Eugène Zamiatine - Nous Autres

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J’étais dans ma chambre, l’aube était encore verte et immobile. Un fragment de soleil frappait l’armoire. Je me trouvais dans mon lit. C’était un rêve. Mon cœur battait avec violence ; j’avais mal aux doigts, aux genoux. Cela avait réellement eu lieu, c’était indubitable. Je ne distinguais plus le rêve de la réalité. Des quantités irrationnelles traversaient l’espace solide à trois dimensions et, au lieu de surfaces lisses et dures, il n’y avait plus autour de moi que des formes toutes tordues et velues.

J’avais encore du temps devant moi avant la sonnerie. Je restai couché et une chaîne logique, extrêmement étrange, se déroula dans mon esprit.

« Dans notre monde superficiel, à chaque équation correspond une courbe ou un solide. Nous n’avons jamais vu de corps correspondant aux formules irrationnelles, par exemple à ma racine de moins un. Mais ce qu’il y a de terrible, c’est qu’ils existent réellement, bien qu’invisibles. Ils doivent exister puisqu’en mathématiques leurs ombres fantastiques, biscornues, passent devant nous comme sur un écran : les mathématiques et la mort ne se trompent jamais et ne plaisantent pas. Et si dans notre monde nous ne les voyons pas, il y a sûrement pour eux un monde immense quelque part, de l’autre côté. »

Je me levai, sans plus attendre la cloche, et me mis à courir par la chambre. Mes mathématiques, qui, jusqu’à présent, avaient été pour moi comme une île ferme et inébranlable dans ma vie agitée, se désagrégeaient également, allaient à la dérive, tourbillonnaient.

« Que veut donc dire cette “âme” absurde, aussi réelle que mon unif ou que mes chaussures, bien que je ne les voie pas, rangés comme ils le sont dans l’armoire. Si les chaussures ne sont pas une maladie, pourquoi l’“âme” en est-elle une ? »

Je cherchais, sans la trouver, une issue à ces raisonnements sauvages et logiques. C’étaient des contrées barbares aussi inconnues, aussi affreuses que celles qui s’étendent au-delà du Mur Vert et peuplées comme elles de créatures extraordinaires, parlant sans paroles. Je crus la voir, à travers quelque verre épais, cette racine de moins un, infiniment grande et en même temps infiniment petite, en forme de scorpion, avec son signe moins, aiguillon caché que je sentais toujours… Peut-être était-ce tout simplement mon « âme », semblable au scorpion légendaire des anciens, qui se piquait volontairement pour…

La cloche sonna, il faisait jour. Toutes mes pensées, sans mourir ni disparaître, se recouvrirent de la lumière du jour, de la même façon que les objets visibles, sans mourir, se recouvrent de ténèbres à la nuit. J’avais dans la tête un brouillard léger et vacillant. À travers ce brouillard, j’entrevoyais de longues tables de verre autour desquelles des têtes sphériques mâchaient silencieusement et en mesure. Au loin, à travers le brouillard, un métronome faisait entendre son tic-tac ; je me mis à compter machinalement jusqu’à quinze, avec les autres. C’étaient les quinze mouvements masticateurs réglementaires pour chaque bouchée. Puis, machinalement, en battant la mesure, tout le monde descendit et je marquai mon nom sur le livre des sortants, comme les autres. Malgré tout, je me sentais mener une vie à part, seul, protégé par un mur mou qui absorbait les bruits et derrière lequel se trouvait mon monde…

Mais voilà, si ce monde m’est spécial, pourquoi en parlé-je dans ces notes ? Que viennent faire ici ces « rêves » absurdes, ces armoires, ces couloirs sans fin ? Je me vois avec peine en train d’écrire, en même temps qu’un poème régulier et sévère à la gloire de l’État Unique, je ne sais quel roman fantastique. Si ce n’était vraiment qu’un roman et non pas ma vie actuelle, remplie de chutes et de racines de moins un !

