boue. Au final, dans ce camp-là, le crime paie. Sylvaine Pasquier,

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— Personne, tant que tout le monde y trouvera son compte.

Il a lâché mon bouton. Il a calculé rapidement dans sa tête et son sourire est revenu s’attarder, comme en suspens, entre son visage et le mien, posé nulle part. Il a reconnu :

— Tant que tout le monde…

— Sois gentil, Bingo : tire-toi… Ramasse ton serial killer en peau de lapin, et tire-toi… Les types dans votre genre me les brisent et ceux qui vous commandent aussi…

Bingo a laissé errer son sourire encore un peu, puis il s’est penché sur moi et m’a lâché dans la figure entre deux bouffées de cigare, avec une férocité mal contenue qu’il fallait prendre au sérieux :

— Tu te goures, comique : personne me commande. Personne me commande plus… C’est moi qui les ai à ma botte…

Il a raidi son gros majeur droit et l’a tendu vers le plafond. On pouvait reprocher au geste son caractère obscène, mais il avait pour lui le mérite d’être explicite. Bingo a ri d’une façon que je n’ai pas trouvée antipathique, et il a ajouté avec un air de contentement qui ne semblait nullement feint :

— Ils l’ont dans le cul, comique… Tous profond…

— Même Starsky ?

— Starsky ? Surtout Starsky !

J’ai eu tendance à le croire. On croit toujours ce qui arrange. Malgré cela, il commençait à m’user. Je lui ai montré la porte et le gamin, dehors.

— Ramasse ton esclave et tire-toi, Bingo…

Drôle de chose : il l’a fait…

Le brouillard s’est enlevé vers dix heures et il s’est établi à la place un petit vent froid de secteur Est, qui a récuré tout le ciel de fond en comble en un rien de temps. J’ai roulé à petite vitesse jusqu’à Vincennes et j’ai laissé la Pontiac sur l’esplanade du château. Durant des années, j’avais couru dans le bois le jour et j’y avais patrouillé la nuit. Je n’ai pas eu trop de mal à trouver l’endroit où les types avaient déversé le corps — avant de lui passer dessus à deux reprises.

Lorsqu’on a exercé le même métier durant pas loin d’un quart de siècle, on ne peut s’empêcher de céder à la déformation professionnelle. J’ai examiné le sol et les buissons sur un rayon d’une dizaine de mètres — et je n’ai rien trouvé. Je n’ai rien trouvé non plus en agrandissant le cercle, jusqu’à couper l’allée cavalière qui passait plus loin derrière. Elle était faite de sable gris et friable, assez semblable à de la cendre, et ne retenait guère les pas. Les branches portaient les premiers bourgeons griffus qui annonçaient une autre saison pour l’année d’après ou la suivante et le vent sifflait avec un entrain bizarre, passablement factice, sans se donner beaucoup de mal pour faire bouger les choses…

J’avais emporté la New Orléans Suite d’Ellington, dans mon Walkman. La plupart du temps, elle m’aide à réfléchir et à me rappeler, et parfois seulement à regretter, mais lorsque je l’ai mise dans les écouteurs, même l’orgue de Wild Bill Davis, qui d’ordinaire rugit et feule comme un big block de cinq litres compressé, m’a paru fade, traînant et sans saveur. J’ai éteint presque tout de suite.

Je suis allé m’asseoir sur une souche, j’ai enfoncé les poings dans mes poches de manteau, le col relevé. Presque tout de suite, trois pies sont venues me tenir compagnie au milieu de la clairière, sautillantes et compassées. Je suppose qu’elles au moins savaient ce qu’elles cherchaient, mais je doute qu’elles l’aient trouvé. Elles sont pourtant restées un bon moment, à aller et venir, à m’observer en coin sans rien dire… J’entendais dans mon dos le trafic du périphérique, qui faisait comme un murmure pressé, qu’on pouvait croire incessant. Un peu de soleil tiède m’a engourdi tout un côté de la face… J’ai fumé une cigarette de bout en bout… Je me suis rappelé les yeux de la fille — mauves et doux, avec un cercle ardoise autour de l’iris qui se voyait beaucoup mieux sur les photos de l’Identité Judiciaire que dans mon souvenir.

