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Hugues Pagan: Boulevard des allongés

Здесь есть возможность читать онлайн «Hugues Pagan: Boulevard des allongés» весь текст электронной книги совершенно бесплатно (целиком полную версию). В некоторых случаях присутствует краткое содержание. Город: Paris, год выпуска: 1995, ISBN: 978-2-86930-926-5, издательство: Éditions Payot & Rivages, категория: Полицейский детектив / Триллер / на французском языке. Описание произведения, (предисловие) а так же отзывы посетителей доступны на портале. Библиотека «Либ Кат» — LibCat.ru создана для любителей полистать хорошую книжку и предлагает широкий выбор жанров:

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Hugues Pagan Boulevard des allongés

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Bénin en apparence, l'inspecteur Katz possède du félidé homonyme une détente sournoise et implacable. À pattes veloutées, il tourne autour de grands truands qui, après avoir volé un tas de bijoux, se le disputent sans pitié. Katz attend son heure pour lancer ses griffes. Mais dans la police, Katz est parrainé — et surveillé — par son frère aîné, le commissaire principal Lantier, un vieux matou pelé mais sagace… «Hugues Pagan se livre ici à une démystification de la police à papa, non point burlesque comme dans les mais saumâtre et quelque peu nihiliste, du style dans une société pourrie, pourquoi les flics ne le seraient-ils pas.» Michel Lebrun,

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Un camion passait sur la route, illuminé comme un arbre de Noël. Le gendarme tournait le dos à la circulation. Il retira les doigts de sa vareuse, avant même d’avoir donné le coup de raquette réglementaire.

— Eh oui, fit Ségura en levant les épaules. Eh oui… Au même instant, il reconnut la silhouette renflée d’un revolver de fort calibre, et, au bout du court canon trapu, le tube épais d’un silencieux, il tourna la tête vers l’autre gendarme dont il ne distingua pas les traits. Les moteurs des motos faisaient un bruit creux. Ségura demeura immobile, comme pétrifié, tandis que l’arme se braquait sur son front, tenue à hauteur de la ceinture. Le second camion, celui qu’il avait dépassé avant le pont, passa à son tour et couvrit le bruit de la détonation.

Presque à bout touchant, la balle frappa Charles Ségura juste au-dessus de l’œil gauche, lui traversa le cerveau et fit éclater la boîte crânienne, dont l’arrière se répandit au petit bonheur dans l’habitacle. Une main gantée repoussa le corps, dont le torse s’affala sur le siège du passager, coupa le contact et les phares. Le revolver avait disparu. La même main ouvrit la portière arrière gauche, saisit l’attaché-case et s’en empara.

Le tout n’avait pas duré plus de vingt secondes.

*

Dans la villa de Tony Pastor, trois hommes attendaient. Celui qui paraissait être le chef avait pris place dans un fauteuil, et jouait machinalement avec des gants de conduite ajourés. Personne ne fumait. Deux autres hommes s’étaient embusqués dans le parc, munis de Mossbergs à pompe, en calibre douze. L’homme aux gants avait un visage creux et dur, les cheveux coupés court, et des yeux clairs, presque incolores. Il consulta sa montre. Seul ou accompagné, Schmitt n’allait plus tarder. Il sortit son porte-cartes, examina le contenu et le referma.

Commissaire principal.

Il en avait l’âge.

Il entendit la voiture qui remontait l’allée dont le gravier crissa sous les pneus. On sonna à la porte, et le bruit du carillon lui sembla futile et déplacé. Il était déjà debout, la veste entrouverte, les deux autres avaient fait mouvement. Ils lui amenèrent Schmitt, un homme petit et fluet d’une cinquantaine d’années. Il l’examina, de la pointe des chaussures vernies aux quelques cheveux qui lui restaient sur le crâne, soigneusement peignés en arrière. Les yeux clairs ne s’animèrent pas.

— Où est Ségura? demanda Schmitt.

Il ne paraissait nullement inquiet.

— Police judiciaire, annonça l’homme aux gants.

Il ouvrit le porte-cartes, le passa devant les yeux du petit homme.

Schmitt sentit qu’on lui ramenait les bras en arrière, puis le contact froid des menottes. Il avait laissé l’argent dans la voiture, mais il ne faudrait guère plus de cinq minutes aux policiers pour le trouver. De l’argent anonyme, dans un sac de cuir anonyme. Rien à voir avec les cailloux. On le fouillait rapidement, le délestant de son portefeuille, de son chéquier, ainsi que du carnet qu’il portait toujours sur lui. Des clés de contact de sa voiture.

— Je ne crois pas que vous pourrez me retenir bien longtemps, commissaire, dit-il avec douceur.

L’homme aux gants esquissa un sourire plat, le visage un peu penché sur l’épaule gauche et murmura:

— Je ne crois pas que ce sera nécessaire, en effet…

Ils l’embarquèrent.

