Robert Harris - L’indice de la peur

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L’indice de la peur: краткое содержание, описание и аннотация

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Alexander Hoffmann, patron d'un fonds d’investissement à Genève et génie de la finance, a trouvé un algorithme qui permet de multiplier les gains à l'infini : l’indice de la peur. Mais le scénario idéal bascule, Alexander est espionné. Ou paranoïaque ?
La folie le guette et pendant ce temps l'indice de la peur s’emballe, le système devient incontrôlable, est sur le point de provoquer un krach boursier sans précédent. La panique s’empare des marchés et l'étau se referme : Alexander ne pourra peut-être plus détruire le monstre qu’il a créé, un monstre numérique et immortel.
Thriller psychologique de haute voltige, trépidant et terrifiant,
prouve une fois encore l'incroyable talent de Robert Harris, son goût de l’intrigue et du complot, sa fascinante maîtrise du suspens.
Robert Harris est l'auteur de
(Pion, 2010, disponible en Pocket),
sous le titre
et pour lequel Polanski et Harris ont reçu le César du meilleur scénario.
Paul Greengrass, réalisateur de La Vengeance dans la peau, adaptera
en 2012.
Traduit de l'anglais par Natalie Zimmermann

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— Attendez ! s’écria Hoffmann.

— Laisse-le, Alex, conseilla Quarry. Ne lui donne pas cette satisfaction.

— Mais il a raison, Hugo. Ça devient très dangereux. Si le VIXAL a d’une façon ou d’une autre échappé à tout contrôle, ça pose un vrai problème de risque général. Il faut qu’on ait Gana avec nous jusqu’à ce qu’on ait compris ce qui se passe.

Ignorant les protestations de Quarry, il se lança à la poursuite de Rajamani, mais l’Indien avait accéléré le pas et il le manqua à la réception. Il l’aperçut près des ascenseurs. Le couloir était désert.

— Gana ! appela-t-il. S’il vous plaît. On peut discuter.

— Je n’ai rien à vous dire, Alex.

Rajamani serrait le carton devant lui, le dos tourné à la cabine d’ascenseur. Il appuya sur le bouton d’appel avec son coude.

— Je n’ai rien contre vous personnellement. Je regrette.

Les portes s’ouvrirent. Il se retourna et s’avança vivement entre les panneaux coulissants, puis disparut instantanément. Les portes se refermèrent.

Hoffmann resta une seconde immobile, doutant de ce qu’il venait de voir. Il s’avança avec hésitation dans le couloir et appuya sur le bouton d’appel. Les portes s’ouvrirent sur le tube de verre vide de la cage d’ascenseur. Il se pencha et scruta une cinquantaine de mètres de colonne translucide qui s’enfonçaient ensuite dans l’obscurité et le silence du parking souterrain.

— Gana ! appela-t-il désespérément.

Il n’obtint pas de réponse. Il tendit l’oreille, mais n’entendit personne crier. Rajamani avait dû tomber si rapidement que personne n’avait rien remarqué.

Il se précipita dans le couloir vers l’escalier de secours et, moitié courant, moitié sautant, dévala les volées de marches de béton jusqu’au sous-sol puis fit irruption dans le garage souterrain et fonça vers l’ascenseur. Il glissa les doigts dans l’interstice et s’efforça d’écarter les portes, mais elles ne cessaient de se refermer sur lui. Il recula et chercha du regard ce qu’il pourrait utiliser. Il envisagea de briser la vitre d’une voiture pour avoir accès au coffre et récupérer un cric. Puis il repéra une porte métallique portant le symbole d’un éclair et l’essaya. Elle ouvrait sur un réduit de rangement — des balais, des pelles, des seaux, un marteau. Il découvrit une sorte de grand pied-de-biche de près d’un mètre de long et le porta en courant à l’ascenseur. Il en introduisit l’extrémité entre les deux portes et le poussa en faisant des mouvements de va-et-vient. Les panneaux s’écartèrent juste assez pour qu’il puisse glisser son pied, puis son genou. Il força pour enfoncer toute sa jambe dans l’espace. Cela déclencha un mécanisme automatique, et les portes s’ouvrirent complètement.

