Yasmina Reza - Babylone

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Babylone: краткое содержание, описание и аннотация

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« Tout le monde riait. Les Manoscrivi riaient. C’est l’image d’eux qui est restée. Jean-Lino, en chemise parme, avec ses nouvelles lunettes jaunes semi-rondes, debout derrière le canapé, empourpré par le champagne ou par l’excitation d’être en société, toutes dents exposées. Lydie, assise en dessous, jupe déployée de part et d’autre, visage penché vers la gauche et riant aux éclats. Riant sans doute du dernier rire de sa vie. Un rire que je scrute à l’infini. Un rire sans malice, sans coquetterie, que j’entends encore résonner avec son fond bêta, un rire que rien ne menace, qui ne devine rien, ne sait rien. Nous ne sommes pas prévenus de l’irrémédiable. »
Romancière et dramaturge de renommée mondiale,
a publié chez Flammarion
(prix littéraire Le Monde 2013) et Yasmina Reza

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The Americans m’a remis des images de jeunesse. On rêvait et on ne faisait rien. On regardait les gens passer, on décrivait leur vie et à quel objet ils ressemblaient, maillet, pansement… On riait. Par-dessous le rire, on ressentait un ennui un peu amer. J’aurais bien aimé les revoir ces photos du pont Cardinet. On a dû les jeter un jour avec des vieux papiers. Après l’anniversaire à Auteuil, je me suis prise d’affection pour Jean-Lino Manoscrivi. On sortait de l’immeuble pour faire quelques pas dehors et on prenait un café au coin si l’occasion se présentait. Dehors il avait le droit de fumer, chez lui non. Je le percevais comme le plus doux des hommes, et je le vois encore de cette façon. Il n’y a jamais eu de familiarité entre nous et on s’est toujours vouvoyés. Mais on parlait, on se disait parfois des choses qu’on ne disait pas à d’autres. Surtout lui. Mais ça pouvait m’arriver aussi. On s’était découvert la même aversion pour notre propre enfance, le même désir de l’effacer d’un trait noir. Un jour, évoquant son parcours sur terre, il avait dit, de toute façon le plus dur est fait. J’étais d’accord. Jean-Lino était le petit-fils d’émigrés juifs italiens du côté paternel. Son père avait commencé comme homme à tout faire dans un atelier de passementerie. Ensuite il s’était spécialisé dans les rubans, jusqu’à ouvrir une mercerie dans les années soixante. Un boyau avenue Parmentier. Sa mère tenait la caisse. Ils habitaient un fond de cour à deux pas du magasin. Les parents travaillaient dur et n’étaient pas tendres. Jean-Lino ne s’étendait pas sur le sujet. Il avait un frère, beaucoup plus âgé que lui, qui avait réussi dans la confection. Lui partait en vrille. Sa mère l’avait viré de la maison. Il avait démarré en cuisine après un CAP de pâtisserie. À l’heure la plus optimiste de sa vie, il s’était lancé dans la restauration. C’était dur, pas de vacances, pas assez de chiffre. Pour finir, Pôle emploi avait financé une formation dans la grande distribution et une association intermédiaire l’avait placé chez Guli où il s’occupait de l’après-vente électroménager. Il n’avait pas eu d’enfant. C’était le seul reproche qu’il osait faire aux puissances qui avaient gouverné son existence. Sa première femme l’avait quitté après l’échec du restau. Quand il avait connu Lydie, elle était déjà grand-mère par une fille née d’un mariage précédent. Depuis deux ans, le gosse venait régulièrement chez eux. Les parents étant séparés dans les plus mauvais termes, au point que les services sociaux s’en mêlent, on fourguait l’enfant chez mamie Lydie à la moindre occasion. Par l’effet d’une tendresse qui n’avait jamais trouvé à s’exprimer (sauf avec son chat), Jean-Lino avait accueilli ce Rémi à bras ouverts et tentait de s’en faire aimer. Est-ce qu’on a raison de vouloir se faire aimer ? N’est-ce pas une de ces tentatives toujours calamiteuses ?

