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Michel Zévaco: Les Pardaillan – Livre VI – Les Amours Du Chico

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Michel Zévaco Les Pardaillan – Livre VI – Les Amours Du Chico

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La suite de Pardaillan et Fausta. Au cours de son ambassade à la Cour d'Espagne, Pardaillan est amené à protéger une jeune bohémienne, La Giralda, fiancée d'El Torero, Don César, qui n'est autre que le petit-fils secret et persécuté de Philippe II. Or, Fausta a jeté son dévolu sur El Torero pour mener à bien ses intrigues, et elle bénéficie de l'appui du Grand Inquisiteur Don Espinoza dans ses criminelles manoeuvres. Le chevalier est aidé dans cette lutte par le dévouement absolu d'un pauvre déshérité, le malicieux Chico et sa bien-aimée Juana…

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Michel Zévaco Les Pardaillan Livre VI Les Amours Du Chico 7 décembre 1912 - фото 1

Michel Zévaco

Les Pardaillan – Livre VI – Les Amours Du Chico

7 décembre 1912 – 23 mai 1913 – Le Matin

1913 – Fayard, Le Livre populaire

I LES IDÉES DE JUANA

Nous avons dit que Pardaillan, mettant à profit le temps, assez long, pendant lequel les conjurés se retiraient un à un, avait eu un entretien assez animé avec le Chico.

Pardaillan avait demandé au petit homme s’il n’existait pas quelque entrée secrète, inconnue des gens qui se trouvaient en ce moment dans la grotte, par où lui, Pardaillan, pourrait entrer et sortir à son gré.

Le nain s’était d’abord fait tirer l’oreille. Pour lui, pénétrer seul et sans autre arme qu’une dague, dans cet antre, c’était une manière de suicide. Il ne pouvait pas comprendre que le seigneur français, qui venait d’échapper par miracle à une mort affreuse, s’exposât ainsi, comme à plaisir. Son affection grandissante lui faisait un devoir de ne pas se prêter à un jeu qui pouvait être fatal à celui qui l’entreprenait.

Mais Pardaillan avait insisté, et comme il avait une manière à lui, tout à fait irrésistible, de demander certaines choses, le nain avait fini par céder et l’avait conduit dans un couloir où se trouvait, affirmait-il, une entrée que nul autre que lui ne connaissait.

On a vu qu’il ne se trompait pas, et qu’en effet, ni Fausta, ni les conjurés ne connaissaient cette entrée.

Pendant que Pardaillan était dans la salle, le nain, horriblement inquiet, se morfondait dans le couloir, la main posée sur le ressort qui actionnait la porte invisible, ne voyant et n’entendant rien de ce qui se passait de l’autre côté de ce mur, contre lequel il s’appuyait, se doutant cependant qu’il y aurait bataille, et attendant, angoissé, le signal convenu pour ouvrir la porte et assurer la retraite de celui qu’il considérait maintenant comme un grand ami. Car Pardaillan, avec son naturel simple et bon enfant, profondément touché d’ailleurs par le sacrifice quasi héroïque du Chico, lui parlait avec une grande douceur qui était allée droit au cœur du petit paria sevré de toute affection, en dehors de son adoration pour Juana.

Lorsque Pardaillan frappa contre le mur les trois coups convenus, le nain s’empressa d’ouvrir et accueillit le chevalier triomphant avec des manifestations d’une joie aussi bruyante que sincère qui l’émurent doucement.

– J’ai bien cru que vous ne sortiriez pas vivant de là-dedans, dit-il, quand il se fut un peu calmé.

– Bah! répondit Pardaillan en souriant, j’ai la peau trop dure, on ne m’atteint pas aisément.

– J’espère que nous allons nous en aller maintenant? fit le Chico qui tremblait à la pensée que, pris de quelque nouvelle lubie, le Français ne s’avisât de s’exposer encore, bien inutilement, à son sens.

À sa grande satisfaction, Pardaillan dit:

– Ma foi, oui! Ce séjour est peut-être agréable pour des bêtes de nuit, mais il n’a rien d’attrayant et il est trop peu hospitalier pour d’honnêtes gens comme Chico. Allons-nous-en donc!

Le soleil se levait radieux, lorsque Pardaillan, accompagné de son petit ami, le nain Chico, fit son entrée dans l’auberge de La Tour.

