Frédéric Dard - Du sable dans la vaseline

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Du sable dans la vaseline: краткое содержание, описание и аннотация

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Franchement, je me demande ce que nous sommes allés foutre à Las Vegas, les Pinaud, les Bérurier et moi. En France, nous étions peinards : tout baignait. J'avais ma Féloche, mes potes et plein de culs proprets à ma disposition. Des petites mignonnes douées me taillaient des calumets irréprochables qui ne pénalisaient pas mon futal, et quand je leur déballais ma tierce à pique dans un plumard, personne ne venait les scrafer sur mon bide pendant qu'elles faisaient du trot anglais.
Tandis qu'à Vegas !…
Cette hécatombe,
!
Tout le monde cartonne tout le monde !
Les flics en tête !
Tu peux oublier ta petite laine à la rigueur, mais surtout pas ta médaille de saint Christophe.

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— Cette frénésie a dû vous causer pas mal de désagréments, non ?

— Quelquefois, mais ils ne sont rien comparé aux joies que j’en ai tirées.

Je suis un peu honteux de me vanter devant un homme pourvu d’une frime pareillement dévastée. Les bons coups de bite, Cécoinsse, c’est au claque de la mère Lola qu’il les donne. Probable qu’à cause de ses fonctions il grimpe gratos, mais ça me surprendrait qu’il déchaîne les passions ; à moins de s’équiper d’une capote en peau de porc-épic !

— Si vous me parliez de votre perquisition illégale chez Liebling ? Elle a coûté la vie à son serpent, ce dont je me fous, mais également à un gars du Daily Red Indian .

À quoi bon tergir le verset ? dirait Salman Ruddy. Puisque Kesselring joue franc-jeu avec moi, je vais être réglo avec lui.

15

En vertu de quoi, je lui raconte très à fond mon odyssée depuis ma déposition à l’hôtel de police, sans rien lui celer : mon rendez-vous manqué avec Dolores, les frasques de nos dames, mon altercation avec Gulliver, ma visite chez Liebling et mes démêlés avec le serpent, la venue de M. Blanc et du chien, l’exploration dans les cintres du music-hall, la curieuse trajectoire de Pinaud (le kidnappé semant ses boutons de manchettes), l’ours blanc, enfin, trouvé mort au fond du conduit.

La triste fin du plantigrade vedette le fait tiquer plus que le reste.

— Voilà un magicien qui n’a pas de chance avec ses animaux savants, résume-t-il.

— Vous le connaissez ?

— C’est une célébrité : il fait courir les foules. Il y a même ici un zoo fameux qui porte son nom.

— Le Gladiateur jouit-il d’une bonne réputation ?

— L’établissement par lui-même, oui.

Je flaire une réticence.

— Mais ? insisté-je.

— Celle de son propriétaire est plus contestable : Nello Manzoni a appartenu à la pègre avant de se ranger des voitures.

— Je ne crois pas beaucoup à la rédemption des truands, dis-je ; elle n’intervient que lorsqu’ils sont gâteux, s’ils vivent assez longtemps pour le devenir.

Mon terlocuteur approuve.

— J’ai demandé votre curriculum à notre ambassade de Paris. Vous êtes un super-flic, là-bas.

— Ça se raconte dans les chaumières, en effet.

— Efficacité à cent pour cent, grâce à l’emploi de méthodes pas toujours orthodoxes. Courageux, téméraire, homme d’esprit…

— N’en jetez plus ! Je connais le reste.

L’œil valide exprime une certaine bienveillance. Drôle de gus, ce Kesselring ; m’est avis que son passé ne doit pas être triste. C’est pas en jouant aux quilles qu’il s’est fignolé ce physique hiroshimiesque !

Mon camarade yankee conclut :

— Vous m’avez l’air d’une grosse pointure. Je suis tout disposé à vous apporter mon concours, car ici les choses ne se passent sûrement pas comme chez vous.

— Merci, fais-je avec sincérité.

Il me tend la pogne. Je constate qu’il lui manque l’auriculaire de la main droite. Peut-être s’est-il trop curé l’oreille ?

— Mon prénom est Ray ! annonce-t-il.

— Le mien : Antoine !

On s’en triture neuf et on se quitte après qu’il m’a donné son numéro de portable.

* * *

Avant d’aller me toiler, je passe par l’appartement du Gros. Il est vide, mais l’odeur du Monstre y stagne encore, terriblement « physique » et présente.