Les premiers moments ont été chaotiques. L’enfant, âgé de cinq ans à son arrivée, il habitait auparavant dans le Sud, s’appliquait à ne pas faire attention à Jean-Lino et pleurait dès que Lydie disparaissait. C’était un petit garçon banal, un peu grassouillet, qui avait un joli sourire avec des fossettes. Les difficultés d’apprivoisement étaient aggravées par Eduardo, le chat de Jean-Lino, une bête antipathique recueillie dans une rue de Vicence et à qui on ne pouvait s’adresser qu’en italien. Lydie avait su frayer avec Eduardo. Elle tenait son pendule devant lui et le chat suivait le balancement du quartz rose, mesmérisé (la pierre s’était présentée à elle quelque part au Brésil). En revanche, Eduardo avait pris Rémi en grippe. Il doublait de volume quand le petit surgissait, et soufflait de manière inquiétante. Jean-Lino avait tenté de raisonner son chat sans que personne autour n’y mette du sien. Lydie avait réglé l’affaire en cantonnant Eduardo dans la salle de bain. Rémi allait l’asticoter en imitant son miaulement à travers la porte. Jean-Lino essayait de l’en empêcher mais il n’avait pas d’autorité. Quand le champ était libre, il allait discrètement réconforter la bête à travers l’embrasure en lui murmurant quelques pépiements italiens. Rémi avait refusé d’appeler Jean-Lino papy Jean-Lino . D’ailleurs, on ne peut pas dire que l’enfant avait refusé. Il ne l’avait tout simplement jamais appelé papy Jean-Lino malgré les incessants Papy Jean-Lino va te lire une histoire ou si tu finis ton poisson papy Jean-Lino va t’acheter je ne sais quoi de Jean-Lino. Papy Jean-Lino avait été dédaigné par Rémi qui s’en foutait complètement. Quand il avait eu besoin de le nommer il l’avait appelé Jean-Lino, lequel s’était senti bêtement affecté par ce prénom seul, prononcé sans la moindre nuance familiale. Par la suite, changeant de stratégie, il s’était mis en tête de séduire l’enfant par la voie du rire. Il lui apprenait à dire des bêtises du genre topodoco, tapadaca pour arriver à tupuducu . Rémi adorait. Il s’était vite débarrassé des premières étapes et répétait en boucle tu pues du cul , en prenant des voix saugrenues ou en fredonnant, ou bien le balançait directement à Jean-Lino si possible dehors et à voix forte. J’ai moi-même servi de spectateur à cette saynète dans le hall de l’immeuble. Feignant de rigoler Jean-Lino avait dit, si on répète un jeu de mots trop souvent il n’est plus marrant, tu sais. Il ne savait plus comment enrayer le processus. Plus il tentait de le raisonner, plus l’enfant répétait la phrase. À la place de dire c’est bien ou c’est pas bien, le petit disait c’est nichon ou c’est pas nichon (un enseignement de Jean-Lino ?), de sorte qu’il pouvait répondre, c’est pas nichon tu pues du cul ?! Lydie n’aidait pas, confinée dans la théorie du on récolte ce qu’on sème. Quand elle percevait une manière de découragement chez Jean-Lino, elle se contentait de dire, mais fiche-lui la paix à ce gosse. Le dernier mot prononcé avec une texture navrée. On ne va pas réprimander une victime de l’inconséquence adulte. Avec le recul, je suppose qu’elle avait senti le danger de cet attachement unilatéral. Il me faudrait dire un mot sur ce hall d’immeuble. C’est un espace en longueur, éclairé de jour par la porte d’entrée semi-vitrée. L’ascenseur se présente de face au centre. On accède à l’escalier par une porte latérale dans un renfoncement à gauche. Le bout de couloir à droite mène au local des poubelles. Quand ils étaient tous les trois, Lydie prenait l’ascenseur avec son petit-fils tandis que Jean-Lino montait à pied. Quand Jean-Lino était seul avec l’enfant, celui-ci ne voulait prendre que l’ascenseur. Pour l’emmener dans la cage d’escalier il fallait le traîner dans des hurlements. Jean-Lino ne pouvait pas prendre l’ascenseur. Au cours de sa vie lui était venu l’empêchement de prendre l’avion, l’ascenseur, le métro et les nouveaux trains dont les fenêtres ne s’ouvraient plus. Un jour, le petit s’est accroché comme un singe à la porte de l’escalier pour ne pas y entrer, Jean-Lino a fini par s’asseoir sur les premières marches les larmes aux yeux. Rémi s’est mis à côté de lui et a demandé, pourquoi tu veux pas prendre l’ascenseur ?

