Je me rends à leurs chevets, mon sac sur l’épaule, trimardeur de luxe.
— Ça baigne, les naïades ?
Elles bondissent sur leur séant. Leurs beaux visages s’irradient (rose). Elles me mamourent d’emblée, s’extasient sur ma transformation qui me virilise davantage encore. Te dire !
— Il fait décidément trop chaud au bord de la plage ou de la piscine, allons donc nous mettre à l’ombre, qu’elles disent.
Salopes !
Tu sais ce qui leur produit cet effet ? Mon début de barbe. Elles la sentent déjà râper leurs merveilleuses cuisses, ces belles ! Ah ! les Danoises, je te jure ! Elles font passer leur clitoris avant leur mère, dans l’échelle des valeurs.
Elle n’ont qu’une chambre pour deux, mais chouette : vaste et élégante. Je sens que je vais me plaire ici. J’y passerai des nuits enchanteresses, sans avoir à produire mes fafs. L’invité surprise. Locataire de contrebande (si on peut s’exprimer de la sorte). Le principal sera de me montrer discret.
Je dépose mon vademecouilles entre la commode de bambou et la cloison et m’installe dans un fauteuil d’osier tressé pourvu d’un repose-jambes. Une fatigue poignante m’enlève toute énergie. Je voudrais prendre une longue douche à des températures différentes et ensuite me pieuter nu entre une paire de draps frais.
Le climatiseur murmure sa chanson du froid et agite les voilages des deux lits à baldaquin. Tout est vaporeux, clair, agréable.
Je somnole. Quatre mains veloutées se mettent à errer sur ma braguette pour tenter d’établir une tête de pont.
Sir Popoff fait le dos rond ; les mômes le débriment en le laissant prendre l’air. Sans barguigner, y a dégustation des produits de la ferme. A toi, à moi ; re-à-toi, re-à-moi ! Mais pas du bâclé, hein, je t’informe. L’entonnoir à glissière, la toilette du zouave, le défilé des lanciers, le polissage du chinois, le tracé de la reine, la colonne repeinte, la balise diplomatique, la flûte de paon, la trompette de la renommée, tout y passe.
Et je finis par y passer aussi, Carola se mettant à me monter à cru, au grand dam de sa potesse.
Comme le ton monte, je leur fais valoir combien il serait dommage que leur belle amitié cède à une enfilade gratis, d’autant qu’il y en aura pour les deux.
Je n’ai pas le cœur assez grand pour pouvoir aimer deux mamans (chanson sentimentale d’avant la Quatorze), du moins ai-je le paf assez gros pour pouvoir faire reluire deux exquises jeunes filles à poils blonds. Et d’ailleurs, il suffit de prendre des dispositions adéquates, histoire de créer l’harmonie. Devenant metteur en seins, je me déloque éclair et entraîne mes blanches colombes sur le premier des deux lits venu.
Première figure du manuel : Martha allongée sur le plumard, en croix de Saint-André, Carola agenouillée au niveau de ses pinceaux et moi, derrière Carola, pour faire le fourgon de queue de ce charmant petit train. Je ne sais pas si ces deux merveilleuses font du polo sur gazon dans leur intimité, mais elles ne prennent aucune initiative. Moi, à point, je commence à fourrer Carola côté pile, appuyant sur sa nuque de manière à lui imprimer une position propice à mon dessein. Car, en l’eau-cul-rance, plus le postère est dressé, mieux s’effectue l’invasion du Martien.
Notre union se trouvant parfaitement assujettie, j’entreprends un ballet du braque sur une valse anglaise très lente, Roses de Picardie , crois-je reconnaître. Mon Dieu, qu’elle aime ça ! Toutes les femmes, il me semble. Et ce sera le titre de cet impérissable chef-d’œuvre : Mesdames vous aimez « ça ».
L’inévitable se produit. Etant attablée entre les guitares de Martha, elle part au gigot, que veux-tu. Et pas qu’un peu, mon n’veu ! Pas du bout des lèvres. Yayaïe, c’est de la gloutonnerie ! Elle va écarteler la Martha à force de peser sur ses genoux pour l’ouvrir en plein.