Un feuillet blanc, souillé de ce qui lui tient lieu d’écriture, repose sur la moquette : J’sus t’été briffer et faire un peu d’enquête. Sandre.

Brave homme ! Cher cocu boulimique ! Que le Tout-Puissant te garde sous Sa protection.

Au plus fort de mon sommeil, dont la masse spécifique est 207,21 et la densité 11,3, je suis réveillé par des grattements à la porte.

What is it ? questionné-je, d’un ton plus voile que la roué d’une voiture d’enfant réutilisée par un clodo.

— Mouah mouah ! répond Salami.

D’humeur fulmigène, je lui ouvre.

Il est assis dans le couloir, l’une de ses pattounes posée sur une délicieuse petite culotte jaune, sertie de dentelle noire.

M’apercevant, il se dresse, cueille délicatement le sous-vêtement entre ses incisives et me l’apporte en dirigeant la Cinquième de Beethoven avec sa queue.

Je suis aussitôt prêt à prendre le relais, tant son trophée est affriolant.

— Où avez-vous trouvé cette merveille, mon royal ami ? lui demandé-je.

Il cligne de l’œil et, d’un court hochement de tête m’invite à l’accompagner.

— Un instant, dis-je, je dois passer une tenue décente.

Avec promptitude, j’enfile ma robe de chambre (en attendant mieux), mes mules vernies aux semelles cardinalices.

Ces dispositions express ne m’ont pas pris deux minutes, cela n’empêche pas mon hound de perdre patience et de me jouer de la truffe de Pan.

Nous voici dans un couloir long comme l’avenue de la Grande-Armée. Zébulon trace à toute vibure avec, toujours, l’affolant slip dans la bouche. Je connais la fantaisie de mon gaillard, mais juge son comportement plutôt singulier. Quelle croisade entreprend-il ? Où me drive ce satané quadrupède ?

Le galant stoppe devant une large porte à deux battants située dans la partie de l’hôtel cataloguée « super-luxe », lui valant les deux vantaux.

Mon cicérone jappouille sur un air convenu ; une superbe Noire vêtue en femme de chambre, à la jupe plus courte qu’une prestation de serment, dépone en nous montrant simultanément l’émail de ses dents et les poils de sa chatte.

— Mais oui, qu’il a bien fait la commission, ce chéri ! gazouille-t-elle.

Puis, à moi :

— Vous possédez là un chien exceptionnel ! Figurez-vous qu’il a suivi Mademoiselle jusqu’ici. Il est entré avec elle et, une fois au salon, a hardé comme un fou. Mademoiselle, vous allez voir, est une personne très portée sur le sexe. Devant la frénésie de l’animal, elle a ôté sa culotte et cet exquis basset s’est mis en devoir de la minoucher d’une langue extraordinairement experte. Aux dires de ma patronne, aucun humain, homme ou femme, ne lui a procuré autant de plaisir dans cette savoureuse discipline. Cela dit, je cours vous annoncer.

Et elle nous laisse en faisant voleter sa jupette plissée.

Je me tourne vers Salami :

— Vous en faites de belles !

Il baisse la tête et ses oreilles composent un O’cédar sur le plancher.

— Je ne veux pas me laisser aller à une scène de jalousie, reprends-je ; je vous l’ai signifié en son temps, la zoophilie me répugne et me révolte. M’imagineriez-vous « pratiquant » une chienne afghane ou me faisant laper par un bouvier des Flandres ?

Agacé par mon sermon, il se lèche les roustons, exercice peu courant chez l’individu non contorsionniste.

La jolie Noire réapparaît.

— Vous pouvez entrer ! annonce-t-elle, claironnante.

Puis baissant le ton, elle chuchote :

— Vous me paraissez étranger, alors sans doute l’ignorez-vous : Mademoiselle est la fille de Jo Morton, le plus grand propriétaire des jeux de Vegas, familièrement connu sous le sobriquet de Lucky Love.

— Beau parti ! apprécié-je, et je pénètre dans le toril.

Sa petite culotte jaune à dentelle noire se montrait trompeuse. Elle casse pas trois testicules à un escargot, la Miss, et possède davantage de carats que toutes les vitrines Cartier réunies. Pour introduire sa poitrine dans son soutien-gorge, elle utilise une balayette à crins durs et une pelle à charbon. Le nez crochu, style Polichinelle, le menton qui part à sa rencontre, la bouche en arc-de-cercle, les baffles haute fidélité, la peau du ventre à festons et la moule aussi consistante qu’un chewing-gum sous ta semelle, telle est la Vénus honorée par mon intrépide Salami.

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