3.5 Demande d’asile présentée à l’aéroport (art. 22 s. LAsi)
La procédure à l’aéroport est régie par des dispositions spéciales. Celles-ci ne sont actuellement applicables qu’aux seuls aéroports de Zurich-Kloten et de Genève-Cointrin ; si une demande d’asile est présentée dans un autre aéroport suisse, il y a transfert du requérant dans le CEP le plus proche et la procédure « normale » est suivie. En cas de dépôt de la demande à Zurich-Kloten ou à Genève-Cointrin, la police de l’aéroport en informe immédiatement le SEM. La police de l’aéroport de Zurich (Flughafenpolizei) ou le SEM (à Genève) collecte ensuite les données personnelles du requérant, relève ses empreintes digitales et le [64]photographie ; d’autres données biométriques peuvent encore être saisies (art. 22 al. 1 LAsi).
La personne qui demande l’asile est interrogée sur son identité et sa nationalité. Ses relations avec la Suisse sont également clarifiées, tout comme l’itinéraire suivi et les circonstances du départ. L’autorité compétente peut faire appel à un interprète. L’audition fait l’objet d’un procès-verbal.
Le SEM examine s’il est compétent pour mener la procédure d’asile en tenant compte des accords d’association à Dublin (art. 22 al. 1 bisLAsi). S’il arrive à la conclusion que la Suisse n’est pas compétente, il rend une décision de non-entrée en matière et ordonne le renvoi du requérant (art. 31a al. 1 let. b LAsi en relation avec les art. 44 ss LAsi). Cette décision doit être notifiée dans les 20 jours suivant le dépôt de la demande d’asile, faute de quoi il faut autoriser l’entrée en Suisse du requérant d’asile et l’attribuer à un canton (art. 23 al. 2 LAsi). 29
3.5.1 Autorisation d’entrer en Suisse
L’entrée en Suisse est autorisée lorsque la Suisse est compétente en vertu du Règlement Dublin III et que le requérant semble être exposé à un danger relevant du droit des réfugiés ou être menacé de traitements inhumains dans le pays d’où il est directement arrivé. Il en va de même s’il rend vraisemblable que ce pays l’obligerait, en violation de l’interdiction du refoulement, à se rendre dans un pays où il risque d’être exposé à un tel danger (art. 22 al. 1 terLAsi).
Le SEM peut autoriser l’entrée en Suisse pour des motifs humanitaires même si la compétence de la Suisse n’est pas donnée en vertu du Règlement Dublin III (art. 11a al. 3 OA 1). Il peut aussi le faire si le requérant d’asile a des relations étroites avec des personnes vivant en Suisse (art. 11a al. 2 let. a OA 1) ou si la Suisse est compétente, sur la base du Règlement Dublin III, pour mener la procédure d’asile et que le requérant n’est pas arrivé directement de son pays d’origine ou de provenance à la frontière suisse, mais rend vraisemblable qu’il a quitté ce pays pour un [65]motif inscrit à l’art. 3 al. 1 LAsi et est arrivé sans retard à la frontière suisse (art. 11a al. 2 let. b OA 1). Cependant, l’art. 11a OA 1 est formulé de manière potestative (« peut »). Cela signifie que les personnes concernées n’ont pas un droit à l’octroi d’une autorisation d’entrée, mais que la décision relève du pouvoir d’appréciation du SEM. La légalité et l’adéquation de la décision peuvent être revues par le TAF (art. 108 al. 4 LAsi).
3.5.2 Refus (provisoire) de l’entrée en Suisse
Lorsque la compétence de la Suisse pour mener la procédure d’asile est donnée, mais que les autres conditions d’entrée ne sont pas remplies, le requérant se voit refuser provisoirement l’entrée. Le SEM lui assigne alors un lieu de séjour et lui fournit un logement adéquat. En règle générale, la personne est assignée à la zone de transit de l’aéroport. A Genève, sont prévues 30 places à cet effet et à Zurich 60. La durée de ce séjour est de 60 jours au plus. Le requérant y est soumis aux mêmes règles que celles qui régissent les CEP, à savoir celles de l’ordonnance du DFJP relative à l’exploitation des logements de la Confédération dans le domaine de l’asile (voir pt 4.1).
