Sheri Tepper - Rituel de chasse

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Rituel de chasse: краткое содержание, описание и аннотация

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Le monde va mal, le monde est malade.
Un terrible fléau se répand dans l’univers, une infection mortelle qui menace d’exterminer toute vie. Aucune planète n’est épargnée. Aucune, sauf Grass. Pourquoi ? Comment expliquer cette immunité ? Marjorie est envoyée en mission sur Grass pour trouver la réponse.
Grass, planète dont on sait peu de chose, si ce n’est qu’elle est couverte d’herbe et que des colons s’y sont installés, voici quelques siècles. Aristocrates, ils ont fait de la chasse leur occupation favorite. Chasse à courre, chasse à mort...
Là-bas, à des millions de kilomètres de la Terre, Marjorie va découvrir un monde étrange, une culture fascinante et cruelle. Mais pourra-t-elle percer le secret de Grass ? Un secret qui peut sauver l’univers — ou le conduire à sa perte…

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Les heures suivantes s’étirèrent avec une mortelle lenteur. Par la suite, le silence qui recouvrit alors Red Canyon s’identifia dans la mémoire de Rillibee au prélude du drame à venir. L’après-midi mourait à petit feu, déversant son soleil resplendissant par les grandes fenêtres du salon, allumant de somptueux reflets sur les lattes blondes du plancher dont Joshua était si fier. La veille, Rillibee avait édifié un château féodal, avec remparts crénelés, tours, tourelles, donjon. Il le démonta ainsi qu’il en avait reçu l’ordre, rabattit le tapis, aligna les franges avec soin comme des petits soldats à la parade. Le perroquet s’agitait sur son perchoir ; entre lui et le garçon s’échangea un long regard plein de ressentiment.

— Nom de Dieu, chuchota l’oiseau. Oh, misère de misère !

On aurait presque dit la voix de Miriam.

Assis sur le tapis, Rillibee regardait au-dehors. Peu à peu, il n’aurait su préciser à quel moment, la lumière avait basculé. La nuit entra, légère, au ras du sol. Son estomac criait famine. Il gagna la cuisine, où son père et sa sœur attendaient sans échanger une parole.

— Puis-je avoir quelque chose à manger ? demanda-t-il.

Joshua eut un sourire las.

— Tu as raison, passons à table. Votre mère serait fâchée que nous l’ayons attendue jusqu’à une heure si tardive. Je me demande ce qui peut la retenir.

Ils retournèrent dans le salon. Ils venaient de s’installer et n’avaient encore touché à rien lorsque le voyant s’alluma au-dessus de la porte, signalant que quelqu’un venait de franchir la grille du jardin. Une expression de profond soulagement se peignit sur les traits de Joshua ; toute sa physionomie s’éclaira. Il se leva d’un bond et se hâta d’aller ouvrir.

— Je voudrais parler à Miriam Chime, déclara un inconnu d’une voix forte, sur un ton d’autorité.

— Ma femme est absente, dit Joshua. J’ignore quand elle sera de retour. Il poussa une exclamation de surprise et de colère tandis que l’homme, l’écartant d’une bourrade, pénétrait dans le salon comme en terrain conquis. Où vous croyez-vous ? Qu’avez-vous l’intention de faire ?

— Mon boulot. Chercher jusqu’à ce que je la trouve.

Il était grand, il dépassait Joshua d’une tête. Il avait des mains puissantes et rapaces, des bras musculeux. Sa carrure athlétique était rendue plus impressionnante par l’uniforme blanc aux épaulettes vertes. Un masque lui pendait autour du cou. Après avoir inspecté le salon, il entra dans la cuisine. Il ouvrit les placards, puis la porte donnant sur l’extérieur, jeta un coup d’œil circulaire et la referma. Après avoir fait la visite des chambres, il ressortit. On l’entendit marcher le long de la maison. On l’entendit fouiller l’atelier. Rillibee avait posé ses couverts. Les mains bien à plat sur la table, de part et d’autre de l’assiette, il ne quittait pas des yeux le visage de son père, d’une pâleur effrayante.

Quand l’inconnu eut tout remué de fond en comble, il resta planté au milieu de la cour. Les poings sur les hanches, il contemplait la maison. Il se passa la main dans les cheveux et pria Joshua Chime de le rejoindre un instant. Les enfants eurent beau tendre l’oreille, ils ne saisirent pratiquement rien de leur conversation assourdie et chuchotante. Quelques mots, au passage : « Autorité », « Sanction », « Détention ».

Rillibee s’était tu.

— Je connais la langue de bois des agents du pouvoir, grommela Frère Mainoa. J’ai senti bien des fois la jubilation qu’ils éprouvaient à nous jeter au visage les mots les plus sinistres.

