Emmanuel Carrère - La moustache

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Un jour, pensant faire sourire votre femme et vos amis, vous rasez la moustache que vous portiez depuis dix ans. Personne ne le remarque ou, pire, chacun feint de ne l'avoir pas remarqué, et c'est vous qui souriez jaune. Tellement jaune que, bientôt, vous ne souriez plus du tout. Vous insistez, on vous assure que vous n'avez jamais eu de moustache. Deviendriez-vous fou? Voudrait-on vous le faire croire? Ou quelque chose, dans l'ordre du monde, se serait-il détraqué à vos dépens? L'histoire, en tout cas, finit forcément très mal et, d'interprétations impossibles en fuite irraisonnée, ne vous laisse aucune porte de sortie. Ou bien si, une, qu'ouvrent les dernières pages et qu'il est fortement déconseillé d'emprunter pour entrer dans le livre. Vous voici prévenus.

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«Voilà, conclut-elle, tu es en règle.»

Il reprit la carte d'identité, consterné. Elle avait arraché du grain de l'image sa moustache, une aile de son nez, un lambeau de sa bouche et, bien sûr, cela ne prouvait rien quant au visage que reproduisait la photo avant d'être mutilée. Il faillit le lui dire, mais se rappela sa décision d'entrer dans son jeu, au moins jusqu'à lundi, de ne pas la contredire. Déjà beau, après tout, qu'elle ait vu une moustache, avoué qu'elle le soupçonnait de l'avoir tracée au feutre. En un sens, c'était même mieux, mieux que la marche arrière au sujet du psychiatre, qui calquait trop son attitude à lui: au moins elle acceptait de se trahir, rompait la symétrie capable de faire croire que c'était elle la saine d'esprit, la temporisatrice, la conciliante…

Et, comme d'habitude, comme si elle lisait dans ses pensées, elle lui prit la main, dit: «Pardonnemoi. J'ai eu tort.»

– Partons.»

Ils restèrent silencieux, dans la voiture. A un moment, seulement, elle effleura sa nuque, répéta d'une voix à peine audible: «Pardon». Il détendit le cou, épousant la paume de sa main, mais aucun son ne put franchir ses lèvres. L'idée le tourmentait que peut-être elle avait mutilé ou détruit toutes ses photos, toutes les preuves tangibles autres que le témoignage des amis, toujours sujet à caution. Si ce n'était déjà fait, il fallait se hâter de les mettre en lieu sûr, ne serait-ce que pour le dossier du psychiatre. Il sentait qu'après une brève rémission elle tâchait de reprendre l'avantage, préparait une offensive pour le remettre en position d'accusé, position de celui qui doit fournir les preuves et, si elle jouait si franc, si elle se découvrait, cela signifiait qu'elle avait ménagé ses arrières, mis la main sur les preuves en question. Bien que ce fût sans doute déjà inutile, il aurait voulu entrer le premier dans l'appartement, ne pas l'y avoir laissée seule, il avait été fou de s'absenter. Un espoir lui restait: si, devant l'immeuble, avant qu'il aille garer la voiture au parking, elle exprimait le désir de monter la première, alors il pourrait dire non, tu restes, la retenir de force s'il le fallait. Mais elle ne dit rien, descendit au parking avec lui, signifiant que le mal était fait. Penser qu'elle est folle, se répétait-il, ne pas lui en vouloir, l'aimer ainsi, l'aider à s'en tirer…

Il dut se raisonner, à la porte de l'appartement, pour s'effacer devant elle. Ce tribut payé à la galanterie, il renonça à faire comme s'il ne cherchait rien et, après avoir parcouru du regard les rayonnages, la table basse, le dessus de la commode, ouvrit un à un les tiroirs du secrétaire qui, repoussés sans ménagement, émirent un bruit de bois sec.

«Où sont les photos de Java?»

Elle l'avait suivi, se tenait debout devant lui, le regard fixe. Jamais, même lorsqu'ils faisaient l'amour, il n'avait vu sur son visage une telle expression de désarroi.

«De Java?

– De Java, oui. Je voudrais regarder les photos de Java. Juste comme ça», précisa-t-il sans aucun espoir d'être cru.

Elle s'approcha, saisit son visage entre ses mains, en un geste qu'elle avait dû, qu'il avait dû faire mille fois et qu'elle voulait maintenant charger de conviction, de prière efficace, délester du poids mort que lui conférait l'habitude.

«Mon amour…» murmura-t-elle. Sa bouche tremblait, comme si sa mâchoire allait se décrocher. «Mon amour, je te jure, il n'y a pas de photos de Java. Nous ne sommes jamais allés à Java.»

