Frédéric Dard - Le pétomane ne répond plus

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Le pétomane ne répond plus: краткое содержание, описание и аннотация

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Tu y crois, à la sorcellerie, toi ? Par exemple je t'affirmerais qu'une horde de loups hurlent dans la banlieue parisienne les nuits de pleine lune, tu penserais que je suis givré, non ? Que j'ai la dure-mère trop fibreuse ? Et pourtant je sais un gonzier qui s'est fait claper tout cru dans son plumard, une noye de pleine moon. P't'être que la lune était aussi bourrée que lui, pour la circonstance ? En tout cas, t'aurais même pas pu faire des hamburgers avec ce qui restait de lui !
Moi dans cette histoire de cornediable, j'ai bien failli y laisser mes os, ainsi que la bidoche qui est autour. Tu sais notre vie est fragile, quand on y pense.

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— Je vous ai infligé un préjudice quelconque ? il me fait.

— Vous me surveilliez à la jumelle.

— Serait-ce un délit ?

— Qui sait ?

Et puis les nerfs me bichent sans crier S.N.C.F. J’ai des crises, parfois.

Je lui emmanche un pain de trois livres sur sa pommette intacte, laquelle se fait un devoir d’éclater. Après quoi, j’essuie ma rangée de phalanges ensanglantées sur sa belle régate.

— Ça, oui : c’est un délit ! assuré-je froidement. Qu’aussitôt, je lui offre les bracelets de la Poule.

Sonné, hébété, il se met à marcher devant moi sans piper. Quand il a tendance à ralentir, je lui place un coup de genou dans les noix, rien de plus démoralisant pour un type.

Des gens qui déambulaient nous regardent, interdits.

On marche dans le soleil de juin.

Où sont passés les loups-garous ?

9

LAIT DE VACHE

Le bigophone !

Pile comme je regagne la maison du défunt capitaine au long cours, avec mon prisonnier en guise de bouclier.

Je décroche.

— Oui ?

C’est le Négus…

— Je suis à pied d’œuvre, m’annonce-t-il. J’ai commencé par le ministère de la Marine et ç’a été tout de suite juteux.

— Vas-y, Dudule !

— Ton père La Cerise a mal terminé sa carrière d’officier puisqu’il est passé en conseil de guerre et qu’il a été destitué avec radiation sans solde de la Marine. Ça s’est déroulé en 1964.

— Motif ?

— Il aurait couvert un trafic de drogue qui se serait opéré à bord du bâtiment qu’il commandait. Il a nié éperdument ce qui, je pense, lui a évité une peine d’emprisonnement. Les deux marins qui se livraient à cette besogne lucrative ont été retrouvés noyés dans la rade de Toulon, et n’ont pu, de ce fait, déposer. Compte tenu des états de service de son père qui fut amiral d’escadre, l’affaire a été plus ou moins mise sur une voie de garage. L’amiral qui vivait encore à l’époque est mort peu après, miné par le déshonneur…

Jérémie reprend son souffle, puis, à nouveau, la parole :

— Sur le plan familial, il était marié avec une personne de la noblesse nantaise, une demoiselle de Magonfle, Adèle, dont il n’a eu qu’un enfant : une fille prénommée Antoinette qui ne s’est jamais mariée et qui vit à Antibes. Lorsque l’affaire a éclaté, la femme du commandant Lhours, qui vivait dans cette maison, s’est immédiatement séparée de lui et a été s’installer à Antibes, dans la demeure qu’occupe leur fille actuellement. Elle a démarré peu après une maladie d’Alzheimer qui l’a emportée une quinzaine d’années plus tard.

Un temps de récupération, puis mon sombre adjoint déclare :

— C’est tout pour l’instant.

— Pas mal. Tu as l’adresse de la fille ?

Le all black récite, sans hésiter :

— Chemin des Sœurs Karamazov, cap d’Antibes, villa « La Pigne de Pin ».

— Sais-tu que tu es un auxiliaire plus que précieux, Ophélie ?

— Si tu l’affirmes…

— Comment vont tes nouvelles amours ?

— Lesquelles ?

— Avec la petite greluche qui poireautait dans ma bagnole ?

— Ah ! la petite salope ? Elle n’a rien voulu savoir pour me suivre.

— Raciste ?

— Au contraire : elle m’a avoué qu’elle aurait bien aimé tenter une expérience avec un colored , mais qu’elle avait un coup de foudre terrible pour toi et qu’elle attendrait ton retour aussi longtemps qu’il le faudrait. Que veux-tu que je te dise, Antoine, tu es un don Juan auquel on ne peut pas se mesurer. A ta place, je la tirerais ; tu risques de tomber sur la bonne surprise.

