Arthur Clarke - Les enfants d'Icare

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Les enfants d'Icare: краткое содержание, описание и аннотация

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« Il se trouvait à un moment où l’Histoire retient son souffle, où le présent se détache de ce qui a été… Toutes les réussites du passé se trouvaient réduites à néant, mais une seule pensée revenait inlassablement dans l’esprit de Reinhold comme un écho tenace : désormais l’homme n’était plus seul dans l’univers. »
L’astronef étranger s’était posé sur Terre et nul ne l’avait vu arriver. Maintenant qu’il était là, plus rien ne serait comme avant. Sans se montrer, ses occupants ne tardent pas à imposer leur volonté à l’homme. Ils exigent et obtiennent le désarmement général.
L’action des Suzerains est incontestablement bénéfique et cependant un doute terrible subsiste… Pourquoi aucun humain n’a-t-il pu les apercevoir ? L’existence de l’humanité n’est-elle pas menacée ?

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— Nous avons peut-être eu des visites dont vous ignorez tout, insista Stormgren qui n’abandonnerait pas aussi facilement la partie. Bien que, s’il y a des milliers d’années que vous nous observez, ce ne soit pas très vraisemblable.

— Je ne vous le fais pas dire, laissa tomber le Superviseur, toujours aussi peu coopératif.

Ce fut alors que le secrétaire général prit irrévocablement sa décision :

— Je vais faire rédiger le texte de votre déclaration et je le soumettrai à votre approbation, Karellen. Mais je me réserve le droit de continuer de vous harceler et, si l’occasion s’en présente, je ferai l’impossible pour découvrir votre secret.

— Je n’en doute pas un seul instant, gloussa Karellen.

— Et vous n’y voyez pas d’objections ?

— Pas la moindre, à ceci près que j’exclus les armes nucléaires, les gaz toxiques ou tout ce qui risquerait de nuire à nos bons rapports.

Karellen avait-il subodoré quelque chose ? Derrière sa gouaille, Stormgren discernait une nuance de sympathie, peut-être même – allez savoir ! – d’encouragement.

— Je suis content de le savoir, dit-il de son ton le plus égal.

Il se leva, saisit son porte-documents. Son pouce se posa sur le fermoir.

— Je vais faire rédiger immédiatement la déclaration, répéta-t-il. Je vous communiquerai le texte par télétype dans le courant de la journée.

Tout en parlant, il appuya sur le bouton. Et comprit instantanément que toutes ses craintes avaient été vaines. Les sens de Karellen n’étaient pas plus subtils que ceux de l’Homme. Le Superviseur ne s’était certainement aperçu de rien car ce fut d’une voix inchangée qu’il dit adieu à son visiteur et prononça la familière phrase-clé qui ouvrait la porte de la petite salle.

Et pourtant, Stormgren avait l’impression d’être dans la peau d’un voleur à la tire qui sort d’un grand magasin sous l’œil du détective de la maison, et quand la porte se fut refermée, il poussa un soupir de soulagement.

— J’admets que mes théories ne se sont pas toujours révélées géniales, dit Van Ryberg. Mais vous allez me dire ce que vous pensez de celle-là.

— Vous y tenez vraiment ? soupira Stormgren.

Pieter fit mine de ne pas avoir entendu et enchaîna en jouant les modestes :

— L’idée n’est pas réellement de moi. C’est un récit de Chesterton qui me l’a inspirée. Supposez que les Suzerains cherchent à cacher le fait qu’ils n’ont rien à cacher ?

— Je crains que ce ne soit un petit peu trop abstrus pour moi, rétorqua Stormgren dont l’intérêt commençait vaguement à s’éveiller.

— Voici où je veux en venir, poursuivit van Ryberg avec excitation. À mon avis, ils sont physiquement tout aussi humains que nous. Ils ont compris que nous tolérerions d’être commandés par des créatures que nous imaginerions être… enfin, étrangères et super-intelligentes. Mais la race humaine étant ce qu’elle est, elle n’acceptera jamais d’être régentée par des êtres appartenant à la même espèce.

— C’est très ingénieux… comme toutes vos théories. Vous devriez leur donner un numéro d’ordre, ça me permettrait de m’y retrouver. Les objections que je formulerais contre celle-ci…

Mais Stormgren n’alla pas plus loin car, au même moment, on introduisait Alexander Wainwright dans son cabinet.