Tout le personnel s’activait, frottant, lavant, balayant, nettoyant, mettant tout en ordre, car ce jour était un dimanche et la clientèle serait nombreuse.

Dans la vaste cheminée de la cuisine, un feu clair pétillait, et la gouvernante Barbara, pour ne pas en perdre l’habitude, maugréait et bougonnait contre les jeunes maîtresses qui ne veulent en faire qu’à leur tête, et qui, après avoir passé la plus grande partie de la nuit debout, sont levées les premières et parées de leurs plus beaux atours, gênent les serviteurs honnêtes et consciencieux acharnés à leur besogne.

C’est qu’en effet la petite Juana était descendue la première, n’ayant pu trouver le repos espéré.

Elle était bien pâle, la petite Juana, et ses yeux cernés, brillants de fièvre, trahissaient une grande fatigue… ou peut-être des larmes versées abondamment. Mais si inquiète, si fatiguée et si désorientée qu’elle fût, la coquetterie n’avait pas cédé le pas chez elle. Et c’est, parée de ses plus riches et de ses plus beaux vêtements, soigneusement coiffée, finement chaussée – coiffure et chaussures, ses deux plus grandes coquetteries, en vraie Andalouse qu’elle était – qu’elle allait et venait, par habitude, mais l’esprit absent, ne surveillant nullement les serviteurs, ayant toujours l’œil et l’oreille tendus vers la porte d’entrée comme si elle eût attendue quelqu’un.

C’est ainsi qu’elle vit parfaitement, et du premier coup d’œil, entrer Pardaillan, flanqué de Chico, l’air triomphant. Et du même coup le sourire s’épanouit sur la pourpre fleur de grenadier qu’étaient ses lèvres, ses joues si pâles rosirent, et ses yeux inquiets, comme embués de larmes, retrouvèrent tout leur éclat, comme par enchantement.

Elle les vit parfaitement, mais il se trouva, comme par hasard, que juste à ce moment elle remarqua une négligence d’une servante à qui elle se mit à faire des reproches très vifs, des reproches exagérés par rapport à la faute commise, ce qui parut surprendre et chagriner la servante, peu habituée sans doute à une telle sévérité.

Quand elle jugea que le seigneur français avait suffisamment attendu, Juana daigna remarquer sa présence, et avec un joli petit cri de surprise, admirablement jouée, et avec un air d’indifférence hypocrite:

– Ah! monsieur le chevalier, vous voici de retour? Savez-vous que vos amis, don Cervantès et don César, sont très inquiets à votre sujet? dit-elle.

– Bon! fit Pardaillan en souriant, je vais les rassurer… dans un instant.

Mais, chose bizarre, Juana, qui avait, quelques heures plus tôt, si vivement pressé le Chico de sauver le chevalier, s’il était possible, Juana, qui avait prodigué des promesses sincères de reconnaissance et d’attachement, Juana ne dit pas un mot au nain, dont l’air triomphant se changea en consternation. Elle ne parut même pas le voir; ou plutôt, si. Elle lui jeta un coup d’œil. Mais un coup d’œil foudroyant, comme si elle eût eu à lui reprocher quelque trahison indigne.

Le pauvre Chico, qui s’attendait à des remerciements bien mérités, somme toute, demeura pétrifié, et son petit visage se crispa douloureusement: «Qu’a-t-elle donc? Que lui ai-je fait?»

Juana, sans plus s’occuper du nain, demandait:

– Seigneur, désirez-vous monter vous reposer de suite? Désirez-vous prendre quelque chose avant?

– Juana, ma jolie, je désire me restaurer d’abord. Faites-moi donc servir la moindre des choses, quelque tranche de pâté, par exemple, avec deux bouteilles de vin de France.

– Je vais vous servir moi-même, seigneur, dit Juana.

– Honneur auquel je suis très sensible, ma belle enfant! Pendant que vous y êtes, voyez donc, s’ils ne dorment pas, à rassurer sur mon compte MM. Cervantès et El Torero…

– Tout de suite, seigneur!

Vive et légère et heureuse, Juana s’élança dans l’escalier pour informer les amis du seigneur français de son retour inespéré, après avoir fait signe à une servante de dresser le couvert.

Lorsque Juana eut disparu, Pardaillan se tourna vers le Chico et, voyant dans ses yeux toujours la même interrogation, il se mit à rire franchement, de son bon rire clair et sonore. Et comme le nain le regardait d’un air de douloureux reproche, il lui dit:

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