3. Au printemps, à l'automne, ces deux princes décoraient avec soin le temple de leurs ancêtres; ils disposaient soigneusement les vases et ustensiles anciens les plus précieux [au nombre desquels étaient le grand sabre à fourreau de pourpre, et la sphère céleste de Chun ][15]; ils exposaient aux regards les robes et les différents vêtements des ancêtres, et ils leur offraient les mets de la saison.
4. Ces rites étant ceux de la salle des ancêtres, c'est pour cette raison que les assistants étaient soigneusement placés à gauche ou adroite, selon que l'exigeait leur dignité ou leur rang; les dignités et les rangs étaient observés: c'est pour cette raison que les hauts dignitaires étaient distingués du commun des assistants; les fonctions cérémoniales étaient attribuées à ceux qui méritaient de les remplir: c'est pour cette raison que l'on savait distinguer les sages des autres hommes; la foule s'étant retirée de la cérémonie, et la famille s'étant réunie dans le festin accoutumé, les jeunes gens servaient les plus âgés: c'est pour cette raison que la solennité atteignait les personnes les moins élevées en dignité. Pendant les festins, la couleur des cheveux était observée: c'est pour cette raison que les assistants étaient placés selon leur âge.
5. Ces princes, Wou-wang et Tcheou-koung , succédaient à la dignité de leurs ancêtres; ils pratiquaient leurs rites; ils exécutaient leur musique; ils respectaient ce qu'ils avaient respecté; ils chérissaient ce qu'ils avaient aimé; ils les servaient morts comme ils les auraient servis vivants; ils les honoraient ensevelis dans la tombe comme s'ils avaient encore été près d'eux: n'est-ce pas là le comble de la piété filiale?
6. Les rites du sacrifice au ciel et du sacrifice à la terre étaient ceux qu'ils employaient pour rendre leurs hommages au suprême Seigneur[16]; les rites du temple des ancêtres étaient ceux qu'ils employaient pour offrir des sacrifices à leurs prédécesseurs. Celui qui sera parfaitement instruit des rites du sacrifice au ciel et du sacrifice à la terre, et qui comprendra parfaitement le sens du grand sacrifice quinquennal nommé Ti , et du grand sacrifice automnal nommé Tchang , gouvernera aussi facilement le royaume que s'il regardait dans la paume de sa main.
Voilà le dix-neuvième chapitre.
[15] On peut voir la gravure de cette sphère, et la description des cérémonies indiquées ci-dessus, dans la Description de la Chine , par le traducteur, tom. 1, p. 89 et suiv.
[16] «Le ciel et la terre qui est au milieu.» ( Glose .)
1. Ngai-koung interrogea KHOUNG-TSEU sur les principes constitutifs d'un bon gouvernement.
2. Le Philosophe dit: Les lois gouvernementales des rois Wen et Wou sont consignées tout entières sur les tablettes de bambous. Si leurs ministres existaient encore, alors leurs lois administratives seraient en vigueur; leurs ministres ont cessé d'être, et leurs principes pour bien gouverner ne sont plus suivis.
3. Ce sont les vertus, les qualités réunies des ministres d'un prince qui font la bonne administration d'un État; comme la vertu fertile de la terre, réunissant le mou et le dur, produit et fait croître les plantes qui couvrent sa surface. Cette bonne administration dont vous me parlez ressemble aux roseaux qui bordent les fleuves; elle se produit naturellement sur un sol convenable.
4. Ainsi la bonne administration d'un État dépend des ministres qui lui sont préposés. Un prince qui veut imiter la bonne administration des anciens rois doit choisir ses ministres d'après ses propres sentiments, toujours inspirés par le bien public; pour que ses sentiments aient toujours le bien public pour mobile, il doit se conformer à la grande loi du devoir; et cette grande loi du devoir doit être cherchée dans l'humanité, cette belle vertu du cœur, qui est le principe de l'amour pour tous les hommes.