Il pensa qu'il s'y attendait, que cela aussi devait venir. Elle sanglotait à présent, comme la veille, comme l'avant-veille, comme le lendemain, et ça n'arrêterait plus: chaque soir une scène semblable, chaque nuit faire l'amour pour se réconcilier, tâcher d'oublier tout dans la fervente quiétude des corps, chaque matin adopter un naturel factice et chaque soir recommencer, parce qu'on ne peut pas sans trêve faire comme si de rien n'était. Il se sentait las, ne songeait plus qu'à accélérer le cycle, à plonger dans la nuit, à la serrer dans ses bras, et il la serrait déjà, berçait ses pleurs, calmait ses épaules, malade d'amour et de chagrin. Les spasmes affolés de son corps lui disaient qu'elle ne mentait pas, qu'elle croyait vraiment, ce soir, n'être jamais allée à Java et qu'elle en souffrait trop pour parvenir à le lui cacher. Eh bien d'accord, ils n'y étaient pas allés, d'accord il n'avait jamais eu de moustache, d'accord il avait maquillé sa photo, d'accord sur tout pourvu qu'elle se calme, cesse de pleurer, même peu de temps. Ils demandaient grâce tous les deux, prêt chacun à tout sacrifier, à nier l'évidence, à acheter un répit à n'importe quel prix, mais elle pleurait toujours, tremblait toujours, et derrière elle, sur le mur, en embrassant ses cheveux, il voyait la grande couverture tissée qu'ils avaient rapportée de Java. Tant pis pour la couverture, tant pis pour Java, tant pis pour tout, stop, stop, stop mon amour, répétait-il doucement, encore, comme d'habitude.

Le téléphone sonna, le répondeur se mit en marche. Ils entendirent la voix posée, rieuse presque, d'Agnès débitant le message tandis qu'elle hoquetait dans ses bras puis, après le signal sonore, celle de Jérôme qui dit: «Qu'est-ce qui se passe, tu vas m'expliquer? Rappelle-moi», et il raccrocha.

Agnès se dégagea, alla se recroqueviller sur le canapé.

«Tu crois que je deviens folle, c'est ça? murmura-t-elle.

– Je crois, dit-il en s'accroupissant à sa hauteur, que quelque chose ne va pas et qu'on va trouver quoi.

– Mais tu penses que c'est moi? Dis-le.»

Un temps de silence.

«Toi ou moi ou autre chose, répondit-il sans conviction. De toute façon, on trouvera. Pense que c'est comme quand on est défoncé, à un moment ça s'arrête.»

Elle pleurait plus calmement, à petits coups.

«Je sais que j'ai eu tort, tout à l'heure, au restaurant.

– J'aurais fait pareil. Je ne te reproche rien.»

Il se demanda si elle pensait: «encore heureux!», mais elle dit seulement: «Je veux dormir» et se leva. Puis, tout en rajustant ses vêtements, elle alla dans la chambre, revint avec la plaque de somnifère et, comme l'avant-veille encore, lui tendit deux comprimés.

«Seule, j'aime mieux», ajouta-t-elle.

Il la suivit des yeux et, au moment où elle referma la porte, l'idée lui vint, affreuse, qu'ils avaient fait l'amour pour la dernière fois, l'autre nuit. Presque en même temps, il eut peur qu'elle ait gardé les autres somnifères pour les avaler tous et voulut aller les chercher. Elle risquait de penser la même chose à son sujet, mais tant pis, il frappa à la porte, entra sans attendre la réponse et rafla la plaque posée sur la table de nuit. Elle était étendue sur le lit, encore habillée. Le voyant faire, elle devina tout de suite, sourit, dit «prudent, hein?», puis ajouta: «Tu sais, j'ai peur qu'on en aie besoin demain aussi.» Il eut envie de s'asseoir au bord du lit, de prolonger un peu cette intimité de chagrin, mais comprit que c'était inutile et sortit en tirant la porte derrière lui.

