Pierre Lemaitre - Cadres noirs

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Alain Delambre est un cadre de cinquante-sept ans anéanti par quatre années de chômage sans espoir.
Ancien DRH, il accepte des petits jobs démoralisants. À son sentiment de faillite personnelle s’ajoute bientôt l’humiliation de se faire botter le cul pour cinq cents euros par mois…
Aussi quand un employeur, divine surprise, accepte enfin d’étudier sa candidature, Alain Delambre est prêt à tout, à emprunter de l’argent, à se disqualifier aux yeux de sa femme, de ses filles et même à participer à l’ultime épreuve de recrutement : un jeu de rôle sous la forme d’une prise d’otages.
Alain Delambre s’engage corps et âme dans cette lutte pour regagner sa dignité.
S’il se rendait soudain compte que les dés sont pipés, sa fureur serait sans limite.
Et le jeu de rôle pourrait alors tourner au jeu de massacre.

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Il devrait prononcer leurs prénoms. Il devrait dire : « Avec Mathilde, je vais faire ceci… », « Lucie, je vais lui faire cela… ». Il devrait personnifier sa menace. « Votre femme, Nicole, je vais l’attacher… » Il devrait l’incarner. Il en parle mal. C’est trop anonyme. « Toutes les trois », c’est ridicule, comme si, à mes yeux, elles n’étaient que des choses.

Voilà le genre de mots que je me dis pour résister, parce que je ne dois pas réagir. Il aurait dû laisser les photos sous mes yeux pour que j’imagine la suite. Il devrait détailler tout ce qu’il va leur faire. Avec minutie. C’est comme ça que je résiste, avec ces pensées-là. Je pense à sa technique de persuasion. Peut mieux faire. Je pense à ça pour me taire. J’occulte de force toute image de Nicole, même son prénom, je le fais disparaître de ma mémoire. « Ma femme. » Je pense « ma femme » et je le répète mentalement dix, vingt, trente fois, jusqu’à ce que le mot ne soit plus qu’une suite de syllabes vidées de signification. Il se passe d’interminables secondes, je fais des exercices mentaux. Grâce à quoi je continue de me taire. Je gagne du temps. J’ai envie de pleurer, de vomir, mes filles… Je résiste. « Mes filles mes filles mes filles mes filles… », ces mots se vident à leur tour. Je fixe Fontana bien en face, sans ciller. Peut-être que mes larmes coulent sur mes joues sans que je m’en aperçoive, comme Nicole, ici la première fois. « Nicole Nicole Nicole Nicole Nicole Nicole. » Le mot se vide à son tour. Vider les mots pour fuir les images. Soutenir le regard de Fontana. C’est quoi. Je cherche. Un cratère ? Je fixe ses pupilles et je vide à son tour Fontana de sa substance. Je ne dois pas penser à ce qu’il est. Pour pouvoir me taire le plus longtemps possible. Non, ce n’est pas un cratère. C’est ça ! Ses pupilles, l’iris, ça ressemble aux formes aléatoires qu’on voit sur les logiciels audio, quand on…

Fontana cède le premier.

— Vous en dites quoi, monsieur Delambre ?

— Je préférerais que ce soit moi.

C’est sorti comme ça. Parce que c’est vrai. Je parviens à ne pas revenir totalement à la réalité. Mentalement, je continue de répéter : « Nicole ma femme mes filles Nicole ma femme mes filles Nicole ma femme mes filles Nicole ma femme mes filles Nicole ma femme mes filles. » Ça ne marche pas trop mal.

— Peut-être, répond Fontana, mais ce n’est pas de vous qu’il s’agit, mais d’elles.

Me vider la tête. M’abrutir de mots. Ne penser à rien de concret. Se maintenir au niveau des idées. Conceptualiser. Que dit le management ?

Trouver une issue. Je ne trouve rien.

Quoi d’autre ? Contourner l’obstacle. Je ne trouve rien.

— Elles vont souffrir beaucoup.

Quoi encore ? Proposer une alternative. Je ne trouve rien.

Le visage de Nicole remonte à la surface, son joli sourire. Le chasser ! « Nicole Nicole Nicole Nicole Nicole Nicole Nicole Nicole. » Ça marche.

Il y a un autre truc, dans le management, c’est quoi ? Oui : sauter l’obstacle. Je ne trouve rien.

Reste enfin ça : recadrer. Je trouve un truc. Ça vaut quoi ? Pas le temps de réfléchir, je me lance :

— C’est tout ?

Fontana fronce très légèrement les sourcils. Pas mal. Gagner du temps. Recadrer. C’est peut-être ça.

Fontana penche la tête, dubitatif.

— Oui, je dis, c’est tout ? Vous avez terminé votre sketch ?

Les gros yeux de Fontana. Lèvres serrées, maxillaires contractés. Colère froide.

— Vous vous foutez de ma gueule, Fontana ?

Ça peut marcher. Fontana se raidit. J’en remets une dose :

— Vous me prenez vraiment pour un con.