5. Cette humanité, c'est l'homme lui-même; l'amitié pour les parents en est le premier devoir. La justice, c'est l'équité; c'est rendre à chacun ce qui lui convient: honorer les hommes sages en forme le premier devoir. L'art de savoir distinguer ce que l'on doit aux parents de différents degrés, celui de savoir comment honorer les sages selon leurs mérites, ne s'apprennent que par les rites ou principes de conduite inspirés par le ciel[17].
6. C'est pourquoi le prince ne peut pas se dispenser de corriger et perfectionner sa personne. Dans l'intention de corriger et perfectionner sa personne, il ne peut pas se dispenser de rendre à ses parents ce qui leur est dû. Dans l'intention de rendre à ses parents ce qui leur est dû, il ne peut pas se dispenser de connaître les hommes sages pour les honorer et pour qu'ils puissent l'instruire de ses devoirs. Dans l'intention de connaître les homme sages, il ne peut pas se dispenser de connaître le ciel, ou la loi qui dirige dans la pratique des devoirs prescrits.
7. Les devoirs les plus universels pour le genre humain sont au nombre de cinq, et l'homme possède trois facultés naturelles pour les pratiquer. Les cinq devoirs sont: les relations qui doivent exister entre le prince et ses ministres, le père et ses enfants, le mari et la femme, les frères aînés et les frères cadets, et l'union des amis entre eux; lesquelles cinq relations constituent la loi naturelle du devoir la plus universelle pour les hommes. La conscience, qui est la lumière de l'intelligence pour distinguer le bien et le mal; l'humanité, qui est l'équité du cœur; le courage moral, qui est la force d'âme, sont les trois grandes et universelles facultés morales de l'homme; mais ce dont on doit se servir pour pratiquer les cinq grands devoirs se réduit à une seule et unique condition.
8. Soit qu'il suffise de naître pour connaître ces devoirs universels, soit que l'étude ait été nécessaire pour les apprendre, soit que leur connaissance ait exigé de grandes peines, lorsqu'on est parvenu à cette connaissance, le résultat est le même; soit que l'on pratique naturellement et sans efforts ces devoirs universels, soit qu'on les pratique dans le but d'en retirer des profits ou des avantages personnels, soit qu'on les pratique difficilement et avec efforts, lorsqu'on est parvenu à l'accomplissement des œuvres méritoires, le résultat est le même.
9. Le Philosophe a dit: Celui qui aime l'étude, ou l'application de son intelligence à la recherche de la loi du devoir, est bien près de la science morale; celui qui fait tous ses efforts pour pratiquer ses devoirs est bien près de ce dévoûment au bonheur des hommes que l'on appelle humanité; celui qui sait rougir de sa faiblesse dans la pratique de ses devoirs est bien près de la force d'âme nécessaire pour leur accomplissement.
10. Celui qui sait ces trois choses connaît alors les moyens qu'il faut employer pour bien régler sa personne, ou se perfectionner soi-même; connaissant les moyens qu'il faut employer pour régler sa personne, il connaît alors les moyens qu'il faut employer pour faire pratiquer la vertu aux autres hommes; connaissant les moyens qu'il faut employer pour faire pratiquer la vertu aux autres hommes, il connaît alors les moyens qu'il faut employer pour bien gouverner les empires et les royaumes.
11. Tous ceux qui gouvernent les empires et les royaumes ont neuf règles invariables à suivre, à savoir: se régler ou se perfectionner soi-même, révérer les sages, aimer ses parents, honorer les premiers fonctionnaires de l'État ou les ministres, être en parfaite harmonie avec tous les autres fonctionnaires et magistrats, traiter et chérir le peuple comme un fils, attirer près de soi tous les savants et les artistes, accueillir agréablement les hommes qui viennent de loin, les étrangers[18], et traiter avec amitié tous les grands vassaux.
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