Sans bruit, il commença à fouiller le salon, en quête de photos qui auraient pu échapper à Agnès. Mesurant la sottise de l'avoir laissée seule toute la journée, il ne formait guère d'illusions sur le résultat de ses recherches. De plus, l'accès de la chambre où elle dormait, si elle dormait, lui était interdit. Au bout d'un moment, il fut certain que les photos de vacances à Java, celles d'autres vacances, celles de leur mariage, tout le capital d'images et de souvenirs amassé en cinq ans de vie commune avait disparu, au mieux caché, plus probablement détruit. Restaient, bien sûr, des objets pour en témoigner: la couverture tissée de Java, tel bibelot qu'il lui avait offert, en fait tout ce que contenait la pièce et qui avait partie liée avec le passé qu'elle semblait vouloir effacer. Mais ces preuves n'avaient pas la même valeur, il le savait bien: un objet, on peut toujours affirmer qu'on le voit pour la première fois, alors qu'une photo est irréfutable. Même pas irréfutable, puisque l'absurde stratégie d'Agnès consistait précisément à en réfuter le témoignage, à dire blanc où tout le monde voyait du noir, sans même, parfois, se donner la peine de peindre en blanc les objets litigieux. Cette position, bien sûr, n'était pas tenable. Le problème, malheureusement, n'était pas de confondre Agnès mais de la guérir. Il ne suffisait pas de s'attaquer aux symptômes, de lui opposer l'évidence, il fallait extirper la racine du mal, certainement profonde, ramifiée, travaillant depuis des années peut-être à ronger le cerveau de la femme qu'il aimait. Il se rappela un reportage, vu par hasard à la télévision, sur une petite ville du Sud-Ouest qui tirait l'essentiel de ses revenus de l'hébergement des fous. Il ne s'agissait pas, comme il l'avait d'abord cru, d'une expérience psychiatrique de pointe, visant à réinsérer les malades dans la vie sociale, mais d'une simple mesure économique. La journée d'hôpital du fou moyen coûtait trop cher à la Sécurité sociale, les habitants du patelin avaient besoin d'argent, alors on leur allouait une somme très modeste, quelque chose comme 600 F par mois, pour parquer un, deux, trois malades incurables, mais doux, dans des maisonnettes, des espèces d'appentis où on leur portait la soupe aux heures des repas. On veillait aussi, c'était le principal soin, à ce qu'ils absorbent leurs médicaments, et on se débrouillait pour faire de petits bénéfices sur les frais d'entretien. Les fous semblaient paisibles, leurs hôtes pas mécontents de ces revenus locatifs qui avaient l'avantage de tomber tous les mois, à coup sûr, de ne pas risquer de se tarir, car leurs pensionnaires restaient jusqu'à leur mort. Chacun vaquait à ses occupations, un des malades, depuis vingt ans, écrivait sans trêve la même phrase pompeuse et dépourvue de sens, une autre berçait des baigneurs en celluloïd, changeait leurs couches toutes les deux heures, se déclarait heureuse… En voyant le reportage, il avait pensé, c'est horrible, bien sûr, mais comme on trouve horrible la famine en Éthiopie, sans se représenter Agnès assise sur les marches d'un cabanon, au fond du jardin, répétant d'une voix douce que son mari n'avait jamais porté de moustache, et les années passant, répétant toujours cela, en devenant une femme mûre, une vieille femme. Il l'imaginait, Dieu sait pourquoi, en robe de petite fille. Et lui, petit à petit, se serait détaché d'elle, l'amour transformé en pitié, en remords. Bien sûr, elle n'irait pas dans un de ces villages pour malades nécessiteux, il lui trouverait les maisons de repos les plus luxueuses, mais ce serait pareil: avec le temps, l'indifférence s'installerait, elle deviendrait pour lui un boulet, un poids sur la conscience, jamais apaisée par la certitude que, pourtant, il faisait de son mieux, allait la voir chaque mois, payait chaque mois pour sa pension, et lorsqu'elle mourrait, sans se l'avouer, il serait soulagé… Il ne pouvait chasser cette image d'Agnès vieille, délirant doucement, en robe de gamine. Oh non, non, pensait-il, la gorge nouée. Non, bien sûr, ce n'était pas si grave, pas à ce point. On allait la soigner, l'en tirer. L'ex-femme de Jérôme, à une époque, allait d'anorexies en dépressions nerveuses, elle avait bien fini par reprendre le dessus. Étrange, même, qu'ayant connu cela, Jérôme n'ait pas compris plus tôt, dès le coup de fil de conspiratrice qu'avait dû lui passer Agnès, ou même avant, bien avant; peut-être, pour s'en protéger, refusait-il de voir ces choses-là. Il fallait lui téléphoner, en tout cas, lui expliquer tout, lui demander conseil. Se faire recommander un psychiatre sérieux, celui qui avait tiré Sylvie d'affaire. Le mieux aurait été de descendre, tout de suite, d'appeler d'une cabine pour qu'Agnès ne risque pas de surprendre la conversation. D'autre part, il répugnait à la laisser seule, même cinq minutes. Déroulant le fil, il emporta le téléphone dans la cuisine, se promettant de parIer très bas. Il n'aurait pu, d'ailleurs, prononcer certains mots à voix haute.

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