Fontana sourit. Il a compris le système. Mais je pense qu’il doute quand même. Je rassemble des mots, de l’énergie, j’y mets toutes mes forces. Et je balance tout le seau.

— Même si vous le faisiez… Vous voyez d’ici le « chômeur le plus célèbre de France » exhibant devant la presse les photos de son épouse et de ses filles désossées. Et accuser une grande société pétrolière d’enlèvement, séquestration, sévices, torture…

Je ne sais pas comment j’y suis arrivé.

Recadrer. Déplacer. Vive le management. Vraiment une discipline de tordus. Efficace.

Fontana, faussement admiratif :

— Vous êtes prêt à courir le risque !

Je vois qu’il hésite à exhiber de nouveau ses photos. Il sent que je suis sur la bonne voie. Il y a encore quelques gouttes au fond du seau. Je le secoue au-dessus de sa tête.

— Et votre client, il est prêt à courir le risque ?

Il pèse le pour et le contre. Puis :

— Ne m’obligez pas à faire disparaître le corps de votre femme uniquement pour vous priver d’une photo.

Recadrer à nouveau. Avec lui, c’est la technique qui marche.

— Me faites pas chier avec vos conneries, Fontana. Vous vous croyez où ? Dans Les Tontons flingueurs ?

Vexé.

Recadrer à nouveau, c’est la recette.

— C’est moi votre interlocuteur, votre unique interlocuteur. Et vous le savez. Alors ou vous traitez avec moi ou vous rentrez bredouille chez votre client. Me faites pas chier avec vos menaces. Vous travaillez pour un client qui ne peut pas s’offrir ce genre d’emmerdement. Vous choisissez quoi ? Moi seul ou rien ?

Ça marche comme ça, la réussite. Comme un collier. Ôtez le nœud, tout défile. La faillite aussi fonctionne comme ça, je suis bien placé pour le savoir. Pour remonter le courant, il faut une énergie du diable. Ou être prêt à mourir. Moi, j’ai les deux.

J’ai une idée, elle vaut ce qu’elle vaut, mais c’est la seule. L’intuition. Fontana pense que j’en ai. C’est peut-être vrai.

J’ai repris l’avantage. Passer à l’acte.

— Je suis prêt à rendre l’argent. Tout l’argent.

Je l’ai dit, je ne savais même pas que je le pensais. Mais c’est dit. Et je comprends que je le pense. Je veux la paix. Pas l’argent.

— Je veux sortir d’ici. Libre.

Voilà. C’est ça que je pense. Je veux rentrer à la maison.

Fontana est estomaqué. Je poursuis sur ma lancée :

— Je suis prêt à patienter. Quelques mois, mais pas plus. Si je sors dans un délai raisonnable, je rends tout l’argent. Absolument tout.

Ça le souffle, le Fontana.

— Un délai raisonnable…

Il est sincère quand il me demande :

— Et vous comptez sortir comment ?

Mon idée n’est peut-être pas si mauvaise.

Je me donne quatre secondes pour en faire le tour.

Un, Nicole.

Deux, Lucie.

Trois, Mathilde.

Quatre, moi.

De toute manière, je n’ai que celle-là, d’idée.

Je me lance à nouveau :

— Pour que je sorte, il va falloir que votre client fasse un très gros effort. Ça peut marcher. Dites-lui que c’est ma condition pour lui rendre la totalité de sa caisse noire. Cash.

42

Je suis enfermé dans mes mensonges. J’en ai accumulé tant et tant. Dire maintenant la vérité à Nicole est au-dessus de mes forces. On nous a volé notre confiance en notre propre vie, notre sécurité, notre avenir. C’est tout ça que je voulais reconquérir. Comment lui expliquer ?

Le lendemain de la visite de Fontana, je lui fais passer une longue lettre. Par Lucie, pour aller plus vite. Ça n’est pas très réglementaire mais c’est vital. Lucie accepte.

Je lui demande pardon pour ce qu’elle a subi. Je comprends sa peur. Pardon, je lui écris, je t’aime, tout ce que je fais, c’est pour vous protéger, je vais sans doute finir ma vie ici, mourir ici, mais je veux que vous restiez vivantes, j’ai été obligé de faire des choses mais je te jure qu’il ne t’arrivera plus rien, jamais, je te le jure, garde confiance et si tu as eu du mal à cause de moi, pardon, je t’aime, je t’aime tant, je lui écris des tas de mots comme ça. Je veux surtout la rassurer. Pendant que j’écris la lettre, je revois sans cesse la photo prise par Fontana, les yeux de Nicole noyés de peur, chaque fois je suis saisi d’une folie meurtrière. Si je tiens Fontana, il va regretter que je ne sois pas seulement Boulon ou Bébétâ. Mais d’abord rassurer Nicole, ça n’arrivera plus, je te jure, bientôt nous serons de nouveau ensemble. Je dis « bientôt », je ne donne pas d’échéance. Si pour Nicole, « bientôt », ça peut être dix ou douze ans, je n’ajoute pas un mensonge de plus à ma liste.

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