Simon entre dans l’eau du lac pour se débarbouiller un peu. Il savoure le plaisir de la fraîcheur de l’onde relaxante qui masse et nettoie son corps fatigué.
Lorsqu’il en sort propre et déjà dispos, son regard croise à nouveau les yeux rieurs et pénétrants du maître qui l’attend. Il l’entend alors formuler une invitation inattendue :
« Pierre, si tu me suis, un jour tu pêcheras des hommes. »
Simon hésite un instant. A-t-il bien entendu ? L’appel est pour le moins insolite. Non qu’il ne se fie pas au Nazaréen. Mais il réalise qu’il joue son futur sur une simple décision qu’il doit prendre ici et à l’instant même. Il en a le vertige. Il peut choisir de continuer à pêcher, peut-être même avec une barque neuve. Ou il peut décider de suivre le maître qui l’appelle et qui lui promet de lui apprendre à « pêcher des hommes », comme à son frère André et à ses amis Jean et Jacques.
« Qu’est-ce que tu désires vraiment le plus au monde ? »
Cette pêche miraculeuse lui révèle au moins clairement une chose : un seul moment avec Jésus vaut plus que toute la vie sans lui.
Troublé, Simon tombe à genoux devant lui et lui dit :
« Non, rabbi, je ne suis pas digne d’être ton disciple. Éloigne-toi de moi qui suis davantage pécheur que pêcheur. »
Le maître pose la main sur son épaule qui frémit légèrement à ce contact chaud. Puis il l’attire énergiquement vers lui et l’étreint comme on embrasse un ami.
Simon – n’était-il pas déjà Pierre ? – soutient le regard de celui qui lit dans les cœurs. Il y saisit une étincelle qui lui promet de combler ses plus beaux rêves. De quoi enfin donner un sens, une orientation, un but à sa vie. Il a l’intuition que pêcher des hommes l’impliquerait dans l’énorme mission du Nazaréen : tenter de sauver le monde.
Les étranges paroles du maître, aussi destinées à ses amis pêcheurs, résonnent pleines de force et de mystère aux oreilles émerveillées du nouveau disciple :
« Suis-moi et je te ferai pêcheur d’hommes. »
Simon, qui est désormais Pierre, comprend bien ce que Jésus lui demande :
« Abandonne tes filets et ta barque à ta famille. Celle-ci en aura besoin. Quant à toi, je te promets de t’embarquer sur un autre genre de bateau, de t’enseigner à utiliser d’autres filets et à chercher d’autres prises. Bien entendu, sur une autre mer. Sans rivages. »
Pêcheur d’hommes… Si cela correspond à être comme Jésus, alors c’est ce que Pierre désire. Il ne comprend pas le sens exact de cette formule troublante. Mais sachant de qui elle vient, il l’accepte.
Les empreintes du maître s’impriment sur le sable doré de la plage, telles un sillage lumineux invitant à le suivre. Les pas de celui qui ne veut pas rester un simple pêcheur de poissons viennent s’y confondre, tantôt vigoureux, tantôt encore hésitants.
Le soleil rayonne encore avec force sur le lac.
Le petit hameau de pêcheurs, sa maison, sa barque et ses filets rapetissent au loin. Là reste aussi sa famille, occupée au marché du port, profitant de la pêche miraculeuse. Pierre laisse tout derrière lui car il voit s’ouvrir à lui un avenir radieux, comme ce soleil dont les rayons aveuglants l’éblouissent sur les vagues.
Les siens ne comprennent pas qu’il leur abandonne tout maintenant. Ils ne savent pas que ce qui l’attend vaut beaucoup plus que tout ce qu’il laisse. Ils ne perçoivent pas encore l’abîme qui sépare l’incertaine satisfaction de prendre des poissons de la joie indicible qui consiste à guider des êtres humains vers le royaume de Dieu.
1. La petite ville de Capharnaüm s’étalait sur la rive nord-ouest du lac de Génésareth, encore appelé lac de Tibériade. Depuis là, l’horizon nord-est est cadenassé par le haut plateau du Golan, surmonté par les versants enneigés du mont Hermon. Au sud s’étend la vallée verdoyante du Jourdain, bordée à l’ouest par le mont Thabor.
2. Matthieu 4.18-22; voir aussi Marc 1.16-20.
3. E. G. White, Jésus-Christ, p. 229, évoque cette scène en disant de Pierre que, « tandis qu’il regardait les filets vides, l’avenir lui parut sombre et décourageant ».
4. Le terme grec petros (traduction de l’araméen kepa ou cefas, qui signifie “pierre”, “petit caillou”), a évolué en français donnant le nom de Pierre.
5. Jean 1.42.
6. Lorsque Jésus demande à ses disciples s’ils désirent l’abandonner pour reprendre leur ancienne vie, Pierre répond : « Seigneur, à qui irions-nous? Tu as des paroles de vie éternelle » (Jean 6.67-68).
7. Passage inspiré de Luc 5.1-11.
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