Il le développa tant que la faculté de médecine l’incita à lui donner toute l’ampleur possible. Ainsi, en 1597, quelques graines venues probablement du Canada furent semées dans le jardin de Jean Robin et s’y épanouirent.
Jean Robin devint directeur du Jardin des Plantes, qui connut un grand engouement ; arboriste du roi, l’apothicaire montrait toutes les plantes rares venues de Virginie ou autres pays.
En 1601, il publiait le catalogue de ses collections dans lequel figurait le fameux arbre venu du Canada, souvent appelé acacia. L’arbre « à Jean Robin » grandit et continua de plaire.
Jean Robin mourut en 1629, son neveu Vespasien lui succéda et prit en main les destinées de ce qui était dorénavant le Jardin Royal des Plantes. À son tour, Vespasien disparut, en 1662.
Charles de Linné, à qui l’on doit quelques autres baptêmes semblables, décida en 1735, dans son catalogue, d’honorer la mémoire des deux Robin, qui avaient bien mérité de la botanique : ainsi naquit le robinier.
Un robinier qui est vivace puisque, à près de 400 ans, il est encore présent au Jardin des Plantes, protégé par des grilles.
Voilà comment deux petites graines apportées en 1597 du Canada ont connu une belle histoire.
VERNONIE
Le botaniste anglais Petiver était fort réputé vers les années 1840. N’a-t-on pas donné son nom à une plante dicotylédone, de la famille des phytolacées, appelée pétivérie ?
Or, ce botaniste reçut un jour une plante du Maryland ; il s’agissait de l’étudier. C’était également une représentante du genre des dicotylédones, mais de la famille des composées.
Certaines autres espèces étaient cultivées comme plantes ornementales ; indéniablement, celle-ci allait plaire également. Petiver ne fut pas long à se décider : l’expéditeur se nommant W. Vernon, la plante prendrait dorénavant le nom de vernonie.
ZINNIA
Une nouvelle fois, nous rencontrons sur notre chemin le fameux botaniste suédois Charles de Linné, professeur à l’université d’Uppsala et auteur d’un système de classification des plantes.
En 1763, il eut à identifier une plante dicotylédone, herbacée, annuelle, d’origine exotique puisque venant du Mexique.
Voulant rendre hommage au botaniste allemand nommé Zinn, Linné créa ainsi le zinnia, dont la variété des couleurs et la durée des fleurs sont toujours fort appréciées pour agrémenter les intérieurs des habitations.
BAUXITE
Ce minerai d’aluminium est d’une grande importance technique puisque, suivant la proportion d’oxyde de fer qu’il contient, on distingue deux variétés : la blanche, qui sert à préparer le sulfate d’aluminium et entre dans la fabrication des produits réfractaires et des ciments ; la rouge, pour l’alumine gélatineuse et la grise, pour les abrasifs et les sables de fonderie.
Il fut découvert et analysé pour la première fois par l’ingénieur des mines Berthier, en 1821. Comme le gisement se situait près d’Arles, dans les Bouches-du-Rhône, exactement dans le pittoresque village des Alpilles nommé Baux-de-Provence, on donna à la découverte le nom de bauxite, dès 1837.
En fait, c’est le gisement situé près de Brignoles, dans le Var, qui a fait l’objet d’une exploitation, celui des Baux-de-Provence ne l’ayant guère été.
CALCÉDOINE
La ville de Chalcédoine est une ancienne cité de la rive asiatique du Bosphore, siège de plusieurs conciles, notamment celui de 1451.
La ville fut entièrement détruite par les Turcs, au XV esiècle : c’est de ses ruines que furent extraites les pierres qui servirent à construire les mosquées de Constantinople.
Jadis, la région possédait une variété de quartz à éléments rayonnants, translucide, chatoyant, de couleur blanche ou grise.
C’est tout naturellement que cette pierre fut appelée calcédoine, dès 1120 ; il fallut toutefois attendre le XVIII esiècle pour que le mot entre au Dictionnaire de l’Académie (1798).