Le secrétaire général aurait bien voulu savoir ce que pensait son visiteur. Il se demandait aussi si Wainwright avait pris contact avec ses ravisseurs. Il en doutait car il croyait en la sincérité de l’attitude anti-violente de ce dernier. La fraction extrémiste de son mouvement s’était bel et bien discréditée et il coulerait pas mal d’eau sous les ponts avant qu’elle se manifeste à nouveau.

Le leader de la Ligue de la Liberté écouta attentivement tandis qu’il lui lisait le projet de déclaration et Stormgren espérait qu’il appréciait à sa valeur ce geste suggéré par le Superviseur lui-même. Ce ne serait que douze heures plus tard que les habitants de la Terre seraient mis au courant de la promesse faite à leurs petits-enfants.

— Cinquante ans, cela fait longtemps à attendre, dit pensivement Wainwright.

— Pour l’humanité, peut-être. Mais pas pour Karellen.

C’était seulement maintenant que Stormgren commençait à réaliser à quel point la solution des Suzerains était adroite. Elle leur donnait le répit dont ils estimaient avoir besoin et coupait en même temps l’herbe sous les pieds de la Ligue de la Liberté. Il ne se leurrait pas : la Ligue ne capitulerait pas mais sa position serait gravement affaiblie. Wainwright devait sûrement s’en rendre compte, lui aussi.

— Dans cinquante ans, le mal serait fait, laissa tomber ce dernier sur un ton amer. Ceux qui se rappellent le temps où nous étions indépendants seront morts. L’humanité aura oublié son héritage.

Des mots, songea Stormgren. Des mots vides. Des mots pour lesquels des hommes avaient lutté, pour lesquels ils avaient péri. Au nom desquels personne ne mourrait plus, personne ne prendrait plus jamais les armes. Et le monde s’en porterait mieux.

Wainwright prit congé. En le regardant s’éloigner, son hôte se demandait quelles difficultés la Ligue susciterait dans les années à venir. Mais cela, ce serait le problème de son successeur. Cette pensée le rassérénait.

Il est des plaies que seul le temps peut guérir. Les corrompus, il est possible de les détruire, mais avec les justes que l’on a trompés, il n’y a rien à faire.

— Voilà votre mallette, dit Duval. Elle est comme neuve.

— Merci, répondit Stormgren qui n’en examina pas moins attentivement le porte-documents. Vous allez peut-être me dire maintenant de quoi il retourne et ce que nous allons faire dorénavant.

Mais le physicien paraissait s’intéresser davantage à ses propres pensées.

— Ce que je ne comprends pas, c’est la facilité avec laquelle nous avons pu agir. Moi, si j’avais été Karellen…

— Mais vous n’êtes pas Karellen. Cessez de tourner autour du pot, mon vieux. Qu’avons-nous découvert ?

— Ah ! Ce que les Scandinaves peuvent être exaltés ! soupira Duval. Je vais vous dire ce que nous avons fait. Nous avons construit un radar à faible puissance, émettant non seulement des ondes radio de très haute fréquence mais aussi des ondes de la gamme extrême dans l’infrarouge. En fait, tous les types de rayonnement dont nous étions certains qu’aucune créature ne pouvait les détecter optiquement, si bizarre que puisse être sa vision.

— Comment pouviez-vous en être sûr ? s’enquit Stormgren. L’aspect technique du problème commençait malgré lui à éveiller sa curiosité.

— Évidemment, nous n’avions pas une certitude absolue, reconnut Duval à contrecœur. Mais Karellen vous voit sous un éclairage normal, n’est-ce pas ? Donc, sa vision perçoit approximativement la même bande du spectre que la nôtre. Toujours est-il que cela a marché. Nous avons la preuve qu’il y a une vaste pièce derrière votre écran. Il a trois centimètres d’épaisseur environ et le local qui se trouve derrière mesure au moins dix mètres. Nous n’avons pas d’échos du mur du fond mais nous n’espérions pas en obtenir, compte tenu de la faible puissance que nous étions contraints d’utiliser. Voici, néanmoins, ce que nous avons obtenu.

Duval tendit à Stormgren un cliché représentant une ligne ondulée. À un endroit donné, on distinguait des irrégularités semblables au tracé sismographique d’une secousse de faible amplitude.

— Vous voyez cette ligne tremblée ?

— Oui. Qu’est-ce que c’est ?

— Karellen, tout simplement.

— Seigneur ! Vous en êtes certain ?

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