— Merci du conseil, dis-je. Continue de chercher dans la même direction, camarade ; il y a des filons qui méritent d’être exploités jusqu’à la dernière veine !

Je raccroche.

Le Rouquemoute qui poursuivait son suif dans le carré du capitaine débouche, en surexcitance.

— Ah ! Antoine, figure-toi…

Je le minéralise d’une prunellée d’acier.

— Je suis à toi dans quelques instants, beau blond.

Sans vergogne, je glisse ma dextre dans la veste du binoclard et pêche son larfouillet dans sa vague.

— Ne vous gênez pas ! gronde-t-il.

— Pensez-vous !

Et je lui place un coup de boule dans le renifleur. Il pavoise illico.

Je ne comprends pas ce qui m’arrive, avec ce gazier. C’est vrai qu’il ne m’a rien fait, sinon m’observer, ce qui n’a jamais constitué un forfait punissable ; cependant, d’entrée, j’ai eu vocation de le massacrer. Quelque chose d’impondérable (de lapin) qui me titille la nervoche.

Ce sieur se nomme Igor Makilowski, né à Odessa. Ingénieur chimiste domicilié à Marseille, rue de Paradis.

Mon bourre-pif lui amène des larmes qui me font autant de peine que la dernière crise d’éthylisme de Boris Eltsine, lequel n’a qu’un ennemi déclaré : les escaliers.

— Vous voudrez bien me pardonner ces gestes d’humeur, me rasséréné-je-t-il, mais il se trouve que le quartier grouille de cadavres, si j’ose une telle métaphore. Parlons plutôt sereinement. Que faites-vous dans les parages ?

— C’est mon droit, non ?

Je lui assure un crochet à la pointe du bouc qui lui vaudra plus tard des déprédations dans sa denture.

— C’est votre droit, et ça, c’est ma droite ; on poursuit ?

— Vous ne devriez pas me frapper !

— Hélas non, mais quand une bêtise est commise, un peu plus, un peu moins, c’est du pareil au même.

Et là, il déguste un ramponneau au plexus qui le fait tomber à genoux. Et comme il est en prière, kif s’il se trouvait dans la grotte des miraculades de Lourdes, j’ai une soudaine illumination. Je fais un signe à Mathias et approche mes lèvres délectables du cérumen abject qui lui sort des coquillages.

— Va à la tire de ce mec qui se trouve à deux cents mètres à gauche en sortant : c’est une grosse Renault avec les deux boudins arrière crevés. Tu la fouilles avec ta méticulosité proverbiale, O.K. ?

Il opine, puis soupire :

— J’ai des choses à t’apprendre.

— Dans quelques minutes je te tendrai une baffle grande comme une antenne parabolique, Xavier.

Vaincu par ma volonté dominante, il s’emporte. Tu croirais un gamin qu’on envoie en courses. Autrefois, p’pa me dépêchait au bureau de tabac pour lui acheter des Gauloises bleues. Un soir d’été, j’ai trouvé l’air si doux, le jour si lent à mourir, que j’ai musardé plus d’une plombe dans les rues avant de rentrer. Féloche était aux cent coups. Mon dabe m’a filé une mandale, mais j’ai rien regretté. J’avais la tronche pleine de ce crépuscule languide, avec ses bruits différents de ceux de la journée.

Je considère le tuméfié aux lunettes d’or qui tente d’étancher son sang avec sa pochette, malgré ses mains entravées.

— Vous savez quoi, monsieur Makilowski ? Depuis un moment je cherche à trouver une raison à mon attitude violente. Je n’ai pas pour habitude de châtaigner d’emblée un homme que je ne connais pas. Je ne suis pas paranoïaque ; enfin, pas trop. Par contre, il existe en moi une espèce de sixième sens qui m’avertit lorsque je me trouve en présence d’un être particulièrement malfaisant. Je suis comme le papier de tournesol qui change de couleur sous l’effet d’un acide. Mine de rien, vous êtes l’acide au contact duquel je deviens rouge. A priori, vous paraissez être un homme passe-partout, qui fait plutôt bonne impression. Et cependant je capte certaines ondes qui se dégagent de vous et affolent mon compteur Geiger intime. Vous ne trouvez pas la chose étrange ?

Il hisse ses poignets à la hauteur de sa bouche pour tamponner ses lèvres marquées de sang, elles aussi.

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