Au reste, tout est peut-être pour le mieux. Il est probable que vous êtes, lecteurs inconnus, des enfants en face de nous. Nous avons été élevés par l’État Unique, conséquemment nous sommes parvenus aux plus hauts sommets que l’homme puisse atteindre. Et, comme des enfants, vous avalerez toute l’amertume que je vous offre, si elle est soigneusement enrobée dans le sirop épais de l’aventure…

Le soir.

Vous connaissez sans doute la sensation que l’on éprouve lorsqu’on s’élève à toute vitesse en avion suivant une spirale bleue et que les fenêtres sont ouvertes ; le vent vous siffle au visage, on ne voit plus la terre, que l’on oublie et qui vous semble aussi éloignée que Saturne, Jupiter, Vénus. Je reçois actuellement un tourbillon dans la figure ; j’oublie la terre ainsi que la charmante et toute rose O. Mais la terre n’en existe pas moins et, tôt ou tard, il faudra que j’atterrisse. Je ne veux pas voir le jour où, sur mon Tableau Sexuel, est inscrit son nom : O-90…

Ce soir, la terre lointaine m’a rappelé à son souvenir.

Comme je tiens sincèrement à guérir, j’applique strictement les prescriptions du docteur. J’ai erré deux heures huit minutes dans les déserts en ligne droite de nos boulevards. Tout le monde, conformément aux Tables, était dans les auditoria, il n’y avait que moi, séparé des autres, qui fût seul… C’était, à la vérité, un spectacle contre nature : imaginez un doigt séparé de la main, de l’ensemble, qui courait par petits sauts, courbé en deux, le long d’un trottoir de verre. Ce doigt, c’est moi. Le plus étrange, le plus antinaturel, c’est que ce doigt ne voudrait absolument pas être sur la main, avec les autres, il voudrait être, ou bien seul, ou bien… Je n’ai plus rien à cacher : ou bien à deux avec elle, avec l’ autre, pour me vider entièrement en elle par nos bras enlacés…

Je rentrai chez moi quand le soleil fut couché. La cendre rose du soir tombait sur le verre des murs, sur la pointe d’or de la Tour Accumulatrice, sur les voix et les sourires des numéros rencontrés. N’est-il pas étrange que les rayons du soleil couchant nous arrivent sous le même angle que ceux du soleil levant et que tout semble entièrement différent : la teinte rose du soir est très calme, à peine amère, et celle du matin est sonore et pétillante.

En bas, dans le vestibule, U, la contrôleuse, prit une lettre d’un tas d’enveloppes couvertes de cendre rose et me la tendit. Je le répète, c’est une femme respectable et je suis sûr qu’elle a les meilleurs sentiments pour moi. Mais, malgré tout, chaque fois que je vois ses joues pendantes, semblables à des ouïes de poisson…

En me donnant cette lettre de sa main osseuse, elle poussa un soupir. Ce soupir fit à peine remuer le rideau qui me séparait du monde. J’étais tout entier absorbé par la lettre qui tremblait dans mes mains et qui, je n’en doutais pas, était de I.

Elle poussa un second soupir, si intentionnellement souligné de deux traits, que je levai les yeux et vis un tendre sourire, nuageux et caressant, parcourir ses ouïes et poindre à travers les jalousies pudiquement fermées de ses yeux.

« Mon pauvre ami ! » Elle poussa un soupir trois fois souligné et désigna la lettre d’un signe de tête à peine perceptible. Elle connaissait évidemment le contenu de la lettre, comme son devoir l’y obligeait.

« Vraiment… Pourquoi donc ?

– Ah, mon cher ! Je vous connais mieux que vous. Il y a longtemps que je vous observe et vois bien qu’il faut que vous ayez avec vous quelqu’un ayant étudié longuement la vie… »

Je me sentis tout caressé par son sourire.

C’était un emplâtre pour les blessures que cette lettre allait ouvrir en moi. Enfin, à travers les chastes jalousies, elle déclara d’une voix tout à fait basse :

« J’y réfléchirai, mon cher, j’y réfléchirai. Soyez tranquille, si je m’en sens suffisamment la force… »

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