Il est juste de reconnaître qu’il ne restait plus grand-chose à voir d’autre sur ces photos, qui eût encore quelque chose d’humain, plus rien qu’un magma informe de chairs lacérées et d’esquilles d’os jaunâtres, empesé de sang couleur de goudron, avec en plein milieu du trou sombre de la bouche dans lequel j’aurais pu sans mal enfoncer mon poing, une sorte de gros morceau de cuir bouilli, noirâtre et raide, dans lequel j’ai mis du temps à reconnaître sa langue. De Velma — de Velma vivante —, il ne restait plus que les yeux : deux yeux grands ouverts, mauves et ternes. Certains morts sèchent leurs larmes bien avant les vivants, et c’est tout à leur honneur. Des yeux sans cils ni sourcils, aux paupières bleuâtres gonflées comme des outres. Les pies s’en sont allées se jucher sur un pin écimé et moi, je suis reparti par où j’étais venu.

Sur l’esplanade, la Pontiac m’a fait penser à un animal vaincu, étendu à même le sol. En m’approchant, je me suis aperçu qu’on lui avait lacéré les quatre pneus — avec le vice appliqué propre aux petits voyous et à certains flics qui ne valent pas beaucoup mieux qu’eux. Je ne voyais pas des voyous taper à midi plein, avec tant de monde autour. Je me suis penché sur l’habitacle : la radio était toujours encastrée dans son logement. Pas des voyous… J’ai essayé de mettre la clé dans la serrure du conducteur. Un malin l’avait soudée à la cyanolite. Je l’avais fait moi-même des dizaines de fois, quand j’appartenais encore à l’Armée d’Occupation, mais jamais pour autre chose que pour stopper un vilain… Ce que je croyais être un vilain… J’ai plongé la main dans ma poche de manteau, je me suis retourné d’un bloc. Dans le même temps, mes doigts ont saisi la crosse du .45, mon pouce a remonté le chien qui s’est calé à l’armé… Nul besoin d’actionner la culasse : j’avais monté une cartouche dans la chambre avant de quitter mon antre — bien avant d’avoir rencontré Bingo et son G-man à la mie de pain. Ma paume a enfoncé la pédale de sûreté dans la crosse.

Le jeunot a fait un pas en arrière. De face, il ne valait guère mieux que de dos. Sa maigre face était livide, avec des yeux qui se voulaient sans vie comme ceux des vrais tueurs de cinéma et n’y parvenaient pas tout à fait — on n’y parvient jamais tout à fait sans collyre —… Un petit toupet roussâtre assez semblable à du kapok lui poussait tout en haut du crâne et ses dents larges et jaunes couraient après le biftèque. La veste de cuir fauve était plus somptueuse qu’il m’avait paru de prime abord — avec Bingo comme chef de groupe, il n’avait pas dû la payer bien cher —, mais l’écharpe blanche n’était qu’en acétate, et encore de l’acétate de chez Prisu… On ne peut qu’émettre les plus expresses réserves sur le compte moral d’un homme capable de porter de l’acétate… Il s’est repris — il avait un .357 Magnum dans son holster sous le bras gauche, une carte de flic, des menottes et une matraque — et l’habitude de molester les gens qui ont les mains attachées dans le dos. Un dur, pour tout dire.

Il a ricané :

— Moche, ce qui t’arrive, papy…

— Très moche, Squirrel…

— Chers, des boudins comme ça…

— Moins qu’on le dit, mais plus qu’on le croit…

— Pontiac, hein ?

— Pontiac…

— Fragile, Pontiac…

— Moins que ta gueule, Squirrel…

Il a bougé les épaules — ses épaules étaient celles d’un type qui fait beaucoup de fonte entre midi et trois au gymnase Nation. Je le faisais aussi moi-même, dans le temps, quand j’avais encore des vrais poumons et pas des sacs en papier bitumé pour respirer. C’était aussi avant que les flics et les chemises brunes de la Retape, les gens des sociétés de surveillance et de gardiennage, tout ce que la ville comptait de miliciens privés commencent à venir s’y builder… Il a bougé les épaules, de la manière dont on chasse une guêpe qui vous tourne autour de trop près. Il a serré les poings… Pas beaucoup de tête, même pour un jeune poulet comme lui. Il s’est avancé en laissant pendre les bras… Bien bâti, mais ce qu’il avait de moins approprié, c’était le jeu de jambes et, surtout, il était comme certains de ces vieux navires de guerre trop chargés sur les hauts, ce qui nuit à leur stabilité latérale par gros temps… Pas beaucoup de vrai punch non plus… Son genou gauche a ramassé mon tranchant de chaussure, et Squirrel s’est couché de côté avec un geste pour saisir la crosse du pistolet sous son blouson, mais j’avais accompagné le coup — et doublé juste sous le plexus… Il a gigoté par terre, enroulé sur lui-même comme une chenille écrasée. Je me suis penché dessus :

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