Ah ! non, insiste pas, je t’en dirai pas davantage : on se ferait interdire de séjour dans les librairies. Les ligues du culte viendraient bouter le feu à notre pavillon de Saint-Cloud. Les chouans radineraient à la Maison Poupoule avec leurs fourches pas aseptisées pour m’étriper.
Toujours il soit que Carola déguste sa copine de vagabondage pendant que je lui trognonne le prose. Finie la valse, je viens de passer à un air de csardas, mieux approprié. On ne doit pas gueuler la bouche pleine, mais ma partenaire ne s’en prive pas, malgré son excellente éducation. Et l’autre donc ! Tu dirais que des divas d’opéra font des vocalises pour s’entraîner.
C’est gracieux, bien mieux qu’un film « X ». Les « hard productions » sont tournées, le plus souvent, par des gerces à frime pétasse qui se bouffent la toison d’or en ayant l’air de penser à autre chose. Là, c’est d’une sincérité totale. Les intonations ne trompent pas. On sent que ces dames y vont à fond la caisse !
Au bout d’un moment de ce charmant manège, on modifie légèrement le programme. Elles permutent ! Et ça fonctionne tout aussi bien. Si ça continue, je vais pouvoir aller prendre ma douche tant espérée sans qu’elles s’aperçoivent de mon retrait de la compétition. Grande leçon de modestie. Nous sommes peu de chose, les hommes.
Fectivement, ayant débigoché pour assurer mon confort personnel, elles optent illico pour le tête-bêche de gala et la Martha laisse aller ses instincts anthropophagiques, ce qui va dispenser Carola de chiquer l’écuyère pour l’écurie Jacob-Delafon.
Ça fait songer au cycle de l’azote, en plus confidentiel.
Pendant qu’elles planifient notre étreinte triangulaire, je réalise mon rêve de douches successives. La salle de bains est d’une vasteté incroyable. Une famille maghrébine s’y installerait à trois générations. Mon dessapage étant déjà fait, je bondis dans le bac à douche et ouvre les grandes eaux jacuzesques.
Une volupté succède à une autre. Je me fais le grand jeu : savonnage mousseux, fourbissage avec la brosse à long manche, jets de plus en plus impétueux, d’abord très chauds, puis décélérants jusqu’à l’obtention d’une fraîcheur revigorante. Essorage, séchage… Dieu qu’il est savoureux de faire le ménage de son corps !
Je saute sans vergogne sur un flacon d’eau de toilette et m’en asperge complètement. Me voici paré pour de nouvelles queutées. Ces deux donzelles constituent l’une des grandes aubaines de mon existence.
Tout fanfareux, je retourne dans leur chambre. Les miss se sont endormies sur le pot-au-feu et ont conservé leurs attitudes made in Lesbos (ses oliveraies, ses godemichés, ses langues fourrées princesse).
Elles ont dû orgasmer à s’en péter les rivets, on le devine à leur total abandon. Je m’approche de leur nid d’amour, le métronome déjà en action.
Ma débandade est instantanée, totale et irrémédiable quand je constate que ces deux superbes sont mortes.
Tu as bien lisu ? Mortes !
Un ami de passage leur à tiré, à l’une comme à l’autre, une balle dans la nuque pendant qu’elles se gougnotaient le grizzli.
Le camarade en question devait se déplacer sans bruit, avec un silencieux au bout de sa rapière.
Tu paries qu’elles ont défunté sans s’en apercevoir ? En tout cas, moi je n’ai rien entendu. Il faut dire qu’avec des jets torrentueux qui te cinglent la couenne, tu perds de tes facultés auditives.
Anéanti par la stupeur, le chagrin, l’indignation et tout ce que tu voudras d’autre, je reste les bras ballants et la queue pendante.
Qu’ai-je fait au Seigneur pour qu’il m’inflige une épreuve aussi terrible ?
Je n’ai pas le temps de trouver une réponse valable à cette épineuse question car voilà qu’on frappe à la porte !
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