Frédéric Dard - Fais gaffe à tes os

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Fais gaffe à tes os: краткое содержание, описание и аннотация

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Derrière moi, il y a le passage à niveau où l'homme se fit ratatiner par un rapide… Je laisse ma voiture sur le bord du fossé et je me mets en quête du numéro 12… Pas marle à dénicher… C'est une petite construction sans étage, couverte d'ardoise… M'est avis qu'il s'agissait d'un pavillon de chasse situé au fond d'un parc. La voie ferrée a coupé le parc et on a vendu le morcif de terrain avec la masure. Schwob l'a fait réparer, mais il y a un certain temps, car elle n'est plus très fraîche… Les volets sont clos… Dans la lumière blafarde de la lune, ce pavillon a quelque chose d'inquiétant. J'ai comme l'impression de l'avoir déjà vu sur la couverture de
!

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Nous voici dans les faubourgs. C’est la première fois que je viens chez les toréadors. Je suis tout émoustillé.

On débouche sur une vaste esplanade brillamment éclairée.

— Place d’Espagne, annonce le Gros… Mords les arènes, à gauche…

Il se met à siffler : Toréador en ga-a-a-arde .

— Tu sais où il faut descendre ? je demande.

Il pose une question au chauffeur.

Ce dernier se met à bavouiller à perte de vue et Bérurier prend un visage tendu de constipé en plein effort.

— Tu entraves l’espagnol ? je demande…

— Assez mal… Je crois qu’il a dit qu’il nous déposerait à l’Arycasa…

— C’est un homme…

— Hombre ! clame Bérurier…

Joyeux, le chauffeur meugle « Hombre ! »… Ici, je vais m’en apercevoir, c’est le grand cri de ralliement.

* * *

— C’est le bouquet, déclare Bérurier en jetant un coup d’œil circulaire sur la chambre mise à sa disposition.

— Quoi ?

— Il y a un coffre-fort dans ma carrée… Ils me prennent pour la Bégum, les mecs en queue de morue… Qu’est-ce que tu veux que j’y mette, dans ce coffre ?

— Mets-y tes précieuses, fais-je en le quittant.

— Et puis la radio, à la tête du plumard ! poursuit-il.

Il tourne le bouton et un air de paso doble nous saute sur le poil.

— Ah ! l’Espagne, rêvasse-t-il. Je me souviens, l’an passé… avec ma femme…

— Bon, zone-toi, il est trois plombes du mat, on a le temps d’en écraser, paraît qu’on se lève tard dans ce pays.

— Dix heures, fait-il. Les repas principaux se font à trois heures de l’après-midi et à neuf heures et demie le soir…

— Bon, on s’accommodera des nouveaux horaires…

Je lui flanque une bourrade qui l’envoie dinguer par-dessus sa valise. Il s’étale sur le pageot.

— Bonne nuit, gros sac à vinasse !

— Va te faire…

Il ne précise pas, laissant ainsi leurs chances à toutes les possibilités. Moi j’ai la piaule au fond du couloir : le 728… Comme j’y parviens je vois s’entrebâiller une lourde et j’aperçois la petite blonde de l’avion.

— J’ai cru que c’était le garçon d’étage, susurre-t-elle.

Et d’expliquer :

— Je meurs de soif, alors j’ai commandé un scotch à l’eau…

— C’est une riche idée, dis-je. Je vais en faire autant. On pourrait le boire ensemble ? proposé-je, ce serait plus facile pour trinquer.

Elle baisse pudiquement les carreaux.

— Ça ne serait pas convenable.

Elle a fait du ciné et elle joue les Marie-la-Pudeur ! Sans blague !

— Dites, fais-je, on est de sortie, non ?

D’autor, je pénètre dans sa chambrette. Un tas de robes sont déjà étalées sur le pucier et le nombre de godasses qui s’alignent devant la penderie pourrait chausser un pensionnat de jeunes filles.

— Vous avez une drôle de garde-robe !

— Dans le cinéma, il faut bien…

— Évidemment.

Je ne pense pas que ce soit avec ses cachetons qu’elle s’offre ça.

Je décroche le bignou et je dis au préposé de faire monter carrément une boutanche de rye.

Con siphone ? demande-t-il.

Of course , réponds-je afin de donner de l’internationalisme à la conversation.

Quatre minutes plus tard un garçon cérémonieux dépose un nécessaire à biture sur la table.

Il y a des cubes de glace gros comme des icebergs.