La lumière qui tombait des étages supérieurs éclairait Rajamani, couché, face contre terre, au fond de la cage d’ascenseur. Une flaque de sang grosse comme une assiette semblait jaillir du sommet de son crâne. Les photos gisaient, éparpillées autour de lui. Hoffmann sauta près de lui, et des bouts de verre crissèrent sous ses pieds. Il respira une odeur de thé incongrue. Il s’accroupit pour prendre la main de Rajamani, d’une douceur et d’une chaleur perturbante, et, pour la deuxième fois de la journée, chercha un pouls qu’il ne trouva pas. Dans son dos, juste au-dessus, les portes se refermèrent avec fracas. Hoffmann jeta un regard affolé autour de lui au moment où la cabine d’ascenseur entamait sa descente. Le tube lumineux diminuait rapidement alors que la cabine dévalait les étages — le cinquième, puis le quatrième. Hoffmann saisit le pied-de-biche et essaya de le glisser à nouveau entre les portes, mais il perdit l’équilibre et tomba en arrière à côté du corps de Rajamani, les yeux rivés sur le fond de la cabine qui se précipitait vers lui, maintenant la barre de fer à deux mains dressée au-dessus de sa tête comme une lance pour repousser une bête en train de charger. Il perçut un souffle graisseux sur son visage. La lumière se voila puis disparut, quelque chose de lourd heurta son épaule, et la barre de fer eut un sursaut avant de se fixer aussi fermement qu’un étai. Pendant plusieurs secondes, il sentit le pied-de-biche résister. Il hurlait de toutes ses forces dans le noir absolu, contre le fond de la cabine qui ne devait se trouver qu’à quelques centimètres de son visage, et s’arc-boutait pour empêcher que la barre ne ploie ou ne dérape. Mais alors le mécanisme s’inversa, la note tenue par le moteur se mua en vrombissement, le pied-de-biche lui retomba entre les mains et la cabine se mit à monter, accélérant à mesure qu’elle s’élevait jusqu’en haut de la cathédrale de verre, révélant des étages successifs de lumière blanche qui se déversait dans le puits.

Hoffmann se releva et fourra à nouveau la barre entre les portes, forçant pour la faire entrer dans l’interstice et parvenant à écarter légèrement les deux panneaux. L’ascenseur venait d’arriver tout en haut et s’immobilisa. Il y eut un bruit métallique et Hoffmann l’entendit entamer une nouvelle descente. Il se hissa contre les portes et enfonça les doigts dans l’étroite ouverture. Il s’accrocha, jambes écartées, muscles tendus, puis il rejeta la tête en arrière et rugit sous l’effort. Les portes cédèrent de quelques centimètres avant de s’ouvrir brusquement. Une ombre passa derrière son dos et, dans un grand souffle d’air et un vrombissement de machine, il se jeta en avant sur le sol du garage.

*

Leclerc se trouvait dans son bureau, au commissariat, et était sur le point de rentrer chez lui quand il reçut un appel l’informant qu’on avait trouvé un corps dans un hôtel de la rue de Berne. Il devina tout de suite, à sa description — visage hâve, catogan, manteau de cuir —, qu’il s’agissait de l’homme qui avait agressé Hoffmann. La cause de la mort était apparemment la strangulation, mais il était encore trop tôt pour déterminer s’il s’agissait d’un meurtre ou d’un suicide. La victime était allemande : Johannes Karp, cinquante-huit ans. Leclerc téléphona pour la deuxième fois ce jour-là à sa femme afin de la prévenir qu’il était retenu au travail, puis partit à l’arrière d’une voiture de police dans la circulation des heures de pointe en direction de la rive nord du Rhône.

Il était en service depuis près de vingt heures et se sentait complètement claqué. Mais la perspective d’une mort suspecte, ce qui n’arrivait pas plus de huit fois par an à Genève, le requinquait toujours. Dans une explosion de gyrophare, de sirène hurlante et de rugissement de moteur, la voiture de police remonta avec importance le boulevard Carl-Vogt, franchit le pont et coupa la voie de gauche de la rue de Sous-Terre, forçant les voitures qui arrivaient en face à s’écarter de son chemin. Ballotté sur la banquette arrière, Leclerc appela le chef de la police et lui laissa un message pour l’informer qu’on avait apparemment retrouvé le suspect de l’affaire Hoffmann, mort.

Dans la rue de Berne, il régnait presque une atmosphère de carnaval devant l’hôtel Diodati : quatre voitures de police au gyrophare bleu éblouissant dans la pénombre de ce début de soirée couvert ; une foule assez dense rassemblée de l’autre côté de la rue et comprenant plusieurs prostituées noires et lustrées aux vêtements aussi courts que criards, qui plaisantaient avec les gens du coin ; des lignes vibrantes d’adhésif rayé noir et jaune destinées à interdire l’accès du lieu du crime aux curieux. De temps à autre, un flash éclatait. Leclerc songea en descendant de voiture qu’on aurait dit des fans attendant l’arrivée de la star. Un gendarme souleva l’adhésif, et Leclerc passa dessous. Quand il était jeune, il avait sillonné ces quartiers à pied et connaissait toutes les filles par leur nom. Il se disait que certaines devaient être grands-mères à présent ; mais, en y réfléchissant, certaines étaient déjà grands-mères à l’époque.

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