Et, une fois par jour, le joueur de flûte municipal, plutôt jeune, joue de ses instruments, et les rats dansent sur sa musique, le plus souvent sur des pas de conga. L’attraction connaît un grand succès. (Certains jours, un petit rat danseur de claquettes organise des revues à grand spectacle avec des centaines de rats en paillettes, des ballets aquatiques dans les fontaines et des décors raffinés.)
On y donne aussi des conférences qui expliquent la taxe ratière, le fonctionnement de tout le système, le village des rats qui s’étend sous celui des humains, le libre accès à la bibliothèque municipale des rongeurs qui envoient parfois leurs petits à l’école. Et tout le monde de s’extasier : c’est parfait, c’est bien organisé, positivement fabuleux !
Puis la plupart des visiteurs s’en retournent dans leurs propres villages, posent leurs pièges et répandent leurs poisons, parce qu’on ne peut pas changer certaines mentalités, même à coups de hache. Mais quelques-uns voient le monde sous un jour nouveau.
Ce n’est pas parfait, mais ça marche. Le truc, avec les histoires, c’est de choisir celles qui durent.
Et très loin en aval, un chat au physique avantageux, dont le pelage avait presque partout repoussé, sauta d’une péniche, suivit nonchalamment le quai et entra dans un gros bourg prospère. Il passa quelques jours à tabasser les chats du coin, à sentir l’ambiance locale et surtout à rester assis pour observer.
Il finit par apercevoir ce qu’il voulait. Il suivit un jeune gars hors de la bourgade. Le gamin portait sur l’épaule un bâton au bout duquel pendait un mouchoir noué, de ceux dont on se sert dans les histoires pour transporter tous ses biens terrestres. Le chat sourit tout seul. Quand on connaît les rêves des gens, on en fait ce qu’on veut.
Le chat suivit le gamin jusqu’à la première borne kilométrique le long de la route, là où le voyageur s’arrêta pour se reposer. Et entendre :
« Hé ! le gamin à l’air bête. Tu veux devenir maire ? Nan, plus bas, petit…»
Parce que certaines histoires ont une fin mais que les anciennes se poursuivent et qu’il faut danser sur la musique si on veut rester en tête.
FIN
Je crois avoir lu au cours de ces derniers mois plus de documentation sur les rats que je n’aurais dû. La plupart des faits réels – du moins ceux qu’on dit réels – sont tellement incroyables que je ne m’en suis pas servi de peur que les lecteurs m’accusent de les avoir inventés.
Les rats sont connus pour s’échapper d’une fosse en recourant à la même méthode que Noir-mat avec le malheureux Jacko. Si vous ne le croyez pas, le vieil Alf, Jimma et oncle Bob en ont été témoins. Je le tiens de source sûre.
Les rois des rats existent bel et bien. Leur naissance reste un mystère ; dans ce livre, Malicia mentionne deux des théories habituelles. Je dois au docteur Jack Cohen celle, plus moderne et déprimante, qui veut qu’au cours des siècles des gens aussi cruels qu’imaginatifs ont eu beaucoup trop de temps à perdre.
On racle le beurre sur la tartine pour l’étaler. Puis on le racle pour l’enlever. Ensuite on mange la tartine.
C’est difficile de traduire « chef » en rat. L’équivalent n’est pas un mot mais une espèce d’accroupissement bref indiquant qu’à cet instant le rat qui s’accroupit est prêt à accepter l’autre rat pour patron, mais qu’il ou elle ne doit pas en rajouter pour autant.
Mesure des rats. Environ deux centimètres et demi.
Les rats en avaient trouvé une dans la ville de Quirm, là où ils avaient récupéré les « Clic-clic ». Ils trônaient sur une étagère libellée Jouets pour Minou en compagnie de rats couineurs en caoutchouc, dénommés avec beaucoup d’imagination « Couinou ». Les rats avaient essayé de déclencher les pièges en les asticotant avec un rongeur en caoutchouc au bout d’un bâton, mais le couinement quand le piège se refermait incommodait tout le monde. En revanche, on se fichait de ce qui arrivait à Clic-clic.
Pour les jeunes lecteurs qui découvriraient le Disque-monde, la Mort est de sexe masculin. (Note du traducteur.)