— Je vous laisse préparer les drinks, fait la blonde enfant, pendant ce temps, je range mes robes.

— Faites !

Elle a raison de dégager le pucier. M’est avis qu’avant longtemps on aura besoin d’un champ de manœuvre.

— À votre santé, mademoiselle, heu ?…

— July Chevreuse, se présente-t-elle.

Ce pseudonyme doit cacher un Adrienne Dubois qui n’est pas bouffé aux mites.

— Antoine Antonio, me présenté-je à mon tour.

— Vous êtes Espagnol ?

— Par un ami de ma famille seulement…

Elle rit. On trinque. Au second verre de rye j’aventure une main louvoyante sous un tunnel d’étoffe. Au troisième ma main arrive à destination. Au quatrième elle n’a plus de secret pour moi.

Cette poulette est agréable. Sa peau est souple, frémissante. Je ne sais pas ce qu’elle donne devant une caméra, en tout cas devant un mâle, elle est un peu champion et mérite l’oscar de l’interprétation féminine. Du scientifique ! Ça ne part pas du cœur, non, ça se situe même beaucoup plus bas ; pourtant ça vaut le voyage à Barcelone. Une pareille séance, je ne la porterai pas sur ma note de frais.

Tout en lui faisant la Bougie-téléguidée, je me dis que Barcelona est une ville où il fait bon vivre.

Comme mademoiselle est une gourmande, elle en redemande. Sans sucre, au naturel !

Et comme je ne suis pas radin en amour, ni fainéant, je lui en ressers une porcif pour grande personne. Dans la vie, il faut faire plaisir à tout le monde. Et puisque nous sommes sur ce chapitre délicat des relations culturelles, souvenez-vous toujours d’un bon vieux proverbe de chez nous, les gars :

« La façon de donner vaut mieux que ce que l’on donne ! »

Je demande à la cocotte si elle remet ça une troisième fois, mais elle secoue la tête énergiquement et négativement.

— Je tourne demain ! annonce-t-elle.

— Tu seras en forme, lui assuré-je. En tout cas, je trouve le bout d’essai satisfaisant.

CHAPITRE X

Le jour commence à poindre lorsque je regagne mes pénates. Je me zone comme un bon petit diable et je sombre dans les bras de Morphée, lesquels sont plus reposants que ceux de la starlett.

Lorsque je m’éveille, l’horloge de ma carrée indique onze plombes. M’est avis que si le Vieux pouvait voir ses collaborateurs en action, il se rongerait les ongles jusqu’au coude. On démarre l’enquête en douceur, faut en convenir. Un peu honteux, je bondis dans la salle de bains, rasoir électrique en main et je me tonds le gazon en vitesse. Une bonne douche pour me redonner la blancheur Persil et me remettre le ciboulot en place et je décroche le tube. Une voix de femme me gazouille des trucs aussi interrogateurs qu’espagnols.

— Vous ne parlez pas français ? imploré-je…

Momente , fait la souris.

Elle me passe un jules qui manie notre belle langue.

— J’écoute, dit-il.

— Passez-moi le 704 !

C’est la turne à Bérurier… Ce gros sac doit en écraser à tout va, tandis que sa doudoune, là-bas, en France, se fait palucher l’intimité par le garçon boucher.

— Il est sorti, fait l’employé…

— Il y a longtemps ?…

— Un instant, s’il vous plaît, je me renseigne.

J’entends parlementer en espagnol.

Puis le gars dit :

— Cette nuit, vers trois heures…

Je sursaute.

— Il doit y avoir erreur, fais-je, au contraire nous sommes arrivés mon ami et moi à ce moment-là.

La jactance reprend :

— Non, monsieur, affirme le gnace, votre ami est ressorti presque aussitôt. Il a du reste essayé de vous appeler, mais vous n’étiez pas dans votre chambre…

Je mords ma menteuse. Aïe ! J’ai pas lieu d’être fiérot. Surtout que le zig vient de prendre un drôle de ton pour me dire : « Vous n’étiez pas dans votre chambre. » C’est lourd de réprobation… Il est écœuré, le copain. Dans ce pays où la pudeur est à l’ordre du jour, constater qu’un homme a déserté son page pendant la nuit vous pousse à la consternation (le monde vu en français).

— Il a laissé un mot pour vous, continue-t-il.

— Voulez-vous avoir la bonté de me le faire monter ?

— Tout de suite !

Nous raccrochons de part et d’autre. Je me gratte les poils de la poitrine.

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