— Parce que j’ai peur, a répondu Jean-Lino.

— Moi j’ai pas peur, je peux le prendre.

— Tu es trop jeune.

Après un temps, Rémi a monté les escaliers en se hissant à la rampe. Jean-Lino l’a suivi.

S’il me fallait isoler une seule image, parmi toutes celles qui persistent dans ma tête, ce serait celle de Jean-Lino assis dans la presque obscurité sur la chaise marocaine, les bras rivés aux accoudoirs au milieu d’un encombrement de chaises qui n’avait plus lieu d’être. Jean-Lino Manoscrivi pétrifié sur la chaise inconfortable, dans le salon où restaient encore, alignés sur le coffre, les verres achetés frénétiquement par moi pour l’occasion, les raviers de céleri, chips light, tous les reliquats de la sauterie organisée dans un moment d’optimisme. Qui peut déterminer le point de départ des choses ? Qui sait quelle combinaison obscure et peut-être lointaine a gouverné l’affaire ? Jean-Lino avait rencontré Lydie Gumbiner dans un bar où elle chantait. Dit comme ça, on imagine une fille chaloupée délivrant une voix chaude dans un micro. En réalité c’était une petite algue sans trop de poitrine, habillée à la gitane et couverte de breloques, qui avait visiblement mis l’accent sur sa chevelure, un frisé orangé, volumineux, domestiqué avec des barrettes décoratives (elle avait aussi un bracelet de cheville avec des breloques…). Elle prenait des cours de jazz avec une prof de chant et se déployait dans des bars de temps à autre (nous y sommes allés une fois). Elle avait chanté Syracuse en regardant Jean-Lino, assis là ce soir, par le hasard de la vie, en bordure d’estrade, et dont les lèvres avaient fini par murmurer Avant que ma jeunesse s’use et que mes printemps soient partis… Jean-Lino était fan d’Henri Salvador. Ils s’étaient plu. Il avait aimé sa voix. Il avait aimé ses jupes longues et vaporeuses, ce goût pour le bariolé. Il trouvait attirant qu’une femme de son âge se foute de la convention urbaine. C’était d’ailleurs une femme inclassable à bien des égards et qui se vivait comme possédant des facultés surnaturelles. Pourquoi ces deux êtres s’étaient-ils assemblés ? J’avais une copine au CEIPI à Strasbourg, une fille un peu en retrait. Un jour, elle a épousé un type ingrat et taciturne. Elle m’a dit, il est seul, je suis seule. Trente ans plus tard, je l’ai rencontrée dans le Thalys, elle construisait des montgolfières pour des parcs d’attractions, elle était toujours avec lui et ils avaient eu trois enfants. Le final n’est pas aussi souriant pour le couple Gumbiner-Manoscrivi mais sous des déclinaisons infiniment variées le motif n’est-il pas toujours le même ? J’ai pris des photos lors de notre petite fête (je l’avais appelée fête de printemps ). Sur une d’entre elles on voit Jean-Lino debout, surplombant Lydie assise sur le canapé dans un de ses déguisements chamarrés, riant tous les deux, visages tournés vers la gauche. Ils ont l’air bien. Jean-Lino a l’air content et rougeaud. Il est appuyé sur le dossier du canapé, corps penché au-dessus de la frisure rousse. Je me souviens très exactement de ce qui les avait fait rire. La photo a été utilisée dans le dossier. Elle saisit ce que saisit n’importe quelle photo, un instant pétrifié qui ne se répétera plus, et n’a peut-être même pas eu lieu comme tel. Mais étant donné qu’il n’y aura jamais plus d’images ultérieures de Lydie Gumbiner, elle semble receler un contenu secret et se trouve nimbée d’une aura vénéneuse. J’ai vu récemment dans un hebdo une photo de Joseph Mengele dans les années soixante-dix en Argentine. Il est assis quelque part dehors, en chemisette, devant des restes de pique-nique, au milieu d’une bande de garçons et filles nettement plus jeunes. Une d’entre elles est accrochée à son bras. Elle rit. Le médecin nazi rit. Ils sont tous rieurs et décontractés, attestant du soleil et de la légèreté de la vie. La photo ne présenterait aucun intérêt sans la date et le nom du personnage central. La légende bouleverse la lecture. Est-ce vrai de toute photo ?

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