Dehors, un jour gris commençait à s’insinuer entre les arbres. Il faisait frais, comme toujours au petit matin. Schmitt regarda le parc, avant de monter en voiture, aperçut une Renault 14 embusquée le long du garage plat. Comment ne l’avait-il pas remarquée? Il devait se faire vieux, somme toute. Ou alors, il y avait d’autres policiers alentour et il était tombé dans une souricière. On le poussa sans rudesse dans sa voiture, derrière, entre le commissaire et un autre policier qui prit place sur la banquette en se serrant.

Schmitt s’interdit de penser.

La voiture prit de la vitesse dans l’allée, ralentit à peine au portail, et tourna à gauche. Schmitt eut le temps d’apercevoir la Renault 14 qui, elle, dégageait à droite. Ils n’avaient pas fouillé la voiture. Personne ne lui avait demandé quoi que ce soit. Personne ne parlait: une mécanique bien rodée. Il remua un peu pour soulager ses poignets. Ils ne pourraient rien prouver, à moins que Ségura se soit déjà allongé, et encore: il n’était que le commissionnaire payé au forfait d’une transaction commerciale dans laquelle il n’était pour rien. Il remarqua que le conducteur portait des gants. Le commissaire également, ainsi que l’autre policier qui avait le visage tourné vers la vitre et paraissait abîmé dans la contemplation du paysage. Ils n’avaient pas fouillé la voiture et on portait des gants lorsqu’on ne voulait pas laisser d’empreintes. Des policiers n’avaient rien à foutre, de laisser des empreintes ou pas. Schmitt bougea.

— Vous n’êtes pas des poulets, laissa-t-il échapper.

L’homme aux yeux clairs tourna à peine la tête, le dévisagea et dit:

— Tu as gagné, papy! On n’est pas des poulets, mais je crois pas que tu iras le clamer sur les toits…

Et comme Schmitt commençait à bouger un peu trop, il l’étourdit d’un seul coup de son poing osseux, porté en plein sur la tempe gauche. Le jour se levait, il serait blême et livide un moment, un bon moment, des bancs de brouillard glacé traînaient encore dans les creux, d’où émergeaient les cimes dépouillées d’arbres fantomatiques et immobiles, puis le soleil brillerait, peut-être, ce qui, pour Schmitt en tout cas, n’aurait plus aucune espèce d’importance. L’homme aux yeux clairs contracta les mâchoires. Celui qui avait monté l’opération, il ne le connaissait pas, et il n’avait nulle envie de le connaître. Il recevait les instructions par téléphone, dans un bistrot ou l’autre, jamais le même, et qui se situaient au hasard entre Bastille et Charles-de-Gaulle. Il était payé rubis sur l’ongle et ça lui suffisait. Il examina sa main maigre, enfila le gant.

L’homme aux yeux clairs était un tueur.

Il n’avait jamais rien fait d’autre, depuis l’âge de vingt ans, sauf des boulots de couverture. Il n’avait jamais quitté Paris ou la région parisienne, ni pris une semaine de vacances, aussi loin qu’il se souvienne. Il n’était connu d’aucun fichier de police ou de gendarmerie. Il obéissait au curieux nom de code de Diogène, et comme lui, il cherchait un homme. Jamais une femme ou un enfant. Toujours un homme. Il savait que les damnés ne pleuraient pas. Il savait que, tôt ou tard, Diogène mourrait, que c’en serait fini. Le savoir le laissait tout à fait indifférent. Il étendit ses doigts gantés. Si Diogène revenait, il conviendrait que sa lanterne fût sourde. À regarder ses doigts, il sentit que le manteau noir l’avait frôlé de son pan négligent, la première fois, c’était pour dire: à bientôt, et celle qui le portait ne se retournait pas. La seconde fois… La seconde fois, il n’y en aurait pas d’autre.

— À droite, au carrefour, indiqua-t-il au conducteur.

Sa voix était rauque.

La prochaine fois, elle se retournerait, elle le regarderait et il la verrait en face. Il lutta contre l’envie d’allumer une cigarette, tandis que la voiture virait presque sans ralentir, ce qui fait que Schmitt s’appuya contre son épaule, longuement, comme un compagnon d’infortune résigné. Il le repoussa bien après que la voiture fût revenue en ligne droite.

*

Katz se rasait avec soin, devant la glace. Il avait pris une douche glacée, s’était rapidement épongé, et avait enfilé un peignoir. Il avait certainement les cheveux trop longs. Mouillés, ils lui pendaient de chaque côté de la tête. Katz avait un torse de culturiste, qui ne devait rien à la gonflette, et sur lequel se traduisait, par le jeu de chaque muscle, le moindre de ses mouvements, une taille mince, et, plus bas, dans une touffe de poils sombres, un truc qui ne lui servait plus guère qu’à pisser. Le truc et lui s’étaient séparés, il avait cessé de lui obéir. Katz reposa le rasoir mécanique sur la tablette. Elle avait dit: «… redevenir un homme capable de gérer ses conflits…» C’était bien sûr une manière de voir la question. Il y en avait peut-être d’autres.

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