La décision d’assignation doit être notifiée au requérant dans les deux jours qui suivent le dépôt de la demande d’asile ; il faut préalablement accorder au requérant le droit d’être entendu et lui donner l’occasion de se faire représenter (art. 22 al. 2, 3 et 4 LAsi). L’assignation à l’aéroport comme lieu de séjour restreignant de fait la liberté de mouvement du requérant à la zone de transit, il faut que la personne ainsi concernée ait également la possibilité, en vertu des règles de la CEDH applicables en la matière, de faire contrôler cette privation de liberté par un juge. 30Tant que la demande d’asile n’a pas fait l’objet d’une décision (art. 23 LAsi), le refus de l’entrée en Suisse peut être attaqué devant le TAF (art. 108 al. 3 LAsi). Le TAF examine la privation de liberté en tant que « juge de la détention » souvent parallèlement à la question de l’admissibilité du refus de l’entrée en Suisse et tient compte notamment des circonstances, de la durée et du type d’hébergement, de la possibilité d’accès à des soins médicaux et des possibilités de contact avec le monde extérieur. 31
Si l’entrée sur son territoire n’est pas autorisée malgré la compétence avérée de la Suisse, la procédure à l’aéroport suit son cours. L’art. 22 al. 6 LAsi renvoie aux art. 23, 29, 30, 36 et 37 LAsi pour la réglementation et les garanties de procédure, qui correspondent ainsi à celles de la procédure ordinaire.
[66]3.5.3 Durée du séjour
Si une décision d’asile ou de non-entrée en matière ne peut pas être rendue dans les 20 jours à l’aéroport, le requérant d’asile est attribué à un canton (art. 23 al. 2 LAsi).
La durée du séjour de 20 jours devrait, dans la plupart des cas Dublin, s’avérer insuffisante pour mener à bien la procédure de détermination de la compétence.
Au total, le requérant d’asile peut être retenu 60 jours au plus à l’aéroport ou dans un autre lieu de séjour attribué dans la zone de transit. Après une décision de renvoi entrée en force, il est cependant encore possible de le placer en détention en vue du refoulement (sur ce type de détention, voir chap. XVI, pt 3.2.4 ss).
Il faut relever que toutes les décisions rendues dans le cadre de la procédure à l’aéroport peuvent être notifiées directement au requérant d’asile lui-même (même s’il est représenté). Cette règle contenue à l’art. 13 al. 3 LAsi déroge à la règle générale de l’art. 11 al. 3 PA sur la représentation en justice. 32
3.5.4 Requérants d’asile mineurs non accompagnés dans la procédure à l’aéroport
Selon la loi, si le requérant d’asile est un mineur non accompagné (MNA), l’autorité cantonale désigne une personne de confiance pour la durée de la procédure à l’aéroport (art. 17 al. 3 let. a LAsi), pour autant que des actes de procédure déterminants y soient accomplis. Davantage d’informations au sujet des particularités dans la procédure pour MNA se trouvent dans le chap. XVIIII, pt 3.
La désignation d’une personne de confiance 33devrait intervenir dès que possible, c’est-à-dire avant l’accomplissement de tout acte de procédure à l’aéroport. Le MNA doit être accompagné tout au long de la procédure, y compris lorsque celle-ci ne comprend pas d’audition approfondie. Une éventuelle décision de non-entrée en matière et de renvoi (p. ex. rendue sur la base de l’art. 31a al. 1 let. b LAsi en relation avec les art. 44 ss LAsi) doit pouvoir être vérifiée et éventuellement attaquée par le MNA avec l’aide de la personne de confiance. Cela vaut également pour la décision incidente d’assignation d’un lieu de séjour à l’aéroport. Le MNA ne subit pas de préjudice juridique du fait de la règle de l’art. 13 al. 3 LAsi qui prescrit la remise des décisions directement aux requérants d’asile, car cette règle est corrigée, [67] en ce qui le concerne, par le fait qu’un délai de recours ne court qu’après la notification de la décision attaquée au MNA et à la personne de confiance ; selon l’art. 53a OA 1, le délai ne commence à courir qu’à partir de la date de la notification qui intervient le plus tard.
Читать дальше