DOLOMIE
Sylvain Tancrède Gratet de Dolomieu naquit en 1750 à Dolomieu (Isère). Membre de l’ordre de Malte, il voulut devenir novice ; une altercation et un duel le firent condamner à mort.
Gracié, il se consacra à l’étude et aux sciences. De nombreuses missions lui permirent d’établir des des travaux appréciés et d’entrer à l’Institut ; il fit partie du groupe des savants de l’expédition d’Égypte mais fut capturé au retour, ce qui lui valut de connaître les prisons italiennes, à Messine.
Il occupa son temps à faite de multiples observations et à rédiger ce qu’il avait constaté sur les minéraux (leur forme et leur nature), notamment sur les roches volcaniques des îles Ponce et Lipari et écrivit Une introduction à la philosophie minéralogique . La victoire de Marengo lui assura, comme à ses compagnons emprisonnés, la liberté, mais la dureté de sa captivité l’avait à jamais marqué et il mourut peu après, à Châteauneuf, en 1801.
Le naturaliste suisse Bénédict de Saussure avait, dès 1792, proposé de baptiser dolomie une variété de calcaire surtout répandue en Angleterre et au Tyrol. Dans les Alpes, d’ailleurs, les alpinistes connaissent fort bien les Dolomites, autre hommage au fameux géologue.
En 1878, le mot dolomie entrait dans le Dictionnaire de l’Académie.
JAIS
Si l’on en croit l’historien Pline, il se trouvait en Lycie une ville et un fleuve du nom de Gagos. Une variété de lignite, d’un beau noir luisant, fit la renommée de cette ville, la « pierre de Gagos ».
Les aléas de la prononciation en firent le jais.
MAGNÉSIE
Magnesia ad Sipylum, ville grecque d’Asie Mineure, située en Lydie, sur les bords de l’Hermos, vit la victoire de Scipion l’Asiatique sur Antiochos III de Syrie (190–189 avant J.-C.).
Cette cité connut une grande prospérité à l’époque hellénistique ; parmi ses richesses, un gisement de minerai de fer magnétique situé aux abords de la ville : la pierre de Magnésie.
TOPAZE
La mer Rouge — appelée aussi golfe Arabique ou mer Érythrée — est en fait un long fossé d’effondrement entre l’Afrique et l’Arabie.
Le canal de Suez la relie à la Méditerranée et au détroit d’Aden sur le golfe du même nom. Ses eaux sont très chaudes et comme colorées de rouge, lors des fortes chaleurs, en raison du développement d’organismes microscopiques.
Dans cette mer, des îles et, parmi elles, une nommé Topazos, connue depuis le II esiècle. C’est ce nom qui a été donné à la pierre précieuse jaune et transparente.
Il existe de nombreuses appellations : topaze d’Inde, de Sibérie, de Saxe, d’Espagne, d’Orient. De nos jours, la plupart proviennent en fait du Brésil.
TRIPOLI
Il existe deux cités du nom de Tripoli : une ville de la République libanaise et la capitale de la Tripolitaine et de la Libye. C’est cette dernière qui nous intéresse, appelée également Tripoli de Barbarie.
Dans la région, jadis, était extraite une substance siliceuse, d’apparence argileuse et âpre au toucher, dont la dureté fut bientôt appréciée pour polir les pierres dures, le verre et les métaux.
Comme la plus grande partie du commerce concernant cette substance s’effectuait autrefois dans la ville de Tripoli de Barbarie, le nom qui se fixa fut tout simplement… tripoli, vers l’an 1508. On connaît par ailleurs le tripoli de Venise (il vient de Corfou), le tripoli de Toscane, celui de Bohême, ceux d’Auvergne et de Bretagne.
TURQUOISE
La Turquie, point de liaison entre l’Europe (par la Bulgarie) et l’Asie (par l’Irak, le Liban et la Syrie), a bien entendu laissé son nom à divers termes de notre vocabulaire.
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