Le silence entre eux menaçait de s’éterniser.

— Comme tu dois souffrir, dit encore le frère.

La gorge nouée, Rillibee se contenta de hocher la tête.

— Quand tu t’en sentiras le courage, tu me raconteras la suite. Nous avons tout le temps.

Le petit appareil poursuivait son vol tantôt rectiligne et tantôt zigzagant dans l’air gorgé de soleil. Il s’écoula un long moment avant que Rillibee ne reprît le fil de son récit.

L’inconnu avait quitté les lieux. Assis devant la cheminée, Joshua demeurait prostré.

— Papa ?

— Pas maintenant, Rillibee. Ne me demande rien. Cet homme était venu chercher Miriam. Dieu sait pourquoi. Et Dieu sait pourquoi elle n’est pas rentrée. Je ne sais rien, vois-tu, rien du tout.

— Qui est-ce ?

— Un fonctionnaire du Service de Santé.

— Saloperie de poisse ! s’écria le perroquet.

Joshua lui lança une cuillerée de soupe à la tomate. Elle le manqua et fit sur le mur une tache rouge dégoulinante.

On ne revit pas l’homme au masque de toute la soirée. Aucun signe de Miriam. Joshua arpentait le salon. Parfois, il s’arrêtait devant le vidéocom, pianotait un numéro sur le clavier. Aucune des personnes avec lesquelles il s’entretint n’avait eu de nouvelles de Miriam, pas plus sa sœur, établie à Rattle Snake, que ses amis de l’atelier de peinture ou de tissage.

Il fut l’heure d’aller dormir. De la fenêtre de sa chambre Rillibee avait, entre les arbres, une échappée de vue sur le désert. L’homme du Service de Santé s’était installé dans son gyroplaneur ; il surveillait la maison, déterminé à ne pas manquer Miriam Chime lorsqu’elle se déciderait à rentrer. Rillibee se mit au lit et pleura toutes les larmes de son corps, en sourdine afin de ne pas alerter Songbird, dont la chambre se trouvait de l’autre côté de la cloison. Puis le sommeil le noya comme une eau sombre.

Un bruit insolite le réveilla, mi-frottement, mi-grattement, non loin de sa tête. Sous le lit ; plus précisément, sous le plancher.

Un moment, le cœur battant, retenant son souffle, il ne fit qu’écouter. Ce sont des vampires, ce sont les dragons de la fable, songea-t-il. La raison l’emporta : que feraient dans une cave des monstres de légende ? L’entrée principale du sous-sol, inutilisé depuis longtemps, se trouvait dans l’atelier, derrière les réserves de bois. On y accédait aussi par une trappe, située sous le lit de Rillibee. Quelqu’un s’était introduit dans la cave et manifestait ainsi sa présence.

La décision du petit garçon fut vite prise. Il se glissa hors de sa chambre ; en tapinois, il alla prévenir son père. Celui-ci déplaça le lit, sans précipitation, sans faire de bruit, en s’y prenant à plusieurs reprises. Quand la trappe fut dégagée, il souleva l’abattant.

Blanche, les cheveux en désordre, Miriam leva vers eux un visage méconnaissable. Elle avait l’air hagard de quelqu’un qui vient de frôler l’épouvante. Ses vêtements étaient déchirés et souillés comme si elle avait dû ramper dans la boue.

— Josh, si tu savais, si tu savais… souffla-t-elle. Mon Dieu, ils voulaient m’envoyer je ne sais où. Ils voulaient m’enlever à vous… Je me suis enfuie par la fenêtre. J’ai couru à perdre haleine. Je suis allée vers le torrent. J’ai rampé dans le lit du torrent. Je suis entrée par la petite porte. Sais-tu combien de temps il m’a fallu pour déblayer l’entrée de la cave ? J’avais si peur que le tas de bois ne s’écroule… Cache-moi, Josh. Empêche-les de me reprendre.

— Ma biche, mon trésor, mon amour. Jamais ils ne te trouveront.

Nouveau silence.

— Ton père l’aimait donc à ce point ? murmura Mainoa.

— Quelle confusion, dans mon esprit, reprit Rillibee. Pourquoi avait-on enlevé ma mère ? Où voulait-on l’envoyer ? Quel crime avait-elle commis pour mériter un tel châtiment ? Je ne posai aucune question et personne ne me fournit la moindre explication. Songbird ne fut pas davantage mise dans le secret. On nous recommanda seulement de ne pas trahir la présence de notre mère. Pour la famille, les amis, pour le reste du monde, Miriam n’était pas rentrée. Elle avait disparu.

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